De façon peut-être étonnante, je me retrouve dans l'un et l'autre de vos commentaires concernant l' épisode 12 de Tokyo Ghoul √A.
Il y a pour moi un double-problème dans cette "fin" : d'une part ce n'en est pas une, à moins peut-être qu'elle ne serve qu'à conclure le délire en sous-couche de cette seconde saison; ensuite, elle part à mon sens un peu trop du principe que nous sommes des fans transits de Tokyo Ghoul et que nous couinerons à chaque prise quasi-émouvante, ce qui n'est évidemment pas le cas en bons soldats objectifs de la justice culturelle que nous sommes... presque.
Je m'explique ci-dessous, dans un spoiler évidemment consacré à la totalité de la saison √A de Tokyo Ghoul et surtout de son douzième épisode.
La longue marche silencieuse de Kaneki avec Hide dans ses bras aurait pu être glorieuse, émouvante et belle, si seulement elle n'avait pas duré trop longtemps et n'avait pas servi à solder un épisode sans émotion, ni gloire ni beauté. Je n'irai pas comparer ce chapitre à celui du manga où d'après moi le traitement par omission du destin d'Hide auprès de Kaneki avait selon moi cent fois plus de puissance que cette quasi-tragédie, mais il faut tout de même savoir un peu où l'on va.
Kaneki s'est associé à Aogiri dans √A pour justement gagner le pouvoir de protéger les siens; or, de toute évidence, cet épisode nous révèle que cette "route" n'est pas moins tragique pour ce protagoniste décidément né sous la mauvaise étoile. Bon, d'accord. C'est seulement pour moi un peu stupide : le manga Tokyo Ghoul, encore par le biais d'Hide, nous montre que Kaneki dans la voie suivie dans les œuvres sur papier n'a pas su contrôler ses pulsions de goule, là où dans l'arc √A il y parvient presque entièrement.
Pourquoi n'a-t-on pas joué ce parallèle alors, pourquoi n'a-t-on pas récompensé la différence dans les choix de Kaneki modélisant cette seconde saison spéciale "√A" par un destin différent pour Hide ? La plus réaliste réponse serait de dire que Tokyo Ghoul est une tragédie, que tout doit être résolument triste pour Kaneki. Et encore une fois nous enfonce-t-on dans la gorge cette philosophie adolescente propre au format de l'adaptation animée, "il faut vivre tout en sachant que nos proches vont mourir un jour, et il faut alors survivre en les gardant dans notre cœur". Rien que ça. Cela pourrait être appréciable, qu'on se le dise, mais seulement si le sujet est traité à fond et sans lacunes.
Je suis donc en premier lieu très déçu par cette seconde tentative de "clôture" de l'arc Anteiku de Tokyo Ghoul, tant elle essaie de faire différemment qu'elle en oublie en réalité de faire mieux que sa concurrente en format manga. Et il y avait pourtant totalement de quoi fournir d'autres saveurs, d'autres ambiances, d'autres destins, justement parce que √A marque un nouveau choix pour Kaneki et par conséquent une certaine quantité d'options inédites pouvant affecter les dénouements. Mais non, on aura favorisé là le cordon émotionnel pour les fans avec comme un camouflet porté à celles et ceux qui portaient un espoir différent dans cette route spéciale.
Le second moment de ma déception se trouve justement dans ce "cordon émotionnel pour les fans" un peu trop utilisé dans cet épisode. Tokyo Ghoul √A s'est terminé sur une mélodie qui me paraît similaire à ces chansons des musiciens qui montrent à quel point les chanteurs se relâchent après avoir acquis un certain succès et une forte base de fans. Tandis en effet qu'ils reposent sur leurs lauriers, ils espèrent réussir à vendre un produit similaire au précédent, avec des messages identiques et sans trop se mouiller. Et ils y réussissent, mais seulement et effectivement auprès de leurs fans remplis d'un amour aveugle. Le reste du public est interloqué puisqu'il se demande ce qui est nouveau, ce qui est différent et surtout ce qui est "intéressant" dans ce nouvel album qui n'est pas qualitativement plus probant que le précédent.
