Je me permets très humblement de faire remarquer à tout le monde ici que les enjeux avaient été explicitement posés dès les premières pages du sujet sur l'Ukraine en 2013.
On ne peut pas s'étonner de la situation actuelle quand on sait que l'Ukraine EST une ligne rouge stratégique (donc vitale) pour la Russie. Ce qu'elle a toujours rappelé. Ce que les Américains ont toujours su. Ce que les Européens ont tenté d'oublier.
Petit point lecture de référence.
Tout est pourtant très clairement exposé dans l'ouvrage le plus connu de Brzezinski Le grand échiquier (1997). Que ce soit la question de l'Ukraine ou de l'OTAN, des marges caucasiennes de la Russie ou son extrême Orient japonais et coréen. Et en plus ça se trouve facilement dans le commerce, c'est pas cher et ça se lit très bien.
Tout est pourtant aussi clairement dit dans les ouvrages de Radvanyi, de Marchand ou de Eckert que j'ai pu citer il y a a quelques années sur ce même sujet.
Ce qui se passe actuellement est une négociation musclée sur la redéfinition des frontières et des zones d'influences post- Guerre Froide, entre Américains et Russes (les Européens n'ont aucun poids stratégique, Macron n'est qu'un histrion qui n'a RIEN à négocier, c'en est affligeant tant c'est abyssal de faiblesse). Personne n'a intérêt à la guerre (ou alors tout le monde, et là, par contre, on est tous très très profondément dans la merde... pour le coup, on serait vraiment dans un scénario "great reset"...). Poutine sort les muscles pour avancer ses pions et gagner ce qu'il peut, mais il est le grand perdant stratégique de l'histoire, qui tente de sauver ce qui peut l'être. L'Ukraine n'est qu'un pion sacrifiable pour des Américains, mais pas pour la Russie. En fait, Américains et Russes ont un intérêt vital à s'entendre (tous les deux redoutent la montée de la Chine, et la Russie a un intérêt réel et durable à s'entendre avec l'Europe, en priorité de l'Ouest, l'Allemagne étant toujours son premier partenaire). Mais pas à n'importe quelle condition (c'est ce que nous voyons actuellement).
Je l'ai dis il y a presque dix ans et je le répète : la Russie ne lâchera pas l'Ukraine tout simplement parce qu'elle ne le peut pas et ne le veut pas (si elle le fait, elle n'est plus une puissance européenne, et elle sort du jeu avec la Chine, c'est pour elle une question de survie pour demeurer une puissance). Si elle le fait, c'est qu'on l'aura foutue dehors. Et si c'est le cas, ça ne pourra pas être complètement : elle partira en emportant un bout avec elle, et en laissant une situation qui la fera revenir tôt ou tard sous une forme ou sous une autre. Son intérêt n'est PAS une confrontation ouverte et généralisée dans laquelle elle risque de tout perdre, notamment un effort de développement vers l'Ouest qui est un axe historique majeure pour elle (elle a perdu presque trois siècles de guerres et de conquêtes entre 1989 et 2004...).
L'Ukraine ne peut RIEN sans l'appui américain, et elle est totalement exposée à la puissance russe dans toutes ses dimensions. Les Européens ne pèsent pas lourd dans la situation : ne pensant plus en termes de puissance, de nations, de souveraineté, ils croient que l'économie fera plier la Russie, oubliant que la Russie est par excellence une nation politique qui a toujours mis l'économie en seconde zone, et qui a toujours su admettre les difficultés et les pénuries majeures liées aux lacunes de son développement et à l'immensité de son territoire. On ne peut pas impressionner un pays comme celui- là avec des sanctions économiques... Ca ne suffit pas.
Depuis qu'il est arrivé au pouvoir, Poutine s'est montré être un réaliste qui défend les intérêts russes dans la plus pure tradition westphalienne... Il sait que les Européens ne sont pas unis, et que ceux de l'Ouest comme de l'Est ne mourront pas pour l'Ukraine (alors que les Russes oui). Il sait que les Américains n'ont pas les moyens d'une guerre ouverte en Ukraine. Et il sait que les pays de l'Europe centrale sont totalement dépendants de la protection américaine, et donc que tout le monde saura trouver un accord le moment venu. Point barre, c'est plié. Si on voulait autre chose que des discours, il fallait se donner les moyens de sa politique ou faire la politique de ses moyens (donc... les discours d'histrion).
|