[Fiscalité] La fiscalité en France et dans le monde

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Publié par Doudou
Perso, je ne serais pas très serein si je tentais un truc du genre, c'est pas parce que c'est pas prouvable que théoriquement c'est légal non ?
Ce n'est pas dans les règles parce que les règles disent pour résumer que l'on considère que la valeur créée par un échange marchand est liée à un endroit physique (que ce soit pour la TVA ou pour le calcul du chiffre d'affaires). Et cette règle, à l'époque d'Internet, est absurde.

Je vais prendre mon cas personnel : un de mes clients est une boite Marocaine qui opère au Maroc. Je suis allé le voir une fois et depuis je bosse pour lui depuis la Bretagne.
- La valeur que je crée pour lui est entièrement tournée vers le Maroc : sites Marocains, médias Marocains, etc. C'est une valeur que j'injecte par mes actions dans l'économie Marocaine
- La valeur que je crée pour moi est entièrement située en France

En poussant le raisonnement de territorialité à l'absurde, le gouvernement Marocain serait en droit de me demander des impôts sur la valeur créée dans son économie ?
- Non parce que je n'y ai pas de présence physique ou de bureaux ...? Mais j'y fais des affaires pourtant...
- Oui parce que j'y fais des affaires ? Ah mais non parce que je n'ai pas de présence sur place qui permettrait au gouvernement Marocain de me réclamer des impôts ?

C'est absurde. Et cette absurdité a créé une grosse partie des fuites de capitaux des multinationales et des GAFA.
S'en offusquer ne suffit pas. Ne suffit plus.

Citation :
Publié par Bjorn
Si tout le monde bosse en France, est domicilé en France, avec des clients 99% du temps français, un site / un produit en français, et que seule la domiciliation de la boite (et quelques activités annexes genre ton sous traitant hébergeur) sont à l'étranger, c'est facile, c'est de la fraude.
Si tu bosses, produit pour des clients estoniens, des produits internationaux, et que tu viens une fois vendre un prestation réduite à un client français, c'en est pas.
Bravo. Sur une hypothèse absurde tu obtiens une réponse absurde.

Par contre, dès qu'on entre dans la réalité ça devient tout de suite plus compliqué. Je ne sais pas ce que c'est une "prestation réduite", il y a des limites dans le CA ? Dans le nombre de clients ? Il n'y a rien. Rien qui définisse un périmètre de règles acceptables dans ce domaine.

Par définition, si je lance un produit sur Internet, je le lance dans une langue. Pas dans un pays. La source de mes clients est une ventilation de tous ceux qui n'ont pas la barrière de la langue pour accéder à ma proposition de valeur. Dès lors, définir une territorialité du service rendu devient absurde.

@Aedean dans le cas que j'évoque je ne parle pas d'un travailleur indépendant. Je parle d'un travailleur salarié d'une entreprise non implantée en France. Et pour ce qui est de l'autonomie, il est très simple d'installer un serveur mail ailleurs que dans un pays pour démontrer que l'entité nationale n'est pas autonome.
Citation :
Publié par Doudou
Bah justement, ils comment à se prendre des enquêtes et des contrôles pour payer, eux peuvent encaisser sans trop de soucis d'éventuelles redressements fiscaux, voire l'esquiver grâce à du lobbying et une armée d'avocats, mais conseiller ce genre de pratique à une petite structure, c'est bof.
L'administration fiscale est intervenue, mais cela ne signifie pas que son approche sera celle retenue in fine. Entre les deux, il peut y avoir des négociations entre les sociétés et l'administration, il y a les recours hiérarchiques, les commissions de conciliation, et enfin le juge qui peut tout à fait envoyer chier l'administration. L'administration fiscale, c'est l'exécutif, le rôle de l'exécutif c'est de faire appliquer les lois, mais juger la bonne application de la loi relève du pouvoir judiciaire. Pour simplifier, l'administration fiscale a sa propre position mais qui n'est en rien la position "légaliste", et je n'hésiterais pas à la taxer d'ailleurs parfois d'opportuniste.

Une enquête ça veut pas dire grand chose, on peut enquêter sur toi et repartir bredouille car tu n'as rien à te reprocher d'un point de vue légal.

