[Sécurité sociale] La santé : financement et choix politiques

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Pour avoir été parmi les meneurs d'une grève d'internes il y a maintenant presque 20 ans (purée cette claque du temps qui passe), nous déposions une moyenne de 3 plaintes par jour en référé contre assignations abusives au début de la grève et ce, juste sur l'AP-HP. Oui, les hôpitaux peuvent assigner des médecins grévistes à travailler mais il y a une démarche à suivre et l'administration des différents hôpitaux s'en torchait les fesses. Déjà, une réquisition doit être donnée en main propre, pas laissée dans le casier de l'interne. Ensuite, l'ordre de réquisition, c'était médecins senior (y compris d'autres services pour les urgences) puis internes non en grève (en respectant leur temps de pause) puis internes en grève. Mais, pour ne pas avoir à refaire toutes les lignes de garde, pour ne pas avoir à négocier avec les médecins senior, c'était juste assignation par bout de papier ou e-mail, de l'interne en grève qui était initialement prévu.
Dès que les premiers jugements en référé sont tombés, la plupart des assignations abusives ont stoppé.

3 plaintes par jour au tribunal en référé, ça voulait dire au moins 15 signalements (car la plupart des internes ne voulait pas aller au tribunal) et probablement 50 autres internes qui, par peur de se faire mal voir dans leur hôpital, acceptaient l'assignation abusive. Par jour.

C'est à ce moment-là que j'ai compris à quel point le management hospitalier était toxique de la part de l'administration hospitalière, que les soignants ne sont que des pions pour eux, et que le professionnalisme était un mot qui leur était complètement inconnu. Donc, oui, c'est quelque part normal que les médecins utilisent les arrêts de travail (qui sont d'ailleurs tous très probablement individuellement justifiés par une vraie souffrance au travail et un burn-out total), pour se faire entendre. Pas la faute des médecins. La faute à cette suradministration hospitalière complètelment cynique et incompétente.

A une époque de ma carrière, j'ai côtoyé les hautes sphères de l'AP-HP et de l'ARS IdF, j'ai été à des réunions où des ingénieurs risque machin chose dormaient autour de la table pendant toute la durée de la réunion (littéralement, ils arrivaient, s'asseyaient, dormaient, repartaient à la fin de la réunion), j'ai vu un DG de l'AP-HP feuilleter un magazine d'art comme un collégien sous la table alors qu'il assistait à une présentation qui lui était directement destinée, j'ai travaillé avec un architecte titulaire de la fonction publique expliquer des plans complètement à l'inverse de la réalité parce qu'il n'avait pas réussi à positionner le Nord correctement. Et plein d'autres exemples d'incompétence ou de fainéantise (ps : j'utilise le neutre mais certains de ces exemples étaient des femmes aussi).

Dernière modification par Visionmaster ; 24/10/2024 à 22h36.
D'où viennent ces "autorités compétentes" du coup ?
Ce sont de hauts fonctionnaires, des relations placées là car trop incompétentes ou juste des planqués ?

Cette couche administrative qui est censée aider le travail des fonctionnaires et qui se retrouve à pourrir littéralement le fonctionnement de l'administration, ça se voit de plus en plus et c'est principalement ça qui fait que ça ne tourne plus, car le dévouement à l'état des fonctionnaires a ses limites.

Mais si l'on indique qu'il faut "dégraisser le mammouth", on aura droit à des cris d’orfraies.
Donc, que fait-on ?

Je le vois aussi, à une échelle moindre (et plus lointaine), dans l'éducation nationale. Que ce soit vis à vis de l'enseignement ou de la gestion par la région des agents des établissements.
Citation :
Publié par Piergeiron
Mais si l'on indique qu'il faut "dégraisser le mammouth", on aura droit à des cris d’orfraies.
Donc, que fait-on ?
Très simple. Quand on parle de dégraisser le mammouth, le mot a d'abord été utilisé pour l'Education nationale, on parle de virer les prof et non les administratifs. Et on voit ce que ça a donné sous Sarkozy, (qui est même allé jusqu'à "dégraisser" les gendarmes et la police de proximité aussi).
Ben c'est pareil pour la santé. Du coup forcément, on ne trouve pas l'idée bonne.
Bref, quand ce genre d'expression est utilisé, c'est en général par une certaine couleur politique, pour des résultats qu'on a vu (rappeler des prof à la retraite car on avait trop dégraissé, etc. je ne vais pas refaire un historique connu ici).
Citation :
Publié par Déposeur2bilan
Faire de faux arrêts maladie devrait être sanctionné, quand bien même leur lutte est justifiée.
Surtout venant de médecins.
Difficile de dire que c'est des arrêts de complaisance, pour en arriver à ce point là, je pense que clairement ils pourraient tous très bien se faire diagnostiquer en burnout sans même chercher à frauder. Mais quand bien même la moitié du pays se mettrait en arrêt maladie, je pense sincèrement que ça ne changerait rien. Pour que les choses changent, il faudrait déjà un immense audit pour virer tout les administratifs et les bullshit jobs qui ne servent à rien(mais qui argumenteront du contraire), revoir toute la politique salariale pour conserver le personnel de l'hôpital public et éviter qu'ils se barrent dans le privé ou à l'étranger et surtout se mettre vraiment face à la réalité des erreurs passées en se disant que l'hôpital public va mal et qu'on se doit de tout faire pour régler le problème. A force de réduire les effectifs et d'être en flux tendu, on use nos soignants les plus dévoués. Le système ne tient que grâce au professionnalisme et à la vocation des soignants de faire tout ce qu'ils peuvent. Mais un jour, ça va péter comme un élastique entre les doigts. Le Covid ne leur a pas servi de leçon. Pour Périgueux, ça changera rien, ils basculeront sur un autre CHU ou trouveront une solution temporaire qui ne réglera rien. La dernière idée de Barnier pour combler le manque étant de rappeler les soignants retraités. Très bonne idée ça(mdr non)

