[Ex-Libar : Chapitre Deux] Enfin les textes, le vote et les résultats !

Affichage des résultats du sondage: Quel est votre texte préféré parmi ceux proposés ?
Texte n°1 9 20,45%
Texte n°2 2 4,55%
Texte n°3 10 22,73%
Texte n°4 1 2,27%
Texte n°5 4 9,09%
Texte n°6 3 6,82%
Texte n°7 6 13,64%
Texte n°8 1 2,27%
Texte n°9 0 0%
Texte n°10 4 9,09%
Texte n°11 1 2,27%
Texte n°12 3 6,82%
Votants: 44. Vous ne pouvez pas participer à ce sondage.

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Bonsoir, bariens, bariennes

http://cours.funoc.be/essentiel/article/img136/ecrivain.jpg

Bienvenue à la présentation des textes du Chapitre Deux de l'Ex-Libar !

Pour ceux qui n'auraient pas suivi, ils peuvent toujours admirer les textes du premier Chapitre ICI.

Rappelons brièvement de quoi il s'agit, nous vous avions proposé cinq images, et le but de jeu consistait à en choisir une et à se servir d'elle comme support à une courte histoire. L'image peut être un instantané de l'histoire ou une gravure qu'on aurait pu trouver à coté de votre texte.

Afin de rafraîchir vos mémoires, voici les images qui vous avaient été présentées (cliquez sur les images pour les voir en grande taille) :

Image numéro 1 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag1mini.jpg

Image numéro 2 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag2mini.jpg

Image numéro 3 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag3mini.jpg

Image numéro 4 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag4mini.jpg

Image numéro 5 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag5mini.jpg


Nous avons reçu une dizaine de textes, ce qui est fort bien vu le peu d'entrain apparent que l'idée avait suscité, mais finalement certains ont tenté l'aventure. ^^

Nous vous invitons à les lire, à les savourer et à les apprécier, et ensuite à choisir votre préféré. Pour cela, il suffit de voter pour votre texte favori en vous référant à son numéro.

Le vote reste ouvert deux semaines, afin de vous laisser tout le temps nécessaire pour lire les proses de nos bariens mystérieux. Au-delà de ce délai, les auteurs respectifs seront révélés au grand jour et les deux qui auront reçu le plus de voix auront la possibilité de préparer le Chapitre Trois de l'Ex-Libar (idée, thème, organisation, ...).

Voilà, trêve de bavardage, les textes sont joints ci-après, bonne lecture et surtout passez un bon moment !

Les roxxor-organisateurs, Lulu & LND.
Texte numéro 1 :

Image numéro 3 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag3mini.jpg

Citation :
Motel: n.m (mot anglo-amér). Hôtel situé à proximité des grands itinéraires routiers. Spécialement aménagé pour accueillir les automobilistes

Ah le Motel, c'est quelque chose de bien étrange. Moi je vais à l'hôtel, pas au motel, enfin comme tout le monde. C'est vrai çà, qui va au motel ? Je me demande bien. C'est un peu le genre d'endroit que tout le monde connaît, tout le monde sait ce que c'est, mais finalement, personne n'y met les pieds.
Les cinéastes peut être, dans les polars ou les films américains, y'a toujours une scène glauque dans un motel, une prostituée qui attend de se faire tringler par un psychopathe qui va l'étrangler, un gangster qui vient de braquer une banque, un chasseur de primes ...
C'est chouette quand même le motel, y'a toujours de l'action.
Le truc c'est que si toi tu vas passer la nuit dans un motel, tu verras pas tout çà, ca n' arrive qu'aux autres.
«Les autres», c'est pas toi. A toi il ne t'arrive rien, à la limite des fois t'oublis tes clefs dans ton appartement alors que t'as claqué la porte, ou alors tu réussis à ne pas te faire voler ton téléphone par des voyous dans le métro, et ensuite tu vas raconter ta palpitante aventure à tes amis en enjolivant ton histoire autour d'une bière bien méritée.
«Les autres», eux s'ils vont au motel, ils entendront les cris d'une femme battue par un ivrogne, ils verront les murs trembler parce que le voisin a décidé de pilonner sauvagement la catin qu'il vient de se payer. Avec un peu de chance, ils vivront peut être une fusillade durant la nuit, et devront dormir sur la moquette pour éviter une balle perdue.
En tout cas, tu peux être certain que si toi tu vas passer une nuit au motel, tu sera déçu, aussi certain
qu'il y'a toujours une porte qui se referme toute seule derrière toi dans un donjon.

Oui «les autres» c'est comme çà, ils ont de la chance. Mais en même temps c'est normal, eux ils vont au motel. Tu ne risque pas de gagner a la loterie si tu ne joue pas.

Là c'est à se demander si c'est vraiment un motel, après tout, il n'y a pas de harley davidson rutilante garée devant.

Je ne comprends pas pourquoi on («on» c'est pas moi, ni toi d'ailleurs, ni même eux, c'est un peu tout le monde mais ca ne nous concerne pas) prête au motel une image si sordide. D'accord c'est souvent triste, (et encore, un pot de fleur suffirait a égayer l'endroit), sale (enfin çà toi et moi on en sait rien, puisqu'on y va pas, mais on t'as dit que c'était sale), enfin bref, ce n'est pas attirant, mais pourquoi c'est là que les crimes se produisent ? C'est un endroit comme un autre. Ce n'est qu'un hôtel proche de la route. Y'a pas de pancarte où il est écrit : Ici vous pouvez violer des gens et les cacher dans le placard. (Ou peut être que cette pancarte existe, mais d'une, elle doit être trop petite, et de deux, je ne la verrai pas sans aller dans un motel).
De toute façon, si j'étais un gangster, (je sais que toi aussi si tu devais refaire ta vie, tu serais tueur à gage), c'est pas dans un motel que j'irais me planquer. Bien trop cliché, les flics me débusqueraient bien vite.

Moi quand on parle de motel, j'ai toujours l'impression qu'il fait nuit, voilà, je sais pas pourquoi, mais c'est comme ca, je n'arrive pas à imaginer un motel le jour. D'ailleurs, je me demande si les motel n'apparraissent pas sur le bord des routes que la nuit. Je crois même que j'ai du en voir que un ou deux dans ma vie, et encore, la première fois c'était à la télé, et la deuxième, j'étais bourré.

A vrai dire, je sais même pas si toi et moi on aurait les couilles d'aller passer une nuit là dedans, (enfin je veux dire chacun dans une chambre), même en sachant qu'il ne nous arrivera rien.
Là tu te dis, oui je suis pas une lopette, quand tu veux.


Imagine, toi et moi on fait le pari d'aller cette nuit au motel. Tu pars de chez toi, je sais que tu prendrais au moins un couteau suisse, (au cas où le motel n'est pas qu' une légende), tu prends ta bagnole aux sièges poussièreux, t'as le visage gras après deux heures de route, tu vois au loin dans la nuit (oui dans la nuit, puisque les motels ne sont là que la nuit de toute façon, cette enseigne minablement grosse, d'un orange vomi, avec ces néons qui clignotent irrégulièrement. Tu t'arrêtes sur cette aire d'autoroute (ah ca aussi les aires d'autoroute c'est glauque n'est ce pas), tu vois ce fameux motel, accueillant comme une porte de prison, avec tous ces camions de loubards (routards je voulais dire). Là tu penseras bien à fermer ta voiture à clef si t'oses en sortir. Tu vas même penser à prendre ton autoradio sur toi, pourtant tu sais bien que les routiers ont tous la radio dans leur camion, et que faudrait vraiment être malchanceux, ou être comme «les autres», pour te le faire voler ici.
Tu vas demander s'il reste un chambre à l'acceuil, d'ailleurs, il reste surement une chambre, c'est pas le genre d'endroit où on bataille pour avoir sa place. Si jamais y'a pas de chambre libre, c'est que c'est une journée hors du commun (le jour de journée qu'il n'arrive qu' «aux autres», et là tu risquerais d'assister à un meurtre dans la nuit, vaut mieux rentrer chez toi.
Le mec qui se fait chier comme un rat mort te tend une clef que tu prends du bout des doigts.
T'es dans ta chambre.
Là tu m'appelles, tu te demandes quand est ce que je te rejoins. A la base c'était un pari, t'as voulu me montrer que c'était facile.
T'es tout seul, il est environ minuit, tu comprends que je t'ai laché.
Tu me traites de tous les noms, me laisse plusieurs messages sur mon répondeur, en vidant ta batterie et t'as oublié ton chargeur (ben oui, toi t'as pas droit aux aventures palpitantes comme au cinéma, mais t'oublis ton chargeur de téléphone), tu te dis que s'il t'arrive un truc, tu pourras appeller personne à l'aide, et autant dire que personne n'a pas pour habitude de venir en aide. Tu stresses, tu balises, tu flippes. Tu as peur.
Fallait pas regarder trop de films. T'es pas à l'aise, tu n'es pourtant qu'à deux heures de chez toi, dans ta ville, dans ton pays, mais t'as l'impression d'être au bout du monde, et nu.