Par ailleurs, tu parles d'"armée" d'avocats (en vrai souvent non parce que les avocats c'est cher), mais quand l'administration fiscale fait une perquisition ou s'attaque à un gros dossier, elle a "une armée" d'inspecteurs fiscaux. La petite PME du coin, t'as le petit inspecteur des impôts du coin qui bite rien aux prix de transfert.

Citation :
Publié par Bjorn
Si tout le monde bosse en France, est domicilé en France, avec des clients 99% du temps français, un site / un produit en français, et que seule la domiciliation de la boite (et quelques activités annexes genre ton sous traitant hébergeur) sont à l'étranger, c'est facile, c'est de la fraude.
Être une femme libérée, tu sais c'est pas si facile.

J'ai mon HQ aux Pays-Bas, en France je n'ai que des "prestataires de vente et de marketing" (et donc un CA basé sur mes coûts et non sur les ventes du Groupe en France), certes tous mes clients en France sont français mais tout le reste est exécuté aux Pays-Bas, site hébergé et alimenté là bas, personnel décisionnaire là bas, contrats conclus avec la société hollandaise, décisions stratégiques, préparation du matériel marketing, gamme de produits, etc. Bref, non c'est pas si facile, et l'OCDE qui a rendu les projets BEPS en 2016 s'y est cassé les dents et a repoussé le traitement des activités par informatique à 2020. Tant que les Etats européens se tireront la bourre et refuseront d'appliquer des règles communes dans l'intérêt de tous, ils récolteront ce qu'ils ont semé : bien sûr madame la France qu'on va venir profiter de votre CIR en mettant des activités de R&D chez vous, par contre la hollande propose une imposition ultra attractive pour les redevances de propriété intellectuelle donc elle sera là-bas, et la Belgique a de très bonnes dispositions fiscales pour tout ce qui est centralisation opérationnelle de logistique et activités similaires, donc on va foutre tout ça là-bas, et puis on aura aussi notre shared services center à Prague parce que pourquoi pas faire du dumping social pendant qu'on y est.

Je bosse pas pour des PME, donc je peux pas vous dire que je sais comment faire un schéma pour juste une petite boîte à 1-10 employés, mais très franchement ça me semble pas délirant de pouvoir monter quelque chose de solide pour ces petites boîtes.

Pour conclure : en Europe on se fait niquer par le reste du monde et on se nique entre nous parce qu'on est trop cons pour faire une Europe fédérale.
Dans la grande majorité des cas et pour simplifier, on peut considérer que l'établissement stable est caractérisé par la présence de personnel et/ou d'actifs permettant de générer du chiffre d'affaires... Ainsi dès lors que l'activité est réelle et physique, les règles actuelles permettent de définir relativement facilement la présence ou non d'un établissement stable.

Dans les conventions fiscales modèles OCDE, l'article 5 sur l'établissement stable est ainsi rédigé :

Citation :
Publié par Convention fiscale franco estonienne
1. Au sens de la présente Convention, l'expression "établissement stable" désigne une installation fixe d'affaires par l'intermédiaire de laquelle une entreprise exerce tout ou partie de son activité.

2. L'expression "établissement stable" comprend notamment :
a) Un siège de direction,
b) Une succursale,
c) Un bureau,
d) Une usine,
e) Un atelier, et
f) Une mine, un puits de pétrole ou de gaz, une carrière ou tout autre lieu d'extraction de ressources naturelles.

3.
a) Un chantier de construction, de montage ou d'installation ne constitue un établissement stable que si sa durée dépasse douze mois ;
b) Toutefois, un chantier de construction, de montage ou d'installation commençant au cours de la période de dix années suivant immédiatement la date de prise d'effet de la Convention ne constitue un établissement stable que si sa durée dépasse six mois. A l'issue de cette période de dix ans, les dispositions du a sont seules applicables.

