Souille

 
 
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Dans les yeux d'une ombre


Mon corps relâche son âme, qui flotte, un court instant, incertaine, avant de heurter violemment la pierre à laquelle elle s'était liée.

Un genou sur le sol, je prends appui pour me relever, mais ma tête vacille encore. En baissant les yeux, je m'aperçois de l'état lamentable de ma Garde de Bravoure. Le sang et la sueur se sont colmatés pour former de larges croûtes craquelées sur les flancs. L'eau glacée et limoneuse qui croupit sous les ponts en a usé les coutures, et le cuir dégage une vague odeur de moisissure.

Je titube un peu en m'approchant du hâteur. Je sens les regards des guerriers sur moi. Dragons Celestes, Phoenix Souls, Ethernalys.... ce n'est pas le moment de trébucher. Je regrette presque en cet instant de ne pas arborer les couleurs d'Epopée. Mes gestes se veulent calmes et sûrs d'eux lorsque je demande la téléportation pour Dun Crauchon.

La matérialisation est douloureuse. Je suis encore rentrée dans un druide-esclave semi-comateux installé au beau milieu du fort. A qui est-il, celui-là? Il pourrait au moins éviter de le laisser traîner n'importe où. A côté de moi, d'autres furtifs reçoivent sagement leurs sorts d'amélioration. Je me fais petite et pousse la porte de Crauchon. Je fouille mes poches en courant et en extrais un vieux ticket pour Caer Benowcyk. Confiante, je le refourgue au Capitaine d'Emain Macha, non sans m'être fait dépasser deux ou trois fois par quelques malotrus peu soucieux de ma petite silhouette furtive. Enfin, je me hisse à bord. Advienne que pourra, et puisse le vent m'être favorable, cette fois.

Le soleil se couche et je m'enroule dans mon manteau d'Ombre Brumeuse. L'air frais du large me griffe le visage et je ferme les yeux.
Lien direct vers le message - Vieux 19/02/2006, 13h49
L'eau glacée me happe alors que ma fragile embarcation me laisse tomber, à quelques mètres du pont albionais le plus proche. Je prends une grande respiration et plonge. Une fois immergée, je fouille frénétiquement mes poches à la recherche de la potion de Néréide que Thaanac, mon compagnon, a confectionnée pour moi. Du bout des lèvres, j'aspire une gorgée du liquide au goût saumâtre et je sens mes poumons se compresser. Vite, il me faut regagner ma furtivité... Certains Sarrasins ont la mauvaise habitude de surprendre les Hiberniens au débarquement du bateau, et je n'ai pas envie de retourner aussi vite d'où je viens. Avec de longues brasses, je gagne la berge. Je pose un pied hésitant sur le sol, prenant garde à ce que l'herbe humide mêlée de boue ne prenne pas la trace de mes pas. Je retiens mon souffle et je fais lentement face au pont.

Apparemment, je suis seule. Devant moi se dresse la silhouette massive de Caer Benowyck. Quelques patrouilles de gardes me dissuadent de trop m'en approcher. A côté de moi, le pont menant à l'embarcadère albionais semble me tendre les bras. Ses pierres humides et ses hautes piles m'attirent... Si je parviens à m'y établir, mes lames goûteront encore au sang albionais. A cette pensée, un léger sourire me chatouille les coins des lèvres. Sur mon pont, je ne crains personne... ou presque. Mais suis-je vraiment la seule à le convoiter? N'y aurait-il pas déjà de redoutables combattants de l'ombre tapis dans les recoins de pierre froide?

La brume descend lentement vers la terre et je prends cette opacité temporaire comme un signe d'encouragement. J'inspire longuement l'air humide et je me dirige d'un pas peu assuré vers le milieu du pont.

Je l'ai vu bien avant qu'il ne me voie. Un Sarrasin, l'arc à la main, a déjà fait de ce terrain le sien. Mon coeur s'accélère et ma Dague du Traître tremble de faim. Plus court sera le combat, mieux ce sera pour moi. Je m'approche de lui le plus vite possible, jusqu'à sentir son souffle sur mon visage, et je vise sa gorge.

Raté, il s'est rejeté à temps sur le côté. Je suis face à lui, armes dégainées alors qu'il a tiré les siennes. Je le frappe rapidement, deux fois, afin que mes poisons pénètrent ses veines. Dans mon empressement, j'ai pris un coup et les flammes qui jaillissent de l'arme de mon adversaire ne présagent rien de bon pour la blessure qu'il m'a infligée. Le cuir de ma manche droite a brûlé et la chair de mon bras me cuit. Il frappe trop vite, il frappe trop fort, je ne peux pas rester en face. Il faut que je me presse. Je jette des caltrops empoisonnés sous ses pieds et lui arrache un cri de douleur. Je prends la fuite, sentant un Zéphyr partir en sifflant dans mon dos. Je l'ai échappé belle. Je connais bien les réactions de mes adversaires dans ces cas-là: sûrs d'eux, ils poursuivent sans se préoccuper du venin qui suce leur vie. En courant, j'ai le temps de sortir un tonnelet de ma poche. Bénissant Thaanac une fois de plus, j'avale une gorgée du liquide revigorant. Derrière moi, le Sarrasin a perdu des forces, et il est temps de faire face à nouveau.Je sors de mon sac une faucille porteuse de poison infectieux et lui donne un nouveau coup. La substance se mêle à son sang, empêchant l'albionais de se soigner efficacement. Il va me falloir l'achever... J'empoigne ma Batailleuse et lui demande à mi-voix de me protéger en affaiblissant les défenses adverses, ce qu'elle fait sur le champ. Mes lames dansent, le sang coule et il s'écroule.

L'un après l'autre, ses sorts d'amélioration s'évaporent et retournent à son clerc domestique. Je m'incline et regagne les ombres. Il va me falloir un peu de repos. Peu importe: à présent, le pont est à moi.
Lien direct vers le message - Vieux 19/02/2006, 13h50
J'aime beaucoup le nom et l'avatar, ça m'a donné envie de lire le texte en question, et je n'ai pas regretté.

Vraiment très agréable à lire, dommage que si peu de monde passe dans -ou s'intéresse à- cette partie du forum
Lien direct vers le message - Vieux 05/07/2006, 02h57
Citation :
Publié par Kouick / Courage
J'aime beaucoup le nom et l'avatar, ça m'a donné envie de lire le texte en question, et je n'ai pas regretté.

Vraiment très agréable à lire, dommage que si peu de monde passe dans -ou s'intéresse à- cette partie du forum

c'est une des raisons pour lesquelles je passe sur cette partie du forum, si ce n'est la principale, les écrits de Turpitude.

en espérant qu'il y ai bientôt une suite
Lien direct vers le message - Vieux 19/08/2006, 22h57
 

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