Puis tu te lèves de ce lit, qui finalement est propre, tu remarques que les chiottes ont été néttoyé, que la lumière fonctionne, qu'il n'y'a pas de cadavre dans le placard, que l'eau du robinet est potable, que tu peux surveiller ta voiture à la fenêtre (car il y'a bien une fenêtre), que les routiers sont au bar en face, en train de parler gonzesses, qu'il n'y a pas pas de capote usagée sous ton lit, et que le mec d'avant a même oublié 10 euros dans le tiroir.
Là, là seulement tu t'endors.
Au lendemain, tu rentreras chez toi, tu m'appelleras pour me donner rendez vous dans un bar pour me raconter ton aventure autour d'une bière.
En me disant «moi, je suis déjà allé dans un motel», l'air mystérieux et fier.
Et je te répondrai, complice, le sourire aux lèvres, que tu as passé une nuit comme «les autres».
Texte numéro 2 :

Image numéro 1 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag1mini.jpg

Citation :
Il secoua d'un geste rapide l'allumette pour l'éteindre, et la laissa tomber dans l'herbe humide avant de l'écraser sous sa semelle encore boueuse. Le vent s'était levé depuis un moment déjà, et les arbres qui entouraient les ruines et le petit parc émettaient une sorte de vague murmure, les feuilles agitées et les branches secouées par les courants d'air. L'après-midi était déjà bien entamé et le soleil achevait sa course à l'horizon, sans que cela ne semble importuner l'homme d'une trentaine d'années qui fumait tranquillement dans la cour, adossé à l'une des solides colonnes de pierre blanche sur lesquelles le temps ne semblait pas avoir de mise. Sa peau commencait à frémir, l'air rafraichi n'ayant guère de mal à passer au travers de sa chemise, dont la blancheur contrastait avec la cravate noire qu'il arborait.

-"Journée de merde."

Il grommela quelque chose d'inaudible en envoyant sa cigarette sur le coté et enfonca les mains dans ses poches pour les réchauffer, plissant un peu le front sous l'effet de ses pensées. Rien d'inhabituel au premier abord, un homme seul, perdu dans ses idées au milieu de nulle part, pourtant quiconque le connaissant se serait dit qu'il avait pris dix ans d'un coup, et le visage frais et enthousiaste du cadre plein d'avenir avait fait place à la mine soucieuse et au regard usé d'un campagnard avec suffisament d'années au compteur pour voir d'un autre oeil le monde environnant. Il soupira longuement et passa sa main dans ses cheveux, peigne grossier visant plus à se décoiffer pour se remettre les idées d'aplomb qu'autre chose, et l'effet s'avéra réussi, plusieurs mèches de ses cheveux bruns foncés retombèrent aussitôt dans tous les sens. Quelques murmures légers en provenance de derrière l'arbre, à sa droite, lui arrachèrent un nouveau soupir agaçé, avant qu'il ne se retourne dans sa direction.

-"Ta gueule, tu m'empêches de réflechir."

Le bruit cessa aussitôt, mais sans doute trop tard, et l'homme s'éloigna de la colonne d'un pas lent, essuyant ses mains terreuses sur un gros chiffon tiré de sa poche, finissant par le laisser choir au sol comme le reste de ses affaires.

-"T'aurais mieux fait de pas te réveiller, tiens."

Il s'était retourné en direction de l'arbre, ou plutôt de la silhouette allongée qui remuait faiblement derrière, recouverte par la pénombre croissante en cette fin de journée. Il peinait à la distinguer, moins par la faute de la zone d'ombre qu'à cause de son esprit troublé qui l'empêchait de se concentrer sur ses propres sens. Il ne s'attendait pas à avoir de nouveau une quelconque interaction avec elle, et peinait à réaliser qu'elle soit encore consciente après cette journée, qu'il se rememorait par la même occasion, complètement égaré dans sa propre mémoire, celle de sa folie.

Le corps de la jeune femme remuait un peu malgré les cordages serrés qui lui nouaient les mains dans le dos et les jambes ensemble, trop serrés sans doute, lui coupant presque la circulation sanguine, et la corde de mauvaise qualité avait depuis longtemps déjà laceré sa peau à plusieurs endroits. Elle n'avait plus la force de se débattre et se laissa faire lorsqu'il la souleva sans ménagement, comme un gros colis, sans se soucier des morceaux de robes dechirés que le vent emportait à chaque pas. Le tissu était autrefois blanc, avec quelques motifs bariolés, désormais couvert de sang et de terre, dechiré brutalement par endroits ou simplement usé par les déplacements. Il traversa la cour d'une traite, sans même un regard pour la captive à demi consciente, trop epuisée pour seulement exprimer sa douleur physique aussi bien que morale, et resignée à se laisser faire, incapable d'aller où que ce soit dans son état.

-"Allez c'est bientôt fini."

Il la déposa sans ménagement dans la terre fraîchement retournée, à coté du grand trou rectangulaire qu'il avait mis l'après midi à creuser dans le parc. Il avait soigneusement rassemblé la terre en tas à coté, et avait creusé sur plus d'un mètre de profondeur, profitant de l'humidité et du sol mou pour accomplir son ouvrage sans trop de peine. L'homme se pencha sur elle après l'avoir retournée sur le dos d'un coup de pied dans les côtes.

-"Dommage pour toi que tu sois si resistante ma jolie, ça aurait été plus simple pour toi de crever tranquillement cet après-midi."

Son regard vitreux se posa sur sa victime terrifiée, mais silencieuse. Elle parvenait encore à le regarder et à secouer la tête machinalement, les machoires crispées sur le chiffon qui lui servait de baillon depuis le matin même, et qu'elle avait presque réussi à déchirer à force de le mordre pour chaque coup qu'elle avait subi. Sa peau était livide, transie par le froid, et il ne restait plus que quelques bouts de tissu éparses pour couvrir son corps meurtri.

-"Allez, hop, suffit les pleurnicheries."

Il la poussa dans le trou d'un coup de pied méprisant, arrachant un cri etouffé lorsqu'elle entra en contact avec la terre humide, la chute ayant sans doute ravivé la douleur d'un membre fracturé ou d'une côte brisée, puis se tourna en direction de ses outils. Le pelle portait encore les traces de sang et la partie métallique était un peu gondolée, conséquence du nombre de fois qu'il l'avait abattue sur la jeune femme, frappant avec une régularité implacable jusqu'à ce qu'elle sombre dans l'inconscience. Il la ramassa d'une main et récupera le soutien-gorge de sa victime de l'autre, celui là même qu'il avait eu tant de mal à enlever en début de journée, et qui l'avait forcé à avoir recours à des méthodes plus brutales pour parvenir à ses fins. Il le laissa tomber dans le trou avec un rictus victorieux, avant de lancer une première pelleté de terre par dessus. Le contact de la terre sur ses jambes provoqua une nouvelle énergie chez la victime, et elle se débattait tant bien que mal pour se dégager, alors que les pelletées s'enchainaient, ensevelissant un à un ses membres endoloris sous les couches de terre. Il comptait bien faire durer jusqu'au bout, et prenait un plaisir malsain à ne pas recouvrir son visage, l'effleurant parfois du bord de sa pelle ou laissant glisser un filet de terre avant de rajouter une nouvelle pelletée sur le bas du corps.

-"Va falloir en finir maintenant."

La lourde pelletée de terre glissa sur le visage mortifié de la jeune femme, l'étouffant à moitié et la forcant à se secouer tant bien que mal pour chercher un peu d'air et profiter d'un maigre sursis, mais la seconde chute de terre ne semblait pas venir.

-"Au fait, tu vas être ravie de l'apprendre avant de mourir, c'est ton cher époux qui m'a payé pour ça." ajouta l'homme, ponctuant sa phrase d'un rire gras.

-"Merci pour l'information."

Le rire s'arrêta net sous l'effet de la stupeur, et avant qu'il n'ait le temps de se retourner pour voir d'où provenait la voix, la détonation de l'arme vint briser le silence des ruines, suivie de peu par la chute d'un corps dans la terre fraîchement retournée.

Le tireur rangea l'arme calmement et nota quelque chose dans son petit calepin, profitant des halos de lumières émis par les girophares, et sans porter la moindre attention aux silhouettes qui s'affairaient autour du trou pour dégager la victime. L'une d'entre elles vint à sa rencontre d'un pas pressé.

-"Monsieur, votre femme est encore en vie !"
-"C'est une merveilleuse nouvelle, mais ne perdez donc pas de temps avec moi, retournez aider vos collègues voyons !"

Il ponctua sa phrase d'un sourire avant de se diriger vers l'ambulance, attardant son regard sur l'une des colonnes ensanglantées, théâtre probable de la scène du matin même et que la nuit recouvrait peu à peu.
Texte numéro 3 :

Image numéro 2 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag2mini.jpg

Citation :
Je me souviens bien de cette nuit la, nous étions cachés entre le mur et l'immense armoire en bois sombre.Il y faisait toujours très froid et c'était tout noir mais on s'y sentait en sécurité.Elle me serrait très fort contre elle, enfouissant sa tête dans ma fourrure sale pour y étouffer les quelques larmes qui coulaient de ses petits yeux.Elle ne voulait jamais qu'on me lave, mon odeur était la seule chose qui la réconfortait quand elle avait peur , ce qui arrivait beaucoup trop souvent.