4. Nonobstant les dispositions précédentes du présent article, on considère qu'il n'y a pas "établissement stable" si :
a) Il est fait usage d'installations aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison de marchandises appartenant à l'entreprise ;
b) Des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de stockage, d'exposition ou de livraison ;
c) Des marchandises appartenant à l'entreprise sont entreposées aux seules fins de transformation par une autre entreprise ;
d) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'acheter des marchandises ou de réunir des informations, pour l'entreprise ;
e) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins d'exercer, pour l'entreprise, toute autre activité de caractère préparatoire ou auxiliaire ;
f) Une installation fixe d'affaires est utilisée aux seules fins de l'exercice cumulé d'activités mentionnées aux alinéas a à e, à condition que l'activité d'ensemble de l'installation fixe d'affaires résultant de ce cumul garde un caractère préparatoire ou auxiliaire.

5. Nonobstant les dispositions des paragraphes 1 et 2, lorsqu'une personne -autre qu'un agent jouissant d'un statut indépendant auquel s'applique le paragraphe 6- agit pour le compte d'une entreprise et dispose dans un Etat contractant de pouvoirs qu'elle y exerce habituellement lui permettant de conclure des contrats au nom de l'entreprise, cette entreprise est considérée comme ayant un établissement stable dans cet Etat pour toutes les activités que cette personne exerce pour l'entreprise, à moins que les activités de cette personne ne soient limitées à celles qui sont mentionnées au paragraphe 4 et qui, si elles étaient exercées par l'intermédiaire d'une installation fixe d'affaires, ne permettraient pas de considérer cette installation comme un établissement stable selon les dispositions de ce paragraphe.

6. Une entreprise n'est pas considérée comme ayant un établissement stable dans un Etat contractant du seul fait qu'elle y exerce son activité par l'entremise d'un courtier, d'un commissionnaire général ou de tout autre agent jouissant d'un statut indépendant, à condition que ces personnes agissent dans le cadre ordinaire de leur activité. Toutefois, lorsque les activités d'un tel agent sont exercées exclusivement ou presque exclusivement pour le compte de cette entreprise, et lorsque les transactions entre cet agent et cette entreprise diffèrent de celles qui auraient été réalisées entre des personnes indépendantes, cet agent n'est pas considéré comme un agent indépendant au sens du présent paragraphe ; mais, dans ce cas, les dispositions du paragraphe 5 s'appliquent.

7. Le fait qu'une société qui est un résident d'un Etat contractant contrôle ou est contrôlée par une société qui est un résident de l'autre Etat contractant ou qui y exerce son activité (que ce soit par l'intermédiaire d'un établissement stable ou non) ne suffit pas, en lui-même, à faire de l'une quelconque de ces sociétés un établissement stable de l'autre.
Le schéma proposé par Jack ne fonctionne que sur des services complètement immatériels :
- redevances de marques, de licences, de brevet, de savoir-faire, etc. ;
- primes d'assurance ;
- intérêts ;
- dividendes ;
- prestations entièrement numériques exercées en totalité depuis l'étranger ou ayant sur le sol français un caractère préparatoire ou auxiliaire.

Les quatre premiers points sont traités par les conventions fiscales au travers de mécanismes de retenue à la source (articles 10, 11 et 12 des conventions fiscales modèles OCDE) qui permettent à l'administration fiscale du payeur (i.e. du client) de prélever sa part d'impôt (parfois le taux de la retenue à la source est nul). Au sein de l'UE, il existe aussi des directives spécifiques qui s'appliquent, donc les conventions fiscales sont applicables uniquement pour les cas non abordés par le droit communautaire.

Le dernier point en revanche est peu en adéquation avec les règles de fiscalité internationale existante parce que l'on est en présence d'une activité qui n'est ni réelle, ni physique. En fait, soit on manque d'éléments juridiques pour appréhender la territorialité de l'impôt, soit on manque de preuve pour appliquer les règles existantes. Donc pour le cas des Amazon, Google et autres qui prestent l'essentiel de leurs services sous forme immatérielle et sans emprise territoriale, les règles aujourd'hui applicables sont peu pertinentes. C'est pourquoi l'OCDE travaille depuis plusieurs années sur la notion d'établissement stable virtuel... c'est l'objet des discussions autour du BEPS (mission sur l'érosion de la base d'imposition et les transferts de bénéfices) dont a parlé Alleria. Le site Internet de l'OCDE est en panne, mais si vous êtes intéressés par le sujet toutes les évolutions envisagées y sont très bien expliquées.


