Ce sujet m'intéresse particulièrement, étant en licence STAPS et futur candidat (l'an prochain) au CAPEPS, le certificat d'aptitude au professorat d'EPS.
Alors déjà quand je vois ce genre de choses:
sinon, qu'on aime ou qu'on aime pas l'EPS, cela reste une récréation, un bol d'air nécessaire qui permet de voir un prof autrement, un système autrement, une classe autrement.
Ca me fait dresser les cheveux sur la tête...Ce n'est pas la seule remarque de ce genre, mais je trouve que c'est une insulte faite à tous les étudiants/enseignants qui font 5 ans d'études pour parvenir à exercer ce métier (et encore 5 ans c'est loin d'être suffisant pour former un bon prof d'EPS).
Cela dit, même si ces remarques me flinguent, elles sont toutefois assez révélatrice d'un certain état d'esprit et traduisent une certaine réalité : l'EPS pose quelques problèmes :
- Tout d'abord, l'image du prof d'EPS type "monsieur mégot" que certains colportent et qui a autant de valeurs que le matheux larve de 40kg, l'intello avec les culs de bouteille ou autre. => Il y en a des profs comme ça, comme j'ai connu des profs de maths alcooliques, des profs de SVT qui arrivaient à rendre leur matière chiante à mourir (alors qu'elle m'intéressait au plus haut point)...
- L'EPS est encore considéré comme un "défouloir" après le cours de maths où on s'ennuie, c'est une "récréation", on va tous aller se retrouver en short sur le terrain et là t'as le prof (que tout le monde appelle "coach") qui va nous faire faire un foot ou autre avec sa casquette, son sifflet et son short moulant. De la simple garderie quoi. En somme, pourquoi payer un prof si cher? on pourrait mettre mon entraineur de club il s'y connait mieux...Bref, toute cette confusion se retrouve ne serait-ce que dans la dénomination de la matière : on ne parle pas d'EPS : on va "en sport" avec le "prof de gym". Ca s'explique en tout premier lieu historiquement parce qu'il y a eu des époques où la gym prédominait et constituait un outil à une éducation utilitariste, voire militariste et nationaliste. Des époques où le sport prédominait, en tant que couronnement du modèle industriel anglais, où on lui assignait les valeurs de "compétition", de "rendement", "d'optimisation" etc etc => Mais maintenant NON ce n'est plus ça.
L'EPS est une discipline d'enseignement
au même titre que les maths ou autres choses. En EPS on n'envoie pas les collés parce qu'ils font chier le monde et que le prof d'EPS est sympa et sait mieux les aborder, non en EPS on apprend des choses, il y a des exigences, des programmes à respecter, des objectifs fixés.
En EPS, on aborde 2 pôles, le pôle éducatif, ce qui suppose un versant plus citoyen, voire philosophique, et un pôle "physique", qui suppose une éducation corporelle.
Je sais pas à l'heure où l'on constate tous la désaffection de valeurs comme la citoyenneté, l'autonomie, la responsabilité, la tolérance...Je ne comprends pas pourquoi on voudrait retirer une des seules matières qui met l'élève dans des conditions
concrêtes d'exercer cette citoyenneté : ben oui la danse ça pue c'est pour les filles, mais les cours qui sont donnés et l'évaluation proposée a par exemple mis les élèves dans des situations de groupe avec toutes les contraintes que celà suppose : faire des choix ensemble, mettre en relation les points forts de chacun en vue d'une production (ce qui suppose une connaissance de soi), argumenter ses choix, faire valoir sa position au sein d'un groupe, s'affirmer...Je pourrais en donner des tonnes comme ça. Tout ça pour dire que l'intérêt on ne le voit pas forcément tout de suite (parfois jamais...) mais un bon enseignant d'EPS vous fera vivre ces situations et ca sera forcément formateur pour votre vie d'adulte.
Quant au pôle physique, l'EPS est la seule discipline qui aborde le corps. Alors quand j'en entends dire certains que ça ne sert rien, c'est qu'ils doivent vraiment vivre sur une autre planète. A la limite je comprends certains qui n'aiment pas l'activité physique. Je ne comprends pas ceux qui pensent que ça ne sert à rien. Le corps dans notre société actuel est un objet sacralisé, tout est fait pour l'entretenir (prolifération de la bouffe allégée, des clubs de REMISE EN FORME, des centres de soins corporels et que sais-je encore.
Bref supprimer une matière qui aborde ces deux aspects tout simplement parce que "c'est nul" "ca sert à rien" "je peux en faire en club" "c'est comme la musique et l'art plastique ça sert à quoi si je veux devenir ingénieur?" et bien je trouve que ce ne sont pas des arguments recevables...Après tout dépend de l'école que l'on veut. Former des citoyens lucides/autonomes etc ou de la main d'oeuvre?
Quoique...
Maintenant il est clair que les capacités intellectuelles sont bien plus importantes que les capacité physique, tu n'auras pas à faire ça dans une entreprise comme disait mon prof de compta en dénigrant les profs de gym et les "journées sportives"
Ton prof de compta est bien gentil avec ses collègues, mais s'il se cultivait un peu il saurait que l'un ne va pas sans l'autre. Je vais pas te faire une étude là dessus mais c'est quelque chose de communément admis, bien qu'en France ça ne soit pas vraiment assimilé (aller voir dans d'autres pays, notamment anglo-saxon l'importance qu'ils donnent au sport).
Aller juste pour te donner un exemple : les entreprises ont bien vite compris que les valeurs et les bienfaits du sport étaient largement compatibles avec leur mode de fonctionnement. C'est la raison pour laquelle on a vu émerger très vite au sein des entreprises des équipes patrons-employés, des championnats inter entreprises, voire même (cela se fait à côté de chez moi) un complexe sportif entier consacré aux seuls employés de l'entreprise. Loisir et rendement sont loins d'êtres opposés
Bref...Je suis surement un peu confus mais ce sujet déchaine tellement mes passions que je ne sais plus quoi dire et que je pourrais en discuter pendant des heures.
PS: d'ailleurs j'en reviens au principal: ton coach t'a parlé de la disparition de l'EPS car celle ci n'entre pas comme discipline fondamentale au sein du socle commun de connaissances de la loi Fillon. Ca devrait entrer en application en 2007...Ce qui explique notamment les saignées sur les recrutements en EPS au CAPEPS (-70% en 2 ans, 400 postes cette année alors qu'il en faudrait environ 1100...)