Un sujet intéressant, documenté, malgré un titre plutôt discret. Après avoir lu, écouté, et regardé les différents documents proposés, puis avoir ensuite lu les diverses interventions joliennes, je pense la chose suivante ( suspens ... genre ) : M. Nabe subit le revers du style littéraire qu'il a adopté, et de la posture verbale qu'il a choisi, à savoir non pas la provocation, mais plutôt l'agression.
Effectivement, on pourrait dire une chose "banale", comme le deuxième extrait vidéo en parle ( Emission Tapage ), et se situer dans le flot d'actualité, avec quelque chose comme ça ( c'est un exemple ) :
Les anciens colonisateurs, par condescendance, ont admis l'art "nègre" à côté des critères ( sous-entendus supérieurs ) de l'art européen, comme pour s'excuser d'un lourd passé. Les "occidentaux" en sont venus à apprécier l'Afrique, ses habitants, ses traditions culturelles et artistiques, partout et en tout lieu, mais surtout pas chez eux.
Au lieu de ça, et je vous y renvoie, Nabe enchaîne ce qu'on peut qualifier des mots vulgaires, grossiers, dégradants, lourds de sens, chargés d'histoire.
Il veut marquer, voire nous décoller la rétine et violer l'accès de notre pensée, en utilisant les grands moyens. Pas en provoquant, car il ne provoque pas.
Comme quelqu'un l'a dit, il se contente, au fonds, de ressortir des banalités de soi-disant non-conformiste ( ex. : en fait, les gens kiffent Le Pen car au fonds il a un effet de catharsis de toutes nos mauvaises pensées; ou encore le passage sur le faux amour "politiquement" correct des "blancs" pour tout ce qui est "africain" etc. ... ), mais en aiguisant ses mots.
Il veut rentrer une énorme clé de de 25 dans notre cerveau calibré en 12. Bref, effet entonnoir oblige, on s'en prend plein la gueule, et que retient-on ? Et bien les mots ....
Et sur les mots, je trouve que Nabe se plante. En effet, lui qui veut "sacraliser" les mots, lui qui trouve que le poids des mots, la lourdeur de leur sens doit être profondément pesé et soupesé, et bien cela l'amène à l'effet inverse à celui qu'il escomptait obtenir : loin de faire réfléchir, loin de faire pensée, il nous retourne la rétine à grands coups "d'enculés", de "racistes", de "youtres", de "nègres", bref on va pas faire un catalogue, mais il en fait trop.
Et ce trop, c'est qu'une lecture rapide nous fait retenir. D'ailleurs, certaines réactions sur ce fil nous le montre : à le lire trop vite, on ne sélectionne que les insultes et les ignominies, et on se plante.
Mais l'auteur récolte là le fruit de son "extraordinaire" travail littéraire qui, selon certains, pourraient égaler celui d'un Céline ( question de goût, mais Céline est 1000 fois supérieur à Nabe ).
Mais il subsiste un paradoxe. En effet, notre cher Nabe veut redonner le sens aux mots, veut remettre les idées "vraies" et même les plus noires, mais enfouies dans notre inconscient politique, à leur place.
Il veut nous montrer notre propre hypocrisie, notre propre "bien-pensance" pour reprendre le néologisme de Zaffro ( auteur initial de ce sujet ).
Et force est de reconnaître que, malgré le flot d'immondices télévisuelles, de toutes sortes ( morts en direct au JT, films dépravants, série débilissime et bien pensantes, publicité menant au formatage de la consommation et des modes de pensées ), l'écrit, et Nabe nous le démontre, est extrêmement puissant.
Tous ici, même ses partisans, vous avez été choqués, outrés parfois, même si qui "comprennent" le 2nd degré de Nabe, par l'emploi de certains termes.
Nabe nous montre donc à quel point, à notre corps défendant de consommateur du XXème siècle, la puissance du mot est encore réelle, et combien, il vrai, parfois, notre pensée est formatée en long, large, travers.
Enfin, je conclus en revenant sur un fait qui persiste, je trouve, chez Nabe : il balance des banalités pseudo anti-conformistes, recouvertes d'une couche d'agression littéraire propre à faire gerber, à première lecture, n'importe quel amoureux de lecture.
En somme, il nous assomme, et voudrait ensuite nous faire réfléchir.
Miller n'a pas tort dans le fonds avec son histoire de "ligne rouge" ( voir l'extrait Tapages ) : on peut discuter de tout, à fonds, mais avec un tantinet de correction et de savoir-vivre et savoir-dire.
Nabe n'attire au mieux que l'indifférence, au pire la haine pure et simple de ceux qui s'arrêtent aux mots qu'il emploie. Indifférence car même s'il présente des idées au final très convenues ( et parfois même fausses ), son accumulation de mots ignobles ne pousse pas à le prendre réellement au sérieux. Il se fera alors taxer, faussement, de provocateur. La haine car ses oeuvres ne permettent pas une lecture saine et clairvoyante.
|