[Ex-Libar Edition 29] Voyage de nuit - les textes

Affichage des résultats du sondage: Pour quel texte votez-vous ?
Texte n°1 5 16,67%
Texte n°2 7 23,33%
Texte n°3 1 3,33%
Texte n°4 0 0%
Texte n°5 0 0%
Texte n°6 1 3,33%
Texte n°7 6 20,00%
Texte n°8 1 3,33%
Texte n°9 2 6,67%
Texte n°10 0 0%
Texte n°11 7 23,33%
Votants: 30. Vous ne pouvez pas participer à ce sondage.

Répondre
Partager Rechercher
Voici donc la moisson, par ordre de première réception.

Je précise à toutes fins utiles que les sujets abordés peuvent parfois heurter la sensibilité du jeune public, comme dirait un créa faux-cul.
En clair, certains voire tous ces textes demanderont des efforts au lecteur, et des commentaires au moins au même niveau de maturité.

Place aux perles de nuit :

Citation :
Publié par Texte n°1

Vingt deux heures, la nuit est tombée sans crier gare, rappelant qu’il sera bientôt l’heure de s’en aller. Et tous ces moments passés, souvenirs heureux d’un voyage au cœur de la capitale en sa compagnie. Le train fait son entrée sur les quais, nous ramenant à la réalité, que l’on a que trop bien oublié durant ces quelques jours.

Dernière vérification, ne rien avoir oublié de plus que ce qui est encore à son domicile. Quelques mots, et c’est le train qui est sur le point de partir, il va bien falloir se décider. Un dernier baiser, coupé par le sifflet d’un contrôleur trop zélé, et les portes se referment, ne laissant à ces derniers instants qu’un goût amer de trop peu. Se dire que l’on aurait dû oublier ce train, faire un dernier signe de la main à travers le hublot, et la voir disparaître au loin au fur et à mesure que le train s’en va en silence. Morne voyage qui s’annonce, malgré les mots doux par téléphone interposé. S’ensuit un passage au wagon restaurant, pour acheter une boisson trois fois trop chère, et pester sur les tarifs, permettant d’oublier quelques instants ce brutal retour à la réalité.

La nuit est noire, aucun nuage ne laisse filtrer les étoiles. Et l’averse qui finit par s’inviter à son tour, le fracas des gouttes retentissant en une douce mélodie, aux accents mélancoliques. Triste requiem interrompu une fois encore par un contrôleur, faisant étant de notre légitimité à bord. Un bonjour sec, et une main tendue, attendant de recevoir ce fichu ticket. Une fois celui-ci contenté, un simple et nonchalant au revoir mettra fin à notre échange. Et les souvenirs de ces derniers jours qui resurgissent, ces moments simplement ensembles, que ce soit dans le célèbre parc de Marne-la-Vallée, ou au coin du feu de la cheminée de sa maison. Des lits pleins d’odeurs légères, encore ancrées dans ces souvenirs.

Le paysage défile, sans véritable changement, faute à une nuit toujours trop noire, et aux fenêtres abondamment arrosées par une pluie battante. Le temps passe, le retour à une vie monotone et programmée se fait oppressant. Et ce regret de ne pas avoir laissé la moderne locomotive s’en aller seule voilà de ça une heure. Voix suave et internationale dans le haut parleur, l’arrivée en gare est proche. Cohue générale qui sortira le premier, sauf pour ceux pas encore décidés. Léger sifflement entêtant des freins, et c’est la porte qui s’ouvre, sur un ciel bien trop couvert pour la région. Chacun y va de sa démarche maladroite pour descendre, il suffira de suivre le mouvement.

Regrets, il ne fallait pas prendre ce train. Erreur facilement réparable, il suffira d’attendre quelques heures pour un train de retour. Le temps de se reposer quelques heures. Déjà l’heure du retour, au diable ce foutu boulot, il ne sera pas compliqué d’en retrouver un plus intéressant. Visite courtoise du contrôleur après le démarrage du train, et le soleil levant qui invite à regarder par la fenêtre. Les nuages finissent par laisser entrevoir un soir fait de rose et de bleu mystique, puis un éclair unique, comme un long sanglot chargé d’adieu. Accidenté malheureux d’avoir voulu changer un destin sans enjeux.

Citation :
Publié par Texte n°2

Le Soleil se lève derrière les collines. J'ai froid aux poignets.

Il y a mille nuits, maman se mariait. Cotillons, champagne, piste de danse et pièce montée. Sa main qui caressait mon cou était paternelle et protectrice. Je la refusai en mémoire de papa.

Il y a huit cents nuits, j'acceptai les marques d'affection. Contact, chaleur et proximité. Papa était mort. A quoi bon refuser ce père de substitution ?

Il y a six cents nuits, mon intimité fut réduite. Surprise, gêne et pudeur. Je me couvris rapidement d'une serviette de bain. Il sourit, amusé par ma précipitation. Je m'excusai et lui souris en retour.

Il y a cinq cents nuits, mon intimité fut détruite. Contact, chaleur et proximité. Mensonge et manipulation. Il ne m'avait pas connue petite. Il fallait qu'il rattrape le temps perdu. J'avais besoin d'un père. Je ne savais pas quoi faire. Le choix du silence ne fut pas le bon.

Il y a trois cents nuits, ses mains restèrent à distance. Surprise, gêne et stupeur. Douleur et honte. Maman trouva mes draps tâchés de sang au petit matin. Maman m'expliqua. Mon corps changeait. C'était normal. Tout était normal. Quoi de plus normal ?

Il y a cent nuits, je croisai maman dans le couloir. Je lui parlai. Colère, déni et autorité. Mensonge et manipulation ? J'étais seule, je l'appris alors. Ca n'était pas normal. Rien n'était normal.

Il y a vingt nuits, j'eus une idée. Lumière, anticipation et espoir. Douleur et honte ? Je l'ignorai en mémoire de papa. Il ne m'avait pas élevée comme ça. Il fallait trouver une autre solution.

Il y a dix nuits, j'essayai de me soustraire à l'autorité paternelle. Colère, déni et autorité. Contact, chaleur et violence. Maman nous surprit. Mensonge et manipulation. Maman retourna se coucher. Solitude et désespoir. Maman ne m'aiderait pas.

La nuit dernière, je pris ma décision. Lumière, anticipation et espoir. Contact, proximité et violence. Il me l'a appris, comme il m'a appris à me taire. Il m'avait montré la voie. Obéissance, soumission et acceptation. Il le faisait pour mon bien. Je le ferais pour mon bien.

Cette nuit, ma main se serra sur la lampe de chevet. Réflexe, violence et libération. Douleur et stupéfaction. Une nouvelle fois, sa chaleur corporelle se répandit sur moi. Une dernière fois. Sa tête sur mon cou. Paternelle et protectrice ? Ses yeux révulsés ne montraient aucun regret. Ni regret, ni remord. Ni pour lui, ni pour moi. Je fermai les yeux. Je ne voyais plus rien. Je ressentais seulement. Papa, pardonne-moi.

Tout à l'heure, maman nous découvrit. Colère, déni et autorité. Douleur et stupéfaction. Elle trouva mes draps tâchés du sang d'un autre. Je lui expliquai. Mon esprit changeait. C'était normal. Tout était normal.

J'espère que maman comprendra. Si elle m'aimait, elle n'aurait pas dû détourner le regard. Si elle l'aimait, elle n'aurait pas dû fermer les yeux. J'espère que maman se souviendra que je l'aime.

Le Soleil se lève derrière les collines. J'ai froid aux poignets. Un rayon de lumière se réfléchit sur les menottes et m'éblouit. Le gendarme sourit devant ma grimace, paternel et protecteur. Il est temps d'y aller. Il tend sa main pour me tenir l'épaule et stoppe son mouvement au dernier moment. Je lui souris pour le remercier.

Les apparences sont trompeuses. Aujourd'hui, je suis libre. Cotillons, champagne, panier à salade et projets d'avenir.

Citation :
Publié par Texte n°3 - "Police de nuit"

Le vent fouette mon visage tandis que la lune, pleine et ronde, éclaire les cieux.
Je contemple une nouvelle fois la Ville-Lumière.
Vu des toits tout est si futile.

Je souris à cette évocation.
Le jour, peut-être, Paris correspond à son surnom.
Les blanches façades, les beaux quartiers lumineux, les uniformes propres et repassés des défenseurs du peuple.
Mais la nuit ?