En y réfléchissant bien je crois que je ne l'avais jamais réellement vu sourire ou tout au plus un petit sourire triste. Les gens disaient qu'elle était timide mais moi je savais que c'était la douleur lancinante et l'angoisse permanente qu'elle ressentait à chaque instant qui l'empêchait de sourire. Ils disaient aussi, en voyant tous ses bleus, que c'était une petite fille très maladroite.Ses parents répondaient que c'était parce qu'elle avait toujours la tête dans les nuages. Elle me racontait ça le soir, alors que nous étions blottis sous sa couette, puis elle s'endormait, épuisée, la tête contre moi en me disant qu'elle m'aimait que j'étais le seul qui la comprenait.

Ce soir la, après une soirée encore plus angoissante que d'habitude, on avait senti tous les deux que ça allait bientôt tomber et elle essayait de se faire la plus petite possible. Elle respirait à peine en me serrant fort et en murmurant comme une prière de la laisser devenir invisible, qu'on ne puisse plus la remarquer pour qu'elle se sente enfin en sécurité.Ca me rendait triste de la voir comme ça. Elle m'a alors emmené dans sa chambre ,comme tous les soirs, puis a éteint la lumière pour qu'on la voit moins et s'est accroupie dans un coin derrière son lit. Elle attendait d'entendre les pas, puis la porte et la elle serait enfin tranquille, il serait couché. Elle pourrait alors se réfugier sous sa couette et dormir en faisant le moins de bruit possible. Elle sentait son coeur battre si fort qu'il couvrait tous les autres bruits de la maison.

Mais elle n'avait pas entendu les pas. Elle savait que ça n'était pas bon signe et qu'elle devrait aller se cacher. Nous nous étions donc retrouvés derrière la vieille armoire dans un recoin du sous sol, il y faisait très froid pendant l'hiver et très noir. Elle releva la tête et me susurra a l'oreille :

"-T’inquiète pas doudou il nous trouvera pas ici. Faut pas que t'ai peur je suis la, je te protégerai toujours c'est promis.Moi aussi j'ai un peu peur et beaucoup froid mais c'est pas grave on est tous les deux on reste tous les deux hein? Tu m'abandonneras pas toi je sais bien , je t'aime fort mon doudou. T’inquiète pas il nous trouvera pas..."

Puis, entendant du bruit, elle sursauta et commença à regarder partout autour d'elle. Lentement, elle sorti sa tête pour voir ce qui se passait. Cétait sur il était réveillé et il n'était pas content. Elle entendait ses pas lourds dans l'escalier. Elle se leva doucement me serrant contre elle et se dirigea sans bruit, respirant a peine pour ne pas se faire entendre, vers la porte du sous sol qui donnait dans le jardin. Une fois dehors, elle frissonna, son petit pyjama rose avait du mal a la protéger du froid qui régnait et même si dans sa hâte de fuir elle ne s'en était pas rendue compte, un manteau de neige recouvrait le sol.

Elle courut jusqu'à sa petite maison en bois, où elle aimait beaucoup jouer avec moi l'été, y entra et s'allongea sur une vieille couverture. Elle était recroquevillée et me berçait contre elle en me susurrant comme une complainte "faut pas que tu aies peur de papa doudou, il nous trouvera pas ici, faut pas que tu aies peur...". Je savait bien qu'il faisait trop froid dehors, en plein mois de décembre, pour une si petite fille mais elle semblait vraiment paisible quand elle ferma les yeux et s'endormit.

Ils nous retrouvèrent le lendemain matin. Elle dormait toujours et je n'ai pas compris pourquoi elle ne voulait pas réouvrir les yeux. On m'a transporté sur son lit et je l'ai longtemps attendu, jusqu'à ce qu'un jour sa maman me mette moi et les autres jouets dans un grand carton et la j'ai su qu'elle ne reviendrait plus. Elle me manque...
Texte numéro 4 :

Image numéro 2 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag2mini.jpg

Citation :
Un regard, tourné vers l’inconnu. Que cherche-t-il ? Qu’attend-il de la vie ?
La curiosité, l’innocence font de lui une aspiration au bonheur.
Il guette, il furète, il se meut, change de couleur… Il vit.

Quand bien même il serait le reflet d’une souffrance passée, il continue à espérer. Pourquoi se fermerait-il à l’appel de la curiosité ? A cet espoir qui lui donne envie de se plonger dans l’avenir ?

Une pointe d’inquiétude, une hésitation mêlée d’impatience, le poussent à aller vers ce monde qui l’attire inexorablement.
Comment découvrir la vie s’il continue à se cloîtrer ? Cette aura de protection, bien que fêlée, l’enveloppe et lui murmure de se lancer au devant des choses.

Que pourrait-il bien lui arriver ? Une expérience de plus, voilà tout. Ce « tout » qui fait de lui ce qu’il est : à la fois mûr, distant, curieux et timide.

Ce regard évoluera au fil du temps. Se durcira, deviendra farouche, se rebiffera, mais restera toujours le reflet de son âme.

Fidèle à ses croyances, il poursuivra son chemin, à la recherche de ce qu’il ne trouvera peut-être jamais. Il ne sait même pas ce qu’il cherche, il se doute juste que quelque chose l’attendra toujours quelque part, au détour d’un chemin tortueux, faisant de lui une image malléable, une fenêtre béante, s’ouvrant mais se refermant parfois, au gré des rencontres.

Il croisera d’autres regards avec lesquels il échangera des paroles muettes. Ils dialogueront, se feront des confidences, s’uniront parfois pour partager leur route, puis se sépareront, chacun allant vers sa propre quête.

La vie est si simple, si riche, et le regard si avide de connaissances. Ils sympathiseront tous deux, s’apprivoiseront, chacun puisant l’énergie de l’autre pour trouver le courage d’aller de l’avant. Une complicité naîtra de cette union, et ils apprendront à partager leur quotidien, l’un influençant l’autre, et donnant à chaque tournant un souffle différent.

Fort de cette complicité, le regard grandira, s’aiguisera, et épousera les nouvelles formes qui formeront cet univers qui lui est propre.

Ouvrons grands les yeux, n’ayons pas peur de l’inconnu, car cet inconnu fait de nous ce que nous sommes : des regards se défiant, s’entremêlant, se séduisant, pour goûter à ce mystère qui nous entoure, et ne jamais nous en trouver rassasiés.
Texte numéro 5 :

Image numéro 3 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag3mini.jpg

Citation :
Je sortis de la Ford, elle en fit autant. Les néons zébraient la main sombre qui recouvrait notre terre. Clignotaient, s’éternisaient, reluisaient. Je pointai un doigt vers l’ensemble lumineux et anarchique :
« - Ce sont nos étoiles, ma chérie. Les nôtres. » Elle me fixait de ses yeux plissés et je devinais que dans l’obscurité, elle souriait à mes divagations. J’éclatai de rire, puis je levai à nouveau mon doigt vers un néon incandescent. Dans la nuit, il surpassait les autres en intensité, incarnat comme l’enfer, le sang, la luxure. Les lettres s’affichaient sur fond obscur, les unes après les autres. Motel. Nous étions comme les moustiques, attirés par le sang et par l’orgie. Un tourbillon de poussières scintilla un bref instant.

Je pris ma belle par la taille, glissai ma main sur une de ses hanches, imaginai la volupté qui tendait le tissu de sa robe. Sa main fit de même, elle la lova dans une des poches de mon pantalon en coton. Nos pas claquèrent sur l’asphalte craquelé, puis nous passâmes sous le porche du motel.

A l’intérieur, une lumière pisseuse éclairait le comptoir sur lequel étaient dispersées des revues sur les bayous, le golf à neuf trous, les Chevrolet à la carrosserie rutilante. Accoudé, le réceptionniste se penchait légèrement par-dessus. Il nous souriait et je lui rendis la pareille. J’ai toujours aimé les gens qui sourient.
« - C’est pour une chambre, m’sieur et ma’ame, j’suppose.
- Vous supposez bien » rétorquai-je, mon sourire s’élargissant.
Il se retourna vers sa grille de niches, prit une clef et nous la présenta.
« - Chambre 38, j’ai un peu peur qu’v’soyez emmerdés par le néon, les autres chambres sont prises… » lâcha-t-il, contrit. Je haussai les épaules et m’emparai de la clef. Ma douce se contenta d’écraser son cigare dans le cendrier, puis elle dit malicieusement :
« - Ce n’est pas grave, dormir est secondaire cette nuit. »
Je sortis de ma poche trois biffetons de dix dollars.
« - Et bien… Bonne nuit, m’sieur ma’ame. Amusez-vous bien. » Il agita mollement sa main. Nous l’ignorâmes.

Nous rejoignîmes lentement notre antre d’une nuit. Déjà, l’excitation montait en moi. Elle, elle se dandinait devant moi, ses hanches roulant de manière scandaleuse. Et sa peau d’ivoire luisait, rougeoyante. Elle se retourna un bref instant et me dévisagea. Je devais paraître subjugué, elle poussa un petit rire moqueur. Elle posa sa main sur mon cœur et je le sentis battre, puis elle la ramena sur elle, à la naissance de ses deux seins.

