Je me permets quelques petits conseils, qui valent ce qu'ils valent - c'est-à-dire pas grand chose.
Ton sujet ne traite pas uniquement de l'Histoire, prend garde à ne pas limiter ton analyse à l'Histoire, entrevois aussi la temporalité subjective.
Un peu de Saint Augustin :
- Le passé, c'est ce qui n'est plus, donc n'est pas.
- Le futur est ce qui n'est pas encore, donc n'est pas.
- Seul le présent est le mode effectif du réel ; être et présent, c'est la même chose.
Prenons la métaphore du fleuve pour caractériser le temps (Bergson m'insulterait, passons) : hier la neige fondit, aujourd'hui l'eau est devant moi, demain elle sera à l'estuaire.
Pour que mon jugement passé soit valable, il lui faut implicitement inclure une présence de la conscience : si ma conscience avait été présente à la fonte des glaces, j'aurais pu dire "la glace fond et alimente le fleuve" ; je ne peux pas, mais je fais comme si aujourd'hui.
De même, demain je ne serai pas à l'estuaire, mais je fais comme si.
Mais qui me dit que le fleuve ne se tarira pas d'ici là ? Le futur est la totalité des possibles contenus en germe dans le présent ; un jugement au futur a toujours quelque chose d'hypothétique, au sens où il présuppose des hypothèses.
Cette présence nécessaire de la conscience dans le passé invite à repenser le passé personnel autant que l'histoire. Si c'est ma présence telle qu'elle est maintenant qui pose un jugement, la vision du passé est altérée selon mon état de conscience présent. C'est le présent qui donne sens au passé, et non l'inverse.
Sartre powa avec son exemple de la crise mystique : une fille de quinze ans a une "crise mystique", des écailles de grenouille de bénitier commencent à lui pousser ; mais si deux jours plus tard, la crise s'abolit, elle n'aura été qu'un accident ; si au contraire la crise se perpétue et que la jeune fille rentre dans les ordres, alors elle sera déterminante, essentielle à la constitution de cette jeune fille.
Extrapoler cela à l'Histoire : la conscience de l'historien est limitée à ses outils (témoignages écrits, oraux, documents écrits ou matériels, etc.).
Si l'on dit qu'il faut retenir des leçons du passé, ce n'est pas pour la décoration, c'est bel et bien pour féconder notre présent, donc la totalité des possibles qu'il incarne, c'est-à-dire le futur. On ne bute jamais contre le présent, au contraire, puisqu'il comporte tous les possibles, il ouvre sur le futur, il se dérobe incessamment sous nos pieds, et la conscience se projette perpétuellement vers le futur. L'homme est projet nous dit Jean-Paul (Sartre, pas le romantique allemand).
Il peut être intéressant de penser au passage le rapport de la conscience à l'Histoire, comment la conscience - dont le mode de conjugaison est le "je" - peut passer au "nous" de l'Histoire. Mais je ne cache pas que le problème est particulièrement épineux et complexe.
Important aussi, m'est avis : porter tout son passé sur ses épaules peut être un frein à l'action ; le poids du passé, c'est la tempête sous un crâne décrite par V.H. "Toute action présuppose l'oubli" nous dit Nietzsche ; à creuser.