J'étais si fier en arrivant dans cette ville. La ville où tout avait lieu, la pièce principale de tout ce qui était.
Jeune policier elle représentait la concentration de tous les services les plus prestigieux.
Tous les ténors de ma fonction étaient passés par cette ville. C'est ici qu'on pouvait, selon moi, trouver la fine fleur des forces de l'ordre et, bien entendu, immuable alter ego, l'élite du banditisme et du crime.
J'étais là pour changer le monde.
Porteur des espoirs et des attentes de mes formateurs, futur policier d'élite promis à un avenir glorieux, major de ma promotion, destiné aux meilleurs services d'investigations, voilà qui j'étais.
J'avais choisi de travailler au fameux 36. Et j'avais rejoins les groupes de nuit.
Forcément.
C'est la nuit que le Crime opère.

J'ai ainsi connu l'envers du décor, le pendant du lumineux.
Des venelles sordides, des impasses glauques, des passages inquiétants et mal famés.
Un parvis célèbre. Notre-Dame qui trône sur une place envahie par les rats.
Un bout de ruelle où des prostituées venaient tapiner rapidement avec le client du moment, un gars de passage. Et sans aucune assurance, l'un comme pour l'autre, d'une hygiène quelconque.
Des trottoirs jonchés de gens, plus ou moins jeunes, toute catégories sociales confondues, ivres morts, dormant dans leur urine ou leur vomi pour les plus malchanceux, comme attendant qu'on vienne les dépouiller durant la nuit. Ce qui arrivait fréquemment.
Des bancs et des squares où les plus démunis, les oubliés de la société, espèrent dormir encore une nuit de plus. Eux à qui, le jour, personne ne jette un regard.
Des jouets en puissance pour des abrutis alcoolisés qui veulent se sentir forts en fracassant plus faible, plus malheureux qu'eux.
En hiver ces squares sont de véritables cimetières où on ramasse des cadavres raidis.
Des ateliers clandestins, des taudis vétustes, des embranchements de caves et d'égouts. On y fait travailler des immigrés sans papiers afin qu'ils alimentent les marchés du textile, et bien d'autres, de leurs produits à coûts dérisoires. Entassés, confinés, esclaves des temps modernes.
Des impasses où on retrouve des toxicos, entre la vie et la mort, ravagés par leur dernier shoot. Emaciés, squelettiques, comme rescapés d'un Dachau ou Auschwitz, la seringue encore dans le bras. Seringue non stérilisée bien entendu, afin que les maladies se propagent mieux.
Des recoins obscurs où l'ont retrouve parfois une femme, vêtements déchirées, en larme et en sang. Si elle n'est pas morte. C'est ici qu'elle se sera faite violée, trop alcoolisée ou bien trop droguée pour qu'elle puisse encore résister.
La Ville-Lumière.
La ville du vice, de la violence.
La ville de la corruption aussi.
On arrête pas un criminel comme ça. On en trouve pas sur le pas de sa porte le matin.
Il faut collecter du renseignement, recouper des informations.
Il faut des informateurs.
Un prêté pour un rendu.
Ferme les yeux pour cette fois et je te dis qui a fait ça.
Je suis passé dans ces bordels. J'ai vu, sans les voir, les prostituées, le visage et le corps marqués. J'ai vu, sans les voir, ces corps avachis dans la luxure et la drogue. Cette drogue qui les asservit, les rend dociles et qui les empêche de vouloir s'enfuir.
J'ai visité ces ateliers. J'ai vu, sans les voir, tout ces immigrants, mal nourris, non payés, dont on avait confisqué les papiers pour qu'ils n'osent pas s'enfuir. Et puis il aurait fallu qu'ils puissent enlever les chaînes ou forcer les portes de leurs prisons.
J'ai vu, je suis passé. J'ai pris mes infos. Des criminels vont tomber.
Mais pas ceux-ci.
Et cette arme qui a tué ce gosse, lors du règlement de comptes entre bandes rivales ? J'avais trop besoin du vendeur qui me contacte lorsque des types demandent du matos spécialisé en vue des gros coups.
Ca fait un bon braquage dont on aura les auteurs. Un bon coup de pub. C'est une bonne chose pour la carrière.
J'ai arpenté ces pavés souillés, des nuits durant, sous une lune toujours changeante.
J'ai vu la misère humaine.
J'ai vu les exactions, celles dont le pékin moyen pense qu'elles ne peuvent avoir lieu que dans un lointain pays arriéré, africain de préférence. On aime pas le noir dans le Pays des Droits de l'Homme.
J'ai vu la lie du peuple, qui se complaît dans la fange et la débauche, sous les étoiles.
Et, quand le jour revient, on se dépêche de nettoyer les rues. On passe à grand renfort de karcher et de jets d'eau. On lave la crasse, le sang.
Et la même comédie peut recommencer. Les journaux repassent leur discours aseptisé.
Tout va bien braves gens, dormez bien, tout est calme.
Le guet veille et passe.
Et chaque nuit c'est l'horreur qui reprend sa place.
Un scénario puissamment rôdé.
Une ville.
Une pièce.
Deux faces.
Pile, le jour, la lumière, l'ordre.
Face, la nuit, le chaos.
Et moi, tel un pantin projeté en tout sens dans cette mascarade absurde j'ai joué mon rôle.
J'ai participé à l'illusion.
J'ai protégé et couverts des criminels qui feraient frémir les méchants de série B. Pour en faire tomber d'autres qui eux n'avaient rien à me donner, à m'offrir. Eux ils n'entraient pas dans le programme théâtral que l'on joue chaque jour pour la plèbe.
Et plus je m'enlisais dans ces relations plus j'étais efficace, plus je ramenais de criminels.
Je devenais un héros. Le super-flic.


Le vent fouette mon visage tandis que la lune, pleine et ronde, éclaire les cieux.
Je contemple une nouvelle fois la Ville-Lumière.
Vu des toits tout est si futile.

Je pense déjà à ce que diront les journaux du matin à l'annonce de ma mort.
Je vois déjà les gros titres sur le sujet incompréhensible qui m'aura amené au suicide.
J'entends déjà l'éloge qui sera fait. On parlera du chevalier blanc au service de l'innocent qui aura lutté pour rendre le monde meilleur.
Vaste blague.
Qui saura que le paladin, pur et digne, est en fait bien plus corrompu que quiconque ? Que, tel cette ville, je suis souillé par le vice ?
Je n'ai que dégoût pour moi-même.
Et, tandis que le sol se rapproche de moi, que le vent hurle à mes oreilles durant ma chute, j'éclate soudain de rire face à cette vaste comédie qu'est l'Humanité et l'espoir qui est le sien.

Citation :
Publié par Texte n°4

Cette nuit là, il faisait sombre. Je déambulais dans la rue, éclairé uniquement par la lumière de la lune. Personne, c'était désert, même les chats n'étaient pas de sortie. Les feuilles cassaient le silence, lors de leurs batailles contre le vent. Un vent faible, mais frais. Un lampadaire, tous les cent mètres, venait épauler la lune, encore fallait-il qu'il soit en bon état, car dans le meilleur des cas il clignotait. Il était dur de croire qu'un soleil radieux avait été présent toute cette journée.


Il était tard, j'étais fatigué, mais au détour d'une ruelle, je l'ai remarqué. Elle était magnifique, silencieuse. Elle attendait, là. Qui ? Je ne sais pas, mais elle n'avait pas l'air d'être effrayé. La lune se reflétait sur son corps, lui donnant un air divin. Quelques gouttes ruisselaient, et semblait la faire sortir tout droit d'un film. Ses formes généreuses m'avaient capturé, j'étais ensorcelé.


Ma première idée, n'était sûrement pas la plus catholique, mais je n'avais jamais connu une telle attirance pour une rencontre hasardeuse. Je m'enfonçais donc dans la ruelle, insouciant. Elle ne bougeait toujours pas. Je m'approchais, lentement, sans la faire réagir. Elle était maintenant à portée de main, je pouvais la sentir sous mes doigts. Je parcourais lentement les bosses et les creux, mes mains n'étaient pas très chaudes, mais il se passait quelque chose entre nous.


N'écoutant que mes pulsions, j'enfourchais la bête. Seulement, elle n'avait pas l'air de vouloir commencer. Peut être voulait-elle commencer plus doux, tranquillement ? Mais moi, ce que je voulais c'était sentir la vitesse, la chevaucher comme le plus indomptable et le plus farouche des étalons de l'ouest Américain. Je voulais sentir mes cheveux s'emmêler dans le vent, me procurer un plaisir fou, l'orgasme !


