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Je l'avais déjà posté je le remet.
De la part de Galadriel/Nienna/Indis/Earwën etc etc
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Le Baron de Montignac
Ce matin là, alors que les hommes continuaient à fertiliser aux quatre coins du royaume, l’humus de la violence, Charles Célestin Grégoire, Baron de Montignac apparut à la fenêtre de sa gentilhommière, au fond des bois, et, la main portée en visière, scruta la ruralité. Insomniaque, et la tripe à l’envers, il n’avait goût de rien. Il rota bruyamment, noyé dans ses sucs et ferments.
Il tenta de vocaliser, puis se prît à hurler soudain, si fort que, à une portée de cloches seulement, le bon père Niuss, se signa par trois fois et en conclut en écoutant les brames du châtelain, à une de ces indigestions dont le seigneur était coutumier…
Il urina moins loin que d’habitude, écouta le flux tomber dans les douves, et, seulement ensuite, se pencha au dehors, et put entrevoir Laquenouille son valet sortir de la cave et recevoir sur la tête le pissat de son maître.
Il s’apprêtait à abreuver d’injures le drôle, quand celui-ci, l’œil en biais, fit son entrée, un pichet de vin à la main.
- Voilà de quoi vous déssoiffer, messire.
- Où étais-tu ? interrogea Montignac
- Nulle part, votre altesse.
- Je suis sceptique, dit le baron, en s’apprêtant à frapper le dessus de la tête ébouriffée de son valet. Tu as mis ta culotte à l’envers.
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L’autre sentant venir la grêle, rentra la tête dans ses épaules.
- Jetais avec mademoiselle Flavie, conclut le malheureux. Elle a encore le feu…
- Nom de Dieu ! J’ai bien envie de te casser le dos !
- Ce serait fort injuste ! et je n’y suis pour rien ! Avec les hommes votre fille s’y entend.
- Que s’est il passé ? Grogna le baron. Dépêche toi ou je te hache !
- Elle m’a montré son écrin à mamelles.
- Ha ! Je devine la suite ! Elle t’a remplit la main ?
- Elle a de fiers tétons, mademoiselle Flavie. Difficile de passer à côté.
- Bon, tu la tâtes et après ?
- Elle s’est mise toute nue.
- Et moi je vais te mettre en pièces ! Gronda le baron.
Laquenouille sauta de côté et esquiva un coup de pied.
- Je n’ai rien fait ! Je le jure ! Douze petits degrés…pour attraper un rhume.
- Je suis sceptique, dit le baron
Il frappa donc La quenouille, et le roua de coups.
- Ha ! Que j’ai mal ! J’ai l’estomac au bord des lèvres ! Finissez-moi, que je ne souffre plus !
- Combien de fois ?
- Trois.
Le baron redoubla de coups sur l’amant de sa fille.
- Stop ! Je me rends !
- Alors, parle sale gueux !
- Sept fois par-devant, messire Charles, et après, mademoiselle Flavie à voulu retourner sa carte.
- Ho ! Ho ! Tu l’as ferraillée à l’envers ?
- Vous le dîtes excellemment.
Le baron s’arrêta net de frapper.
- Vois tu, Laquenouille, ce que tu m’apprends sur ma fille, me fait penser à ma femme.
Il releva le bougre et le réconforta d’une vigoureuse claque entre les omoplates.
- Dis-m’en plus, supplia l’aimable baron. Flavie a-t-elle aussi bon ventre qu’on le prétend ? Et de l’ardeur aussi ?
- Messire, votre descendance est un piment enragé. Elle ne trouvera jamais un mari qui fera son affaire.
- Je suis sceptique, réitéra le baron…
Le lendemain le baron s’éveilla, en caleçon de pilou et sortit de son baldaquin avec l’œil bien frais, débarrassé des excès de la veille.
Premier geste, il ouvrit la gazette populaire, où étaient exposés en titre et articles, les noms des notables et quelques grands commis de l’Etat.
L’époque est bien malade, pensa Charles Celestin en se grattant la barbe.
Il pensait sans penser. Il pensait façon de dire. Il se grattait aussi sous les aisselles.
