Publié par Ariendell
. Au 1er siècle, je suis désolée, mais hem les romains sont très loin de croire en l'existence de leurs dieux :/
Quand je lis ça, honnêtement, je pouffe; non pas parceque ce que tu dis est objectivement faux (j'y viens), mais bien parceque tu ne te donnes même pas la peine de justifier un peu ce que tu avances;
Je soutiens qu'au Ier siècle, la pietas caractérise encore la vie romaine, qu'elle accompagne toutes les étapes de la vie d'un Romain, qu'elle est l'enjeu de nombreux rites, festivités, tout en se présentant comme la garante de valeurs fondamentales pour la solidité du tout.
Et si j'avance cela, c'est parceque je m'appuie sur des textes:
Tibulle,
Elégie, Livre I (dans les trente premiers vers, j'ai pas eu a chercher loin), sous Auguste, donc au début de l'Empire:
Blonde Cérès ! que les épis de nos moissons forment des couronnes que je suspendrai au parvis de ton temple ! que l’image du Dieu des jardins soit placée dans mes vergers ! que la faux menaçante de Priape en écarte les oiseaux ! Et vous, mes Lares ! jadis protecteurs de mes riches domaines, et maintenant gardiens de leurs débris ! Autrefois une génisse était le tribut que je vous payais pour mes innombrables troupeaux ; maintenant un faible agneau est la riche victime que vous offre un Tibulle indigent
Stace (50 ap JC)
Thébaide Livre I
Dans son doute, une dernière pensée lui sourit, c'est de faire parler les prêtres inspirés, et d'apprendre ainsi la volonté des dieux.
C'est un travail à peu près infini, et fastidieux en fait; mais si tu veux t'y livrer, tu verras à quel point le culte des dieux, et la pietas dans son ensemble sont des facteurs déterminants de la vie romaine sous l'Empire.
Encore une fois, le christianisme s'impose facilement parceque l'esprit latin tombe peu à peu en desuétude; je continue de penser qu"à une époque que je situerais sous les derniers Antonins, c'est à dire Marc Aurèle et Commode-et peut être même dès Hadrien, il n'y a qu'a voir à quel point cet Empereur était peu "latin", en plus d'avoir été initié à des religions considérées comme Barbare (culte de Mithra), il y a en effet une sorte de déliquescence progressive de la romanité, un moment rare où l'on se desinteresse des valeurs, qui, en disparaissant, emportent tout l'édifice dans leur chute (cela correspond d'ailleurs au moment où les lettres latines sont écrites en Grèce par des Grecs); sur cette base d'un délayement des valeurs, auquel s'ajoute la baisse progressive de la puissance romaine dans son Empire, le christianisme a pu construire son message, et se présenter comme une nécessité avant le naufrage.
Mais ce moment ne correspond pas au début de l'Empire, et dire que le passage de la République à l'Empire correspond à une perte de la pietas romaine, c'est une faute grossière.
EDIT: (pour l'EDIT d'en dessous sur Mithra: je suis influencé par l'analyse que fait Marguerite Yourcenar dans les Mémoires d'Hadrien en fait; l'assimilation de cultes étrangers est une base du panthéon romain qui est un panthéon exceptionnellement mobile; il assimile énormément sans pour autant mettre en jeu sa cohérence (je pense notamment au mythe d'Isis qui constitue un apport majeur de la religion egyptienne à la religion romaine, et qui apparait clairement dans Apulée; ce qu'il y a de particuliers avec la facon dont Hadrien pratique le culte de Mithra c'est qu'il le fait en dehors de toute "romanité", c'est à dire en se livrant sciemment à un mystère étranger qu'il ne cherche pas à relier aux valeurs romaines; pour ca je te renvoie au livre de Yourcenar encore une fois, n'ayant pas la prétention de restituer ici tout ce qu'elle met en évidence)