A mon humble niveau, sur Saint-Etienne, métropole de quasi un demi millions d'habitants, cela fait bientôt 6 mois que les urgences adultes du CHU sont fermées au public, il faut désormais passer par le régulateur qui décidera si oui ou non c'est admissible, porte fermée avec un téléphone à l'entrée si tu va sur place. Les urgences dentaires n'existent quasi plus, j'ai appelé un dimanche à midi pour une rage de dent de ma grand-mère de 93 ans : "Désolé c'est que la dimanche de 9H à 11H, voyez demain avec votre dentiste habituel, si vous avez pas, bah je sais pas, et le cas échéant ben montez sur Lyon à l'hôpital Herriot.". Et je ne parle même pas du fait qu'il est impossible de trouver un praticien qui prends les nouveaux clients.

Je suis convaincu que rien ne changera, et encore moins par les temps d'instabilité politique qui courent.
Citation :
Publié par Déposeur2bilan
Faire de faux arrêts maladie devrait être sanctionné, quand bien même leur lutte est justifiée.
Surtout venant de médecins.
Vu qu'ils sont tous en burn-out c'est plutôt de fausses attestations d'être en capacité de travailler qu'ils ont.
Citation :
Publié par Adriana
Difficile de dire que c'est des arrêts de complaisance, pour en arriver à ce point là, je pense que clairement ils pourraient tous très bien se faire diagnostiquer en burnout sans même chercher à frauder. Mais quand bien même la moitié du pays se mettrait en arrêt maladie, je pense sincèrement que ça ne changerait rien. Pour que les choses changent, il faudrait déjà un immense audit pour virer tout les administratifs et les bullshit jobs qui ne servent à rien(mais qui argumenteront du contraire), revoir toute la politique salariale pour conserver le personnel de l'hôpital public et éviter qu'ils se barrent dans le privé ou à l'étranger et surtout se mettre vraiment face à la réalité des erreurs passées en se disant que l'hôpital public va mal et qu'on se doit de tout faire pour régler le problème. A force de réduire les effectifs et d'être en flux tendu, on use nos soignants les plus dévoués. Le système ne tient que grâce au professionnalisme et à la vocation des soignants de faire tout ce qu'ils peuvent. Mais un jour, ça va péter comme un élastique entre les doigts. Le Covid ne leur a pas servi de leçon. Pour Périgueux, ça changera rien, ils basculeront sur un autre CHU ou trouveront une solution temporaire qui ne réglera rien. La dernière idée de Barnier pour combler le manque étant de rappeler les soignants retraités. Très bonne idée ça(mdr non)
Bizarrement quand on regarde les chiffres les effectifs du public sont en hausse constante depuis 20 ans, à part la période 2014 à 2018 environ, tandis que ceux du privé régressent. Et les soignants au sens pur représentent une part croissante des dits effectifs.

J'aimerais bien savoir ou vous voyez une réduction des effectifs. Ou peut être qu'on est encore dans les propagandes politiques ? On entend toujours parler de "réductions d'effectifs du service public" mais quand on regarde les chiffres ce n'est jamais le cas.