Citation :
Publié par Kaleos - Jack
Ce n'est pas dans les règles parce que les règles disent pour résumer que l'on considère que la valeur créée par un échange marchand est liée à un endroit physique (que ce soit pour la TVA ou pour le calcul du chiffre d'affaires).
C'est beaucoup moins vrai pour la TVA. Globalement, sauf à de très rares exceptions près, la TVA intègre complètement les difficultés nées du caractère immatériel et de l'absence de localisation physique du service.

Encore une fois, la TVA est plus moderne dans son approche que l'IS... et la réglementation sur la TVA évolue plus vite, en grande partie grâce au travail de la Commission européenne qui fait en sorte de garantir une efficacité maximale à cet impôt.

Du coup, j'en profite pour en rajouter sur la conclusion du message d'Alleria :

Citation :
Publié par Alleria Windrunner
Pour conclure : en Europe on se fait niquer par le reste du monde et on se nique entre nous parce qu'on est trop cons pour faire une Europe fédérale.
Tu as d'autant plus raison que l'on voit l'efficacité de l'approche communautaire pour le cas de la TVA par rapport à l'approche bilatérale qui prévaut pour l'IS avec le jeu des conventions fiscales complètement sclérosé et difficile à faire évoluer. Donc un gros +1 à ta conclusion !

Dernière modification par Silgar ; 01/12/2016 à 13h38.
Citation :
Publié par Kaleos - Jack
Bravo. Sur une hypothèse absurde tu obtiens une réponse absurde.
L'interessant c'est ptet ce que t'as pas cité hein.
La vraie vie, j'en parle juste en dessous, justement, la vraie vie, c'est "ca dépend", et un humain pour jauger.
Et c'est bien comme cela, ca évite (un peu) les petits malins qui flirtent sans arret avec les limites.


Citation :
Publié par Alleria Windrunner
J'ai mon HQ aux Pays-Bas, en France je n'ai que des "prestataires de vente et de marketing" (et donc un CA basé sur mes coûts et non sur les ventes du Groupe en France), certes tous mes clients en France sont français mais tout le reste est exécuté aux Pays-Bas, site hébergé et alimenté là bas, personnel décisionnaire là bas, contrats conclus avec la société hollandaise, décisions stratégiques, préparation du matériel marketing, gamme de produits, etc. Bref, non c'est pas si facile, et l'OCDE qui a rendu les projets BEPS en 2016 s'y est cassé les dents et a repoussé le traitement des activités par informatique à 2020.

Donc, tu m'expliques que ton cas n'est pas celui que je décris, et que donc ma conclusion est mauvaise ? Ben non, puisque ton cas n'est pas celui que je décris.
Encore une fois, les deux cas décrits sont de l'ordre du théorique débile, ayant pour unique but de découler sur la vraie vie décrite dessous, ou "ca dépend", "c'est pas si facile", comme tu dis. Et c'est mieux ainsi.
Je dis pas que ta conclusion est mauvaise, je dis qu'on est sur un forum et qu'on va pas créer un schéma d'optimisation fiscale pour une PME juste pour l'exercice de style, et que bien sûr il y a plein de paramètres à prendre en compte et qu'on ne peut pas ultra simplifier le bousin, mais in fine, je pense qu'on peut dire que c'est possible pour une PME de faire de l'optimisation fiscale "comme" les grands groupes. Pas littéralement "comme" et ce à plein d'égards, car les activités sont moins diversifiées, potentiellement moins délocalisables (mais si vous avez entendu parler du rachat de sociétés françaises qui avaient percé sur internet comme priceminister ou la fourchette, bah la France s'est doublement faite niquer non seulement parce qu'elle perd l'activité mais aussi les impôts parce que derrière c'est restructuré), qu'on a pas autant d'argent à y consacrer, etc. Mais globalement, ok le schéma proposé par Kaleos Jack est trop simple pour fonctionner directement comme tel, mais d'un autre côté voilà, le but c'est juste de dire "en théorie c'est possible" (imho).
Citation :
Publié par Bjorn
L'interessant c'est ptet ce que t'as pas cité hein.
La vraie vie, j'en parle juste en dessous, justement, la vraie vie, c'est "ca dépend", et un humain pour jauger.
Et c'est bien comme cela, ca évite (un peu) les petits malins qui flirtent sans arret avec les limites.
Je ne l'ai pas cité parce que ça ne veut rien dire pour moi.

