Publié par Keldhra
A partir du moment où une autorité religieuse quelconque prétend faire un parallèle idéologique entre deux religions, ici l'islam et le catholicisme, comment les autres religions ne peuvent-elles pas se sentir concernées et impliquées dans le débat ?

Je suis entièrement d'accord pour dire que les Musulmans ont un "droit de réponse", dans la mesure où Benoït XVI prend un texte byzantin qui met en question l'Islam, et qu'il cite une sourate du Coran. Là dessus, pas de souci, c'est leur droit le plus légitime de le faire.
Mais je pense qu'ils l'ont fait de la manière la plus bête possible...
Puisqu'on est dans l'image et non pas dans le texte depuis le début, que va penser l'opinion mondiale, ou du moins occidentale, des réactions du monde musulman, sinon que ce sont en effet des gens violents qui croient en une religion violente ?
Là encore, c'est bien la question des médias qui est posée... Comment admettre que les médias soient - une fois de plus - d'une médiocrité TOTALE dans la diffusion de l'information ? On prend une petite phrase, on la balance dans l'opinion en faisant des contresens et des erreurs magistrales d'interprétation, et en écho, on montre les réaction des excités du monde musulman... Comment voulez- vous que les gens voient dans cette religion autre chose qu'une menace ? Ce qu'elle n'est évidemment pas en elle- même. RIEN n'est fait pour expliquer quoi que ce soit à l'opinion... C'est incroyable d'en arriver là...
Si on a l'esprit mal tourné, et si on est un fan inconditionnel de la théorie du complot, on pourrait penser que Benoît XVI a manipulé l'opinion mondiale par le truchement des médias de masse, en sachant très bien ce qui allait se passer dans le monde musulman, pour pousser les indécis et les non pratiquants en Europe dans les bras de l'Eglise, comme une référence sécurisante et un retour aux origines de la foi des Européens, dans le cadre de la rechristianisation si décriée.
Peut être. Après tout, pourquoi pas ? Moi je n'ai pas de preuve de cela, de même que je n'ai pas de preuve du contraire. Mais j'aimerais savoir ici qui est membre de la Curie et qui est un familier de Benoît XVI pour pouvoir oser l'affirmer sans peur de se tromper ou de troller magistralement.
Publié par Keldhra
Donc non, on ne s'en fout pas de ce que pense les autres religions, cela me semble impossible de réfléchir au problème sans inclure l'ensemble des spiritualités dans le débat...
Dans le mesure où cette conférence me semble être à usage interne en visant l'Eglise avant tout (mais je n'en sais rien en fait), d'un certain point de vue, si, on se fout un peu de ce que pensent les autres religions.
Maintenant, à ma connaissance, il me semble clair que Benoït XVI se préoccupe essentiellement de l'Eglise Catholique Romaine, et pas vraiment de ce que pensent les autres religions, et surtout, que la recherche de la popularité n'est vraiment pas son problème premier. Il faut comprendre que le Pape ne cherche pas à plaire ou à se faire élire. Il dit ce qu'il estime être la vérité au plan du Dogme. Ca ne va pas plus loin.
Alors certes, il est entouré de conseillers et il sait ce qu'il se passe dans le monde. Mais en matière de Dogme, il n'est pas son rôle de l'adapter aux siècles, mais de le réaffirmer face aux sociétés humaines, et de dire ce qui est catholique et ce qui ne l'est pas.
Et là encore, ça n'est pas son problème de savoir ce que pensent les autres religions.
Publié par Keldhra
Etant donné, là je m'avance sans fondements d'aucune sorte, juste une opinion, que depuis quelques années où tout se "mondialise", au vu de la recrudescence de la "religiosité", une question de fond se repose, question qui n'avait plus été posée depuis plus d'un siècle, va-t-on voir émerger une religion mondiale? Et si oui, laquelle.