Seulement, elle avait juste l'air de vouloir y aller tranquillement. Peut être avait-elle un dysfonctionnement ? J'effleurais un peu partout avec le tournevis que j'avais toujours sur moi, elle ne bronchait pas. Je tentais un coup par ici, un coup par là, mais rien n'y faisait. Alors je lui caressais la croupe, en lui chuchotant des mots doux, des mots d'amours, des mots de tous les jours. J'essayais de la mettre en confiance, de lui faire comprendre que je ne lui voulais pas de mal, et qu'il n'y avait rien à craindre.


Petit à petit, je la sentais prête. Elle le fut réellement avec la pompe. Cette fois c'était parti. J'engageais vite, il fallait que je trouve le plaisir dans la vitesse, je n'avais jamais fait ça auparavant. Ni une ni deux, nous sortions de la ruelle, pour aboutir sur la grande route. La vue était dégagée, personne à l'horizon. Intérieurement, je savais que ça allait être une bonne expérience, quelque chose d'unique, la rue déserte y contribuait encore plus. J'avais envie de l'entendre gémir dans le silence, la pousser à son maximum. Et à la fin ce serait l'extase, le septième ciel, comparable à la victoire lors d'un match de foot à finalité mondiale.


Tout allait se jouer maintenant, entre toi et moi, belle moto.

Citation :
Publié par Texte n°5 - "Nuit(s) d'orage"

C’est la nuit, et je n’arrive pas à dormir. Dehors, rien ne bouge, mais je sens l’atmosphère lourde, oppressante, d’un orage qui va bientôt éclater. C’est l’été. Il fait chaud, et étouffant, et j’ai l’impression que le monde entier est à l’affût de cette première goutte de pluie qui tombera bientôt.
Cette ambiance d’attente mêlée d’impatience autant que d’énervement me fait l’effet d’une formule magique qui me revoie dans le passé. Une autre nuit, identique, d’été, d’orage en attente, de chaleur étouffante…
Je tourne, me retourne, change de position, rien n’y fait. Je cherche le sommeil autant que je le redoute. Quand je ferme les yeux, ce sont les images de cette autre nuit qui me viennent en tête. Des images qui me font mal. Celles de la nuit où j’ai cessé de faire confiance à ma mère, où j’ai compris que je serai seule, toujours, et que je ne pourrai jamais compter que sur moi.
Nous étions deux alors, deux sœurs, deux jumelles, agitées nous aussi par le tonnerre qui gronde et la pluie qui ne tombe pas encore. Malgré la chaleur, nous étions blotties l’une contre l’autre sur notre matelas, comme à notre habitude, face à face, nez contre nez, mains mêlées, jambes emmêlées, souffles unis. Maman était agitée elle aussi, avec le recul, je me dis que c’était peut-être pour d’autres raisons. Nous étions là, toutes les trois, dans la position du sommeil mais sans dormir.
Des hommes sont entrés, maman est allée à leur rencontre. Ils étaient trois, sans signe distinctif, des silhouettes qui se découpaient en ombres chinoises devant la porte laissée ouverte sur la rue éclairée. Ils ont parlé à ma mère. Elle semblait un peu inquiète, mais elle n’a rien dit. Elle est repartie se coucher, nous tournant le dos.
Ils sont venus près de nous, ils ont pris ma sœur.
Ils avaient l’air gentil, ils lui disaient qu’elle était belle, qu’il fallait qu’elle soit gentille, maintenant, et elle est partie avec eux.
Je ne l’ai plus jamais revue.
Maman n’en a jamais parlé.
L’orage a fini par éclater, cette nuit là, et, sans ma sœur contre moi, hagarde, perdue, déboussolée, je pleurais, et il me semblait que la pluie n’était là que pour m’accompagner, le ciel faisait tomber ses larmes avec moi.
Plus tard, je suis partie. Seule. Toujours.
Je n’ai pas cherché à revoir ma mère depuis.
Parfois j’ai croisé une silhouette, aperçu un profil, j’ai cru voir ma sœur, ma jumelle, mon double, mon presque moi.
A chaque fois, je me suis trompée.
J’ai continué ma vie, seule, m’obligeant à cette solitude qui me protège de la séparation. Comment souffrir de quelque chose qu’on ne possède pas ?
Souvent, je croise le regard des enfants. Ils me regardent, eux aussi, dans les yeux, alors que les adultes ne me voient pas vraiment. Les enfants ont le visage grave, c’est surprenant.
Un jour d’été, sous le soleil écrasant, deux jumelles, deux gouttes d’eau ont croisé mon regard. Elles étaient belles toutes les deux, côte à côte, se tenant la main. A les voir ainsi, si parfaitement semblables et si parfaitement ensemble, il semblait que rien ne pourrait jamais les séparer. Je les ai regardé longtemps, bien longtemps après qu’elles se soient éloignées de moi. J’ai mal dormi cette nuit là aussi.

Aujourd’hui, je suis à nouveau seule dans le noir, dans le silence étouffant de cette nuit d’été, avec l’orage qui n’en finit pas de ne pas éclater. D’avoir laissé les souvenirs me rattraper, je me suis retrouvée en boule, gémissant sur ma paillasse.
Un éclair, un grondement, et la pluie qui se met à tomber, enfin.
Je sors devant ma petite maison.
Je marche sous la pluie battante.
Il n’y a pas un chat dehors, pas de lumière chez les voisins. Chez moi non plus. A peine la faible lueur des lampadaires plus loin me permet-elle de reconnaître mon arbre. Je m’en approche et, d’un geste rendu rapide par l’habitude, je grimpe et m’installe sur la grosse branche.
L’eau dégouline sur moi et me lave de mes angoisses nocturnes.
Je fixe l’endroit où j’ai vu ces deux jumelles la dernière fois. Juste là, derrière la grille. Elles ont finalement fait comme les autres : elles ont essayé de me donner à manger bien que le panneau accroché sur la barrière l’interdise. Aujourd’hui, les enfants ne jettent plus de cacahouètes dans la cage, ça, c’est bon pour les livres d’images. Elles m’ont envoyé des fraises Tagada. Je les ai ramassées, elles avaient l’air content.
Je ne les ai pas mangées. Je les ai emmenées dans ma cabane. Elles y sont toujours. Deux fraises, identiques. Côte à côte. Pour toujours, soudées par le sucre et la crasse.

Citation :
Publié par Texte n°6

J’ai mal au crâne.

Le bourdonnement continu me retourne le cerveau. Cela me lance. Cela me fait mal.
Il y a en moi une souffrance énorme. Et je me rends compte qu’elle ne se cantonne pas à ma tête uniquement, mais qu’elle me parcourt entièrement le corps.
Chaque fibre de mon être est torturé, mutilé, brisé.

Je tente d’ouvrir les yeux, et n’obtient qu’une vision trouble. Ils sont collants. Ils brûlent.

Qu’est-ce que je fais là ? Pourquoi ai-je autant mal ?

Je perçois une lumière, elle m’aveugle et m'irrite les yeux.
J’ai l’impression que cette clarté enfonce des aiguilles dans mes lobes oculaires, et que cette immonde sensation se propage. En haut. En bas. Dans tous les sens. Je suis une blessure vivante, je sens quelque chose de chaud qui coule le long de mon dos.

J’ai un souvenir.
Vague, imprécis.
Elle me crie dessus.

Non, je lui crie dessus.

Tout devient noir.

Je me réveille en sursaut, la douleur est toujours là, diffuse, mais présente. Je la sens prête à bondir pour se saisir entièrement de moi, et m'emporter dans la folie. J’essaie de lever le bras pour frotter mes yeux, mais il ne répond pas. L'autre ne réagit pas non plus. Aucun ne répond.

Qu’est-ce que... Mes mains... ?
Elles ne sont plus là ?
Bougez bordel !


Encore une image: des cris et des pleurs. Et une lumière qui approche à grande vitesse. Un hurlement, long, puissant, et qui finalement disparaît dans la nuit.

Des ombres dehors, elles bougent et gesticulent, comme des moustiques au dessus d'un feu. Elles sont géantes et à la fois minuscules. Elles s'agitent bizarrement, autour de moi. Elles me murmurent des mots. Je ne les entends pas.
Je ne comprends pas.

Je tourne difficilement la tête à droite. Quelque chose semble bouger. Une forme humaine, tout en nuances de pourpre et de sombre. Je crois que ses lèvres bougent, tout comme ses bras.

Mais pourquoi peut-elle bouger les bras alors que moi...?

Sa tête est couronnée d'argent. Elle a un morceau de Lune au dessus du visage. Elle est belle. Malgré le flou auquel s'accrochent mes yeux, je sais qu'elle est belle. Elle est la plus belle chose en ce monde. Je le sais. Je le sens. J'ai un sentiment d'amour incontrôlé pour elle.