Le personnel médical au sens large (médecins et assimilés31, internes et sages-femmes) connaît la progression la plus forte entre fin 2003 et fin 2020. Sa part dans les effectifs salariés hospitaliers passe de 10,2 % à 12,2 % pendant cette période. En écho à l’extension des numerus clausus32, le nombre de médecins et assimilés augmente de 25 %, celui des internes et faisant fonction d’internes (FFI) de 93 % et celui des sages-femmes de 34 %. Cependant, la tendance s’inverse pour les sages-femmes du secteur hospitalier privé depuis quelques années (tableau 1). Leur nombre recule désormais (-9,4 % entre fin 2013 et fin 2020), dans un contexte où le secteur privé réduit son implication dans les activités périnatales et où de nombreuses maternités privées ont fermé. Dans le secteur public, en revanche, le nombre de sages-femmes continue de progresser (+5,6 % entre fin 2013 et fin 2020). Les effectifs d’infirmiers augmentent de 24 % entre fin 2003 et fin 2020, une progression proche de celle du nombre de médecins et assimilés. Leur part dans les effectifs salariés progresse également, passant de 24,1 % à 25,9 % au cours de la même période. La part dans les effectifs salariés hospitaliers des aides-soignants (20,9 % fin 2020) et du personnel administratif (10,8 % fin 2020) reste globalement stable depuis dix-sept ans.

Citation :
Publié par Cpasmoi
Vu qu'ils sont tous en burn-out c'est plutôt de fausses attestations d'être en capacité de travailler qu'ils ont.
Mais bien sûr, el famoso burn-out ultra-contagieux et autodéclaré, qui les force à arnaquer la sécu.
Trêve de plaisanterie, ce sont eux qui s'affichent par voie de presse et disent s'être tous mis en arrêt maladie "car la grêve ne sert à rien". C'est évident que ce sont donc des arrêts "de complaisance" au moins pour la majorité. Je veux bien que leur lutte soit juste, je n'en sais rien, mais la méthode est déplorable.

Dernière modification par Déposeur2bilan ; 25/10/2024 à 03h37.
Citation :
Publié par Borh
C'est quoi exactement des médecins "et assimilés" ?
Les guérisseurs et autres marabouts, évidemment.
Citation :
Publié par Borh
C'est quoi exactement des médecins "et assimilés" ?
Si j'en crois le PDF: "31 : Dans cette fiche, la catégorie « médecins et assimilés » comprend les médecins, les odontologistes et les pharmaciens"
Citation :
Publié par Borh
C'est quoi exactement des médecins "et assimilés" ?
Au SSA, on appelle ça les MPVD, médecins, pharmaciens, vétérinaires et dentistes, avec tous les autres qui sont des parameds. Je sais pas si si c’est exactement le cas ici.
Citation :
Publié par Déposeur2bilan
Bizarrement quand on regarde les chiffres les effectifs du public sont en hausse constante depuis 20 ans, à part la période 2014 à 2018 environ, tandis que ceux du privé régressent. Et les soignants au sens pur représentent une part croissante des dits effectifs.

J'aimerais bien savoir ou vous voyez une réduction des effectifs. Ou peut être qu'on est encore dans les propagandes politiques ? On entend toujours parler de "réductions d'effectifs du service public" mais quand on regarde les chiffres ce n'est jamais le cas.

Mais bien sûr, el famoso burn-out ultra-contagieux et autodéclaré, qui les force à arnaquer la sécu.
Trêve de plaisanterie, ce sont eux qui s'affichent par voie de presse et disent s'être tous mis en arrêt maladie "car la grêve ne sert à rien". C'est évident que ce sont donc des arrêts "de complaisance" au moins pour la majorité. Je veux bien que leur lutte soit juste, je n'en sais rien, mais la méthode est déplorable.
Comment se fait-il par conséquent que les plans blancs s'enchaînent et que les soignants tirent de plus en plus la sonnette d'alarme ?
Je n'ai pas l'impression que les +15% on les ressente bien, preuve supplémentaire la fin du numérus clausus pendant la pandémie qui a révélé les manques béants au niveau de la santé publique. Ou alors les +15% sont tous installés à Menton ou dans des coins où il y a plus de médecins que d'habitants.
Voici les chiffres pour l'APHP
https://cme.aphp.fr/sites/default/fi...apacitaire.pdf
Baisse des médecins et baisse des infirmiers

Mais attention, on note un "infléchissement" de la baisse. Donc ça empire mais moins qu'avant...


Alors l'AP-HP, c'est pas tous les hôpitaux de France, mais faut voir où est la hausse ? Dans les établissements de longs séjours ? Ce serait pas impossible vu le vieillissement de la population mais c'est pas ça qui aidera les urgences...

Dernière modification par Borh ; 25/10/2024 à 17h11.
Citation :
Publié par Borh
Voici les chiffres pour l'APHP
https://cme.aphp.fr/sites/default/fi...apacitaire.pdf
Baisse des médecins et baisse des infirmiers

Mais attention, on note un "infléchissement" de la baisse. Donc ça empire mais moins qu'avant...