Je papillonnai des yeux, puis ouvrit la porte. Nous prîmes à peine le temps de fermer, encore moins d’allumer. Le lit semblait tapissé de pétales de coquelicot. Je l’amenai près de celui-ci, puis nous nous enlaçâmes. Je griffai sa cuisse et elle soupira. Nous nous affalâmes, langues liées, lèvres jointes, le souffle déjà court. Dans le chaos d’un amour redlight, nos vêtements s’étiolèrent. Enfin, peau contre peau. J’étais avide de la sueur qui perlait doucement le long de sa chair. Nous étions mêlés et emmêlés. Nous respirions le même air, vivions le même songe cramoisi.

Nous roulâmes sur nous-même et je me retrouvai sur le dos. Mes mains fébriles glissaient le long de son corps et la lumière tamisée la sculptait, arc-boutée par le plaisir. Ses cheveux noir corbeau relâchés formaient une chape d’ombre bienfaitrice, notre seule intimité. Elle s’allongea sur moi et ses lèvres effleurèrent ma joue avec tendresse. Au creux de mon oreille, elle me murmura des vers ciselés par notre union, des râles marquant le tempo. Le reste ne fut plus que soupirs étouffés, gémissements intemporels, éclats fugitifs de rubis, mais toujours nous restions agrippés l’un à l’autre, jamais apaisés, jamais désaltérés, toujours illuminés par le néon écarlate.

Vint le jour et sa lumière éclatante et insidieuse. Je me réveillai le premier, aveuglé. Je plaçai ma main en éventail, devant mes yeux. Lentement, j’émergeai. Je sentis une main se glisser sur ma cuisse et je me tournai vers elle. Le regard embué, les cheveux emmêlés, elle mima un baiser avant de sourire.
« - Il est temps de partir » dis-je. Elle ne dit rien, se contenta d’acquiescer. Nous nous habillâmes en silence, un peu nostalgiques ou tout occupés à retenir dans notre esprit le rêve nocturne.

Dehors, le néon était éteint, comme un homme ayant perdu la splendeur de sa jeunesse. Elle le désigna :
« - Il aurait pu laisser allumé ce fanal. Il ramène tous les damnés de la terre ici… » J’acquiesçai. Sans lui, c’était la déperdition. Je sentais que le décompte infernal allait s’allonger… Un peu plus, un peu moins, quelle importance ? Je crachai et récupérai le thermos dans le coffre de la Ford.
« - Je vais lui dire. Monte dans la voiture, je reviens avec des sandwichs et du café. »
Je lui tournai le dos et rejoignis l’accueil. L’homme était toujours là, dans la même posture, saisi par la chaleur matinale. Il n’y avait personne d’autre. Un goût de fer me vint à la bouche.
« - Salut. Nous allons partir. Pouvez-vous remplir notre thermos de café et nous faire deux sandwichs au bacon ? » Il parut se réveiller et s’exécuta. Quelques instants plus tard, il ramena un paquet enveloppant le tout avec un sourire. Je tendis la main vers l’extérieur.
« - Vous devriez le rallumer. C’est une lanterne dans la nuit et le jour. Ma femme n’a pas apprécié que vous l’ayez éteint et moi non plus. » Sur son visage se dessinait une esquisse de refus. Je ne lui laissai pas le temps. Je sortis un Colt à canon court et lui logeai deux balles dans le buffet. Il s’affala sans bruit. Je me penchai par-dessus le comptoir et avisai l’interrupteur du néon. Je l’enclenchai.

Je rejoignis la voiture sans me presser et m’installai au volant.
« - On va à Black Lake, chérie. » Je démarrai et la Ford s’élança sur la route déserte et je marmonnai entre les dents « Amour et mort ne sont que deux facettes qui se rejoignent. On y perd toujours. » Et, un peu plus haut : « Regarde derrière toi. » Elle orienta le rétroviseur et aperçut que le néon vermeil brillait à nouveau. Elle eut un grand sourire, qui valait le paradis. Je pris le temps de la regarder, yeux dans les yeux, sans accorder plus d’attention à la route.
« - Nous reviendrons, Bonnie. S’il est toujours allumé, plus jamais nous ne nous perdrons, foi de Clyde. »
Texte numéro 6 :

Image numéro 2 :
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Citation :
"Elle est ... ? "

La voix de mon père s'était tue, laissant place à un assourdissant silence. Il fixait ma grande soeur d'un regard que je ne connaissais pas.

Le téléphone avait sonné quelques secondes plus tôt. Comme à mon habitude, je m'étais levée pour essayer de deviner à qui papa parlait. C'était devenu une sorte de jeu, depuis que maman était à l'hôpital à cause de l'accident. Elle devenait vieille, ma maman. C'était parce que mes parents s'étaient mariés avec une grande différence d'âge. Ca les dérangeaient pas. Moi je comprenais pas pourquoi papa avait choisi une femme de 13 ans plus vieux que lui. "L'Amour, ça n'a pas d'âge", qu'ils me disaient tout le temps. N'empêche, je comprenais pas.

J'étais toujours cachée derrière le petit rideau qui séparait le salon de ma chambre. Ma grande soeur et mon père était toujours plantés l'un devant l'autre. On aurait dit qu'un magicien avait stoppé le temps dans toute la maison. J'osais pas bouger non plus de peur qu'il ne voit que son sort n'avait pas marché sur moi. Le téléphone était le seul à montrer encore signe de vie. Il se balançait de gauche à droite, pendouillant de la main de papa. Il avait pas l'air de se rendre compte qu'il cassait toute l'ambiance de la maison. N'empêche, Je comprenais pas.

Ma soeur avait ce même regard que quand elle avait du réconforter notre voisine à la mort de Tim. Tim, c'était son chien, à la voisine. Le pauvre avait l'air d'être presque plus vieux qu'elle. Ma voisine, je la connaissais pas trop, si ce n'est qu'elle avait toujours pas la télévision chez elle. L'été je l'observais toujours de ma chambre. Elle jouait souvent avec son chien. Je comprenais pas comment une si vieille dame pouvait autant aimer s'amuser avec un si vieux chien. Alors la seule chose que j'en avais tiré de tout ces vieux, c'était que les êtres vivants se rapprochaient quand ils sentaient la mort arriver. Ils savaient que la mort couraient plus vite qu'eux. Pas moyen d'en réchapper. Alors peut-être qu'à deux, ils courraient mieux.

N'empêche que tout ça s'est vérifié. Tim est mort en se faisant écraser par la camionnette qui venait livrer les couches de sa maîtresse sénile. Elle a eu du mal à le supporter, elle croyait que c'était de sa faute. Alors on a essayé de la réconforter comme on a pu, mais ça à pas marché. Elle est morte peu de temps après. Je me demande si elle a rejoint son Tim là-haut. Peut-être qu'après tout c'est ce qu'elle voulait. il puait pourtant, son chien.

Depuis que maman a eu l'accident, c'était nous qui nous étions rapproché. Ma mère elle était factrice. Je comprends pas pourquoi les gens s'envoie toujours des lettres, avec le téléphone et l'ordinateur. C'est comme si on demandait aux Américains et aux Irakiens de se battre avec des arcs et des flèches. Je lui avais déjà dit, à ma mère. Elle avait rien voulu savoir. Et puis un midi elle était pas revenue manger. Et on a appris qu'elle s'était faite tabasser parce qu'elle avait refusé de donner un colis à un monsieur. Je lui avait dit à maman, que c'était dangereux de se battre avec un arc et des flèches. Quand je l'ai revu à l'hôpital, je lui ai dit " tu vois, je t'avais prévenu!". J'avais l'impression de tout comprendre et de tout savoir sur tout, j'avais l'impression d'être une adulte. Elle était dans le coma.

L'hopital me rappelle beaucoup de choses, beaucoup de mauvaises choses. Les docteurs me sourient, ils me connaissent. Il paraît que je couve quelque chose, quelque chose de grave. Moi j'en sais rien, ça m'empêche pas de faire ce que je veux. De toute façon ils ne veulent rien me dire, même pas ma famille. Je comprends pas.

Depuis, papa nous emmenait souvent moi et ma grande soeur au cinéma, ou au restaurant. Il nous offrait pleins de cadeaux, tout ce qu'on voulait. Même ma grande soeur était gentille avec nous. C'était Noël tous les jours.

J'aurai pas du me lever, j'ai mon coeur qui bat vite. Le téléphone sonne de nouveau et papa décroche. Il a les larmes aux yeux. Moi aussi. Ca fait ça à chaque fois que je vois quelqu'un pleurer.

Maman s'est envolée, papa pleure. Mais le téléphone continue de parler. On dirait qu'il a pas dit assez de saletés pour aujourd'hui. Papa pleure de plus belle et raccroche enfin. Je l'entends dire quelques mots à ma soeur. Soudain, je comprends, je vais retrouver maman.
Texte numéro 7 :

Image numéro 5 :
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Citation :
Étendu sur l'asphalte, je sens la vie suinter à travers chacun de mes pores et se répandre sur le bitume brûlant. Malgré la forte brise l'atmosphère est de plomb et c'est avec joie que j'accueille ces ombres qui planent au dessus de moi pour venir se poser à mon chevet. C'est à peine si je les distingue, blanches comme neige, à présent que mes sens me font défaut et que la vie quitte mon corps à défaut d'y trouver un sens...
Saloperies de colombes ! J'imagine leur bec se tordre d'un rictus dédaigneux devant cet oisillon obèse tombé du nid. L'aristocratie pigeonnaise ne se mélange pas aux oiseaux de bas étage et c'est sûrement de ce fait qu'elle a survécu.