Je reconnais son regard. Ses si beaux yeux. Je sais qui elle est. Elle aussi sait qui je suis. Nous nous connaissons. Elle tend ses doigts vers moi. J'ai peur.

Tout devient noir. A nouveau.
Quelque chose me touche. J'ai mal. C'est un véritable supplice. J'ai envie de pleurer. D'ailleurs je pleure, enfin je crois. Mes joues sont trempées. Ma bouche est remplie d'un liquide au goût dégueulasse. J'ai envie de vomir. J'ai froid.

La forme est toujours là. Je me sens en sécurité avec elle. Mais cependant, je la déteste. Non.
Je l'aime et je la déteste. De tels mots? De telles émotions? Je suis confus, je suis perdu. Je me sens fautif, mais je lui en veux.

Qu'est-ce qu'elle m'a fait?
Que lui ai-je fait...?


Les ombres sont toujours là, à roder. Elles en veulent à ma vie, j'en suis sûr maintenant. Elles veulent m'emporter, loin. Plus loin. Dans une ombre bien plus grande encore. Dans un endroit où jamais plus je ne pourrai admirer les yeux. Ses yeux.

Je me souviens.
Je comprends.


Elle a fait une erreur. Elle ne me voulait pas de mal. Je n'ai pas supporté. Je voulais partir. Mais elle est venue avec moi. Nous sommes partis. Mais j'ai crié. Fort. Avec une méchanceté dégoulinante. Des mots durs et froids comme la pierre. J'ai crié encore. Avec un cœur mort aux bords des lèvres. Elle pleurait. Elle demandait pardon. Pour tout. Mais je continuais à crier. Je regardais ses yeux tristes. J'avais mal. En dedans.

Elle a crié à son tour.
Pas sur moi.


Quelque chose. Quelque chose nous a percuté. Il y a eu du bruit. Beaucoup de bruit. Et du noir. Partout. Et après, du silence. Sans fin.

J'ai encore ce goût en bouche. Ça sort. Mon menton est chaud. Ses mains me le frotte. J'entends qu'elle me dit quelque chose. Encore en pleurs. Mais je ne comprends pas. Toujours ce bourdonnement incessant.

Dehors, les ombres continuent de danser. Elle leur parle. Je crois qu'elle leur demande de m'aider. Qu'il faut faire vite. Les silhouettes noires nous entourent maintenant. Elles sont proches. Je les sens. Ma douleur disparaît petit à petit. Je me sens bien.

Je la regarde. Elle et ses yeux magnifiques. Ses yeux que j'aurai voulu offrir au monde. A nos enfants. Je lui souris. Elle me caresse le visage. Elle m'embrasse.

Elle continue de pleurer. Je voudrai lui sécher ses larmes. Mais je ne peux pas. Je ne peux plus. Ses mots. Je les discerne. Mais mes yeux sont lourds. Trop lourds. Je les ferme. Je me repose. Un peu.

Plus d'ombres.
De lumière.
De Lune.
La nuit.
Les bruits.
Le froid.
Ses yeux.
Tout.

Je l'aime.
Elle aussi.



Tout devient noir. Pour de bon.

Citation :
Publié par Texte n°7

Clac. Un temps
Clac. Un temps à peu près identique
Clac. Un temps plus long
Clac.
Dok-phi-sua jette un bref regard dans ma direction. La berline continue son trajet seule et silencieuse sur une route bitumée où les luminaires sont trop rares et mon anxiété surement un peu trop palpable. J’ai attrapé ce tic sur le trajet du collège : nous n’avions rien à nous dire mon père et moi et il me fallait tuer le temps, alors je traçais un segment entre les deux prochains lampadaires, j’en trouvais à l’œil le centre et je me donnais comme objectif de claquer mes canines inférieures et supérieures à égale distance entre les deux lampadaires. Après plusieurs mois d’entrainement intense j’avais fait évoluer le concept pour l’appliquer à la musique : ma bouche était devenue un clavier où chaque dent représentait une note. Je n’avais pas laissé de côté les contacts entre mes canines Mittérandiennes et l’une d’entre elle, comme pour la remercier, était devenu un do.
Un matin où je bossais la mélodie de Die Shöpfung de Haydn, mon père me lança un regard inquiet.
Ce moment marqua la fin de mes prétentions musicales et mathématiques.

J’ai arrêté aussitôt.

Dok-phi-sua, elle, n’a aucune expression faciale. C’est certainement le métier qui veut ça, et l’écart entre le bon père de famille et la prostituée professionnelle de Phuket.
Heinrich, ah ! Heinrich, il va falloir en dire deux mots. Allemand de Munich, fin connaisseur de BMW, je l’ai rencontré dans l’avion. Ce teuton, tout ce qu’il y a de plus stéréotypé doit avoir 50 ans et n’est pas à son premier voyage « touristique » . Grand, blond aux yeux malheureusement noirs pour prétendre au haut du pavé aryen, a fait fortune dans la chimie en tant que chef de laboratoire chez Henkel. Belle réussite, la Lange & Söhne au poignet mais pas d’Eva. Il me raconte dans l’avion qu’il a bien eu une femme mais que la découverte de la Thaïlande et de ses cons étroits et virevoltants l’avaient tout à fait découragé de la pilosité toute germanique. En somme, il venait deux ou trois fois par an – quand son emploi du temps le lui permettant - revoir ses anciennes amies à peine majeures et découvrir quelques nouveaux talents locaux que seule Phuket pouvait catalyser en son sein. Je devais faire une sale tête et il comprit assez rapidement que c’était mon premier contact avec l’Avalon. S’en suivit une tirade distrayante et instructive sur Phuket et ses délices. A mi-chemin entre le jongleur de sotie et l’eunuque perse, il m’expliqua, pendant plusieurs heures, les écueils à éviter, la bonne tenue vis-à-vis de ses Venus asiatiques, ce qui était possible de leur faire et à quel tarif ; entre lyrisme larmoyant et implacable connaissance du marché, je tirais profit de son expérience. Arrivé à Bangkok, je le gratifiais d’un Danke sehr Herr Professor Heinrich qui lui plut fortement.

Je souris un peu bêtement en pensant que je ne suis pas si différent de Heinrich, plus jeune, moins blond et moins assuré que lui certainement, mais je m’engage dans le tourisme sexuel sans trop de culpabilité. Ce voyage était assez réfléchi, bien organisé, depuis l’explication aux collègues de ma très vive volonté de visiter l’asie du sud-est jusqu’à mon exaltation théâtrale pour ses décors de carte postale. Dans l’Input / Output documents le con est légion et il n’a pas fallu plus d’une demie journée à Roger, un gars à la vie toute aussi insipide que la mienne, mais qui, lui, a femme et enfants, pour m’amener son album-photos de ses vacances « magiques » à Phuket. Madame Roger et Roger dans leurs chapeau de paille pour madame, dans son short long sans forme pour monsieur, les visages déformés par un sourire qu’il faut, ce moment là, inoubliable. Roger me vante les mérites d’un bar au bord de la plage, là même où a été prise cette photo. Roger a aimé l’étincelle dans mon regard, il est fier de lui, il y croit vraiment, il est certain que je les trouve beaux dans leur peau flétrie, blanchâtre, bras dessus, bras dessous fixant l’objectif en s’ imaginant un peu trop fort tourner les pages dudit album devant des amis poussant des « oh ! » « ah ! » « comme c’est beau ! ».
T’inquiète mon Roger, je ne t’oublie pas !