A la vue de tant de boue, il poussa trois soupirs, péta sur le côté, et se reporta à la rubrique locale.
- Merdecon ! s’effondra-t-il. Quelle volière !
En effet, il lut pêle mêle et par le biais, qu’il fallait éliminer les privilèges, juguler les esprits rebelles, et dire adieu à la combine.
Sur ce, il égrena un chapelet d’anathèmes et se traîna jusqu’à son cabinet.
Il se désinfecta dans un bouillonnement d’eau chaude, et resurgit du bain avec la grâce d’un éléphant de mer.
Enfin il talqua, aisselles, plantes et entre-orteils, coupa également le surplus de ses poils d’oreilles, astiqua les conduits, ébouriffa la tignasse et se dirigea nonchalant vers son linge de corps disposé sur un banc.
Il s’harnacha enfin et enfila une paire de chaussures qui n’étaient pas faites pour lui. Il grimaça : le contrefort des chaussures lui martyrisait les chairs.
Puis, après une période de récupération, il garda l’air heureux, voleta de toute son envergure afin de restaurer son aplomb, et, les bras écartés sur les côtés …
- Je vaincrai ! murmura t-il, en fermant les yeux, parce que j’ai un projet féroce et que je suis de la confrérie de ceux qui sont vivants…
Petite pause de l’auteur…
J’allume mon PC, j’active la page du Baron de Montignac….
Charles Celestin Grégoire baron de Montignac m’apparaît à une tourelle de son château et coiffé d’un chapeau de paille,
- Que me veut ‘Madaaaaaaaaame l’auteur ?
- Partons encore pour de nouvelles aventures, veux-tu ?
- Aventures ? Je n’y tiens pas !!
- Vite !! Habilles toi ! c’est bien la nature sent bon…
- Nenni, l’Auteur ! Je ne suis pas corvéable à merci.
- Grouille !! il y va de ma peau !
Le baron crache, éructe, et dit :
- Hier, je suis allé au bordel, avec Laquenouille et … Ce matin je dors !
- Si tu viens sur ma page, je te ferai rencontrer une fille, a la bouche pleine d’eau
- Ma foi j’ai les bourses vides. Je n’ai besoin de rien.
Il sort un petit miroir, s’examine, tourne la tête offrant son profil au nez gros comme une fraise…tire la langue …
- Sorry je suis incapable de gambader sous ta plume aujourd’hui, demande donc à Niuss il est serviable…
Je clique sur « Démarrer, quitter »
Je jure de me venger du Baron…….
Dans la pièce voisine du cabinet, le chien Morlosse aplati comme une crêpe sur un tapis de sol, se dressa en apercevant Laquenouille entrer avec un plateau chargé de victuailles. Seuls le valet et le chien avaient la primeur d'assister aux ablutions de leur maître.
Car bien qu'il marine de plus en plus dans son jus trouble, personne ne se risque à approcher la baignoire du vieux sanglier.
- Messire Charles, je vous apporte quelques collations.
Montignac ouvrit un oeil. Il avait le teint d'une huitre hors saison, hors des mois en "R".
- Bah !! retire toi ! Je n'ai plus le gout de vivre.
- Oh ! plaignez vous pas, notre maître. Vous êtes propre, tandis que moi, je n'ai meme pas droit à la plus élémentaire hygiène.
- Bah ! Je m'en fiche ! Rétorqua le baron.
Moi, je me plaisais dans mon suif. J'eusse préféré garder ma garnison à poux !!
- Hi ! Hi! Hi ! Chevrota Laquenouille. Même le Frère Nuiss dit que vous êtes moins salopeux sur votre corps !
- Nom de Dieu !! de quoi se mêle le moinillon ?
Ah ! Foireux de capucin ! Que connait-t-il exactement de la vie en ce monde ?
- Plus que vous ne croyez, Messire.
- Je suis sceptique .... dit le baron.
- Et pourtant.... ajouta Laquenouille, un éclair goguenard dans l'oeil.
- Peuh !! Pas d'expérience sexuelle ! Rien ! Glapit le baron, même pas ça ! Joignant le geste à la parole, il fit claquer l'ongle de son pouce gras contre une de ses incisives supérieures. Rien ! toujours à farfouiller les jupes du Seigneur !
