Autre exemple (vous allez dire que je prends toujours les même, je prends ceux que je connais pour ne pas extrapoler) on parle depuis un an de "Big data" qui est un barbarisme pour évoquer l'interconnexion de toutes les données qu'une entreprise a au sujet d'un client et dont le but premier est de savoir que M. O'Bannon qui se renseigne pour un produit dans un magasin a déjà acheté les produits X et Y et qu'on devrait donc l'orienter vers Z... Cette compétence là, c'est croiser des séries de données et faire des algorithmes... Autrement dit c'est le job d'un statisticien ! Vous pensez qu'on voit beaucoup de statisticiens qui essaient d'apprendre ces compétences là ? Ou même que les écoles de la filière ont intégré cette nouvelle donnée ? Non.
Je rebondis particulièrement sur ce point parce que je conseille actuellement un grand groupe qui est en train de faire cette transition. Le problème c'est clairement pas les statisticiens. Eux sont généralement conscients de l'évolution des besoins et des pratiques, et bon an mal acceptent de développer de nouvelles compétences. Les freins à ce changement viennent plutôt :
- de la direction qui évalue mal ou tardivement l'impact d'un nouveau paradigme, surtout quand le business est plutôt florissant actuellement. Ils ont mis du temps à comprendre que d'ici cinq ans, Google, Facebook et Orange pourraient leur voler leur carnet de commande
- des techs / agents de maîtrise, qui voient effectivement le changement comme une mise en danger de l'utilité de leur poste (à raison en l'occurence), et qui préfèrent faire l'autruche plutôt que de se préparer. Et l'exemple des stats est bien trouvé : les tâches d'exécution dans le domaine peuvent se baser sur des méthodes et outils qui n'ont pas changé depuis 30 ans !
Bref, je ne dis pas que ton diagnostic sur la flexibilité est faux, mais je pense que tu oublies au moins un facteur important : cette capacité au changement est directement proportionnelle au niveau d'études, et ça rejoint le reste : plus ton niveau d'études est élevé, plus tu as de chances de retrouver un job, plus il est facile de se lancer dans la création d'entreprise, plus tu as un filet de sécurité si ça merde (en moyenne bien sûr), etc.
Sinon, pour les formations, tu as raison, mais c'est pas nouveau. Ne serait-ce que pour des raisons administratives, la création d'un master sur une nouvelle techno, ça prend généralement 2-3 ans , et encore faut-il que des enseignants à l'université aient conscience du besoin et se battent pour le mettre en place. Et honnêtement, sur ce point là, ça va plutôt mieux qu'il y a quinze ans même s'il y a encore de grosses lacunes; particulièrement pour le big data, d'une part parce que les évolutions s'accélèrent et qu'on travaille aujourd'hui avec des technologies qui ne sont pas encore mâtures et qui sont en flux permanent; d'autre part parce que ça a tendance à faire émerger de nouveaux métiers plus hybrides, alors que dans la décennie précédente la tendance était plutôt à la spécialisation à outrance.