Le problème, ce serait pas une fin de deuil difficile, mélange du triomphe d'avoir stoppé l'egypto-bidule et tiraillement de l'envie de jouer qui perdure ?
Inutile d'aller fouiller bien profond dans les poubelles de la volonté pour y trouver le dernier univers en date, aussi merdique soit-il, hâtivement chiffonné, c'est certain.
Cela dit, je ne pense pas qu'il faille se contenter de regarder l'état des lieux en face et de lui répéter mielleusement combien il a les yeux doux.
S'il est exact que ce qui nous est servi est fonction de nos désirs et nos attentes, l'on fait bien d'aboyer si la pâtée n'est pas, ou peu, bouffable.
Et ce n'est certes pas une question de goût, de subjectivité. Qu'on propose de l'elfe trop cuit à ceux qui en veulent encore, jusqu'à la nausée, soit. Mais la carte DEVRAIT être un peu plus fournie. Le plat unique d'office commence à peser sérieusement sur la digestion.
Ma mauvaise humeur est partie d'un mouvement concret : l'aller-retour entre la stérilité réductrice des farces massivement multielfes et la rafraîchissante variétés des grands univers de la SF au sens large, bref des oeuvres misant plus sur la création et l'exploration d'un univers original que sur des ambitions philosophiques ou esthétiques. Bien entendu, les bons bouquins de SF n'excluent pas ces dernières. Mais elles sont secondes par rapport à l'univers crée, en découlent, et non l'inverse.
La comparaison entre les subtilités de Dune ou d'Ambre d'un côté, celles de ce qui remplit nos écrans de l'autre, a de quoi faire ricaner.
Bien entendu, on peut arguer que l'univers n'est qu'un support, qu'un prétexte, et que l'alchimie qui donne un jeu réussi se situe à un autre niveau, ou que le BG, pour utiliser un vocabulaire aussi romantique qu'imagé, ne sert que de vague référence par rapport à laquelle les joueurs s'orienteront : telle "licence" flattera tel indéfectible fan, telle autre aimantera l'interêt d'un autre.
Il me semble pourtant, naïf que je suis, que l'univers dans lequel je vais évoluer, sa richesse, sa complexité, sa profondeur, priment sur les modalités strictement techniques de mon aventure. Certes, un système de combat mal foutu peut sérieusement compromettre le plaisir de jeu, qui dépend décidément d'un délicat équilibre entre une belle multiplicité de facteurs.
Mais j'attends autre chose de nos royaumes virtuels que d'Unreal 2004 - par ailleurs excellent, tonton Freud n'aurait pas, je pense, tari de louanges pour cet admirable produit de notre modernité, si salutaire pour les systèmes nerveux de nous autres pauvres névrosés décadents.
Question de choix, donc, selon l'aspect du mmorpg que l'on privilégie ? - c.f. le post d'à côté, sur les motivations des joueurs. Je ne pense pas, dans la mesure ou rien n'a jamais empêché un jeu d'exceller sur chacun des plans abordés ci-dessus...
On ne parle pas de médiocrité, mais d'INDIGENCE CHRONIQUE.
C'est d'autant plus rageant que d'authentiques génies les ont DEJA crées, ces mondes stupéfiants. Les littératures en regorgent.
Fais des études de devellopement et ponds nous le jeu du siècle.
(Bravo, bien vu. Encore quelques remarques de ce calibre, et la face du divertissement moderne s'en retrouve changée).
Bien sûr, partir d'une oeuvre géniale ne garantit en aucune façon la qualité du jeu. Une adaptation peut être grotesque, pitoyable. On peut se retrouver avec une caricature réductrice à la sortie (Curieux de voir ce que vont donner les terres du milieux online...).
Mais partir d'intuitions géniales ne peut pas faire de mal.
Des propositions sinon foncièrement originales du moins différentes, il y en a
Ou cela ? EQ, Daoc, AC, pour ne citer qu'eux, ne sont que de vastes bricolages où s'entassent des éléments issues de mythologies et d'univers épars, médiocrement juxtaposés. Les intrigues politiques sous-tendant ces mondes sont quelconques, ennuyantes. Les quêtes épiques de DAOC, par exemple, offrent un exemple d'effort honorable, mais n'offrent d'interêt que prises séparément : au final, le tout, le monde, n'est pas assez dense et homogène pour qu'on y accroche vraiment.
D'ailleurs, le plus bel aveu d'échec de ces monde, c'est tout simplement que l'EXTREME majorité des joueurs n'en savent rien, et s'en foutent comme de leur première culotte. 10 pages de BG planquées dans une sous-rubrique du site officiel n'ont jamais suffit à intéresser une communauté dans son ensemble. Honte, ici encore, aux concepteurs, qui dépensent une énergie considérable dans des BG dont tout le monde se fout. A eux de trouver le moyen d'intéresser les foules. A eux de faire en sorte qu'une proportion acceptable de joueurs prennent plaisir à faire une quête sans alt-tab en baillant vers le site de soluce le plus proche.
Finalement, à bien y réfléchir, je suis prêt à m'accommoder de la (n+1)ème déclinaison du joyeux-elfe-bandant-son-fier-arc-vers-le-méchant-dragon, si le monde propose richesse et interêt. Le manque de profondeur des mondes virtuels est un problème bien plus préoccupant que leur manque d'originalité. Mais quitte à mobiliser des forces, autant essayer de tout proposer : riche et neuf.