Encore une fois : faux.
Les traités de paix (et, à l'inverse, les déclarations de guerre) ne sont plus une composante essentielle, tant tactique que légale, des conflits.
Sinon, la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni, la Russie et une cinquantaine de pays sont toujours en guerre avec l'Allemagne, le Japon et l'Italie depuis 1945.
La définition d'un conflit armé international aujourd'hui - car il faut apparemment le répéter - est l'intervention dans un pays étranger de forces armées. Cette intervention ayant été suspendue entre 1991 et 1996 en Irak, un nouveau conflit s'est amorcé à partir de cette dernière date via des frappes aériennes.
(Et comme d'aucuns sont trop flemmards pour chercher des sources :
en voici une spécifiquement attachée à l'Irak.)
Deux conséquences quant aux sujets qui occupent ce thread.
La première tient à la nature des condamnations relative à Abu Ghraib. Si on les lit attentivement, il en ressort une chose essentielle : elles relèvent toutes de la justice interne à l'armée américaine et non du Droit international. Cela tient essentiellement à un aspect : traditionnellement, les condamnations du Droit international pour crime de guerre ont tendance à qualifier la totalité de l'armée (ou d'un corps d'armée) à partir d'une condamnation personnelle. Une tentative de la part des américains de juger leurs actions à l'aune du Droit international aurait consisté à se tirer une balle dans le pied.
On voit clairement cette tendance à rabattre les crimes sur des responsabilités excessivement personnelles à travers nombre d'accusations (souvent retenues) qui ont trait au comportement inacceptables des soldats (manquement aux ordres, non respect du devoir, etc.). C'est - juridiquement - parce que ces soldats étaient de mauvais soldats qu'ils ont commis ces crimes, non parce que l'armée américaine avait organisé/légitimé/incité (on rayera peut-être un jour les mentions inutiles) ces actions.
Deuxième question : celle de la police.
Pour qu'il y ait police, il faut un Etat souverain. Il faut donc la fin de l'occupation qui suspend la souveraineté ; ce qui n'est pas nécessairement synonyme de la fin de la présence étrangère. (Ex typique : la présence massive de soldats soviétiques dans les démocraties populaires européennes pendant près de cinquante ans qui ne compromet pas pour autant la souveraineté des dites démocraties populaires.)
Le bla bla de Morin (et d'autres) consiste donc à dire que l'armée française (ou autre) n'apporte que son soutien à un pays souverain et autonome. Or rien n'est là pour étayer cette qualification : interventions armées permanentes, incarcérations selon les lois de la guerre, maintien de l'ordre public par des armées étrangères, aides humanitaires, etc. C'est là
grosso modo la définition d'une occupation dans le cadre d'un conflit armé international.
Le seul constat qui vaille alors c'est : qu'est-ce qu'ils sont allés foutre la charrue avant les boeufs, ou moins métaphoriquement : un Etat incapable d'assurer la souveraineté sur le territoire, tandis que se poursuit un état de conflit armé.
Constat qui permet de revenir sur la première question : régler la question d'Abu Ghraib selon les lois internationales reviendrait aussi à assumer le fait que l'Irak est en guerre, ce qui dans la propagande gouvernementale (toutes administrations confondues) passe mal.