- Hé ! Hé ! Sussurra le valet. Messire ! Votre chapelain est champion de la gaudriole post Vêpres.
- Que me chantes tu là ?
- Ce que chacun fredonne, Messire.
- Parles !! Effronté!! ou je te bastogne !
Le valet s'approcha de son maître et lui glissa sa confidence à l'oreille.
- Pendant que vous marinez, Charles, avec seulement quelques flatulences passagères, votre moine, troussouille les hautes Dames du royaume.
- Je suis sceptique.... grommela le baron.
Ces pisse froid ! Ces grenouilles de bénitier ! Ces bourgeoises à figue triste !! Je ne te crois pas !
Coupé net aux cuisses, le baron envoya voltiger son chapeau au nez de son valet, porta la main aux sueurs de son front et s'affala sur le banc.
- Je suis sceptique.... dit-il dans un souffle
…Le 4 avril, si l’on en croit Flavie qui tenait son journal intime, (Flavie s’arrondissait du fruit de ses entrailles) Charles Célestin Grégoire, apparut en haut de la muraille, coiffé du célèbre tricorne d’amiral de la famille, trois fois coulé en mer de Chine, et regarda la lande..
Ses traits étaient décomposés. Il était amaigri. A force de cafarderie, c’était affligeante chose de le voir marcher si piteux, les joues molles et jaunasses.
Il respira le chant des oiseaux et offrit ses paumes ouvertes à la vérité de la lumière, puis reprit sa ronde, trébucha sur une pierre déchaussée, ramassa un gadin en glissade, s’écorcha le genou et, Hilh de pute ! (*) étouffa un juron.Lorsqu’il se fut redressé sur ses flageolantes guiboles, le baron avait le regard au flou, délesté du tricorne, le front de monsieur de Montignac était grillagé d’incertitude.
Comme il s’apprêtait à cracher des insultes à l’encontre de Laquenouille, le coquin surgit au détour d’une échauguette.
Le vilain avait les yeux fuyards, la goule empourprée. Il était comme à l’ordinaire, porteur de petit vin régional.
- Voilà votre carafon de soif, messire. Jourd’hui, je vous ai porté un haut-médoc.
La guibolle mal assurée, le drôle en avait prit un coup dans le nez et traviola jusqu’à son maître.
- Où étais tu quand je t’appelle ? Interrogea sévèrement Montignac.
- J’étais en votre chapelle, messire.
- Qu’y faisais-tu mécréant ?
- Heu, je réparais les lumières du Bon Dieu.
- Tout ce temps pour venir ? Tu t’es perdu ?
- J’y voyais goutte
- Tu parles ! Couic ! Je ne te crois pas !
- Alors, visez ma pommette ! j’ai pris un ramponneau dans le manteau de Saint Martin.
Le baron était furieux.
- Serait-ce pas ma fille qui t’aurait cassé une potiche sur le groin ?
Il tendit la main, attrapa un verre qu’il vida cul-sec et attendit. Le vin emparfuma son nez gascon. Il claqua la langue. Vite, qu’on lui versât une seconde rasade.
- Foutre dieu ! Rugit-il au troisième coup de langue. J’en suis sûr ! Tu m’as volé mon château-malescasse ! Tu l’as coupé d’eau et de mauvais vin de messe !…
- J’ai seulement goûté au tonnelet. Faut il pas savoir qu’on verse à autrui ?
Et sans prévenir davantage, le baron assénât un terrible coup de poing dans l’œil de son valet.
- Ouyouyouille ! Vous êtes bien avancé, maintenant que vous m’avez éborgné !
Le baron s’approcha, jeta un regard d’expert à son coquard, et renifla plusieurs fois son haleine.
- Souffle !
Laquenouille souffla un zéphyr.
- Plus ! Ourague ! Bourrasque-moi ça dans le pif je t prie.
Laquenouille, gonfla les outres de ses joues et déballa tempête et postillons.
- Tu es tombé sur mon médoc, diagnostiqua le baron.
L’autre prit un air de faux jeton.