Là, dans notre cas, il y a cette longue marche silencieuse qui me semble totalement gratuite dans le sens où ils ne font guère d'effort pour la vendre à d'autres que ceux qui vont pleurer dès la première seconde. Celui qui n'a pas les larmes pour lui priver la vue constatera par exemple que Kaneki effectue pas moins de trois fois les mêmes mouvements de la tête; après tout, même un final mérite quelques recyclages d'animations de dernière minute. Il y a en plus cette vaste absence de sentiments, ou plutôt l'échec à en solliciter chez le spectateur moyen tandis qu'aucun effort n'est fait par exemple pour soulever une dernière fois de l'empathie auprès d'Hide qui a tout de même sacrifié sa vie et son existence pour tâcher de suivre Kaneki. La musique d'ouverture de la saison 1 de Tokyo Ghoul est à mon sens la seule chose qui sauve l'affaire, avec à côté et comme l'évoque très bien Adnae cette "connexion" vers la saison ":Re" de Tokyo Ghoul où effectivement il y a eu ici un bien meilleur travail d'accompli.
Plus j'écris et plus je semble me trouver une mauvaise langue tandis que je devrais au contraire me réjouir de voir cette seconde saison se conclure, mais une part de moi me rappelle la dégustation du manga Tokyo Ghoul et cette si différente et pourtant tellement plus vaste palette d'émotions ressenties au moment de la "fin". Nous passions de l'incompréhension à la frustration, de l'aveuglement à la déception, pour revenir à plus d'incompréhension et enfin une pointe de déni. Là, avec √A nous est tendue une sorte de gratuité fort simple à résumer : "Kaneki√A= Aogiri = tragédie ++. S'il vous plaît, ici ___, pleurez."
Or, non, je suis désolé mais dans cet épisode 12 il n'y a rien que les auteurs semblaient rechercher. Littéralement même, je vais dire qu'il se trouve ici "moins que rien" au sens de la critique de Limpe un peu plus tôt dans la soirée sur ce fil, et il m'est même possible de nommer ce problème : Arima. Il apparaît comme une sorte de joker mystique qui vient conclure le débat. Dans la manga, passe encore, on donne une sorte de décor et un lien narratif entre les scènes où il est inséré. Là, nous n'aurons même pas le droit à ce privilège : Kaneki marche, Kaneki s'arrête, Arima s'implique, fin. Bon, euh... Bon. Il y a là encore et un peu trop la volonté de s'adresser au "fan" en oubliant totalement que derrière l'écran peuvent se trouver des gens avec l'esprit critique et surtout l'envie de "plus" que du simple fan-service. Et cette envie est surtout motivée par la prise d'initiative audacieuse des scénaristes de la série à justement proposer une route alternative, quelque chose "d'autre" pour les lecteurs du manga et une autre aventure pour les spectateurs du premier jour. Je me questionne donc sur les raisons d'un fin "discount", d'une sorte de promotion sur les fruits et légumes qui affecte également ce Tokyo Ghoul.
Allez, comme Adnae je vais me réfugier dans la seule vérité qui transpire de cette seconde saison, à savoir qu'elle ne sert finalement que de transition et d'en-cas vers une tierce saison promise par le mangaka pour ses fans. Il y a tellement de choses volontairement sous-entendues comme autant de clins d’œil pour les amoureux transits de l’œuvre papier que je ne peux qu'être dérangé pour celles et ceux n'ayant pas lu le manga. Ces personnes doivent affreusement bercer dans l'incompréhension au terme de cet arc narratif, tant elles ont été violemment ignorées par la narration qui semble désormais et dans sa totalité reposer dans un discours par et pour les fans. Et bien sûr je suis frustré au sens où j'ai initié beaucoup d'amis à cette série et dont leur emploi du temps ne leur permet pas une lecture du manga. Qu'une série soit résolument "complémentaire" d'un manga, je me dis "pourquoi pas", mais qu'elle déçoive autant les spectateurs ne suivant que le format animé, je ne peux pas le tolérer.
Moi qui appréciais justement Tokyo Ghoul pour ses décisions audacieuses et pour le fan-service minimal, je me sens soudainement pris pour une bille. Et c'est frustrant quand on attendait tellement, tellement de bonnes choses. Ce potentiel gâché dans la dernière ligne droite de la saison 2 est la vraie tragédie promise dans le synopsis de Tokyo Ghoul.
En résumé et pour finir tout de même sur une pointe d'optimisme, je me permettrai juste de citer l'ami Limpe :
Pourquoi se contenter de :Re quand la grosse première partie de Tokyo Ghoul (manga) apporte tellement plus d'éléments dans tous les domaines que l'anime ? 
Dernière modification par Menthane ; 27/03/2015 à 01h55.
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