Hier soir un ami et moi même sommes partis pêcher. Sortis en mer en empruntant son robuste chalutier amoureusement baptisé le Titanic (en hommage posthume), nous avons jetés l'ancre dans le Quartier Latin, zone fort poissonneuse depuis quelques décennies car contiguë à la Seine.
Lumières stroboscopiques, brouillard dense, aucun doute ce soir on sort les cannes télescopiques. Quelques pas de danse l'hameçon en avant, quelques prises médiocres et très vite rejetées dans les flots tumultueux, il n'y a pas à dire pêche est travail de patience. M'essuyant virilement le front du dos de la main, je commandai un double jus de pomme serré au barman et le descendis aussitôt. Résolu à en découdre je m'en retournai braver la houle et le miracle se produisit.
Baignée d'une lueur éthylique, une beauté nocturne à la poitrine opulente comme les jardins de Babylone me scrutait du haut de son balcon. Je m'approchai aidé par la marée et d'un geste preste l'emprisonnai dans mes filets. Mon ami, stupéfié par tant de tact me remit ses clés sans un mot et dériva vers la Baie Sevosmeres. N'écoutant que mon instinct, je m'en retournai accompagné de ma prise à mon repaire, claquai nonchalamment la portière (du chalutier) et inspirai l'air iodé. Observant le parcmètre plié par la manifestation gauchiste contre l'éradication des thons sauvages de la semaine dernière, elle s'avança vers moi et me susurra d'une voix salée : baise moi.
Ni une ni deux, pris d'un élan salvateur, je l'écaillai prestement. Bruissements de tôle, baisers fougueux, je la harponnai à deux mains comme jadis procédaient mes ancêtres et son coquillage carnivore inonda de son nectar le capot du Titanic. Soudain, sans crier gare et déchirant le ciel d'obsidienne, elle se mit à jouir chanter d'une voix mélodieuse (d'où le chant des sirènes). Fenêtre qui s'allument dans les calanques, silhouettes à l’œil torve n'obéissant qu'à leurs sexes turgescents pointés vers le ponant, la rue résonna bientôt d'une symphonie masturbatoire nous contraignant à gravir les marches de mon donjon.
Ruisselant de cet acte qui dut être le plus noble de toute ma vie, nous nous couchâmes et je ne pus me retenir de verser une larme d'émotion.
Avant de s'assoupir les seins rauques pressés contre ma poitrine hors d'haleine, elle me murmura à l'oreille : demain dès l'aube à l'heure où blanchit la campagne...
Ce matin après m'être réveillé des questions pleins la tête je m'en remet à votre savoir.
Comment expliquer à mon ami que si le capot de son chalutier brille comme une sardine à l'huile ça n'est pas grâce à un lustrage à la cire d'abeille... Que dois je répondre à l'agent de police venu sonner à ma porte en raison du tapage nocturne de cette nuit ? ...Que dois-je répondre à cette conclusion campagnarde ? L'aube s'est levée depuis 3 heures mais elle dort toujours ! Dois-je comprendre qu'elle veut que nous réitérions l'expérience au milieu d'un pré parsemé de rosée et de coquelicots ? Que mange une Sirène ?
Aidez moi amis pêcheurs de foutre !!!
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