Publié par
Bulbon Criquet
Le racisme est la hiérarchisation des races, ça veut bien dire que c'est une base considérant une race plus faible qu'une autre. On a pas été chercher les blancs pauvres de la Lousiane pour aller couper les cannes à sucre.
Colonisation et esclavage vont de pair, dans la mesure où les régions conquises ont été mis en valeur de telle sorte qu'elles deviennent des économies coloniales, des économies entièrement tournées vers la mise en valeur de la métropole.
Ces économies étaient fondées sur l'agriculture et la mise en valeur de la terre, et reposaient sur une importante main d'oeuvre. C'est cela qui a justifié le recours à l'esclavage.
Mais peut- on pour autant parler de racisme dans ce processus ? Non. Parce que ces économies existaient déjà dans l'Antiquité par exemple, et que l'Antiquité n'a établit aucun caractère "racial" dans sa pratique de l'esclavage, qui était massive et qui a duré des siècles.
Pour ce qui est de la traite atlantique, si mise en cause par la loi Taubira, il convient de ne pas perdre de vue deux ou trois éléments avant de parler de "racisme".
Si les Européens déportent les populations d'Afrique, c'est pour deux raisons essentielles. La première, c'est qu'il est impossible pour un chrétien de réduire en esclavage un autre chrétien, ce qui interdit aux Européens de se déporter entre eux vers l'autre monde. La seconde, c'est que les populations amérindiennes, soumises rapidement, sont à la fois massacrées, et surtout, subissent le "choc microbien" qui les décime massivement (des millions de morts au Mexique sur plusieurs années, et une population d'origine qui disparaît presque totalement au cours du XVIème siècle). D'autant que les Indiens sont reconnus comme pouvant recevoir le Christ avec la controverse de Valladolid, ce qui interdit de les réduire en esclavage.
Il se pose donc la question de savoir où trouver de la main d'oeuvre en grand nombre, pour les grandes exploitations qui se construisent alors.
L'Afrique apparaît comme la solution la meilleure, parce que ses populations ne sont pas converties au christianisme d'une part, parce que les Européens en connaissent déjà les côtes d'autre part, et entretiennent des relations "diplomatiques" et commerciales avec un grand nombre de royaumes et des principautés locales (l'esclavage est une donnée économique et sociale tout à fait intégrée à ces régions à cette époque). D'autant que, on le dit trop peu souvent, les filières de l'esclavage sont déjà anciennes et bien implantées en Afrique, les populations se réduisant en esclavage de manière fréquente, comme on pouvait le faire en Europe avant l'ère chrétienne. En définitive, la traite atlantique est la moins importante en volume par rapport aux autres (les traites internes, la traite orientale, vers les pays arabes), et c'est pourtant elle qu'on stigmatise le plus (ça devrait faire réfléchir en théorie...).
En gros, on estime la traite atlantique à 15 000 000 de personnes entre le XVIème et le XIXème siècle. La traite orientale aurait concerné 17 000 000 de personnes entre le VIIème siècle et les années 1920. Les traites internes à l'Afrique auraient concerné 16 000 000 d'individus. Attention : tous ces chiffres sont nécessairement approximatifs, et sont toujours en débat.
Il ne faut pas oublier non plus que les Africains ont été au coeur de l'esclavage et en été des acteurs incontournables. L'historiographie a montré que ce sont les Etats africains qui demeurent les maîtres des termes de l'échange dans le commerce des esclaves, ce qui implique qu'il faut abandonner définitivement l'idée de clients naïfs embobinés par les Européens. Dès le XVème siècle, les Portugais font des échanges économiques avec des Etats qui sont d'un niveau de développement tout à fait équivalent au leur, bien que leur économie ne fonctionne pas selon les mêmes schémas. Il ne faut pas oublier que les ventes d'armes des Européens aux Etats africains portent sur des armes modernes, à forte valeur ajoutée, ce qui suppose un haut niveau de richesse de ces Etats, et aussi une bonne information sur les productions européennes. Il faut aussi savoir que la guerre entre les Etats Africains est un aspect de leur économie, et qu'elle alimente sans cesse les filières de l'esclavage. Les guerres ne sont pas déclenchées ou animées par les Européens, bien qu'ils en profitent pour leurs achats d'esclaves, mais apparaissent aujourd'hui comme un mode de production économique et un mode de régulation interne des formations politiques africaines.
Autrement dit, c'est toute notre vision de l'esclavage, de la colonisation et de l'Afrique qu'il convient de revoir. Il ne faut pas tomber dans le piège de la morale de petite cuisine, et ne pas se condamner à l'anachronisme, qui n'est au fond que le résultat de l'action de groupes de pression qui utilisent l'arme mémorielle et la posture victimaire en concurrence avec d'autres communautés. Le "devoir de mémoire" a des limites, qu'il convient d'établir et de ne pas outrepasser.
NB : je m'appuies largement sur l'article que j'ai cité, puisque je l'ai sous les yeux et que je sais que la plupart n'y ont pas directement accès.
Publié par
Bulbon Criquet
Oui mais au dela de mon avis, je me met à la place d'un noir qui voit Tintin au Congo dans un rayon et qui connaît son histoire...Il doit severement tiré la tronche et je le comprends. Il doit même se dire que les colonies et l'esclavagisme ne sont pas aussi dénoncés que d'autres exactions passées (non je ne pull pas Dieudonné).
La question pour moi est la suivante : admettras- t- il, si toute la lumière est faite, de la regarder en face, et de comprendre que ce sont en partie ses propres ancêtres qui ont été acteurs de ce qu'il affirme être son fardeau actuel ?