Tout a commencé l'année dernière alors que le pays voyait apparaître les premiers signes de la grippe aviaire : de nombreux canards sauvages et autres migrants avaient fui l'Europe de l'Est, touchée par une rude vague de froid, pour venir crever dans les étangs ardennais. Les autorités s'étant préparées à faire face à la menace, l'affolement ne gagna pas la population. Aussi, l'inquiétude ne se fit ressentir que lorsque les premiers chiens de chasse périrent. L'effroi, lui, ne submergea le peuple qu'au moment où il comprit que ses millions de caniches étaient, potentiellement, autant d'armes de destruction massive.
Le chercheur à l'Institut Pasteur que j'étais, spécialisé dans les traitements anti-viraux, fut alors réquisitionné pour rejoindre une équipe européenne chargée de partir en Asie afin d'étudier le virus souche et de comprendre ses soudaines mutations.
En moi, le savant bouillonnait à l'idée de partir pour une telle mission. Le jeune marié, lui, frémissait de devoir quitter sa femme pour partir à l'autre bout du monde. Catherine fut formidable, encore une fois.. Elle m'encouragea, me donna la force de partir vivre cette expérience unique et ce n'est qu'à l'heure du départ que ses paupières cédèrent à l'assaut d'une énième vague de chagrin. Fermant ses yeux soudainement embrumés, elle ne pu retenir la larme qui coula le long de sa joue, et c'est sans un mot que j'y déposai un baiser, goutant la sève de mon amour, le sel de ma vie.


La brise dépose une autre feuille de papier sur son corps alors que le souffle de la vie le quitte. Elles sont des dizaines, des centaines à planer doucement au dessus de la rue déserte, comme un livre qui voudrait s'envoler.

"Mon amour, j'ai beau t'écrire tous les jours, il me semble que ce n'est toujours pas assez pour te raconter tout ce qu'il se passe ici. Nous emménageons aujourd'hui dans le laboratoire flambant neuf qui n'a mis que deux mois à sortir de terre non loin de Pékin. Les budgets internationaux investis sont colossaux, et si les Etats-Unis ont en grande partie subventionné le projet, ce sont les Français et les Allemands qui ont fournis la majorité des chercheurs alors que la technologie, elle, vient du Japon. Les alentours du complexe sont aménagés de façon à pouvoir y vivre en parfaite autarcie, et donc, à favoriser l'émulation intellectuelle.. Je partage ma chambre avec un Suisse originaire de Genève. Nos discussions passionnées au sujet de l'avancement des recherches m'aident à "oublier" mon manque de toi. Hier, nous évoquions les dernières mutations du virus européen..."
"... Huit mois que nous sommes séparés : une éternité ! J'ai lu que le nombre de victimes en France devenait inquiétant. Le ressens-tu au quotidien ? Les gens commencent-ils à paniquer ? J'espère que les travaux de notre nouvel appartement ne prendront pas trop de retard. Tu sais, je pense que nous avons eu raison de choisir celui situé au dernier étage : la montagne de Reims est parait-il de toute beauté lorsqu'elle est enneigée..."
"... Les nouvelles de France sont de plus en plus alarmantes. Depuis que tu m'as annoncé vouloir partir à Marseille chez ta mère, le nombre de victimes a atteint le million. J'espère que tu as bien fait suivre le courrier comme je te l'avais conseillé ! Toujours est-il que cela fait maintenant trois semaines que je ne reçois plus tes lettres et je commence à me demander si le petit oiseau jaune de La Poste n'a pas succombé lui aussi.. Je plaisante, mais l'angoisse me ronge ! Donne moi vite signe de vie !"
"... Mon avion est prévu pour demain matin. Aussitôt arrivé à Paris, je prend un vol direct pour Marseille afin de partir à ta recherche..."
"Mon amour, j'ai trouvé chez ta mère la boite à chaussures dans laquelle tu gardais une partie de mes lettres. La boite aux lettres, elle, vomissait un flot d'autres de mes missives, encore cachetées. Devant la mairie, un mur gigantesque a été édifié avec les photos des victimes, les services médico-légaux étant trop débordés pour aider à l'identification des corps. Tu sais, ils n'ont pas autant de talent que moi et n'ont donc pas réussi à immortaliser le soyeux de tes cheveux, ni le grain de ta peau.. ni même l'éclat de tes yeux autrefois si vivants...
A présent je suis à Reims et je t'écris à même une planche de bois qui gît au sol de ce qui aurait dû être notre salle de bain. J'ai ouvert la fenêtre pour que le vent chasse l'odeur de renfermé. La montagne de Reims est bien là mais elle n'a malheureusement pas encore revêtu son blanc manteau. Il fait 40°C dehors et pourtant j'ai tellement froid. Le soleil éclaire la pièce à travers les carreaux surplombant le fantôme de notre baignoire. Des graphitis recouvrent les murs nus et ces inscriptions barbares offensent le monceau de mes lettres que j'ai disposé à même le sol. Un maçon semble avoir oublié une caisse de bois remplie d'outils au sommet du mur nord qui n'est pas achevé (peut-être laissent-ils la place pour un système d'aération, je ne sais pas..). Le chantier a de toute évidence été déserté du jour au lendemain... tout comme le sens de ma vie depuis que j'ai appris ta disparition. Mon corps est à présent comme un mausolée à ta mémoire, et si j'ai peur d'avoir perdu ton odeur, tu vis encore sur mon corps, sous ma peau à laquelle tes doigts savaient si bien redonner vie. Tu me manques.. Tout me manque...
A présent je te laisse pour mieux te rejoindre, en espérant que je ne te ferai pas trop attendre en descendant ces 4 étages qui nous séparent."
Texte numéro 8 :

Image numéro 5 :
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Citation :
La bille est torturée, elle percute l'acier froid, et émet un son à chaque choc; la magie opère dans la non harmonie de ces multiples chocs. C'est certainement l'une des musiques les plus destructurées que l'on peut entendre, mais certainement celle qui procure le plus d'adrénaline.
Cette bille danse, accompagnée de ses consoeurs et le son que cela produit n'est que plus enivrant.
Iban semble ailleurs, certainement porté par par cette douce mélodie qui provient de son sac, rien de ce qui l'entoure ne semble être en mesure de l'affecter. Il s'éloigne progressivement du centre ville pour rejoindre son sanctuaire, dans un des quartiers environnants.
Ce n'est pas un de ces jours ou il va prendre part a la guerre de la rue, où il part recouvrir les Myrc, Chomp et autres Noise Tank, non aujourd'hui il va dans ce vieux bâtiment qu'il apprécie tant, simplement car c'est dans celui-ci que la fièvre du graffiti l'a contaminé. C'était bien marrant de griffonner les tables d'école et autres murs au marqueur, mais non il cherchait autre chose, et ce soir il va se ressourcer dans ce lieu de pèlerinage où son imagination n'a plus de limites.
Il passe à coté de personnes qui ne semble même pas prêter attention au bruit qui émane de ses bombes. Hérésie, mais au fond, il s'en fout, il est déjà ailleurs, dans un endroit où seul les couleurs et la forme des choses ont une importance.

Murs ternes, trottoirs gris poubelle, portes rongées par la rouille, ça n'a pas tellement changé au fond. Seul devant cette énorme bâtisse qui est censée être détruite depuis prêt de trois ans, une sensation de plénitude parcourt son corps, et les réminiscences ne tardent pas à surgir. Mais ce n'est pas le moment de sombrer dans la nostalgie, ce soir il a du travail.
Il contourne le bâtiment, enjambe un reste de grillage, et se faufile dans un trou camouflé par une buisson qui semble proche de la mort. Quelle sensation indescriptible ! Il est là dans cet entrepôt rempli d'histoire, de souvenirs, et il est là, seul, pour exprimer ce qu'il ressent. La peinture, c'est un peu la psychologue d'Iban, sans elle il se sent impossible d'exprimer ce qu'il ressent.

Il parcourt le bâtiment a la recherche de l'endroit qui lui ira le mieux aujourd'hui. Guidé à l'étage, il gravit les marches pourries avec d'infimes précautions. Une fois en haut il est attiré par cette pièce lumineuse où il a déjà posé sa patte. Ce bâtiment est un pèlerinage dans la mesure où chaque étape importante de sa vie y est gravée. Son premier amour, sa première rupture, la mort de sa mère,... C'est un sanctuaire, un endroit de culte. Lui est le pratiquant, la peinture sa religion et ses oeuvres sont ses offrandes.
Finallement il se met dans cette pièce où il se souvient avoir graphé en compagnie de son meilleur ami, Icare. Ce pacte qu'il avait fait avec lui ce jour là, ils l'avaient retranscrit sous la forme d'un graph. Cette nuit là, complètement en transe sur la musique éléctro que crachait son ghettoblaster, il dansaient en rythme avec le beat et peignaient en harmonie.
La musique et le graffiti, deux choses indissociables.

