L'Unique
Après notre entrevue, j’entrepris d’aller me laver. Il ne restait que deux jours avant la cérémonie. Je me devais de préparer mon départ de la maison. Blanche était nerveuse, je le sentais dans sa façon d’être. Nous avons traversé pas mal de choses ensemble, et ce lien était là. Ce soir-là, je l’attendais bien au fond du lit, je voulais partager le peu de temps avec elle avant de la quitter complètement. Elle arriva fort tard. Elle se mit en chemise de nuit et elle me rejoignit dans le lit. Je me retournais pour lui signifier que je ne dormais pas.
- Et bien petite, tu ne dors pas ?
- Non, je t’attendais !
- Tu dois bien être excitée ?
- En effet, il me tarde de les prononcer !
- J’aurai aimé venir, tu sais, mais je dois être aux fourneaux pour faire un repas digne de cet évènement, et La Mac Harcourt y tient à ce que cela soit parfait !
- Je sais Blanche, mais tu seras là pour moi.
- Tu es bien reconnaissante petite. Tu sais, je ne regrette rien. Tu es comme ma fille.
A ce mot, des larmes vinrent. Elle me serra contre elle. Je me laissais aller pour une fois, elle m’avait protégée comme une mère, et ce lien maternel me manquait et je m’en rendais compte. Elle me berça ce soir là comme une enfant qui se rendait compte du manque affectif. Je voulais être forte tout le temps, et mettre aux oubliettes ces sentiments d’attachement ! C’était impossible à ce moment, toute la haine envers mes parents se déversait dans mes larmes. Blanche avait ce droit de me voir faible, elle était celle qui m’avait donnée sa présence. Je reniflais et elle me tendit un mouchoir.
- Allons, petite, on ne va pas se laisser abattre ! Tu vas devenir un bon soldat et je suis déjà fière de toi !
Ses paroles me remplirent de joie. Cette nuit, je dormis dans ses bras.
Le lendemain matin, je me levais de bonne heure. Je m’habillais vite, et je descendis. Au passage, je rencontrais Léonie et le père Signasse. Je les saluais. Ils entrèrent dans le bureau. Et ils fermèrent la porte.
Je pris le chemin de l’église. Je voulais prendre le temps de méditer, de réfléchir aux derniers évènements, et je comptais que l’Unique m’aide dans cette réflexion.
C’était bien la première fois que je voulais m’entretenir avec lui, mais viendrait-il à mon appel ? J’avais vu bon nombre de personnes faire appel à lui lors des offices. Peut-être qu’il entendrait ma demande. L’église était vide ce qu’il me soulagea grandement. Je ne voulais pas être importunée. Le silence était, mes prières commencèrent. Je laissais mon âme s’ouvrir. Une chaleur envahit mon corps. Je me sentais bien et je me libérais de mes mauvaises pensées que j’avais pour mes parents. Je ne pensais pas que le recueillement donnait un tel état de bien-être. Dans ma tête, une lueur minuscule apparu. Je voulais m’y accrocher. Elle devint plus vivante quand mes lèvres se mirent à chanter un cantique. Je laissais ce charme agir ! La chaleur se fit plus intense quand mon chant se fit plus fort. J’étais surprise et pourtant, je ne pouvais plus m’arrêter. Le chant se fit léger, la lueur grandit et elle se transforma en une flamme belle et chatoyante. Mon esprit ne faisait plus qu’un avec elle. Ma volonté de continuer s’estompa quand je sus que j’allais choisir ma voix : l’Unique m’avait choisie et je me devais de lui appartenir corps et âme.
Le c½ur emplit de cette chaleur, j’ouvrais les yeux. Je fus déçue de voir que rien autour de moi n’avait changé !
Je me remis de mes émotions et je suis rentrée. Je voulais raconter cet état à Blanche mais elle était occupée avec ses légumes et il y avait trop de gens autour d’elle pour que je me livre ainsi. Je décidais de le garder pour moi. La servante de Dame Léonie me dit de la suivre pour aller voir sa maîtresse. Elle me ramena à la réalité.
Je rentrais dans son bureau avec un sourire chaleureux. Je n’aimais pas porter un masque, mais avec le temps, je ne voulais pas être vulnérable aux yeux des autres, et surtout devant cette femme. Elle me fit signe de m’asseoir.
- Amarhante, j’ai une nouvelle pour toi ! Armand m’a confiée qu’il n’avait pas encore su acquérir assez de confiance en lui pour devenir paladin.
Il lui avait parlé.
- Je me suis entretenue ce matin avec mon oncle et il pense qu’il serait bien qu’il t’accompagne avec Sir Avoye sur le terrain. Cette idée ne me réjouie pas ! Mais bon, mon oncle a été toujours de bons conseils donc, j’ai décidé qu’il irait. Je lui laisse 6 mois pas un de plus.
Je me réjouissais intérieurement ! Elle avait craqué, elle était contrariée certes ! Quelle belle victoire ! Pour une fois, je me sentais plus forte qu’elle. Je savais un secret d’elle. Ce n’était pas très catholique d’avoir le dessus sur l’autre, mais nous sommes des êtres humains tous alors parfois, on se laisse aller à la vanité !
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