Dans l’après-midi, j’étais venu repérer le bar. Pas de doute à son sujet, je l’avais trouvé assez rapidement grâce aux explications suffisamment précises de Roger. Il était comme je l’imaginais. Un bar traditionnel avec ses cocktails maison, ses serveurs parlant aussi bien français qu’anglais et proposant une carte dépaysante à souhait avec ses alcools traditionnels aux noms imprononçables, peu nombreux mais surtout ses vodka, whisky, pour que Roger s’y retrouve. L’inquiétude montait, un peu, quant à savoir si la présence de Dok-phi-sua à mes côtés n’allait pas être problématique dans un lieu touristique fréquenté par Roger. La voiture garée, j’invitais Dok-phi-sua à me suivre d’un timide sourire qu’elle me rendit comme pour me réconforter. Elle me prit la main, une main chaude et sûre de son fait, une main qui en dit long sur ses aptitudes dans sa branche : je suis un spécialiste de la dématérialisation de document et elle de la matérialisation du faux-semblant. La population du bar me rassura : il n’y avait là que des occidentaux accompagnés de filles pas plus âgées que Dok-phi-sua. Tout ce petit monde buvait son cocktail dans une ambiance détendue et chaleureuse. J’étais quand même déçu par le cliché, bien qu’il fut rassurant de voir des allemands gras, la Pils à la main, riant grassement, leur Thaïe leur renvoyant professionnellement leur sourire. Plus loin les américains en meute ricanant haut, draguant des gamines déjà payées.
On s’installe à une petite table, un peu à l‘écart des autres occidentaux mais de façon à rester tout de même dans une lumière assez vive pour m’assurer que j’ai fait le bon choix. Dok-phi-sua a la peau très mate, lisse, le visage fin et sans maquillage. Peut-être porte-t-elle un léger rouge à lèvre sombre, mais il ne lui donne pas l’air d’une pute. Elle me fixe de ses yeux noirs, uniformément noirs, un regard presque hypnotique qui attise mon envie de consommer. De ses paroles je ne vois que des lèvres s’agitant, des lèvres besogneuses mais délicates et accueillantes. Elle porte une robe noire à bretelles extrêmement fines qui laissent percevoir un dos très ouvert où tombent ses longs cheveux ébène.
C’est elle qui parle, me demandant d’où je viens, ce que je fais, dans un français très poli. Je lui réponds sans entrer dans les détails, nourris la conversation tout en commandant pour moi, au fur et à mesure, des alcools locaux sur ses conseils, suffisamment pour me donner de l’allant, pour ne pas rebrousser chemin au pied du mur. Je l’invite à recommander si elle le désire mais elle refuse poliment accompagnant chacun de mes verres d’une unique lampée de son premier.

Je souris, elle a du métier.
Mes 200 USD n’ont pas été dépensés dans le vent.

Citation :
Publié par Texte n°8

Paul a encore les yeux fermés lorsqu'il entend les bruits de fond spécifique à l'activité d'un restaurant, il est assis à une table, seul, il ne veut pas ouvrir les yeux, la certitude que rien n'a changé l'angoisse littéralement, inexplicablement une force le pousse à s'en assurer, il se lance, en face la chaise est vide. L'étrange sentiment de ne pas être surpris par la chose, laisse une sensation de bouche pâteuse, surpris de ne pas l'être en somme, l'habitude du déjà vu. il est anxieux et se frotte régulièrement le menton, il jette un coup d'œil à sa montre pour constater l'évident retard de son rendez-vous. Il pourrait craindre le pire puisque c'est dans sa nature, qui plus est il ne fait pas naturellement confiance, ce qui est préférable dans son secteur et qui s'est même transformé en qualité au fur et à mesure du temps. Il sort son téléphone portable pour surveiller un éventuel message qui lui aurait échappé, rien. Il fouille les poches de sa veste en prenant machinalement son paquet et son briquet, il sort une cigarette va pour l'allumer et constate les regards indignés des convives aux alentours, il sourit, s'excusant et se ravise, cette maudite interdiction de fumer dans les lieux publiques est une véritable plaie pour son estomac. Il ne compte plus le nombre d'occasions où cette fameuse cigarette aurait pu calmer son stress, depuis cette loi, il en est à un paquet par jour et une boisson lactée pour calmer l'ulcère qui le ronge depuis 6 mois.

6 mois qu'il connaît Betty, cette magnifique brune aux yeux noirs et la peau aussi laiteuse que cet infecte médicament, elle est toute menue, quiconque la voit est pris d'une furieuse envie de la prendre dans ses bras pour la protéger de toute agression extérieure, elle est souriante de surcroît, de nombreuses qualités qui rendraient jaloux le plus doux des hommes puisque sa farouche indépendance la rend totalement imprévisible.

Elle est en retard, une habitude, son image flotte devant lui à chaque fois qu'il ferme les yeux, il ne va pas tenir, il décide de sortir du restaurant pour s'en griller une petite en attendant le miracle : sa venue. Se lever, bouger et sortir le rassure, quelque part il revit. Les lampadaires éclairent la petite rue piétonne d'une lueur surnaturelle, l'air est frais, il pourrait sans doute pleuvoir, les premières chaudes journées d'été accentuent la différence, il regarde dans le ciel si des étoiles sont visibles, la nuit des étoiles filantes offre un spectacle rare et inédit à une jeunesse obnubilée par la télévision, le problème étant d'être une patience infinie mais cette nuit les nuages gâchent la fête et les lumières de la ville sont bien trop ténues pour permettre des conditions favorables. Le calme est évident de la rue lui laisse percevoir un son étrange, un son hospitalier, un bip de contrôle cardiaque, il tend l'oreille mais plus rien ;

- Faut que j'arrête House et Urgences en même temps, moi.

Comme à son habitude, il a prit une table où il est dos au mur et où chacune des issues restent dans son champ de vision, il regarde l'heure, elle à près une heure de retard. Il est sans doute un tantinet paranoïaque, mais cette dernière l'a toujours plus sauvé que le contraire; lui aurait-elle tendu un piège dans ce restaurant, éloigné du centre ville, dans un quartier calme et désert ? Sa méfiance naturelle reprend le dessus lorsqu'il entend de nouveau le bip cardiaque. C'est décidé il ne restera pas plus longtemps, il profitera du départ du premier couple pour sortir du restaurant en même temps qu'eux, ce qui ne dure pas une éternité puisque 5 minutes suffisent à son soulagement.

Marcher devrait le rasséréner, il a allumé une autre cigarette et l'étrange sensation qu'il a déjà fait cela apparaît soudainement. Il tire une première bouffée salvatrice, il laisse la fumée faire son effet dans la gorge, il est inquiet et plus que d'habitude, il a mal au crâne. Il avance encore quelque pas et tend l'oreille, rien. Rien n'est jamais bon signe. Et Betty n'est toujours pas reparu. Bip … Soirée totalement gâchée.

Il finit péniblement par rentrer chez lui à son appartement, trois étages à pied, le long cheveu brun est toujours à la même place sur la porte, une ruse vieille comme l'espionnage mais efficace et économique. Lumière vive et douleur identique, visions ou réalités, son mal de crâne lui tape sur le système, BIP il sort son trousseau de clef pour ouvrir la porte quand un mouvement au palier supérieur attire son attention, une torche l'éblouit vivement quand derrière lui, on l'assène d'un violent coup dans le coup, une drôle de pensée lui parvient :
- Ah oui lumière vive et douleur identique, çà me revient maintenant.

BIP … BIP … BIP
- Tension stable à 14/8, pouls à 95.
- Alors c'est fini ? C'est tout ?
- Oui, l'expérience est concluante, tous les événements nous ont été relatés.
- Mouais.
La seconde voix, Paul ne l'apprécie guère, sûr que c'est le coup par derrière.
- Je reste méfiant ce n'est pas le premier venu.
- Il se réveille, vous allez pouvoir l'interroger.

- Alors Paul, intéressante expérience de retour dans le passé, non ?
- Je ne trouve pas, avoir mal au crâne aussi violemment une seconde fois est une chose que je ne souhaite même pas à mes pires ennemis.
- Allons, allons pas de romantisme à la guerre froide. Venons en à l'essentiel, où est Betty ?
- Vous l'avez bien vu, elle n'est pas venue au restaurant.
- Oui, oui, c'est tout de même étrange que cet agent double après vous avoir rencontré disparaisse comme par enchantement.
- Je l'aimais.
- C'était sa première mission. Alors agent X, le rapport final ?
Un homme en blouse blanche se retourne et tend à «matraque» quelques feuillets imprimés.
- Conclusion évidente, RAS, l'agent Paul B. peut regagner son domicile.
- Putain d'administration ! Tu t'en sors bien Paul, mais reste sur tes gardes, je t'ai à l'œil.
- Çà marche.

Paul reçoit encore un coup sur le crâne, ras-le-bol de ce boulot … Lorsqu'il se réveille à nouveau, il est dans sa rue, il monte péniblement les marches, vérifie que le palier est désert ce coup-ci et essaye de retirer ce long cheveu brun de la porte d'entrée. Paul se pose soudain une question, d'où vient ce cheveu ?

Ces coups sur la tête n'ont rien arrangé, il va dans la salle de bains chercher une aspirine, mais d'où vient ce cheveu, il tourne la tête sur sa droite pour y voir un corps inanimé dans la baignoire, Betty y gît dans une posture ridicule.

- Ah bah voilà, il n'était pas de moi !
Et il se regarde complaisamment dans le miroir. Paul est chauve.

