J'ai un mal fou, le 7 janvier 2010, à faire le bilan d'une décennie terminée depuis une semaine... En tout cas mettons en gras comme ça semble être l'usage dans ce fil.
Pour commencer, je pense que Wes Anderson est l'un des réalisateurs qui m'aura le plus marqué durant cette période. J'avoue avoir été ému aux larmes pendant La Famille Tenenbaum ou La Vie Aquatique. Pourtant, son cinéma avait tout pour me déplaire : faux costumes années 70, couleurs clinquantes à la Sofia Coppola, acteurs sans cesse en décalage (Bill Murray s'en est fait une spécialité), mais voilà : je marche à fond. Sans doute est-ce dû à la tendresse infinie que m'inspire son complice devant et derrière la caméra, l'immense Owen Wilson, qui coécrit ses films et joue dedans avec sa drôle de caboche toute cabossée, mais finalement les sentiments dans ces films sont sincères, vrais, et cette frime visuelle n'est que de la pudeur. Et puis musicalement, il m'a fait (ré)aimer des chansons incroyables, des Kinks à Nico, d'Elliott Smith à des farfelues de Dylan...
Deux acteurs, dans des registres aussi opposés que possible, m'auront marqué : d'abord Mathieu Amalric, dont le charisme fiévreux, la diction hachée mais précise, le regard dément d'intelligence m'ont réconcilié avec le cinéma d'auteur français. Chaque film dans lequel il est présent vaut le coup d'oeil, il n'y a qu'à voir ses rares scènes dans Munich dans lesquelles il pulvérise en quelques phrases tout le casting autour de lui (des rigolos comme Eric Bana, Daniel Craig, Yvan Attal ou Michael Lonsdale, pas moins). Son plus grand rôle de la décennie, incontestablement dans Conte de Noël d'Arnaud Desplechin.
Dans un autre genre, Will Ferrell aura sans doute été mon héros comique de cette décennie. Son regard aux yeux rapprochés, son front bas, son physique de grizzli auraient pu faire craindre un nouvel Adam Sandler, mais ce serait oublier ce sourire incroyable d'ironie, et en même temps rempli d'une humanité incroyable. Il faut voir ces séquences dans Talladega Nights : The Ballad Of Ricky Bobby, dans lesquelles il se couvre du ridicule le plus total et pourtant il suscite une immense compassion. Voilà un vrai génie.
Sinon, j'aurais sans aucun doute été marqué par le travail de producteur de Judd Apatow. Bourré de côtés détestables (son fond finalement très réactionnaire), il a inventé un comique totalement nouveau, fait de vulgarité totalement vraisemblable, d'improvisation brillantissime, et de dilemmes moraux complètement crédibles. Et puis, quel révélateur d'acteurs... Je ne vais pas tous les citer, mais je pense que Seth Rogan est très bien parti pour succéder à Will Ferrell dans mon coeur.
Au niveau des blockbusters, ce fut bien morne. Je retiendrai pourtant trois réalisateurs qui ont réussi ce tour de force : réussir à concilier film à gros budget et expression personnelle. D'abord Peter Jackson, qui a réinventé le cinéma épique avec sa trilogie bien connue, mais qui a surtout exprimé toute sa générosité et son imagination dans le merveilleux King Kong. Ensuite, Guillermo del Toro, dont on ferait bien un pote, qui a réussi l'exploit de faire un Hellboy encore mieux que le comic originel, tout en sortant des films en espagnol tout aussi foudroyants. Et enfin, Alfonso Cuaron, qui a tout simplement pulvérisé le cinéma d'action avec son Children Of Men, mettant la mise en scène en parfaite adéquation avec l'ère Youtube / CNN, ouvrant la voie au cinéma du futur.
Après, j'y réfléchirai, mais il reste beaucoup de noms à citer... Je pense que je ferai un autre message plus tard.
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