C'est pas moi qui ai commencé à utiliser à toutes les sauces cet argument du "on va tous mourir un jour".
Mais comme je trouve que c'est une excellente remarque, très rationnelle, je l'utilise maintenant moi aussi
On est bien peu de choses finalement face à l'histoire de l'univers
Pourquoi pars-tu dans l'argument de la pente glissante aussi vite ?
Vu que tu n'es pas le premier à le faire, il y a certainement des raisons sous-jacentes.
Je cherche à comprendre votre mode de pensée dans la suite. N'hésites pas à me renseigner parce que ça m'intéresse, j'ai passé une heure à y réfléchir pour taper ce message.
Pour rappel, la discussion partait de :
Cela veut également dire que l'on pourrait tendre vers une doctrine qui signifie qu'à partir d'un certain âge, vous êtes périmés. Ah tiens, cela ne vous fait pas penser à une idéologie récente ?
Personne ne parle de date de péremption. On dit simplement qu'on ne peut pas tout.
Encore une fois, que la population meure selon une distribution d'âge centrée sur 83-84 ans, c'est tout à fait normal.
Je me souviens très bien que quand ma grand mère a eu 84-85 ans, je me suis mis à redouter ce qui allait inéluctablement arriver.
C'est peut-être ça la différence, en tant que médecins vous avez l'impression de pouvoir influer sur la santé des gens, car vous le pouvez dans une certaine mesure.
Mais n'arrivez pas à admettre que ce pouvoir est limité, par la force des choses ?
Vous n'arrivez pas non plus à voir que ce pouvoir doit être limité, car il n'est pas souhaitable de prolonger la vie à l'infini, coute que coute ?
Une loi est passée en 2005 contre ça : contre l'acharnement thérapeutique. C'est interdit maintenant.
Avec le covid, on découvre une nouvelle forme d'acharnement thérapeutique. Il faut élargir la définition, et on se retrouve avec un "
acharnement prophylactique". Vu qu'on ne peut pas soigner le covid, pourquoi ne pas éviter toute mort en cherchant à éviter la contamination ?
Et pour vous, si on vous interdit l'acharnement thérapeutique, ou l'acharnement prophylactique, en osant émettre l'idée qu'on pourrait prendre moins de mesures contre l'épidémie, cela vous parait tellement fou et inacceptable que vous comparez ça à "autant nous suicider tout de suite" ?
Je suis opposé à l'acharnement prophylactique, comme je suis opposé à l'acharnement thérapeutique. Surtout quand ceux-ci ont des conséquences délétères sur le reste de la société, ou sur le reste de la vie des patients.
Par exemple, si on avait eu le moyen technique d'éviter toute contamination dans les ehpad, en supprimant toute interaction sociale réelle, par exemple avec des robots aide soignants, ou plus réalistement avec des combinaisons intégrales et interdiction des visites : j'y aurais été opposé. Et je suis certain que la quasi totalité des résidents y auraient été opposés aussi.
Le gouvernement non plus n'est pas dans l'acharnement prophylactique, puisqu'il tolère la saturation des hopitaux (dont je comprends qu'elle vous impacte directement)
S'il est vrai que moi aussi j'ai pu avoir une position un peu trop de l'autre côté, notamment suite aux chiffres trop optimistes donnés par Macron (400 000 minimum, c'est optimiste, il aurait mieux fait de donner une formule un peu plus réaliste), je suis maintenant dans une posture assez proche de celle du gouvernement, avec des écarts, mais surtout sur la méthode, plus que sur l'objectif.
Le gouvernement est obligé de fermer les bars et restaurants pour limiter les interactions sociales. Même le confinement finit par être obligatoire.
Les écarts que je verrais sont plutôt sur des détails comme la règle des 1km, l'interdiction de la vente de collants...
J'aurais autorisé, en plus de l'attestation actuelle : les déplacements longue distance, et les déplacements dont on peut garantir qu'ils ne donneront lieu à aucun contact avec quelqu'un d'extérieur au noyau familial.
Si ces mesures permettent des abus faciles, rien n'empêche d'une part de les sanctionner, et rien ne dit d'autre part qu'ils suffiraient, à eux seuls, à faire remonter le R de 0.7 à 1 et +.
Et même si le R remontait de 0.7 à plus de 1, on aurait essayé, et rien n'empêcherait de resserrer la vis. Ce qui permettrait de garantir que les mesures prises sont strictement proportionnées au besoin de limiter la courbe épidémique. Car aujourd'hui, interdire les balades en voiture vers une forêt ou autre, on peut clairement se demander si c'est vraiment proportionné.
Je redirigerais aussi les contrôles, qui plutôt que d'empêcher d'hypothétiques situations moyennement risquées, devraient se concentrer sur les lieux encore ouverts qui sont parfois des clusters en puissance. Ai-je parlé du cas de la boucherie où je suis allé l'autre jour ? Une grosse, boucherie, 15 bouchers (et peut-être encore d'autres à l'arrière), 2 caissières, aucun masque porté correctement sur le nez et la bouche. Beaucoup de bruit, donc on parle fort, ce qui favorise bien le postillonnage. Il parait que des contrôles ont été menés pour faire respecter les diverses interdictions de vente dans les grandes surfaces.. c'est absurde.