Il sort de son sac un bloc de feuilles blanches quasiment rempli de divers dessins crayonnés, quatre marqueurs de différentes tailles, ses embouts et sa dizaine de bombes. Communion entre lui et le mur, il finit les esquisses qu'il a réalisé pour aujourd'hui assis en tailleur sur le sol.
Aprés 20 minutes de silence total où les idées se bousculèrent dans sa tête, il se saisit d'une bombe et s'approche du mur. La pression sur le diffuseur fut fatale, et il compris pourquoi il voulait symboliser sa mort.

Un mort ne peut interagir avec le monde des vivants.
Son oeuvre était achevée, Iban disparu.
Texte numéro 9 :

Image numéro 3 :
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Citation :
Aspirine.

The Motel

Ca fait une semaine que je traîne ce mal de crâne, je savais bien que ce n'était pas une bonne idée de partir. Rachel sait se montrer convaincante quand elle veut… enfin… savait…

Une seconde, une heure s'écoulent, a peine le temps d'une interminable bouffée de tabac que déjà le marteau se remet à frapper à l'intérieur du crâne.


Assis sur le rebord du trottoir, je me concentre sur ma cigarette, qui tremblote dans la quasi-obscurité perturbée par ce néon blafard dont l'éclairage orangé dessine les lettres "MOTEL" dans le ciel. Si il n'était pas là l'étau qui me compresse la tête serait peut être mois serré. Et puis je ne pourrais pas voir le sol de parking, rouge, qui me nargue et me faisant bien comprendre qu'avant que le jour soit levé, il y aura des sirènes tout autour de moi.

Le temps semble comme suspendu, mais chaque seconde qui passe s'égraine au rythme des coups sourds qui frappent dans les tempes


D'ici à ce que les employés de la station service que je vois au loin rappliquent après leur service j'aurai bien le temps de m'en griller encore une ou deux. Quand j'allume le briquet pour la suivante, je peux revoir mes mains, aussi rouges que le sol du parking. Un touriste qui arriverait là par hasard ne trouverait rien d'anormal, mais je sais bien que ça ne tromperait personne très longtemps. Il suffirait de regarder de plus prêt la façade du Motel. Rien que les piliers de l'entrée son maculés de sang jusqu'à une hauteur de quasiment deux mètres. Ce n'est pas très discret. J'y suis peut-être allé un peu fort…

L'inspiration de fumée atténue un peu la douleur et anesthésie un peu les sens, mais non d'un chien, pourquoi n'y a-t-il pas d'aspirine ici.

Dire que rien de tout cela n'aurait eut lieu si, après le plein, Rachel n'avait été trop fatiguée et bourgeoise pour vouloir dormir dans la voiture en chemin. Le Motel ne m'inspirait pas confiance. Qu'est ce qui a bien pu lui passer par la tête de pour qu'elle veuille absolument que je l'accompagne à la réception plutôt que d'attendre à l'extérieur qu'elle revienne avec les clés de la chambre ?
Je crois que c'est à ce moment là que ma contrariété à commencer à se changer en énervement. Sûrement parce que mon mal de crâne me lançait de plus belle. Dès l'entrée j'ai su que rien n'allait bien se passer. Un groupe de dix touristes, probablement des hollandais faisaient un boucan d'enfer en tentant de se faire comprendre dans un anglais maladroit afin de réserver leurs chambres.

Chaque coup dans ma tête résonne dans une volonté de violence inassouvie malgré tout ce vient d'arriver. Peut-être que si j'avais continué, ça serait passé.

Ils étaient encore là ces hollandais quand on s'est avancé vers le comptoir derrière lequel se tenait un petit homme hispanique à l'air contrarié et antipathique. "Essayes de rester sympa" m'avait glissé Rachel qui sait bien à quel point je peux être de mauvaise compagnie dans cet état là.
- Vous parlez anglais vous au moins ? avait commencé le réceptionniste d'un ton agressif.
- Bonsoir. Répondis-je d'un ton ferme pour lui montrer que je n'étais pas d'humeur.
Il renifla bruyamment et nous regardant tour à tour d'un air de dédain.
- Et qu'est ce qu'ils veulent ? a-t-il demandé en nous parlant comme à des enfants de six ans.
- Une chambre pour deux ! enchaîna précipitamment Rachel avant que j'aie eus le temps de dire ce que j'aurais voulu.
- 45 dollars, payable d'avance, pas de petit déjeuné et la chambre doit être libéré à onze heures.
J'ai jeté les quelques billets sur le comptoir afin qu'il nous donne la clé et qu'on puisse sortir d'ici. Les hollandais n'était toujours pas partit et semblaient avoir trouvé l'endroit idéal pour improviser une réunion.

Encore une cigarette d'envolée. Est-ce vraiment utile ? A chaque fois que j'en fini une, la douleur revient, tellement violente que je dois en allumer une autre. Espérons que le paquet tiendra jusqu'à l'aube.

Nous sortions enfin de cet endroit, mais soudain je me suis ravisé, j'ai eus une idée. Je fis demi-tour – qu'elle mauvaise idée maintenant que j'y repense - pour rentrer à nouveau dans la réception. Je me suis à nouveau approché du comptoir, sans laisser le temps au petit homme d'exprimer au mécontentement :
- Vous n'avez pas un tube d'aspirine par hasard ?
- Ce genre de truc, c'est pour les fiottes mon gars ! Me lança-t-il d'un air goguenard. Nous ici, n a pas de migraine, on est des durs, maintenant, si vous, vous êtes une princesse, je peux rien pour vous.
Il se détourna de moi avec en riant, moqueur. Et je crois que c'est là que tout a basculé. J'ai pris l'ouvre lettres qui traînait sur son bureau pour lui trancher la gorge. Les touristes et Rachel qui venait de me rejoindre n'ont pas tout de suite compris ce qui se passait. Ca m'a laissé le temps de repérer et de prendre le couteau que le réceptionniste avait à la ceinture. Miraculeusement, mon mal de tête avait disparu, remplacé par une colère inouïe. Quand les hollandais se mirent à hurler, c'est tout naturellement que je me suis tourné vers eux pour leur faire la peau. Je suis infirmier donc je sais où couper pour que ça saigne.
Je me suis fais les dix, il y avait du sang partout sur les murs et dans l'entrée ou j'ai du rattraper les derniers. Des litres de liquide rouge et épais ont alors coulé sur le parking, le transformant en une immense mare rougeoyante. Pas très discret.
En y réfléchissant –maintenant que j'attends là que la police arrive pour m'arrêter- je crois que le plus pénible a quand même été de faire taire Rachel. Je l'aimais bien mais elle n'a pas voulu cesser de hurler. Et elle savait pourtant qu'il ne vaut mieux pas me contrarier quand j'ai mal à la tête…
Texte numéro 10 :

Image numéro 2 :
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Citation :
La nuit est déjà tombée, et la forêt semble bien paisible. Les rayons de lune sont insignifiants, cette dernière étant sous sa forme de croissant et obscurcie par d'intermittents nuages. Sa faible lueur éclaire à peine les bois, qui somnolent. Seul le léger bruissement des feuilles, bercées par la fraîche brise du soir, tendent encore à prouver que le temps continue à s'écouler.



Lara se tient contre cet arbre, l'air intriguée. A son âge, on ne sait jamais où peuvent nous emmener nos rêves, ni même ce qu'ils nous réservent. Elle se cramponne à ce tas de bois vivant, n'ayant rien d'autre à quoi s'agripper.



L'automne a exécuté son impitoyable moisson, et les feuilles gisent sur le sol, mortes. C'est un massacre multicolore, aux tons variés et presque enchanteurs. Le vent se met à souffler sur ce champ de cadavre, et force les malheureuses à frétiller. Les voilà qui se mettent alors à rouler les unes sur les autres, soumise à l'inéluctable force du vent. Cette danse funéraire produit un vacarme des plus incongrus, au milieu de cette quiétude qui semblait pourtant parfaite.



Mais Lara reste scotchée à son arbre, l'air ahurie par le spectacle, malgré le bruit du tapis de feuilles qui virevolte et s'envole... Elle semble comme médusée...


Les feuilles continuent leur périple, avec de plus en plus de vitesse, et d'acrobatie. Le vent les porte et les voilà esquissant des trajectoires fantaisistes et audacieuses. Leur nombre s'accroît toujours plus et elles semblent se rapprocher les unes des autres. Enfin elles semblent s'assembler, elles semblent dessiner une forme...

Une forme humanoïde...

C'est une femme, aux cheveux incroyablement longs et flottants, elle porte une robe ample et déchirée à son bout, en lambeaux. On ne voit pas ses jambes, d'ailleurs il semblerait qu'elle n'en ait pas, elle flotte. Mais son regard... son regard lui... il est froid et vide, c'est la seule partie de son corps qui n'est pas composé de feuilles mortes, non cet endroit est laissé vide, cet endroit n'est pas comblé... il n'y a rien...


Lara est effrayée, cette masse de feuilles mortes est inquiétante, et bruyante. Le vent continue de souffler autour de la chose et, en elle, pour maintenir le flux des feuilles qui constitue son existence.



La créature de feuilles pose alors son regard froid et inhumain sur la petite fille, elle la foudroie de son regard mort, elle l'accable de son néant.

Mais Lara est pétrifiée, elle ne peut plus bouger. L'inconnue la paralyse, elle ne sait pas comment réagir. Ses pieds sont cloués au sol, et il ne lui reste plus qu'à subir le reste des événements, dévisagée par la chose.