- Je me suis embouti dans un pilier de votre voûte.
- Pas de blabla ! Rien ne m’échappe, tu sais comme je suis pointilleux sur le chapitre du vin. Tu peux t’empiffrer à la cuisine, piller ma fille si elle demande du mieux en surplus de ses amants. ! Mais pas siffler mes estèphe et mes pauillac !
- J’aimerais mieux, finir sous une charrette que de vous mentir !
- Jamais vu pire que ton espèce !
- Et mes gages ?
- Tu réponds ?
- Je rétorque.
- Tu discutes tout noir coquin !
- Attention ! Si je veux demain je descends dans la rue, je tonitrue et vous pancarte !
- Des menaces ? Viens là que je te caresse le nez !
- Nenni ! Je suis cégété ! Encore un soufflet et je vous fais épingler !
- Tu ferais cela ! A ton bon maître ? A ton protecteur ? A ton ami ?
- Ouida ! fini le travail au noir et les privilèges !
Charles de Montignac écrasa une larme insincère et opéra un rapide repli dans ses appartements.
Le valet l’avait suivi.
- Est-ce ma faute à moi si je vois rouge dès que tu me voles mon vin ? plaida-il en guise d’excuse.
- Moi, quand vous me sucrez mon salaire, je deviens mauvais, rétorqua le drôle en resservant son maître.
Et ce fut tout pour ce jour là…
(*) Hilh de pute = Fils de pute (patois gascon)
Le lendemain matin, le baron de Montignac se leva de bonne heure. Il se sentait gai. Gai comme celui qui va à l’azur.
Trop content de retrouver ses forces et d’échapper à la monotonie du bain, le seigneur décida qu’avant de passer aux choses sérieuses il allait pinter quelque rouge millésimé…
Il corna à tue tête Laquenouille et trouva le gueux assoupi devant sa porte. Il attisa le coquin en le réveillant d’un coup de savate, et, sitôt que le valet se fut jeté sur ses pieds, claqua des doigts pour se faire obéir. Cédant à l’éloquence du geste, Laquenouille attrapa le tonnelet de vin qui traînait à portée et lui versa à boire comme il le commandait. Illico le baron vida son verre avec la soif de celui qui n’a jamais bu auparavant.
Afin de faire table rase et de bien montrer qu’il effaçait les mots âpres échangés la veille avec son domestique, le baron piaula quelques paroles aimables à propos du bon vin qu’il venait de boire. Il s’enquit du menu et se trouva fort réjoui à la pensée d’avaler une portion de fanfarons qui sont comme on le sait en Gascogne, des haricots blancs dont la féculence et la texture de de peau sont propices à faire parler la culotte…
Plus tard, quand il fut rassasié, il se frotta les mains et s’écria en usant d’une feinte ferveur dans la voix :
- Jeannot !!! Aujourd’hui est jour d’avenir ! L’esprit d’aventure et de chevalerie rôde autour de mon cœur
- Quelle mouche vous pique mon bon monsieur Charles ! se résigna l’ébouriffé valet en se tenant sur ses gardes. Si vous scandez mon nom par son patronyme véritable c’est que vous allez encore me tabasser dans la gueule.
- Je ne te bats jamais par cruauté. Seulement pour me rendre heureux.
- Justement, Messire. Depuis ces dernières lunes, vous rossez la main lourde…
- C’est parce que le monde est morose. C’est que ma fille est pleine comme génisse. C’est que l’époque est aux abrutis…
Du regard il interrogea l’espace… et affirma mollement…
- Je suis sceptique… très sceptique vois-tu… quant a notre devenir…
… Puis retrouvant ses esprits, il se prit à penser à la demande de Laquenouille
- L’argent ! L’argent maudit ! Toujours l’argent ! Tonne et gesticule le baron à toute bringue.
Fendu par l’insistance du coquin à réclamer ses gages, il fit un grand pas en arrière.
Il clame et déclame, en s’éloignant.
- Au moment où tu me parles, corniflot, la piécette est un état d’esprit qui n’est pas le mien.