Va dire à un entrepreneur "ok, y a rien dans les règles qui dit que ton business peut être monté comme ça ou pas, donc soit tu le montes là et tu tires à pile ou face pour savoir si t'auras des emmerdes, soit tu le montes ailleurs et tu seras peinard" sa réponse va être : ok, on se voit ailleurs alors.

La politique fiscale ne peut pas être "on ne fait pas de règles et on verra si on a envie de t'aligner ou pas selon notre humeur du jour". Une entreprise ça se prévoit et ça se planifie. Et à choisir entre un environnement social merdique qui sait où il va économiquement et un bon environnement social qui se touche la nouille économiquement selon le sens de la dernière grève en date, faut pas s'étonner que la nouvelle économie fuie la France comme la peste.
Mais la règle elle existe : tu paies là ou tu as ton activité.
C'est vrai, pour le numérique, c'est plus compliqué. Mais ca se jauge.
Je rappelle ton argument : "c'est simple de frauder, suffit de faire ca et t'es dans les règles". Ben non, c'est pas le cas. La possibilité de contrer existe. Après si tu veux débattre sur les règles qui sont pas parfaites, personne dit ca. Personne ne dit non plus que c'est impossible de frauder, ni qu'il est simple de comprendre. Mais "ouvrez une société en estonie et faites toute votre activité en france, c'est NP", ben non.
@Bjorn Non, désolé le double standard ça ne passe pas :
- Soit tu admets que la règle puisse être regardée au cas par cas, dans ce cas là ma position est valide : si ce n'est pas écrit je fais ce que je veux.
- Soit tu admets que la règle doit être souveraine, dans ce cas elle doit couvrir les nouvelles réalités et suivre les évolutions du monde

Personnellement je suis d'une tendance plus légaliste que négociatrice. Si l'économie se développe dans un sens que la loi n'avait pas prévu, il faut amender la loi. Pas négocier des amendements sur un coin de table qui amènent quelques années plus tard à des multis qui font ce qu'elles veulent pendant que les petites boites payent pour tout le monde.
Jack, tu te concentres sur un problème de droit, mais le problème est rarement le droit... le plus souvent c'est la preuve qui manque. La règle deviendrait à proprement parler un problème si l'administration fiscale n'avait pas d'abord un problème de preuve.

La règle, comme l'a écrit Bjorn, elle existe. Certes, elle n'est pas très pertinente pour les services dématérialisés. Certes, elle aboutit souvent à des querelles byzantines entre l'administration et le contribuable. Mais pour l'essentiel, la règle de territorialité existe et elle permet de taxer les revenus... si les preuves sont réunies.

Aussi, s'il est question de créer de nouvelles dispositions juridiques pour régir les problématiques de fiscalité internationale, c'est moins pour déjuger celles existantes (qui sont finalement plutôt pertinentes dans la grande majorité des cas) que pour permettre aux administrations fiscales d'obtenir des preuves plus utiles pour l'application des règles existantes au cas des services immatériels.
Citation :
Publié par Silgar
Aussi, s'il est question de créer de nouvelles dispositions juridiques pour régir les problématiques de fiscalité internationale, c'est moins pour déjuger celles existantes (qui sont finalement plutôt pertinentes dans la grande majorité des cas) que pour permettre aux administrations fiscales d'obtenir des preuves plus utiles pour l'application des règles existantes au cas des services immatériels.
C'est bien ce que je dis (j'aurais sûrement dû dire "faire évoluer" plutôt qu'amender la loi cela étant !). La règle fonctionne tant que l'on est sur des services commerciaux classiques. Dès qu'un intermédiaire web vient s'y coller c'est le bordel. Donc le point central ici est bien de faire évoluer le commerce international pour qu'il intègre le web comme espace extra territorial (d'où la TVA IP par exemple) ou de créer un droit du commerce sur Internet.