Citation :
Publié par Texte n°9

« – Et que s’est-il passé ensuite ?
– La nuit est tombée. Je l’ai vue par ma fenêtre. J’étais assis devant mon ordinateur. Je jouais et je trouvais qu’il faisait sombre d’un coup. J’ai levé les yeux de l’écran pour regarder autour de moi, et alors j’ai vu que la nuit était tombée. C’est là que ça m’a pris.
– D’un coup ?
– Non. Ça trainait depuis un temps, je ne sais pas. Je n’y pensais plus pendant que je jouais, j’avais perdu la notion du temps. Quand j’ai vu que la nuit était tombée, ça m’a repris d’un coup aux tripes, une sensation vraiment désagréable. Je l’avais déjà eu auparavant, mais ce soir là je sentais qu’elle allait me faire agir.
– Et qu’avez-vous fait ?
– Je suis descendu dans la rue pour allez à l’épicerie arabe. J’ai acheté quatre ou cinq bouteilles de Coca… avec sucre et caféine. C’était important, je me couche tôt d’habitude. Je fais quelques courses, un peu de ménage, et ensuite je joue sur mon ordinateur ou je regarde des séries. Quand j’en ai assez je vais me coucher. C’est souvent autour de dix heures.
– Et quelle heure était-il ?
– onze heures passées. J’avais déjà sommeil. J’avais le coca entre mes mains et j’ai entamé une bouteille en remontant chez moi. Quand j’ai passé la porte, j’ai regardé mon ordinateur, mais je n’avais envie de rien. Alors j’ai cherché un livre.
– Vous lisez ?
– Oui, enfin… quelques livres. Souvent je les entame mais je ne les finis jamais. J’ai pris un livre, j’en ai lu deux pages, puis je l’ai reposé. Je n’avais pas envie de lire non plus. En fait, je ne voulais pas être là. Pas chez moi, je veux dire. Si j’y restais je finirais tôt ou tard par m’endormir.
– Et c’était grave ?
– Oui. Je savais que la seule chose qui viendrait après le sommeil était mon réveil, puis ma douche, puis mon petit-déjeuner, puis aller au travail. Je ressentais déjà la question qui presserait : pourquoi ? Dans quel but je fais ça ?
– Alors qu’avez-vous fait ?
– J’ai pris un sac à dos pour mes bouteilles de Coca et je suis allé dehors. J’ai juste marché pendant un long moment. Dans mon quartier il y a peu de lampadaires, les rues sont très sombres. J’avais un peu peur.
– Peur de quoi ?
– Je ne sais pas… de croiser des bandes, de me faire agresser je crois. J’ai croisé des groupes de jeunes et j’ai changé de trottoir. Un ou deux m’ont regardé, ça m’a impressionné. En fait, après, j’ai compris qu’ils n’en avaient strictement rien à faire de moi. J’ai continué mon chemin sans savoir où aller. J’avais très sommeil. Je me suis dit : et si je dormais ici ?
– Ici… dans la rue ?
– Oui, dans la rue. Après tout, personne ne pourrait me retrouver. Le lendemain, en me voyant absent, que feraient-ils ? Ils appelleraient chez moi ? Si je n’y étais pas, je n’avais pas à répondre. Si je dormais dans la rue toutes les nuits, qui me retrouverait ? Quelles obligations j’aurais ? Aucune je crois bien. Alors j’ai trouvé un banc et je me suis couché dessus. J’ai fermé les yeux, un peu. J’ai dormi, mais pas longtemps.
– Combien de temps ?
– Aucune idée. Il faisait encore nuit quand j’ai rouvert les yeux. J’avais très froid. C’est dur à décrire, c’est comme si le froid n’était pas seulement autour de moi mais en moi, j’étais gelé jusqu’aux os. J’aurais pu rentrer mais je ne voulais pas, pas me coucher chez moi, pas me relever le lendemain et recommencer à fonctionner sans savoir pourquoi. J’ai commencé à errer pour trouver de la chaleur. C’était physiologique : je n’avais pas de but conscient, je me dirigeais vers la chaleur, un peu comme un insecte vers une lampe. J’ai trouvé une porte ouverte, pleine de lumière et de chaleur. Un homme attendait devant en buvant une bière. Je l’ai accosté. Il était saoul et on a sympathisé. Il m’a fait rentrer chez lui et on a parlé. C’était chaud.
– Vous lui avez expliqué votre situation ?
– Non, en fait on n’a pas vraiment parlé. Je l’ai écouté. Lui a beaucoup parlé. Il a fait beaucoup de choses, il a beaucoup travaillé, il a été malade aussi et je crois qu’il avait une femme. Quand j’ai eu chaud, enfin, j’ai réalisé qu’il m’ennuyait. J’entendais du racisme et de la haine dans ses histoires, j’étais mal à l’aise et je voulais partir. J’avais déjà oublié le froid dehors.
– Vous êtes parti ?
– Oui. Quand il s’est relevé et a quitté la pièce pour prendre une nouvelle bière, je suis parti. Je suis sorti et je me suis éloigné en marchant vite. J’espère qu’il ne se rappellera pas mon visage si je le recroise un jour. J’ai marché vite et longtemps. Au bout d’un moment, le vent s’est levé, et le froid est revenu. Même en marchant je n’arrivais pas à me réchauffer.
– Vous êtes rentré chez vous ?
– Non. Je détestais chez moi et tout ce qui y était lié. Rentrer c’était devenir creux encore, juste m’occuper le temps de retourner au travail. Quand j’y pensais j’étais malade, comme si j’avais faim depuis des jours, que mon estomac était terriblement vide, que j’avais des vertiges. Si je marchais loin j’étais vigoureux, si je me rapprochais de chez moi, mes jambes étaient molles et me portaient à peine. Il faisait noir malgré les lampadaires. Au bout d’un moment, j’ai marché vers le seul bâtiment réellement éclairé. Il était grand et une horloge brillait au-dessus de l’entrée.
– Où était-ce ?
– C’était la gare. Je ne l’ai pas compris tout de suite. J’ai surtout senti qu’à l’intérieur il n’y avait plus de vent, qu’ici il faisait enfin chaud. J’ai commencé à m’asseoir sur un banc, puis à m’y allonger. J’ai doucement fermé les yeux.
– Vous vous êtes endormis ?
– Non. Un vigile m’a interpellé. Il voulait savoir ce que je faisais là. J’ai réfléchi vite : je n’avais pas le droit de dormir ici. Je ne voulais pas retourner dehors. J’avais le panneau des trains au départ en face de moi. J’ai dit que j’attendais un train. Il m’a demandé lequel. J’ai répondu que j’attendais celui de Nevers, départ 3h54, voie B. Il m’a dit de me dépêcher, qu’il était à quai et qu’il partait dans trois minutes. Je me suis dépêché et je suis monté dans le train. J’avais extrêmement peur et honte à l’idée que le vigile comprenne mon mensonge.
– Vous êtes monté dans le train ?
– Oui, et je n’avais pas de billet. Ça me terrifiait. J’ai commencé par me cacher dans les toilettes, puis j’ai changé de toilettes, j’ai bougé durant tout le voyage. Au final, je n’ai croisé aucun contrôleur. Quand on est arrivé à Nevers, il faisait jour.
– Vous êtes descendu ?
– Oui. Je suis sorti de la gare et je me suis allongé sur un banc au soleil. J’ai fermé les yeux. J’étais bien. J’ai entendu la sonnerie de mon réveil. Je crois que c’était horrible. Mon téléphone portable était dans ma poche. Je l’ai pris dans ma main et je l’ai regardé sonner pendant longtemps.
– Qu’avez-vous fait ?
– Ce jour là je suis arrivé avec beaucoup de retard au travail. Mon patron m’a permis de récupérer mes heures. Je ne sais pas… je me suis senti extrêmement idiot, même si je ne savais pas pourquoi. Le soir, j’ai acheté un nouveau jeu.

Citation :
Publié par Texte n°10

Une nuit, une grande ville comme tant d‘autres, étouffée par les grattes ciel et le ciel sans étoiles, plombée par la nuit d’orage, un orage de chaleur, écrasante chaleur d’un moi d’Août, où pourtant la nuit était inhabituellement longue, trop longue.