Moi non plus, je n'ai pas de source sur ce point, mais je pense pouvoir affirmer que le Pape actuel ne cherche surtout pas le mélange des genres. N'oublions pas qu'il était justement LE grand théologien des dernières décennies (je parle pour l'Eglise, pas pour les religions en général), qu'il a sans cesse été amené à réaffirmer le Dogme et à clarifier la situation du catholicisme dans le monde. L'hérésie et l'hétérodoxie sont à mon sens plus ses priorités que l'oecuménisme et la quête de la popularité médiatique (il a d'ailleurs toujours eu des propos assez durs sur les médias et sur les effets de modes, qu'il a toujours condamnés comme des "images", des "moindre êtres", la recherche de la crédibilité étant à ses yeux opposée à celle de la vérité, vérité qui ne peut se concevoir à ses yeux que dans le message du Christ et dans le cadre de l'Eglise, gardienne de la Tradition). De ce point de vue, il est en rupture complète avec le pontificat précédent de Jean- Paul II, qui était très impliqué dans la médiatisation du message de l'Eglise.
Publié par Keldhra
Certes, ce débat n'est pas récent, mais depuis l'avènement de la laïcité dans les pays démocratiques, le débat concernant la "religion" n'était plus le même. Aujourd'hui le problème se repose en force et en profondeur...
Comme l'a rappelé Nilrem, la laïcité (la laïcité "à la française") est une exception, et non pas une norme. La majorité des Etats démocratiques ne sont pas laïcs, en tout cas, pas laïcs au sens où nous l'entendons nous en France. Ils sont laïcs dans la mesure où les Eglises ne participent pas aux gouvernements et parce qu'il y a une séparation plus ou moins nette entre la sphère politique et la sphère religieuse, mais pas nécessairement dans leurs pratiques ou leurs références. En Angleterre par exemple, le chef de l'Etat est aussi le chef de l'Eglise anglicane (Elisabeth II). En Espagne, la religion catholique demeure une référence, le roi étant le chef de l'Etat et étant catholique. Dans les pays scandinaves, il me semble que c'est le même cas qu'en Angleterre. En Italie, l'Eglise a un rôle essentiel, et le Vatican ne se prive pas d'intervenir sur certains sujets de société.
Vraiment, la situation française est une exception, et la manière dont se pose chez nous les questions de religion est très différente de ce que l'on peut trouver ailleurs.
Publié par Keldhra
Est-ce un recul de la pensée laïque? Ou bien la pensée laïque telle qu'elle était conçue était-elle trop "catholique"? Notre définition du monde peut-elle s'accorder avec une mondialisation totale incluant d'autres systèmes de pensée que celui occidental? Je ne sais pas. Mais la question je la perçois sous-jacente, partout, dans tous ces débats stériles et là pour la peine, je ne trouve pas ça "stérile". Après je peux totalement me planter, ce ne serait pas la première fois, j'exprime ce que je "ressens", rien de plus.
Je ne sais plus où j'ai entendu cela il y a peu, mais ça me semble parfaitement vrai (je crois que c'est Onfray dans le "forum des Européens", sur la question des gays en tant qu'enjeu de société pour les futures élections) : les républicains en France ont mis un terme à la transcendance en séparant l'Eglise et l'Etat, mais les valeurs sur lesquelles ils ont fondé la République ne sont pas différentes de celles que l'Eglise a incarné pendant des siècles. En fait, il n'y a pas eu de révolution mentale et morale à la hauteur de la révolution politique et sociale. Ce sont les mêmes valeurs, mais avec les références à Dieu et à l'Eglise en moins.
Maintenant, sur la mondialisation, je me demande bien comment les civilisations peuvent faire abstraction de leurs valeurs, coutumes, pratiques sociales et organisations politiques. Certes, il existe (en théorie du moins) des valeurs universelles, mais en pratique, les réalités sont beaucoup plus nuancées que cela. De manière quasi certaine et irrémédiable, un afghan et un français ne peuvent pas voir le monde de la même manière, quelle que soit leur volonté de le faire, et n'en auront pas la même expérience, quels que soient leurs efforts. Nier cela revient à mon sens à nier ce qui est caractéritique de l'humain : la diversité. Et la mondialisation n'est pas une négation des particularités, mais une globalisation de l'espace, du "système- monde", pour reprendre Braudel.
EDIT : oups, c'est pas Nilrem, mais Nijel.