De là est parti la réfléxion sur l'utilité du mariage, des valeurs que ca véhicule, de la symbolique que cela represente encore de nos jours.
Doit-on forcément être marié pour vivre heureux ?
Je me garde de répondre sur le sujet sur lequel nombre des participants ont embrayé, savoir si tu dois te marier avec une personne que nul ici ne connaît. Je ne vois pas l'intérêt de mes conseils ici, et je ne me sens pas fondé à le faire.
Je réponds juste à ta question générale sur le mariage qui t'a été inspirée par ton histoire personnelle.
L'évolution des moeurs a nécessairement changé le rôle du mariage. Désormais, il n'est plus mal vu de vivre en couple sans être marié, tout comme il n'est plus mal vu d'avoir des relations sexuelles sans être marié.
Ce qui fait que le mariage reste aujourd'hui réduit à sa dimension d'alliance entre deux individus. La différence entre un couple marié et un couple de concubins, c'est que les premiers ont accompagné leur vie commune d'un serment public au contraire des seconds. Rien de plus, rien de moins.
Un couple peut n'exister que grâce à l'amour. Et tant que l'amour dure, ce dernier est le meilleur des ciments. Malheureusement (ou heureusement ?) l'amour passionné ne dure jamais qu'un temps. Quand tout le monde retrouve plus ou moins ses esprits, quand l'amour cesse d'aveugler chacun sur les qualités de l'autre, le couple dont l'amour a été le seul ciment a dès lors de bonnes chances d'éclater.
Le serment du mariage n'apporte rien de plus quand tout va bien, l'amour suffit et est un ciment bien plus puissant. Ce serment n'a de sens que pour les moments où tout va mal. Tout couple qui a duré plusieurs dizaines d'années a dû passer par ces moments où la seule chose qui fait que les deux restent ensemble est leur promesse de vie partagée jusqu'à ce que la mort les sépare.
Ce n'est pas pour autant du masochisme. L'amour est comme le phénix, il sait renaître de ses cendres. A chaque fois que le couple passe ce cap difficile où chacun ne semble plus rien ressentir pour l'autre, les sentiments se réinvitent et le couple est reparti pour un nouveau cycle d'un amour plus profond que le précédent.
Pour ne pas l'avoir vécu, j'imagine qu'il doit y avoir quelque chose de triste dans ces cycles de vie passionnée à deux pendant quelques années, puis de rupture quand on ne pense plus s'aimer, puis de solitude émaillée de quelques parties de jambes-en-l'air, puis d'un nouveau ménage avec une nouvelle personne pour redémarrer un nouveau cycle. Comme une partie de l'oie où ne cesserait de tomber dans le puits pour tout reprendre du départ, sans jamais vraiment avancer.
Pour l'avoir éprouvé plusieurs fois, je sais par contre l'immense joie qu'il y a de retrouver quelqu'un après avoir cru que tout était fini, et que tout s'était cassé la gueule. C'est un sentiment qui remplit de joie autant sinon plus que la passion du début. Et le thème de la relation qui ne tient un temps que par la force d'un serment passé avant de repartir sur les chapeaux de roue est d'ailleurs abondamment traité, que ce soit en littérature ou au cinéma, pas seulement pour le couple amoureux mais aussi pour les meilleurs amis d'enfance ou les frères d'armes et n'importe quelle autre relation élective plus ou moins exclusive.
Si le mariage est un serment, il a cependant cette particularité d'être d'être un serment avec un formalisme public.
On peut très bien se promettre en privé de toujours vivre ensemble. On peut accompagner ce serment de gestes destinés à montrer à l'autre le sérieux de ses paroles. Selon les caractères de chacun, cela ira des paumes de main tranchées pour mélanger les sangs au déluge de cadeaux ou à que sais-je-d'autre qui montre qu'on est prêt à tous les efforts et sacrifices pour séduire l'autre (j'arrête de fumer, je prends ma carte à l'UMP, je fais mine de m'intéresser à ce que raconte ta mère, etc.).
Le mariage ajoute une dimension publique à ce serment. On ne se promet pas simplement entre soi, on se promet aussi devant les autres, selon un formalisme consacré.
L'inconvénient de ce formalisme, c'es qu'il peut être désirable pour lui seul, sans qu'il y ait véritable volonté de se lier. Le costume et la jolie robe blanche, les yeux du public rivés sur soi, le fait d'être l'attraction du jour... tout cela n'est que l'accessoire. Si cet accessoire est la principale motivation, il y a de bonnes chances pour que tout se casse la gueule très vite.
Donc, pour répondre à la question de départ : non, pas besoin du mariage pour être heureux. Mais vivre mariés quand tu as trouvé la bonne personne - j'entends par là quelqu'un avec qui tu partages des sentiments et surtout avec qui tu partages un projet commun - c'est une joie incomparable.