Un détail qui me semble avoir son importance, et qui donne tout son sens à la logique des concours, et au "prestige" de l'Agrégation : la maîtrise de la discipline est éminemment pédagogique. C'est elle qui permet justement d'intéresser les élèves, quand ils voient quelqu'un qui aime sa matière, qui la maîtrise, qui a des anecdotes amusantes pour sortir du simple cours pour mieux y retourner, et qui a les cartouches pour répondre à leurs interrogations tout en les renvoyant à un peu de curiosité et à des liens actualisés pour eux (livres, internet, films, musique, vêtements...). Sur la société industrielle par exemple, je fais de l'histoire du vêtement, du chapeau et de la moustache, du tabac et de l'alimentation, de l'histoire de la décoration et de l'ameublement (en gros, ce que Daniel Roche pourrait appeler "la culture des apparences", pour faire un raccourci simple). Oh, pas à "haut niveau", mais à un niveau suffisant pour que les élèves se sentent interpellés et trouvent ça amusant, tout en leur proposant un cours qui leur donne un vrai contenu disciplinaire et qui tournent autour de vraies problématiques historiques, tout en leur parlant de leur environnement quotidien (ce qui les aide à comprendre le passé au regard du présent, par exemple). Ils adorent. Et en plus, on peut appliquer ça à de nombreux sujets, et surtout, surtout, ça rend l'histoire "vivante", charnelle, et ça aide à penser que cette discipline n'est pas qu'un résumé de "par coeur", ou une succession d'exercices et d'activités, dont ils se foutent souverainement. On a du mal à imaginer à quel point le pédagogisme et le spontanéisme ont ravagé notre école. Pour l'élève, le maître reste "celui qui sait", et il doit le démontrer à chaque occasion, pas pour faire le "cake", mais bien parce que c'est l'assise sur laquelle toute bonne pédagogie doit se penser. Le respect de l'élève pour son prof passe par le savoir, de même que le respect du prof pour ses élèves : pas uniquement, loin de là, mais aussi par là, et un prof qui donne l'impression de ne pas aimer être en classe, de ne pas maîtriser sa matière, et de ne rien avoir à apporter aux élèves ne sera jamais respecté par eux.
Je précise que je n'ai pas l'ombre d'un doute sur ce que je viens d'écrire, et que ça vient vraiment de la pratique quotidienne. Et je pense que l'immense majorité des gens qui sont en classe le savent très bien. Ca n'a rien d'une posture idéologique ou politique. C'est juste un simple constat.
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