La dame se rapproche de Lara, d'une allure lente mais régulière, comme une horloge méchaniquement et parfaitement programmée. Le contact est inévitable, brutal et sauvage. L'esprit se désintègre en plusieurs courants de vents, comme lors de sa matérialisation, et se met à tournoyer autour de la pauvre petite Lara dans un vacarme des plus ahurissants. Le vent semble hurler sa colère et sa furie, transperçant la petite fille de toutes parts. Les feuilles mortes s'engouffrent dans les yeux, la bouche, les oreilles et le nez de l'innocente Lara.




Des pleurs, des cris, Lara se débat, mais tout semble pourtant perdu.

Miraculeusement, la lumière jaillit alors du ciel, aveuglante, éblouissante. La petite fille ferme ses yeux noyés de larmes d'horreur et de peur, elle brasse l'air devant elle, terrorisée. Ses petits membres ne tardent pas à rencontrer des mains douces et fines, des mains qu'elle connaît très bien...

Une voix rassurante, des bras qui l'enlacent, des caresses sur ses cheveux, et de fins doigts qui chassent les larmes qui perlaient sur ses joues, voilà réunis tous les éléments de sa délivrance. C'est la tendresse et la douceur maternelle qui jaillissent en plein coeur des ombres et des ténèbres pour dispenser lumière et espoir.

Voilà Lara apaisée, le vilain cauchemar ayant été chassé, au profit d'un réconfort et de câlins bien mérités. La mère a pleinement rempli sa tâche, a parfaitement joué son rôle. L'enfant est consolé, mais pourtant le malaise n'a pas été ahnihilé.




Qu'en était-il de ce rêve ? Quelle était donc cette étrange créature ? Tout a disparu, tout a été volatilisé... Il ne reste que la douceur, que les caresses, le réconfort et la protection d'une mère. Lara ne sait pas encore faire la différence entre rêves et réalité, elle ne sait pas encore faire la différence entre l'imaginaire et ce qui existe réellement, à contrario de ses parents et des autres gens.

Il lui reste encore tout à comprendre, tout à apprendre. Son existence n'a pas de limites, et tout lui semble alors possible. Cela lui est effrayant, car l'inconnu n'est pas rassurant. Mais elle ne se rend pas compte, de sa chance. Et lorsque peut-être un jour elle en prendra conscience, il sera certainement trop tard.

Mais surtout elle a eu le droit de croire à des choses qui « n'existent pas », pour les autres, sans être jugée ou rabaissée. Elle n'a pas été blâmée, elle a juste été consolée, sans qu'on cherche à lui imposer ses principes, ou ses vérités. Mais alors, pourquoi ce qui semble tellement naturel et normal envers des enfants, ne pourrait pas être appliquer pour les plus grands ?
Texte numéro 11 :

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Citation :
Jin Thô Nihîk était un pêcheur natif de Corée du Nord âgé de 22 ans. Il travaillait 18 heures par jour pour nourrir ses frères et sœurs suite au décès de leurs parents lors de la guerre de Corée.

Gisèle Deturche avait 41 ans et était fonctionnaire à la Mairie d’Issy-les-Moulineaux. Elle partageait sa vie avec son chat Cacahuète et bien sûr avec Michel Drucker le dimanche après-midi sur France 2.

Rien ne semblait pouvoir réunir un jour ces deux héros, tant leurs mondes et leurs milieux paraissaient différents et incompatibles.
Cependant, appelez cela le Ciel, le Destin, le Hasard… Appelez cela comme bon vous semble, toujours est-il que dans notre histoire, ce qui les a réunit avait un nom : il s’appelait Eugène Pommier.

Eugène Pommier était retraité et conseiller municipal à la Mairie d’Issy-les-Moulineaux. Depuis des années déjà c’est lui qui avait la responsabilité d’instaurer et entretenir les jumelages de la commune. Cette année-là Eugène Pommier avait focalisé ses efforts sur un partenariat avec la ville de Séoul.
Gisèle Deturche, qui n’avait jamais quitté Issy-les-Moulineaux, s’est vue imposée par sa hiérarchie d’accompagner Eugène Pommier à Séoul pour finaliser le jumelage.
Modérément enthousiaste à l’idée de quitter pendant 4 jours sa ville natale pour rejoindre un « pays où qu’on parle pas français et où qu’on capte même pas France 2 », Gisèle Deturche dut néanmoins s’exécuter pour se faire bien voir par son supérieur dans le but d’obtenir sa semaine de congé pendant le festival international de la laine angora ayant lieu cette année – événement exceptionnel – à Issy-les-Moulineaux.

Jin Thô Nihîk, lui, s’apprêtait à passer un grand cap de sa vie. La pêche dans les eaux glaciales du Naktong n’était pas une activité suffisante pour subvenir aux besoins de ses frères et sœurs s’il souhaitait qu’ils aient un meilleur avenir que celui qu’on leur promet depuis le décès de feu leurs parents.
Jin avait enseigné à son frère cadet tous les rudiments de la pêche nécessaires à la survie alimentaire de la famille ; et il était maintenant décidé à tenter de trouver un travail dans la capitale pour gagner décemment sa vie et permettre à ses petites sœurs d’accéder à une éducation convenable.
Un sac de jute rempli de guenilles chiffonnées comme seul bagage, il prit le train jusqu’à Séoul, en rêvant de jours meilleurs durant son trajet.

Le vol Paris-Séoul fut une véritable aventure pour Gisèle Deturche. Elle découvrit pour la première fois un aéroport, un avion, une vue du ciel et était complètement déstabilisée par tous ces étrangers qui l’entouraient et dont elle se demandait bien ce qu’ils faisaient ici. Elle passa la majeur partie du vol à dormir en rêvant de Cacahuète et de Michel Drucker.

Arrivé à Séoul, Jin Thô Nihîk fut immédiatement tout aussi désorienté. Il découvrit un train souterrain, des embouteillages, des enseignes clignotantes. Son expérience dans la pêche lui permit néanmoins de trouver un travail rapidement comme commis dans un restaurant de fruits de mer. Venant du nord du pays, il s’attendait, à juste titre, à recevoir un accueil plus que glacial. En cuisine il avait pour tâche d’écailler les poissons et décortiquer les fruits de mer et devait subir les insultes et le mépris de la part de ses collègues de travail. En plus de ceci Jin avait également la responsabilité de l’entretien des toilettes, de la vitrine et de la vaisselle.
A la fin de son premier jour de travail, il comptabilisa dix-huit heures de travail, mais fit rapidement le calcul que son salaire journalier de larbin équivalait approximativement à son salaire mensuel de pêcheur.

Confortablement installée à l’hôtel Beau-rivage de Séoul, Gisèle Deturche, dont le dépaysement l’avait laissée sans voix depuis l’aéroport, fut invitée par Eugène Pommier et la délégation coréenne à les accompagner au restaurant. Elle hésita un instant à se faire porter pâle, mais se dit qu’après tout, elle était venue là pour ça, et craignait qu’un faux bond à Eugène Pommier ne lui soit préjudiciable si sa hiérarchie l’apprenait à son retour en France.
Elle enfila donc sa plus belle robe qu’elle avait héritée de sa mère, s’offrit exceptionnellement un trait de rouge à lèvre, chipa une fiole de Martini dans le minibar de l’hôtel qu’elle avala d’une traite puis rejoint Eugène et se mirent en route.

Jin, pour son deuxième soir, passa une soirée éprouvante, lavant les affronts et essuyant les injures de ses collègues.
Gisèle, quant à elle, découvrit le soju, un alcool coréen très sucré aromatisé aux fruits qu’elle goûta à tous les parfums disponibles. L’ivresse lui permit donc de passer une soirée relativement agréable et de trouver finalement « ces petits hommes bridés ma fois très sympathiques ».

L’enchaînement de verres de soju fit que le dîner se finisse relativement tard et lorsqu’ils réglèrent l’addition, ils étaient la dernière table de la salle.
Tandis que Jin se battait contre un bouillon de crevettes séché restant attaché au fond d’une casserole, Gisèle, Eugène et leur petite bande remerciaient chaleureusement l’équipe du restaurant pour leur accueil et quittaient lentement la salle.
La délégation coréenne mit les deux français dans un taxi en les inondant de remerciements, puis les regarda s’éloigner en souriant.

Alors que l’on aurait pu croire que Jin et Gisèle s’étaient ratés et que cette histoire ne présentait finalement aucun intérêt, Gisèle se tapa sur le front et se rendit compte que son porte-monnaie ne se trouvait plus dans son sac à main et insista pour que le taxi fasse demi-tour afin qu’elle retourne le chercher. Une fois revenus, Eugène, fatigué et irrité, marmonna qu’il attendrait dans la voiture.

Gisèle était certaine d’avoir laissé son porte-monnaie dans les toilettes, quand elle avait sorti son rouge à lèvre de son sac pour remettre un trait. Quand elle se rendit dans les toilettes pour vérifier, elle tomba nez à nez avec un employé en tablier sale qui astiquait la cuvette avec soin.
Etait-ce l’ivresse des sojus répétés ? Etait-ce la découverte subite de l’inconnu ? Etait-ce l’exiguïté de la cabine ? Toujours est-il que Gisèle Deturche fur prise d’une furieuse envie de violer sauvagement ce jeune coréen sale et odorant.
Jin, éreinté par une journée éprouvante et complètement pris de cours, ne put repousser les avances de la française et lui fit l’amour avec passion et animosité.