Cette nuit là, je rentrai dans la bouche infernale du métro, m’enfonçant encore plus dans les méandres terrestres, poursuivant quelque chose, sans savoir quoi.
Peut-être le temps, le temps qui cours, qui nous rattrape, qui nous sème, et nous laisse seul.
Seul face aux questions, seul face à la mort, quand tout tombe autour de nous, qu’on se cloître dans la solitude et qu’on ne peut se raccrocher à rien, car à côté de nous, la mort à fait son œuvre, seule.
Dans le froid d’une bouche d’aération, dans le souffle de l’enfer qui cingle, ce froid qui me ronge, ce froid qui nous achève, j’attendais.
Les gens passaient devant moi, tous invariablement d’un pas mécanique passaient devant moi, d’un regard froid et neutre, dans la gare mal éclairée je les voyais passer, comme y sont passés ici d’autres, courant pour rattraper le temps, éphémère ce temps, dont l’importance leur est apparue trop tardivement.
Devant ces faïences sales et ébréchées, un mince nuage de vapeur fuyant d’un corps chétif.
Il est avalé par la bouche, comme la bouche noire et béante creusée dans la terre dévore l’enchevêtrement de métal et de chair.
Sur une banquette grisâtre, dans le métro qui pue la maladie, le renfermé, où la peinture s’écaille, où les immondices expiaient sur le sol, j’attendais encore.
Dans ce miasme immonde, j’attendais.
Un air de Dvorak dans le crâne, et aussi quelques céphalées m’ont tenu éveillé dans le wagon de la solitude.
Je crachais mes poumons, dans une toux sèche qui écorche ma gorge, puis la voix nasillarde vrilla mes tympans, comme les vieilles alarmes des vieux lycées poussiéreux, amenant en moi le souvenir d’un temps révolu, une image d’enfance, un souvenir qui ne peut malheureusement que le rester.
« Descendez à droite. »
On se rua à l’extérieur, les gens se marchèrent dessus, animalisés.
Ça grondait, ça criait, ça fumait, et ça transpirait, malgré le froid qui devrait nous mortifier tous, et certain riaient, insouciants.
Le métro est reparti, dans un crissement infâme.
Et tout s’est mis à tourner autour de moi, tout est devenu encore plus sombre que d’origine.
Sans prévention, un voile noir s’est étendu sur mes yeux.
Je m’affolai, j’ai du crier, je réfléchi à l’après, j’ai dû pleuré, je pensai à ce que je n’ai plus, je sais que personne ne pleurera un pauvre ère, errant dans les sombres couloirs de la solitude, et pourtant je savais que je cherchais quelque chose sans me rappeler quoi, peut-être quelque chose à quoi se rattacher, mais la mémoire se faisait fuyante, et je sombrais, je tombais, dans un vide que je redoutais depuis l’enfance, celle de mes souvenirs, et je craignais ne plus jamais revoir le jour, je craignais d’être arrivé à cette frontière que je me suis toujours représenté, l’infini après la durée limitée de la vie, l’infinie solitude de la mort.
Avant de sombrer, la symphonie du nouveau monde de Dvorak résonnait dans mes oreilles.
Avant de sombrer, j’ai vu le sang vermillon, craché de mes entrailles, unique touche de couleur dans ce monde de fer et de pierre, de noir et de désespoir.
Le temps s’écoulait lentement, alors qu’il m’a toujours glissé des mains.
Alors j’ai pensé que j’avais encore des choses à faire ici, et que la vie était trop précieuse pour la laisser fuir, que j’ai toujours renié mes connaissances qui la foutaient en l’air, et que je n’étais qu’un lâche, si j’abandonnais maintenant.
Le tourbillon s’est estompé soudainement.
J’ai essuyé d’un revers de manche le sang coulant sur mon menton mal rasé, puis j’ai monté doucement les escaliers, profitant de la moindre odeur de souffre, du moindre pigeons frôlant ma tête, comme si elles étaient les dernières choses que je puisse voir.
Je suis sorti de la gare, pour trouver un bar, pour me poser, pour penser.
Après quelques verres de mojito, je me suis rendu compte que j’étais seul au bar, hormis le barman, qui ressemblait un peu à Jeff Bridges.
Au dehors, la nuit d’encre toujours plus oppressante, et toujours personne dans cette ville pourtant si animée d’habitude.
Je suis resté ici quelques minutes, ou quelques heures.
Peut-être même une éternité, mais dehors, il faisait toujours aussi sombre.
Peu après un énième verre, je me décidais à partir.
Fébrilement, je me levai, pour payer le patron.
Ma tête commença à me lancer, et je n’avais pas de quoi payer le patron.
D’ailleurs, ce dernier gisait au sol, dans une flaque de sang, ce qui me parut étrange.
Je suis sorti du Bar, dans une rue déserte je crois.
La terre s’est mise à trembler, de plus en plus fort, la terre s’est mise à trembler, jusqu’à ce que je ne tienne plus sur mes frêles jambes, jusqu’à ce que je m’effondre sur le sol, en regardant haut dans le ciel noir, plongeant dans les pupilles de l’Univers.
Il s’est mis à pleuvoir.
Les flèches glacées me clouaient sur place, ma respiration se fit haletante.
Soudain, je vis l’horizon arriver sur moi comme un raz de marée, les immeubles se mirent à s’effondrer sur le sol qui avançait comme un rouleau dévastateur.
Dans les entailles que les secousses ont creusées dans le sol, un geyser de flamme siffla devant moi, juste avant que le raz de marée de gravats se rue sur moi.
Encore une fois, le sort s’acharne contre moi, je suis le seul à être emporté dans ce raz de marée, seul quand la mâchoire terrestre se referme sur moi.

Il fait noir, il fait froid, je suis seul, je flotte…
Depuis quelques temps déjà je flotte.
Soudain, il y a une explosion, suivie d’une lumière aveuglante.
Je hurle.
J’entends des voix, je ne suis plus seul.
J’essaye de parler, mais je n’y arrive pas.
Mes yeux ne sont pas encore habitués à la lumière… je ne sais pas où je suis, mais je ne suis plus seul, c'est l'important...

Citation :
Publié par Texte n°11

Après une décennie d'attente et une longue traque, il avait enfin réussi à le capturer et il était là, en face de lui, à sa merci. Il ne savait pas encore ce qu'il allait lui réserver mais son imagination était sans bornes quand il s'agissait de trouver des moyens pour torturer sa victime. Il regardait l'homme à l'autre bout de la pièce, inconscient, attaché au mur par une énorme chaîne qui se terminait par deux imposantes menottes retenant ses poignets. Quiconque l'aurait regardé aurait pu le croire mort, seuls quelques soubresauts dus aux coups qu'il avait déjà reçu durant l'enlèvement, trahissait son état.


L'homme ouvrit les yeux, il ressentait chaque parties de son corps douloureusement. Ses yeux mirent quelques minutes à s'habituer à l'obscurité ambiante. Il distinguait une forme imposante à l'autre bout de la pièce qui ne bougeait pas, même si il ne le voyait pas distinctement il se savait observé. Il étudia l'endroit dans lequel il était enfermé aussi vite qu'il pu afin d'essayer de se faire une idée de la situation et de trouver une manière de se sortir de là. C'était une pièce carrée toute en pierre ou seules quelques lumières aux murs apportaient un faible éclairage. Le mur opposé était rempli de divers objets plus effrayants les uns que les autres, et au fond de la pièce en face de lui à côté de l'unique porte, une chaise avait été installée.
Il essaya de bouger un peu l'un de ses bras pour soulager ses poignets qui commençaient à le faire souffrir . Il sentit une douleur vive lui traverser le bras. Levant la tête vers ce qui le retenait prisonnier il vit un filet de sang couler le long de son bras et s'aperçut que ses menottes étaient dotées de pointes acérées, si il tirait sur une partie de la chaîne la menotte opposée se resserrait inexorablement. Essayant de réajuster sa chaîne pour soulager sa blessure son regard fut attiré par la forme assise dans sur la chaise. Il la vit se lever et s'approcher lentement de lui. Le visage de son geôlier à quelques centimètres du sien lui murmura :

"- Ça fait longtemps que je t'attends, comme tu vois j'ai tout préparé et j'espère que tu ne me diras pas trop vite ce que je veux savoir que je puisse m'amuser un peu."

L'homme se recula, son visage s'orna d'un sourire malveillant, il leva le bras et tira violemment sur la chaîne qui retenait son prisonnier. Un cri de douleur perça le silence au moment où les piques en métal transpercèrent l'un de ses poignets.


Après plusieurs heures de torture, le prisonnier, malgré toutes ses souffrances, ne voulait pas trahir le secret qu'il gardait. Il avait résisté à tout ce qui lui avait été infligé et n'aspirait plus qu'à une chose, la mort. Il l'implorait, la suppliait de venir le libérer enfin. Il recommença à délirer, mais son geôlier s'approcha de lui et lui jeta un seau rempli d'eau glacée. Il eut un soubresaut puis leva lentement les yeux vers son bourreau et le défia du regard. Le tortionnaire s'éloigna mais un rire éclata dans son dos. Surpris il se retourna et vit que son prisonnier avait totalement changé de visage, il en frissonna.