- Le contraire m’eût étonné, Messire ! Rapiasse comme vous êtes
- Oh volaille ! je t’en prie, prenons de la hauteur !
- Inutile de louvoyer aux vertigineuses trajectoires Messire ! Il s’agit seulement de mettre la main à votre poche et de payer ce que vous devez à votre fidèle serviteur !
Le baron paraît redescendre sur terre et pose son index en travers de sa carotide.
- Tes gages ? Me faire dégorger ? … Mais tu m’assassines !
- L’époque est sociale ! Vous n’avez pas le choix !
- Je m’amuse ! Ironisa le baron avec une infinie tristesse.
- Et moi je tire la langue ! dit le valet qui ne lâche pas prise.
- Ingrat ! Dans mon castet, tu pitances et biberonnes à ta convenance…
- Gardez votre vie au pair ! Votre paternalisme à la gomme !Je suis de l’autre côté de la flaque moi ! Je m’éraille ! Je fulmine ! Je marche avec les pauvres !Partout les affamés, les rebutés, défilent en tablier de sang !…
D’un revers agacé, le baron chasse le contradicteur ainsi qu’une mouche inopportune.
- Permets que je m’en lave !…
Laquenouille prend l’air heureux comme un fagot d’épines :
- Vous êtes fait ! Le syndicat des gens de maison s’exprime par ma bouche ! La revendication est dans l’air. La cégété y maille de toute son influence.
- Arrêtes tes concédés ! Tu crois encore aux syndicats ?
- Je crois à la justice sociale !
- Je suis sceptique dit le baron.
- Le scepticisme, c’est quand même tout ce qui reste, rétorque le serviteur.
Et plantant la son maître, le drôle tourne des talons sans prévenir.
C’est la première fois depuis longtemps que Monsieur de Montignac se trouve livré à lui-même. Il déchausse ses bésicles de myope. Il avance au hasard devant lui. Il a une grande soif d’hommes. Il écoute la rumeur des voix. Le désaccord des gorges et des idées. Prêt à toutes les farines. Follement perdu par avance. Il exécute le début de son projet mirobolant. Ses oreilles grandissent à mesure. Après une longue absence du monde des vivants, il va au-devant du mauvais vin…
De retour au château, le baron commença à se demander où était passé son couard de valet. Le visage enflammé de colère bleue, il roula sa main en cornet et fit conque aux quatre coins du chemin de ronde.
- Ohé ! L'enflure ! Où es-tu ? Héla t-il son souffre douleur.
Faute de réponse, il saccada trois pas désœuvrés.
Puis de retour dans ses appartements, au détour d'un couloir, il croisa son larbin qui baillait près d'un meuble.
- Que fais-tu comme un piquet ?
- La grève !
- Tout cela est rigolo
Il commanda à Laquenouille de lui ôter sa robe de chambre...
- Nenni ! Allez vous faire mettre !
- Qu'entends-je ?
- Que tant que vous n'êtes pas à jour de mes gages, arriérés et
augmentations, je n'assure plus le service.
- Alors je te fous à la porte !
- Je reste ici !!
- Où te tiendras-tu ?
- A la cave, à la salle à manger, dans le lit de votre fille. Où il me
plaît.
Tu squattes ?
- J'occupe mon instrument de travail !
Devant tant de fermeté, Monsieur de Montignac se trouva fort déconfit et se prit à penser...
Point de méprise, se dit-il ! S'il faut évaluer la facture de chacun et traîner Laquenouille devant le tribunal de nos arrières pensées, ne traitons pas le valet avec des paroles trop rigoureuses.
Le fait est que Montignac est incapable de faire un pas vers le monde sans recourir aux services de son valet à tout faire, une créature laide, poivrote, couperosée, couillarde et sans élévation d'âme, qui n'en est pas moins d'une fidélité à toute épreuve, d'une race qui prend des coups sur le groin et en redemande par méfiance de soi-même et de ses vices ...
Approchez- vous de Laquenouille, même s'il est tordu, chicaneur, et empeste comme une viande séchée, le drôle est fait d'une écorce rustique.
Recevoir sa tannée, avoir les yeux en étoiles, pochtronner soir et matin à la cave, sont de sa destinée.