Sitôt l’acte terminé, Gisèle griffonna sur un post-it son adresse à Jin et lui demanda de venir la rejoindre à Issy-les-Moulineaux. Jin ne comprit pas un mot de ce qu’elle avait pu dire mais garda le post-it et la salua alors qu’elle se précipitait déjà vers la sortie du restaurant.


Cela prit un mois pour Jin pour ne plus supporter le traitement malsain qui lui était réservé au travail, et pour décider d’émigrer vers la France. Toujours le même sac de jute sur le dos, il décida de se rendre à l’aéroport en métro.
Cependant, il se trouva que ce jour même, un indépendantiste nord-coréen décida de sacrifier sa vie pour une cause qui parait encore aujourd’hui obscure. Chargé de 12 bâtonnets de dynamite, il s’engouffra dans une rame de la voie C, puis fit exploser la rame entière.
Jin Thô Nihîk, dont la main serrait un petit post-it jaune, décéda sur le coup


Six années ont passé. Gisèle Deturche regardait toujours Michel Drucker, mais n’eut jamais de nouvelle d’un quelconque employé de restauration coréen frappant à sa porte. Cependant elle est maintenant maman d’une petite fille de cinq ans, aux traits asiatiques prononcés, qui passe son temps à jouer à cache-cache et qu’elle avait choisi de prénommer Soju…
Texte numéro 12 :

Image numéro 4 :
http://julien.baligant.net/lucea/imag4mini.jpg

Citation :
En cette fin d'après-midi, le soleil jouait paresseusement à cache-cache avec les nuages et projetait une lumière douce et chaude par les deux larges fenêtres de la pièce, faisant par moments flamboyer les coutures dorées des quelques coussins disposés sur le canapé moelleux. Du lit à baldaquin trônant au centre de la pièce s'élevaient des ronflements sonores et réguliers.

Progressivement, la scène s’inclina. Les coussins glissèrent doucement vers ce qui devenait le bas de la pièce, le long du canapé qui ne bougeait pas, retenu par des fixations solides entre ses pieds et le plancher. Les tableaux, figurant des individus majoritairement masculins et exhibant tous sans exception un tricorne noir, pivotèrent silencieusement sur leur point d’attache. Inconscient du changement d’aplomb, le dormeur glissa tranquillement le long du lit fixé de la même façon que le canapé sans cesser de ronfler. Quand la pièce fût inclinée à tel point qu’elle évoquait un cube en équilibre sur une de ses arêtes plutôt qu’une de ses faces, le dormeur n’était plus retenu que par les draps du lit. Peut-être que sans l’embonpoint grandissant de l’homme, ils auraient tenu le coup et lui aurait permis de continuer sa sieste sans s’apercevoir de rien.
Peut-être.
Il fut réveillé par le bruit de déchirement du tissu, encaissa sans comprendre le choc de son corps contre le parquet ciré, ouvrit un œil pour voir défiler le plancher à tout vitesse et finit son parcours en s’écrasant sur ce qui avait été conçu pour être un mur, le nez tout contre le tableau d’un vieil homme à larges moustaches qui haussa un sourcil réprobateur.
« - Eh bien allez-y, ne vous gênez pas ! dit le tableau. Faites comme si je n’étais qu’un vulgaire morceau de papier peint ! Mettez votre grosse main sur ma bouche, tant que vous y êtes ! »
« - Oh, la ferme. » grommela l’homme en essayant de trouver une assise suffisamment stable pour pouvoir se relever. Après s’être stabilisée pendant un moment, la pièce se mit à s’incliner dans le sens opposé. L’homme attendit patiemment quelques secondes en se frottant les yeux, ignorant les récriminations du tableau, le temps que le plancher s’aligne sur une horizontale acceptable, puis il se mit en devoir de récupérer ses habits ayant glissé un peu partout contre le mur. Il ramassa un tricorne similaire à ceux des personnages des tableaux, défroissa une de ses extrémités tordues et se le mit sur la tête. Il s’habilla rapidement et sortit en trombe de la chambre en jurant tout bas.

Il parcourut rapidement plusieurs couloirs, grimpa deux escaliers en colimaçon, traversa un salon richement décoré et enfila un dernier escalier. Il s’arrêta, soufflant et suant comme un bœuf, devant une porte capitonnée et ornée d’une sobre plaque sur laquelle était inscrit « Cabine de pilotage », et juste en dessous en caractères plus petits « Entrée interdite aux pirates de l’air et aux chauve-souris non tenues en laisse». Quand il eut repris son souffle, l’homme prit une profonde inspiration, ouvrit la porte à la volée et hurla à pleins poumons :
« - ASPIRANT FOUDJE, NOM D’UN CHAR A VOILES, QU’EST-CE QUE VOUS M’AVEZ FOUTU ? PAS D’CABRIOLES PENDANT LA SIESTE DU CAPITAINE, JE VOUS L’AI DEJA DIT CENT FOIS ! »
Le dénommé Foudje, effrayé, fit un bond impressionnant sur le siège de pilotage et heurta au passage un levier dépassant de l’immense tableau de bord situé en face de lui. La cabine se mit à piquer du nez jusqu’à ce que le capitaine relève d’un geste assuré le levier, à côté d’un Foudje tremblant comme une feuille.
« - Capitaine, ne me faites plus ce coup là s’il vous plaît, j’ai le cœur fragile… »
« - Aspirant, commencez par respecter les consignes prioritaires de vol, et je penserai peut-être à vous ménager. » répondit sèchement le capitaine.
Le soleil entrait à flots par l’immense baie vitrée surplombant le tableau de bord qui laissait apercevoir des nuages cotonneux faisant la course sur fond de ciel bleu. Le spectacle apaisa un peu l’humeur du capitaine.
« - Vous pouvez m’expliquer ce qui vous a pris de partir en piqué tout à l’heure ? » demanda-t-il.
Foudje parut embarrassé. C’était un jeune homme maigre, légèrement acnéique, aux cheveux en bataille sous son chapeau de second.
« - Hé bien, c’est-à-dire… commença-t-il en rougissant. Il ne se passait plus grand-chose depuis un moment, et je ne saurais pas dire si c’est la chaleur, le ronronnement du moteur ou la tourte aux olives de ce midi, mais toujours est-il que je me suis réveillé en sursaut en voyant une flotte entière de harpies foncer droit sur moi, j’ai tenté de les éviter… »
« - Des harpies hein ? » releva le capitaine, fixant l’Aspirant d’un œil soupçonneux.
« - C’est ce que j’ai cru en ouvrant l’œil, oui. »
La rougeur qui avait envahi les pommettes du garçon commençait déjà à se répandre sur ses joues et menaçait de s’attaquer à son front.
« - Et ? »
Le visage de Foudje était désormais entièrement écarlate.
« - Et c’était un nuage d’étourneaux, capitaine. »
Le capitaine regarda fixement son second quelques secondes, ferma les yeux puis se les frotta un long moment, consciencieusement. Sans cesser de se frotter les yeux, il s’adressa au jeune homme.
« - Bon. Pas un drame. Rien de grave. Je prends la relève. Va te reposer. Et touche plus à cette saloperie de tourte aux olives, je suis persuadé que la cuisinière y met des choses pas adaptées à l’estomac d’un honnête homme. »

Le second fila sans demander son reste. Une fois le capitaine installé dans le siège de pilotage, le silence s’installa, uniquement troublé par le bruit lointain des machines. L’homme soupira. Il sentait qu’il allait encore devoir attendre un long moment avant de trouver un successeur valable aux commandes du château volant. Et sa femme allait faire un foin pas possible quand elle s’apercevrait qu’il avait oublié de fixer le vase offert par la belle-mère à la table de nuit.
Et voilà, tout y est ^^

Pour les auteurs, veillés à rester anonymes n'est-ce pas ^^ Par contre, si vous détectez des erreurs dans la présentation de vos textes, n'hésitez pas à me MP ou Lucea.

Un grand merci et bravo à tous les participants, et bonne lecture à tous.
J'ai lu et voté ^^

Y a vraiment très trucs sympas, d'autres que j'ai moins aimé. L'effort est là en tout cas, bravo à tous

ps : dommage qu'une fois qu'on ait voté, on voit pas les résultats du sondage en clair, à moins que ça bug chez moi.
Thumbs up
Lu et voté. Certains sont vraiment très très bien. Faciles à lire, un sujet touchant ou bien tourné. Bref, j'ai eu du mal à choisir, j'avoue. J'ai fait au coup de coeur.
Lu mais pas encore voté.

Merci à tous pour vos textes !


Par contre c'est bien trippant de constater qu'il y a tout de même bon nombre de textes gores, glauques, ou politiquement incorrect



/summon Familles de France

Venez :')


( edit: Ok... ma soeur a log son compte...

Le message est de Wuthrer hein... :/ )
Ayé j'ai tout lu, et je trouve que la qualité est vraiment au rendez-vous. Et la limite de mots assez basse fait que chaque texte est intense, et ça se lit très bien.

Par contre, faut arrêter de faire mourir une personne par texte.

Moyenne de morts par texte pour ce concours : 1,83.
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