Alors l'AP-HP, c'est pas tous les hôpitaux de France, mais faut voir où est la hausse ? Dans les établissements de longs séjours ? Ce serait pas impossible vu le vieillissement de la population mais c'est pas ça qui aidera les urgences...
Le problème des urgences n'est pas forcément parce qu'il y a une baisse des professionnels qui choisissent cette branche spécifique.
Je dirai même qu'elle est ailleurs, à force de dire oui à des lobbys pour du confort, on a reporté vers les urgences beaucoup de patients qui n'ont rien à y faire en fait. Et tant qu'on ne décidera pas que la récré c'est fini, ca continuera.

PS : Et soyons clair dans les lobbys, il n'y en a pas d'administratif par contre des médecins, c'est plusieurs voire beaucoup, histoire de ne pas taper toujours sur les mêmes quand cela ne marche pas.
Citation :
Publié par Adriana
Comment se fait-il par conséquent que les plans blancs s'enchaînent et que les soignants tirent de plus en plus la sonnette d'alarme ?
Je n'ai pas l'impression que les +15% on les ressente bien, preuve supplémentaire la fin du numérus clausus pendant la pandémie qui a révélé les manques béants au niveau de la santé publique. Ou alors les +15% sont tous installés à Menton ou dans des coins où il y a plus de médecins que d'habitants.
Le vieillissement de la population mobilise aussi plus de personnels de santé.
Et peut être aussi que les gens meurent moins vite qu'avant de leurs maladies, donc on a plus de malades chroniques en proportion (je suis pas sur de ça).
Citation :
Publié par Diot
Le vieillissement de la population mobilise aussi plus de personnels de santé.
Et peut être aussi que les gens meurent moins vite qu'avant de leurs maladies, donc on a plus de malades chroniques en proportion (je suis pas sur de ça).
Peut être aussi qu'on se base sur la presse qui se base elle même / se fait le relais souvent sur les déclarations politisées de untel ou untel et non pas des chiffres officiels et administratifs, parce que ça ne fait rêver personne de voir des tableaux, à commencer par les journalistes qui sont littéraires le plus souvent, et que ça ne crée pas le buzz, pas d'émotion et ne fait pas vendre.
Personne ne va jamais "debunker" les déclarations de ce cher médecin ce Périgueux ou de tant d'autres pour infirmer ou confirmer ce qui énoncé. C'est en fait très rare et réservé aux plus polémiques ou aux plus "extrêmes" ou considérés comme tels. Personne ou presque ne va jamais chercher les chiffres réels des administrations, et petit à petit "on réduit les effectifs de service public" devient (par exemple parmi tant d'autres) une réalité cognitive pour des millions de personnes, alors que c'est totalement faux (au niveau global). Et ensuite c'est repris par des politiques, qui vont parfois voter des textes pour lutter contre des problèmes inexistants.
Personnellement j'ai appris à me méfier du discours sur "le manque d'effectifs / le manque de moyens". Très souvent, ce n'est pas le problème qui engendre les dysfonctionnements, mais une solution de facilité pour le mettre sous le tapis ou un problème plutôt secondaire résultat d'une mauvaise gestion (du changement notamment).

Dernière modification par Déposeur2bilan ; 25/10/2024 à 22h33.
Citation :
Publié par Déposeur2bilan
un problème plutôt secondaire résultat d'une mauvaise gestion (du changement notamment).
Aaah oui bien sur. Quand les principaux intéressés hurlent depuis des années que leur principal problème c'est un manque d'effectif ou de moyens, c'est surement pas le problème. Non, le problème c'est la "mauvaise gestion du changement", ie "on les a pas bien accompagné dans l'évolution de leur système". Ce qui se traduit dans la réalité par le fait qu'on a en effet détruit leur système en supprimant des moyens, mais le problème c'est qu'on leur a pas bien expliqué. Ou plutôt pour le décideur politique qu'ils sont trop cons pour s'adapter ou trop gaulois réfractaires face au nouveau monde.
Et c'est toi qui vient critiquer la politisation du discours...

Si personne ne contredit l'ensemble des professions de santé quand elles parlent d'une seule voix ( alors que bon le positionnement politique de l'as et du médecin libéral c'est pas vraiment le même) c'est ptet parce qu'ils ont raison plutôt.
Citation :
Publié par Déposeur2bilan
Personne ne va jamais "debunker" les déclarations de ce cher médecin ce Périgueux ou de tant d'autres pour infirmer ou confirmer ce qui énoncé.
Si ce cher médecin mentait, les dircoms de l'ARS et de l'hôpital se seraient au contraire fait un plaisir de débunker, car c'est pour ça qu'ils sont payés.

Elles ont préféré communiquer en disant que les médecins en arrêt ne leur ont pas laissé assez de temps pour régler le problème, ce qui me laisse penser que le problème est réel.
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