Pour ma part, cela fait 4 ans que je suis en Allemagne et pour être tout à fait honnête, je n'avais même pas envie d'y aller.
Bon, j'ai toujours eu cette envie latente de quitter la France et ce, depuis mes 18 piges, quand j'ai fait un stage de quelques mois aux USA.
Tout le monde a un parcours unique (donc ML incoming), ce serait difficile pour moi de dire "j'ai quitté la France parce que ça et ça". Non, c'est après coup qu'on se rend compte de ce qu'on gagne à la quitter.
Je viens d'une famille d'immigrés italiens (au niveau de mes grands parents) et d'ouvriers (toujours au niveau de mes grands parents). Ma mère a juste le bac et c'est celle qui a le mieux réussi dans la famille niveau salaire.
Elle m'a élevé seule donc niveau thunes, c'était pas ça. Je partais en vacances avec les grands parents à la campagne dans les années 80 comme pas mal d'enfants, mais ça s'arrêtait là. Jamais je n'avais quitté le territoire. Et j'avais toujours vécu avec une mère endettée, moi même endetté et dans des quartiers de merde (Paris limitrophe 93).
Jusqu'au jour où... j'ai eu l'opportunité de rejoindre mon père aux USA où j'ai bossé quelques mois. Ca m'a tout simplement donné une autre vision des choses. J'y ai rencontré des jeunes qui faisaient le même métier que moi sans diplômes (Sys Admin) au même âge (18 ans) et qui gagnaient 3x mon salaire en allant à la plage tous les jours en Californie. Alors forcément, les clichés étaient là, la caricature aussi et à l'époque je n'avais pas le recul nécessaire pour apprécier les différences (manque d'aides sociales, médicales, etc). Par contre, ça a aussi débloqué deux choses en moi dont les français manquent cruellement :
- Un peu d'ambition
- Réussir n'est pas si difficile que ça et surtout, ça n'est pas que pour les autres
La création d'entreprise se faisait en 5 minutes à un guichet, des jeunes sans diplômes se faisaient de l'argent par contre il fallait parler anglais ce qui n'était pas mon cas.
Alors cette vision des choses étaient biaisée et naïve car j'avais 18 ans. Je voyais les avantages sans les inconvénients, je vous l'accorde. Mais ça a créé un déclic. Celui que tout était possible et que rêver était permis. Quand tu vis dans des quartiers de merde et que ta famille n'a pas de thunes, tu entends plutôt le contraire "Arrête de rêver" et "c'est pas pour toi"
Je suis revenu en France, j'ai trouvé un taf, j'ai bossé l'anglais, j'ai fait pas mal de bénévolat dans le secteur qui m'a intéressé et j'ai professionnalisé tout ça en trouvant un autre job dans le secteur qui m'intéressait au sein d'une équipe internationale : J'ai taffé mon anglais encore plus.
J'ai créé ma boite : Echec total. En même temps, faire du recrutement en 2008 juste avant la crise, c'était pas une bonne idée. Mais ça m'a aussi appris que ce n'était pas impossible de devenir entrepreneur et que ce n'était pas réservé "qu'aux autres".
Par contre ça coûte cher et j'avais des dettes donc NEED un taf ASAP. Le seul taf que j'ai trouvé c'était en Allemagne. Bien entendu, j'ai tenté de trouver du taf en France mais... les boites françaises n'aiment pas les ex entrepreneurs, leur crainte c'était que je ne sache pas prendre des ordres après avoir été chef d'entreprise ou travailler en équipe alors que c'était précisément ce qui commençait à me manquer : bosser en équipe car être entrepreneur même avec un associé, au jour le jour c'est très solitaire comme taf. Au contraire, les entretiens que j'ai passé en Allemagne (quelques uns) ont tous été positifs et ils étaient tous super intéressés par mon expérience de créateur d'entreprise, même raté. Quel changement de mentalité ! On passe de la peur à l'intérêt, pfiou le choc. J'ai pu choisir entre 2-3 jobs différents et 4 ans plus tard je suis toujours dans la même boite à manager 120 personnes et à avoir triplé mon salaire (brut).
Pourquoi je suis parti ? Parce que la France ne m'était pas accueillante. Parce j'en avais raz le cul d'avoir 10 ans d'XP pro et d'être au SMIC. Parce que mon parcours inquiétait et parce que tout simplement peu d'entreprises (et encore moins dans mon secteur) estimaient que j'avais quelque chose à apporter. Aujourd'hui on tente de me débaucher c'est que j'ai pas fait le mauvais choix.
Je ne sais pas si je retournerai vivre en France un jour. Ce que je sais c'est que je ne finirais pas en Allemagne. Prochaine étape ? J'aimerai bien tenter le Canada ou les US. Pour me faire revenir en France faudrait vraiment me payer cher.
Mon profil intéresse à l'étranger mais pas en France, jamais reçu d'offres ni de tentatives de débauchage en France. Par contre Irlande, US, Asie, Angleterre, Pays Bas, bref en fait quasi-partout sauf en France.
Je commence à gagner ma vie correctement, j'ai un plus gros pouvoir d'achat qu'à Paris tout en vivant dans une capitale européenne (Berlin) et j'ai un super confort de vie de bourge (+100m², TV 163cm, vacances aux Canaries, etc). Et j'ai fini de rembourser mes dettes ! Putain 20k€ de dettes en moins, ça fait plaisir !
Avant de changer de pays ma situation était : Je vivais dans un 22m² au 6ème sans ascenseur, mon PC était par terre, j'avais juste un sofa pour dormir et j'suis pas parti en vacances pendant 8 ans ! Le tout avec des dettes et une lettre d'huissier par semaine. J'ai été jusqu'à la coupure EDF pour impayé car je ne pouvais juste pas verser l'argent, j'avais aussi les saisies sur mon chômage et je devais de la thune à l'État.
Bon, désolé pour le ML mais je pense que c'est important d'expliquer un cheminement car toutes les histoires sont différentes. J'aurai bien voulu pouvoir répondre simplement en disant "J'ai quitté la France parce que XYZ". Sauf que tu ne peux pas avoir de raisons précises avant de savoir ce qu'il se fait ailleurs.
Je me suis barré par nécessité (un job) et j'ai découvert que j'avais encore le droit de réussir ma vie (pourtant super mal barré) et que oui, dans mon cas, c'était mieux ailleurs.
Pour conclure : Je recommande à tous les jeunes de se barrer à l'étranger entre 2 et 5 ans. Ne serait-ce que pour les rendre plus "employable" et augmenter leur valeur plus rapidement sur le marché du travail. J'ai plein d'exemple parmi les anciens membres de mon équipe. Ils sont venu bosser chez nous 2-3 ans, certains ont fini chez des leaders de mon secteur, d'autres chez Twitter, etc. Une chose est sûre, la majorité a commencé à 20k sans ou avec peu de qualif' et 2-3 ans après sont à 30-40k.
Pour le reste, la décision d'un départ définitif ou temporaire est personnelle mais dans l'idéal, tout le monde devrait au moins tenter l'expérience.