L'alternative, c'est de voir secteur après secteur tomber devant l'offensive totalement dérégulée des intermédiaires web, parce que le sujet il n'est pas que le tupperware de Jack (elle est pas assez grosse pour avoir le droit d'être appelée "boite" encore ) soit enregistrée en Estonie ou à Saint Trou les deux églises. Il est qu'aujourd'hui, le lieu de production, le lieu d'exécution, et le lieu de livraison d'un bien ou d'un service n'ont plus rien à voir les uns avec les autres. Et on peut soit exiger que ça change, soit verser une petite larme quand Amazon fout l'intégralité des libraires à terre et commence à s'attaquer aux magasins de fringues.

C'est pas grave après tout, combien d'emploi dans la vente de détail en France ? Et dans la logistique ? Et dans l’hôtellerie ?
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Ocde
Citation :
Publié par Alleria Windrunner
Le BEPS c'est pris au sérieux chez nous. Après la version définitive est pas encore sortie donc on verra, mais si ça passe comme c'est censé passer, ça réglera pas mal de merde.
La version définitive de la "convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices" est signée aujourd'hui à Paris par 70 Etats.
http://www.lemonde.fr/economie/artic...9965_3234.html
https://oecdtv.webtv-solution.com/38..._shifting.html

Beaucoup de questions ont été abordées, notamment :
- Problèmes posés par l'économie numérique
- Problèmes liés aux prix de transfert
- Problèmes nés des pratiques de forum shopping
http://www.oecd.org/fr/fiscalite/beps/actions-beps.htm

Le texte final est celui-ci :
https://www.oecd.org/fr/fiscalite/co...ir-le-BEPS.pdf
Tu me cites sur 2014, c'est vieux ça.

Pour affiner ce que tu dis, il faut distinguer Base Erosion and Profit Shifting (BEPS), rapports publiés par l'Organisation Mondiale pour le Développement Economique (OCDE) en octobre 2015, de ses conséquences. Pour mémoire, BEPS, qu'est ce que c'est :
Citation :
Publié par OCDE
L'érosion de la base d'imposition et le transfert de bénéfices (BEPS) fait référence aux stratégies de planification fiscale qui exploitent les failles et les différences dans les règles fiscales en vue de faire « disparaître » des bénéfices à des fins fiscales ou de les transférer dans des pays ou territoires où l’entreprise n’exerce guère d’activité réelle. Le cadre inclusif rassemble plus de 100 pays et juridictions qui travaillent en collaboration pour mettre en œuvre les mesures BEPS et lutter contre l’érosion de la base fiscale et les transferts de bénéfices.
La convention multilatérale est une conséquence de BEPS. C'est une convention signée entre les Etats qui s'engagent à échanger de manière automatique les informations du Country by Country Reporting (CbCR, ou Obligation de déclaration pays par pays), qui contiendra les principales informations fiscales et opérationnelles sur l'organisation des groupe multinationaux dans chaque pays. Ce CbCR était l'une des mesures recommandées par les projets BEPS, recommandation qui fut suivie par nombre d'Etat dont la France, mais qui n'aurait aucune portée en tant que telle même si chaque pays avait intégré cette recommandation si cette déclaration pays par pays ne pouvait être échangée entre les administrations fiscales.

Or, là, on parle donc justement et heureusement de la Convention qui permettra aux pays d'échanger ces informations. C'est donc désormais chose faite.

D'ailleurs, j'en profite pour debunk une fake news que l'on voit souvent. J'emploie le mot fake news à dessin, car c'est typiquement ce que c'est : on prend un fond de réalité, et on le tire dans tous les sens pour travestir la réalité. Le CbCR n'est pas existant grâce à nos parlementaires français. Néanmoins, ceux-ci voyant le bon filon venir, on décider de monter au front une foi la guerre terminée pour s'offrir quelques minutes de gloire. Après tout, le sujet de l'évasion fiscale est toujours politiquement porteur, et il n'y avait même plus à bosser, juste à copier coller en rajoutant un peu de sauce personnelle, tel un cuisinier MacDo copiant la recette d'un chef 5 étoiles trouvée sur internet et y ajoutant du ketchup, persuadé que cela sublimera le plat. Nos parlementaires proposèrent donc un CbCR public qui aurait concerné uniquement les sociétés françaises (donc pas vraiment country by country, en fait). Un truc fait dans son coin par la France, qui n'aurait concerné (et donc pénalisé, par jeu de concurrence - il est important que tout le monde joue avec les mêmes règles : que tout le monde joue au foot avec ou sans les mains, peu importe, mais si tout le monde a le droit aux mains sauf vous c'est plus compliqué) que les entités françaises. Ceci sans concertation avec nos homologues d'autres pays alors que les prix de transfert n'ont de sens qu'à l'international. C'est vrai que ça aurait été dommage de bouger son cul pour participer aux débats à l'OCDE. Evidemment, ces parlementaires ont fini retoqués, et on a pu voir fleurir nombre d'articles accusant le Conseil Constitutionnel d'être à la solde du grand capital, le gouvernement de n'avoir rien fait, l'opposition d'avoir bloqué un bon projet, etc. Bref, on pouvait accuser qui on voulait.