Se faire ouvrir les chairs à grande volée.. pose ses pieds sur terre.
Baiser la fille du castet, l'entretien dans sa façon de vivre sur l'habitant...
D'autres ne viendront jamais au monde.
On n'achète pas la vie...
Pendant ce temps, notre vilain s'en alla encanailler la crémeuse Flavie, occupée à siester sur son lit où elle se fabriquait des songes.
Après un bel assaut où le coeur des amants fut devenue cent horloges, Laquenouille fit mine de chercher un second souffle. Il s'allongea sur le côté, les yeux dans les yeux de la fille du baron. Il les découvrit verts avec des paillettes d'or. Il parut réfléchir, ce qui était surprenant. Du bout des doigts il explora les tâches qu'avait attisé le soleil autour du gracieux nez de l'ex-jouvencelle. Il se sentait ému. Il risqua même une question :
- Ca boume ?
Il étrennait des sentiments inconnus.
- Et bien, Laquenouille, que fais-tu là ? Le brusqua t-elle. Trêve de muserie ! Saute moi dedans !
Et comme il tardait à la ragasser, elle ajouta en détachant ses prunelles des siennes :
- Jamais plus ne me regarde ainsi !
Ils se séparèrent aussitôt.
Chacun de son côté se tenait immobile sur l'oreiller; les yeux grands ouverts sur une immensité de graminées ...
- Si longtemps dans le pré, je ne bouge pas, se disait Flavie, est-ce que les oiseaux de l'amour véritable finiront par se poser sur moi ?
Elle se sentait lasse et soupirante.
De son côté, Laquenouille ruminait des perspectives nouvelles.
- Mille dieux ! Et si j'étais le père de votre enfant ? Interrogea -t-il soudain en se retournant sur le ventre.
Alors, dans le regard marécageux du servitieur, du badin qui presque louchait, la demoiselle vit passer l'oiseau.
L'Oiseau !
- Tu es pourtant le plus môche balbutia Flavie.
- Taupin vaut marotte, répliqua son amant à la machoir pesante. Je suis couillu, vous êtes pute !
A ces mots, les yeux de la jouvencelle s'éclairèrent comme un grand ciel d'été.
- Ah ! Mon buffle mal fait ! Ah mon amour ! Comment ne l'ai-je dicerné plus tôt.
Joignant le geste à la culbulte, de sa menotte agile, elle fît hocher Laquenouille par son arbre.
Elle exhala un soupir, long et tiède et entrouvit pour lui son écrin encore chaud.
Alors, avec des yeux aimants, une infinie tendresse, elle le fit pénétrer sur le cours de la rivière souterraine pour en cueillir plus de fruits...
... Tandis que tendrement enlacés, Flavie et Laquenouille choisissaient ensemble le prénom de leur possible progéniture, les autres possibles papas du bambin poursuivaient leur irrésistible ascension...
- Je t'aime, Laquenouille, disait Flavie avec une parfaite innocence.
La nature nous force à tout manger. Tu es tordu, abominable et mal lavé, mais je m'aperçois maintenant que je t'ai toujours aimé.
Et renouant avec mille effleurements propres à entretenir la chaleur, la rouée rafistolait l'ardeur du valet, émerveillé par cette fredaine d'ondes.
Dès qu'elle eût annoncé qu'elle avait quitté tous ses maris, Laquenouille, sût que sa grève était brisée ...
... Plus tard...
Comme à l'accoutumée, le valet apporta sur un plateau la bouteille de vin matinal et un beau chandelier d'étain à son Maître.
Ses cheveux étaient mouillés. Il s'était dessiné une raie sur le côté. Il portait une chemise repassée...
- Voilà votre piveton de soif, Messire Charles. Millesime 74. Grand bien vous fasse !
- Merci, mon garçon. Où en sommes-nous avec la grève ?
L'autre prit le soin d'allumer la bougie et commença à décanter le vin devant la flamme.
- Oh, elle a prit fin hier, dit-il en humant l'odeur de sous-bois du cru bourgeois. Sans trop de casse. Sur l'oreiller.
