Lacune ? Benoit XVI devrait être bien placé, vu sa jeunesse, pour savoir que l'athéisme était
loin d'être la doctrine dominante du 3e reich. "Gott mit Uns", c'est pas spécialement athée...
Et parler de "lacune en histoire" parce que je me gausse d'un Pape qui assimile athéisme et nazisme, c'est quand même très fort.

Qu'un régime comme le nazisme s'approprie ce genre de devise (comme tous les régimes en guerre au demeurant : la République anticléricale a été la première à faire canoniser Jeanne d'Arc pour avoir une sainte nationale, même si la canonisation n'est intervenue qu'en 1920 si ma mémoire est bonne) ne signifie pas que le catholicisme soit en cause (je renvoie aux
Evangiles, qui sont tout de même à distinguer de la tradition incarnée par l'Eglise, même si être catholique signifie prendre les deux, et non pas seulement ce qui arrange).
De plus, je t'encourage à faire plus attention aux termes employés (je parle de l'article publié dans Rue 89), qui parle, si je ne me trompe pas, non pas de l'athéisme en général, mais de l'athéisme "extrême" mis en oeuvre par les Nazis. Et sur ce point qui me semble fondamental, je pense que Benoît XVI est dans le vrai, en dépit de la manière caricaturale dont on présente son propos.
Pour ce qui est de son passage aux Jeunesses Hitlériennes, il y était comme tous les jeunes de son époque en Allemagne. Clairement : on ne peut pas être catholique et nazi, c'est tout à fait inconciliable.
Les idéologies et les régimes dont il est question ici sont la négation pure et simple du christianisme dans ce qu'il a de plus fondamental (et là encore, il s'agit de revenir aux Evangiles, et à rien d'autre, car ce sont eux à la base qui sont censés contenir le message originel du Christ, qui est le vrai fondement historique du Christianisme).
Si j'ai bien compris de quoi il retourne, le Pape ne dit pas que tout athée est un nazi en puissance. C'est une position stupide, et s'il y a une chose dont je suis profondément convaincu, c'est que le Pape n'est absolument pas stupide. Je pense pouvoir dire que son propos est que l'idéologie qui a porté les régimes totalitaires (nazisme et communisme, parce que du point de vue de l'Eglise, je ne pense pas qu'on fasse une grande différence entre les deux au plan théologique) était fondé sur la négation pure et simple de l'Humain, de l'Homme, ce qui a mené à la destruction de l'Homme (système concentrationnaire nazi ou communiste, dont Auschwitz est en un sens la plus lugubre expression). Ce qu'il dit à mon sens, c'est que là où est l'Homme, là est Dieu, et que le refus total de Dieu est une négation pure de l'Homme, qui ne peut le mener qu'à sa perte, ce qu'illustre le nazisme.
De ce point de vue, l'athéisme dont il est ici question n'est rien d'autre qu'une ruse de Satan (ou du Mal, appelez- le comme vous voulez) qui consiste à mener l'Homme à sa perte en le détournant de Dieu (puisque tel est le but suprême de Satan selon l'Eglise, ce qui est clairement rappelé dans le Catéchisme de l'Eglise Catholique, aux pages 88 à 93, et notamment à la page 93 de l'édition Mame / Plon de 1992, que j'ai sous les yeux au moment où je rédige ces lignes : la nature du Mal y est clairement exposée).
Pourquoi le Mal est le Mal ? Parce qu'il refuse en toute conscience la bonté infinie de Dieu, parce qu'il se révolte contre elle, et parce qu'il fait tout pour associer l'Homme à son refus (qui est définitif et libre), afin de le perdre pour s'élever au- dessus de Dieu (puisque c'est ce crime d'orgueil qui a poussé Satan à la chute avant la Genèse).
De ce point de vue encore, le nazisme ou le communisme sont de parfaites expressions maléfiques. Que disent ces idéologies à l'Homme ? Qu'il peut se passer de Dieu, que Salut est sur Terre, ici et maintenant et qu'il ne dépend que de l'Homme et en rien de Dieu, que Dieu n'a pas sa place dans le monde, que l'Homme n'est pas l'Homme puisqu'on peut totalement se déchaîner contre lui en le niant dans ce qu'il a de plus essentiel.
Que fait au fond Benoît XVI, sinon poursuivre l'oeuvre qu'il avait déjà entreprise du temps de Jean- Paul II, à savoir lutter contre ce que l'Eglise appelle la "culture de mort" (et qui est au passage d'une profondeur philosophique et théologique que bien peu soupçonnent, simplement parce qu'ils ne s'y intéressent pas, sinon pour cracher de temps à autre sur le Pape... parce que bon...) ?
En somme, Benoît XVI ne fait rien de plus que son simple office : ça n'est pas un message politique qu'il adresse là, mais bien un message fondamentalement religieux, authentiquement chrétien. Ce que de simples connaissances de base en théologie ou en histoire religieuse auraient permis de comprendre sans hurler à un loup qui n'existe pas...
Le problème n'est pas que Benoît XVI tienne ce genre de propos : c'est son rôle, c'est pour cela qu'il est Pape. Il a défendu les Roms et a critiqué la politique de la France au nom de ce même absolu de la vie et de l'Homme, qui est le coeur même du message christique, il le fait sur un certain athéisme de la même manière. Le problème, encore une fois, c'est que des gens qui ne cherchent pas à comprendre son message le déforment et hurlent au scandale, alors qu'ils auraient mieux fait à la base de se poser, de le lire et / ou de l'écouter, et ensuite de se faire leur idée sur celui- ci. Mais bon, on a l'habitude : il n'y a pas pire sourd que celui qui ne veut rien entendre.
C'est amusant d'ailleurs, parce que c'est en gros l'objet d'un MP que j'ai eu récemment suite à une citation de Pascal que j'ai fait sur un autre sujet de l'Agora.
Ce qui me choque le plus au fond, c'est la prétention qu'ont certaines personnes à juger autrui (le Pape en l'occurence) alors qu'ils ne font à aucun moment l'effort de tenter de le comprendre, ni lui, ni le message qu'il porte (et c'est le message du Pape qui compte ici, pas le Pape lui- même, qui n'est que de passage, comme tous ceux avant lui et tous ceux après lui).