Ce CbCR public était, à mon sens, un pur coup politique et médiatique, tout comme les élus se ramassent régulièrement les lauriers de ce qu'a mis en place l'Europe, ou l'accusent de leurs échecs personnels. Mais ce n'était rien de plus.

Le CbCR, le vrai, existe donc belle et bien, contrairement à ce qu'ont pu vous faire penser moult articles de presse de caniveau (Figaro, Marianne, l'Express, etc.).
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Redressement fiscal de Google en France
Dans l'affaire opposant Google à l'administration fiscale française, le rapporteur public (un magistrat qui fait office de ministère public) s'est positionné en faveur de Google en estimant que cette entreprise n'avait pas d'établissement stable en France... et donc qu'elle n'était pas assujettie à l'impôt sur les sociétés en France.
http://www.lemonde.fr/police-justice...4_1653578.html
https://www.lesechos.fr/tech-medias/...is-2094420.php

Dans la mesure où les juges des tribunaux administratifs suivent dans plus de 95% des cas la position du rapporteur public, il est à peu près certains que Google échappera au 1,6 milliard d'euros réclamés par le fisc français.
Citation :
Publié par Silgar
Dans l'affaire opposant Google à l'administration fiscale française, le rapporteur public (un magistrat qui fait office de ministère public) s'est positionné en faveur de Google en estimant que cette entreprise n'avait pas d'établissement stable en France... et donc qu'elle n'était pas assujettie à l'impôt sur les sociétés en France.
http://www.lemonde.fr/police-justice...4_1653578.html
https://www.lesechos.fr/tech-medias/...is-2094420.php

Dans la mesure où les juges des tribunaux administratifs suivent dans plus de 95% des cas la position du rapporteur public, il est à peu près certains que Google échappera au 1,6 milliard d'euros réclamés par le fisc français.
Je ne comprends pas bien cette décision au regard de ce qu'il s'est passé avec l'Italie.
Citation :
Publié par Silgar
Dans la mesure où les juges des tribunaux administratifs suivent dans plus de 95% des cas la position du rapporteur public, il est à peu près certains que Google échappera au 1,6 milliard d'euros réclamés par le fisc français.
Pour les gros dossier,les exceptions sont plus nombreuses.
Citation :
Publié par Huychi
Il a reçu combien de google le rapporteur public sur des comptes en panama ?
En fait, comme à chaque fois, les juges (y compris le rapporteur public), ne font qu'appliquer le droit tel qu'il a été rédigé par le gouvernement et voté par les parlementaires. Quand on a ce genre de décisions qui peuvent sembler aberrantes (et préparez vous à voir le défilé des politiques venir ouin ouin), gardez toujours à l'esprit que les juges ne font qu'appliquer le droit. Du coup, demandez vous qui rédige le droit, et qui le vote, et là vous comprendrez qui sont les vrais coupables derrière les larmes de crocodile.
Citation :
Publié par Alleria Windrunner
En fait, comme à chaque fois, les juges (y compris le rapporteur public), ne font qu'appliquer le droit tel qu'il a été rédigé par le gouvernement et voté par les parlementaires. Quand on a ce genre de décisions qui peuvent sembler aberrantes (et préparez vous à voir le défilé des politiques venir ouin ouin), gardez toujours à l'esprit que les juges ne font qu'appliquer le droit.
J'aimerai que ce soit vrai, mais vu le nombre de décisions de cette formation (section 1-chambre 1, avec ce rapporteur public) du Tribunal administratif de Paris que j'ai pu faire annuler en appel, j'ai un peu beaucoup l'impression que ce n'est pas le droit qui les guide. Cela dit, la palme revient à la section 1-chambre 2 (je dois avoir plus de 80% de leurs jugements annulés en appel).

