Bref, le problème avec Aion 2 c'est la façon dont les choses sont présentées (mais c'est Coréen hein !)
Ce n’est pas un simple problème de présentation. Le premier MMORPG de NCsoft, Lineage I (1998), proposait déjà les échanges directs entre joueurs ainsi que les Private Shops (stands de rue), tout comme Lineage II. Et tout cela était accessible pendant des années avec un simple abonnement mensuel.
AION 1 proposait lui aussi les échanges directs via un abonnement unique. AION 2, en revanche, fragmente désormais la plupart de ces fonctionnalités en plusieurs abonnements, ce qui relève du Tiering: proposer différents niveaux d’abonnements, chacun donnant accès à des fonctionnalités ou avantages différents, afin de vendre plus au lieu de regrouper ces avantages dans une seule formule mensuelle. Et encore, "mensuelle" n’est plus vraiment le bon mot: avec les abonnements de 28 jours, l’objectif est de pousser vers un 13ème mois, multiplié d’autant de fois que le nombre d’avantages et donc d’abonnements, dont le joueur aura besoin pour retrouver ce qu’il avait autrefois d’emblée.
Le Tiering n’est ni une spécificité coréenne ni limité à la Corée. C’est une nouvelle mode anti-consommateur, et l’une des raisons du retour en force du piratage. Le consommateur comprend parfaitement le message: l’abonnement classique d’autrefois devient aujourd’hui l’offre Basique, plus pauvre mais au même prix. Et pour récupérer ce qu’il avait avant, il doit désormais payer une formule Deluxe significativement plus chère... pour les mêmes options que dans le passé.
Non, AION 2 n’est pas "comme ses prédécesseurs". Il est l’incarnation d’une perfidie devenue trop courante et qui doit cesser. Et la seule façon d’y mettre fin, c’est un arrêt de consommation, même temporaire, pour espérer un avenir vidéoludique plus sain. C’est difficile, évidemment: le consommateur n’a jamais été autant conditionné à consommer, et les joueurs de MMO traversent aujourd’hui un désert où les alternatives sont rares. Demander de se priver demande un effort supplémentaire. Mais c’est pourtant nécessaire si l’on veut vraiment un avenir meilleur.
Le meilleur message à envoyer à une compagnie AAA ne peut passer ni par les mots ni par l’émotion, mais seulement par le porte-monnaie. Ne pas télécharger le jeu, ne pas dépenser le moindre centime: voilà ce qui peut réellement pousser un changement. Et la dimension AAA du jeu est même une force, car la moindre réaction est amplifiée, et l’industrie entière observe. C’est ce qui peut faire peur suffisamment tôt pour éviter que d’autres studios ne reproduisent les mêmes erreurs.
Il serait naïf d’attendre un mouvement de la part des grands influenceurs. Leur position ne leur permet pas de tourner le dos à ces entreprises sans risquer un préjudice financier majeur. Même un influenceur critique finira par jouer au MMO qu’il dénonce, participant ainsi, volontairement ou non, à entretenir le cercle vicieux.
Encore une fois: ce mouvement ne peut venir que des joueurs eux-mêmes. C’est à eux de voter en masse avec leur porte-monnaie. Un effort immense, peut-être utopique, mais le seul moyen d’assainir réellement les systèmes économiques qui gangrènent aujourd’hui l’industrie.