"- Vous ne la retrouverez jamais, j'ai si soigneusement découpé son corps et maintenant il doit plus rien rester d'elle."

Le prisonnier afficha un large sourire quand il vit l'horreur se dessiner sur le visage de l'homme face à lui mais celui ci se détourna rapidement et marcha jusqu'au mur opposé pour y saisir un gros couteau de chasse. L'autre, un rictus malsain accroché aux lèvres, continua à parler en le fixant, oubliant totalement le reste.

"- C'est tout ce que tu voulais savoir? Je peux te raconter tellement plus, comme sa façon de me supplier de ne pas la tuer et à quel point elle serait gentille si je la laissais vivre. Sais tu qu'elle criait ton nom quand..."

Plongé dans ses souvenirs les yeux vitreux, l'homme enchaîné n'avait pas remarqué que le couteau de chasse était à présent sur sa gorge. Son expression trahissait encore la surprise quand la lame s'enfonça dans sa peau.

Bonne lecture à tous, bonne chance aux participants.
Sondage en cours de demande, la modération a un peu de marge le temps que vous lisiez tout

____

Aux auteurs : Si d'aventure une coquillette disgrâcieuse, une erreur de ma part, une grosse connerie qui ruine tout, s'était subrepticement glissée au travers des mailles du filet de la compilation, vous connaissez (très bien pour mes nouveaux coupaings du Compulsive Club, maintenant ) le chemin de ma boîte à MPs.
Message supprimé par son auteur.
Message supprimé par son auteur.
Citation :
Publié par Nsileal/Mosimus
Je lis, je lis.

Je rappelle que les initiateurs de cette nouvelle édition se doivent de commenter tous les textes !
Je ne trouve pas la section idoine du contrat en 23 tomes que nous signâmes...

Si t'es sage, on verra. C'est le Bar ici

Tsabo gère mieux que Dou² du sondage on dirait, par contre le post-it c'est fourbe :/
La vache, 11 textes !
C'est bon, z'êtes rassurés à l'orga ?! Joli coup !
Bon, de la lecture pour ce week-end, donc... Cool !
Au fait, on vote jusque quand ? Ahem j'ai rien dit, ayé, j'ai vu...
Bien sûr, comme d'hab', ça serait vraiment bien urbain qu'après avoir voté, les votants viennent ici donner quelques précisions : ce qu'ils ont particulièrement apprécié dans le texte choisi, voire ce qui a pu les bloquer dans les autres textes.
Up.






Heu, non. Belle moisson !


Bon, je vais faire cela par p'ti bouts.

Le texte 1.

J'ai eu du mal à m'y mettre, quelque chose dans le style m'a un peu rebuté. Et puis... je me suis laissé prendre par l'ambiance. Une ambiance douce amère... J'aime bien ce texte !
Alors j'ai déjà voté (Texte 2), mais je vais détailler :

Texte 1 : Le texte me rappelle un peu certains souvenirs, j'aime bien l'ambiance qui en ressort. J'ai trouvé la fin un peu brutale par contre, et pas particulièrement bien amenée.

Texte 2 : Mon favori. Au début un peu de mal à accrocher, mais la narration m'a vraiment accroché, j'ai vraiment adoré la forme du texte, et la conclusion est juste superbe. Vraiment super sympa à lire.

Texte 3 : Pas réussi à accrocher, j'ai pas su rentrer dedans.

Texte 4 : Le style vulgaire tendancieux m'a vraiment pas accroché, et la conclusion se devine bien avant la fin.

Texte 5 : Le style est sympa, le texte un peu morne, voire monotone. Conclusion un peu surprenante, mais j'avoue ne pas avoir plus accroché que ça à celle ci et la forme.

Texte 6 : J'ai eu du mal à me situer dans le texte, et au moment où l'on prend pied, la conclusion arrive. Conclusion qui d'ailleurs selon moi aurait du couper net plus tôt.

Texte 7 : Le début m'avait bien accroché, mais la suite non, le style est toutefois sympa, mas je sais pas, il manquait un truc. Joli texte, mais pour moi vraiment pas au niveau du 2.

Texte 8 : La sci-fi c'est pas mon truc, et pas accroché à la narration.

Texte 9 : Spécial, il m'a accroché, mais rebuté un peu en même temps, la conclusion est pas bien amenée, un peu bancale, dommage, y'avait du potentiel.

Texte 10 : Beaucoup de mal avec la narration, malgré l'histoire somme toute sympa.

Texte 11 : Celui que j'aime le moins dans le lot. Rien qui accroche, un peu trop préfabriqué selon moi, et glauque juste pour l'être.
Citation :
Publié par Shalf
14 votants, c'est bien.

3 commentateurs, c'est moins bien !

Allez zou, venez nous dire ce qui vous touche, ce qui vous rebute, dans ces textes.
Donne le bon exemple
Texte 2

Bonne mise en place, un récit structuré, qui se tient, avec une fin trop prévisible, mais bon, une structure solide et intéressante. Toutefois, je n'accroche pas. " Lumière, anticipation et espoir. Douleur et honte" ? Franchement, c'est une solution de facilité qui ne tient pas la route, de juste nommer des émotions. En tout cas, ce n'est pas cela qui fait vivre l'émotion au lectrices et lecteurs... Dommage. Ce texte n'aura clairement pas mon vote, c'est un synopsis, pas une nouvelle.
Citation :
Publié par Yzaline
Donne le bon exemple
Çaytrayvil !

On verra au hasard des nuits Pis je prends exemple sur Tabou, organisatrice exemplaire, qui était restée neutre jusqu'à la fin dans la précédente édition !

Bon ok argument faible, mais je n'ai pas encore eu ma dose de malt quotidienne.
Vote tout à fait subjectif, bon déjà je suis désolé mais je n'arrive pas vraiment à accrocher aux récits à la première personne, ou "du moi je" transposé à la troisième, et la torture non plus. Je précise c'est vraiment selon ce que j'aime lire.
Bref j'ai voté le texte 2 le seul que j'ai lu jusqu'au bout.
J'ai trop la flemme de détailler pour chaque texte, mais certains écrits sont un peu brouillons, perdent le lecteur en route, l'émotion doit être suscitée, pas jetée à la tête en une suite de mots.
Ceci n'est qu'un avis subjectif

J'ai voté pour le 7 qui véhicule une ambiance malsaine entretenue tout au long de la narration, laissant le lecteur baigner dans ce bain de poisse duquel il aimerait sortir au plus vite, sans toutefois y arriver.
Texte 1 : l'histoire ne m'a pas vraiment captivé, mais c'est bien écrit.

Texte 2 : j'aime bien le style d'écriture, la façon dont c'est raconté, mais le thème ne m'a pas trop intéressé. Peut-être avec un garçon et une belle-mère, ça aurait pu être plus surprenant.

Texte 3 : Pas lu jusqu'au bout. trop long à se développer.

Texte 4 : J'aime bien, ça change des thèmes glauques. Malgré tout, la fin est prévisible.

Texte 5 : Pas lu jusqu'au bout. L'histoire de la petite fille abandonnée par sa mère, j'accroche pas trop.

Texte 6 : Mal présenté, ça donne une impression de longueur alors que le texte est juste énormément aéré. Pas eu le courage d'aller jusqu'au bout.

Texte 7 : Ambiance malsaine dès le début, pas mal de jeu sur les non-dits. Bien pensé même si le thème est pas forcément facile à aborder

Texte 8 : Pas super intéressé par l'histoire en fait.

Texte 9 : J'ai pas accroché à la présentation trop "tout d'un bloc". J'ai pas lu jusqu'au bout non plus.

Texte 10 : Pareil qu'au-dessus.

Texte 11 : Simple et direct. Bonne organisation des paragraphes, accrocheur, celui que j'ai le plus apprécié.
Message supprimé par son auteur.
Me semble que y'a une contrainte technique qui empêche de faire ça, sans perdre tous les votes actuels, donc on oublie (me trompe-je, lurker expert de Vbulletin caché au fond à gauche, oui toi, là !?).

On va donc être obligé de bump comme des sales pour assurer une visibilité optimales de la bestiole, j'en ai peur. En mettant le paquet ce WE, qui sera le dernier de la période de vote.
Je ne doute pas qu'avec votre doctorat es animation forum Shalf & Eckhaert, vous serez à même de créer l'envie chez les bariens de voter au centuple du nombre actuel des votants.

Next time: demander aux auteurs un résumé ? ^^
Répondre

Connectés sur ce fil

 
1 connecté (0 membre et 1 invité) Afficher la liste détaillée des connectés