D'ailleurs, je précise que ce rapporteur public n'est pas juriste de formation... et que ça se voit. Dans les affaires dans lesquelles j'ai eu affaire à lui, il a ajouter des critères d'appréciation non prévus par la loi... et le tribunal l'a suivi ! Je ne vois pas plus grande preuve d'incompétence en droit. Tous ces jugements ont été balayés en appel, heureusement.

C'est d'ailleurs le principal problème pour ce corps administratif : rendre la justice lorsque l'on a pour seule légitimité d'avoir "quatre années de services publics effectifs" ou d'être dans les moins bien classés de l'ENA, c'est problématique. Les meilleurs sont vite affectés dans les CAA, reste les moins bons dans les TA. La situation est moins grave que dans les tribunaux de commerce, mais à certains égards elle s'en rapproche.
Citation :
Publié par Alleria Windrunner
Ah ouais ? Je fais peu de contentieux mais j'avais toujours entendu que les jugements de TA étaient confirmés à plus de 90% en CAA, on m'aurait trompé ?
En fiscal, je ne pense pas que l'on soit à ce niveau. En tout cas, dans les audiences de CAA auxquelles j'assiste, le rapporteur public conclue dans nettement moins de 90% des cas au rejet de la requête.

Après, au sein d'un même tribunal, il y a des différences énormes entre les différentes formations. Je fais par exemple rarement appel des jugements des sections 2 et 3 du TA de Paris parce qu'ils me semblent presque toujours fondés en droit ou pertinents sur l'analyse des faits, y compris lorsqu'ils me sont défavorables.
Sujet un peu HS, mais qui va en dire long ...

Le Sénat a voté un amendement PCF visant à faire sauter le "verrou de Bercy" , procédure inique au monde qui n'autorise personne à poursuivre pour le motif de "Fraude Fiscale" si le ministère des Finances n'a pas donné son aval.
Ceci explique pourquoi dans les affaires de fraudes massives et avérées , les parquets sont obligés de poursuivre pour "blanchiment de fraude fiscale" et non pour la fraude en elle même , ce qui est notoirement plus dur à prouver...

Bref , rappelons que la dernière tentative en ce sens n'avait pas fait long feu ; les "saâages" du conseil constitutionnel n'allant quand même pas permettre qu'on poursuive les fraudeurs fiscaux comme les délinquants de bas-étages qu'ils sont. Égalité des citoyens devant l’impôt disent ils ... mais il serait sans doute trop facile et présomptueux de leur rappeler l'égalité des citoyens devant la loi dont elle découle.

Enfin bref, passera , passera pas : la suite dans un prochain numéro.
Message supprimé par son auteur.
Si je devais parier, je parie sur le rejet.

Citation :
Ils auraient dû remettre à plat la fiscalité locale et immobilière. Mais bon, je pense que le but est surtout de faire écran de fumée face aux cadeaux fiscaux des riches.
Quand tu annonces aux communes qu'ells vont perdre 20% voire plus pour certaine de leur rentrer d'argent forcément ça passe mal, surtout quand Paris prétend que la perte sera compensé. Y a plus d'un maire qui doit se marrer devant cette promesse.

Sinon clairement c'est pas supprimé qu'il fallait mais réformer. Et je suis d'accord avec toi c'est un écran de fumer pour cacher le cadeau qui est fait par ailleurs. Mais plus grave encore et au risque de me répéter, ça renforce cette petite musique ambiante de l'idée que tout impôts est injuste, donc ça accroît la défiance envers toute forme d'imposition.

Et clairement maintenir la Taxe d'habitation au 20% les plus aisés, ne va faire qu'aggraver cette situation, malgré tous les cadeaux qui pourraient être fait par ailleurs à ces 20%.
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