Militairement, les Etats-Unis n'ont pas la capacité de faire la guerre et vaincre sur leur sol autre chose que des micros-états arriérés. Ca a été montré par le passé, et leur dernier conflit en date en est un autre criant exemple.
Les Etats-Unis dominent la mer et le ciel, mais au sol, ils n'ont pas l'envergure et les capacités de dominer et conquérir l'Iran, ou n'importe quel autre pays qui ne soit pas l'équivalent d'un moucheron géopolitique.
C'est très caricatural quand même. Les Etats- Unis, c'est plus de la moitié des dépenses d'armement dans le monde à eux seuls. Ils ont juste les moyens de pulvériser qui ils veulent et quand ils veulent (je parle juste des moyens techniques et matériels de le faire). Le problème n'est pas la capacité militaire, mais la politique qui anime un acte de guerre, et donc, la manière de gérer l'opinion et la guerre médiatique (et là aussi, ils dominent massivement la fabrication de l'opinion publique).
Il ne faut pas oublier que les guerres que les Etats-Unis ont perdu (ou disons du moins qu'ils n'ont pas gagné) sont finalement des guerres qu'ils ont mené avec très peu de pertes, mais aussi avec un engagement tout relatif de leur part.
J'ai peur de ne pas comprendre. Si on prend la guerre du Vietnam, ça n'a rien d'un "petit conflit" : l'engagement y a été massif, durable, et les pertes, en définitive, nombreuses, sur la base de la conscription (comme dans les deux conflits mondiaux).
Les guerres qu'ils ont perdues n'ont pas été perdues militairement, mais politiquement (un peu comme la France en Algérie). Le problème des machines de guerre comme celle des Etats- Unis, ça n'est pas de gagner les batailles, c'est de gagner la paix après les combats. Surtout, le problème est celui de la résistance des peuples attaqués : le Nord Vietnam a pris plus de bombes sur la tronche que l'Allemagne et le Japon réunis lors de la Seconde Guerre Mondiale. Et pourtant, avec des moyens dérisoires, il n'a pas plié. C'est là où la machine américaine se bloque, puisqu'après, c'est la politique, la diplomatie et les médias qui prennent le relai et qui font qu'une victoire militaire devient une défaite politique.
Et surtout, surtout, n'oublions pas que certaines méthodes utilisées par les chinois ou les russes nous sont "interdites" à cause de la sensibilité occidentale à la violence : Abu Ghraib est une honte sur les Etats-Unis, mais ça n'a rien à voir avec ce que les russes ont pu infligé aux tchétchènes, ou d'autres.
La violence maintenant nous répugne à un point, et on ne peut s'imaginer une puissance occidentale qui bombarde de manière intensive et délibérée des civils, simplement pour démoraliser l'ennemi. Les morts civils des conflits américains sont le fait de bourdes ou de l'instabilité liée au conflit.
Cela explique aussi en partie le sentiment d'antipathie répandu chez les occidentaux envers Israël. Ils ne sont pas dans cet état d'esprit, mais plutôt dans celui de la survie. Tuer ou être tué.
Ca j'y crois moyennement : sur le terrain, la guerre est la guerre, et les atrocités sont de tous les camps. Seulement, c'est vrai, les démocraties doivent être plus prudentes. Non qu'elles les réprouvent (l'armée américaine s'est particulièrement illustrée lors de la Seconde Guerre Mondiale contre les populations civiles du Japon et de l'Allemagne) et n'a jamais reculé devant ce qu'elle estimait devoir faire pour gagner (raser des villes, des monuments historiques majeurs, etc.)
Mais, depuis la Première Guerre Mondiale notamment, la notion "d'arrière" et d'opinion publique dans la guerre fait que les démocraties doivent être plus prudentes avec les massacres et les crimes de guerre en tous genre. Non qu'elles les réprouvent moralement, mais surtout, ils apparaissent comme des "failles" dans la solidité de l'arrière, et sont donc une cause majeure de défaite militaire et politique, car une guerre dans une démocratie se doit d'être présentée comme "défensive", et donc, "juste" par nature.
Il est vrai que les régimes que tu cites s'embarrassent moins de ces considérations, car ils maîtrisent plus fortement leurs médias et leurs opinions, et reposent aussi sur un unanimisme national qui leur donne de meilleures chances de survie et de victoire face à des démocraties affaiblies par des décennies d'individualisme et de confort matériel. Gagner une guerre, et les Russes le savent mieux que tous les autres, ça veut dire être capable d'encaisser les pires coups, puis, d'attendre son heure pour les rendre. Or, notre modèle de société nous rend la violence insupportable (alors que nous sommes le peuple de Verdun... ce qui en dit long sur l'évolution de la France au XXème siècle). De ce fait, ce modèle social est un affaiblissement objectif et met en jeu notre capacité de survie en cas de conflit grave (et nous y serons forcément confrontés au XXIème siècle).
Car, pour gagner une guerre, encore faut- il avoir quelque chose à défendre en tant que "Nation". Et justement, au coeur de la guerre, il y a l'être collectif qu'est la Nation. Question : faisons- nous encore "Nation" ? Sommes- nous prêts à nous battre pour la "Nation" et à mourir pour elle ? Je ne crois pas. Les Russes font "Nation", les Chinois et les Américains aussi, parce qu'ils ont une idée de ce que leur peuple et leur pays doit être, et qu'ils inscrivent son existence et son agir politique dans le temps. La France, elle, ne le fait plus : c'est une mutation fondamentale, très récente et très brutale, qui a été voulue en vue de faire disparaître la France en tant que puissance et peuple, mais qui n'est peut- être pas définitive. C'est ce qui fait la différence entre nous et des Russes qui, au nom de la défense de la Nation et de ses intérêts, assument d'écraser toute une population sous les bombes (Grozny), quitte à l'éradiquer (même si ça n'est pas le but recherché initialement). Nous, nous ne comprenons même plus que nous puissions aimer la terre de nos ancêtres, dont nous ne nous souvenons même pas et dont nous nous foutons... Aimer la France, aujourd'hui, c'est être taxé de sympathie lepenniste, c'est louche... voire... criminel. C'est probablement une des raisons qui expliquent que nous sortons de l'Histoire à une vitesse incroyable.