- Je m'en réjouis, Jeannot. Ma famille a cotoyé la tienne pendant près de trois siècles. Ta pauvre mère m'a donné le sein. C'eût été pitié que nos chemins se séparassent au moment de l'épreuve !
- A voir ! Trois cents ans de servage et de métairie, pour une famille de ma sorte, ça n'a jamais été un chemin tranquille...
Le baron prit l'air de celui qui ne veut pas rallumer une dispute inutile.
- Adepte de cette sagesse réfléchie en laquelle je crois, tout en lui restant toujours inférieur, je ne pense pas qu'il puisse y avoir de grandes réformes sociales sans que l'on change le fond de l'homme...
- Je vous entends bien, notre maître, mais l'homme n'est pas le même, selon qu'il est né ou non du côté du magot.
Le baron hala un gros soupir.
Il avait passé une mauvaise nuit à réfléchir.
Vagabond de l'esprit continuant à chercher le commencement de la sérénité dans l'oubli de soi-même, il était désireux, ce matin-là de prouver à son serviteur qu'il était un abolitionniste, un homme de bonne foi, courageux et désintéressé, un être de sagesse capable d'embrasser de nouveaux principes, un vrai philosophe rompu à tous les excercices de liberté.
- Je veux faire du neuf avec toi, Laquenouille ! Aussi, je te le propose, assassinons l'argent !
- Chaleur ! moussu ! Ce n'est pas pour demain !
- Pourquoi ?... Du moins entre nous, tuons le vilain fric !
Laquenouille se tordit de rire, et lâcha la chandelle.
- Eh bé ! écuma le baron, serre ta bougie droite !
Il avait avancé le poing levé, prêt à frotter l'oeil du maladroit, mais alors que d'habitude il eût borgné le drôle, il décerna un franc sourire à son serviteur déjà garé sous la table.
... Et le faciès radieux, transfiguré par une illumination céleste, Charles de Montignac s'exclama d'une voix de caverne :
- Laquenouille ! Aujourd'hui, décidons que tout ce qui me reste de biens ou d'usage de terres est à toi!
- Depuis quand ?
- Depuis maintenant !
Message formidable ! Laquenouille n'en croyait pas ses oreilles.
- Ainsi j'ai du vin à la cave ?
- Trente barriques !
- A ce moment-là... j'ai aussi de l'argenterie dans votre vaisselier ?
- Dix-huit écrins de vermeil blasonné et deux grands services.
- Et en contrepartie ?
- Je prendrai le peu que tu me donnes !
- Hic, mon prince !... Qu'ai-je à vous offrir ?
La réponse de Montignac était toute prête :
- Ton entière confiance.
- Mais alors, c'est du troc ? Et si c'est du troc, j'y perds fatalement !
- Comment se pourrait-ce, ingrat ?
- Je le sais de mille façons, messire : l'expérience !
- Mais tronche de piaf ! puisque c'est moi qui te donne...
- Justement ! ... Je crois bien que c'est cette putain de confiance que vous me faites qui ne m'arrange pas... ergo, je la refuse !
- Tu repousses les avances de ton Maître ?
- Je préfère vous voler... c'est plus conforme à ma nature.
- Blague sous les aisselles, Jeannot ! Il n'y a que l'âne qui ne sait pas ou le bât blesse, s'emporta Monsieur de Montignac, seul le vilain, le salopeux argent à gâché nos rapports jusqu'ici !
- Et quelques ramponneaux...
Le Baron balaya ce dernier argument de peu de poids. Il se leva avec gravité.
Il répéta avec force et conviction :
- Pour te montrer que je me rends tout à fait à ton égalité sociale, j'augmente tes gages de cinq cents ! et pour solder l'arriéré, tiens, ! c'est dit ! nous allons vendre un bois feuillu !
L'autre semblait frappé par le foudre :
- Monsieur le baron, merci vous venez de me rendre la force de regarder l'avenir !
- Ce n'est point tout, écoute-moi ! J'ai assez longtemps regardé l'herbe lever. Dans la minute qui va suivre, tout à l'heure si ça se trouve.. après-demain au plus tard... vers midi ... nous allons partir en voyage... je veux que tu prépares nos sacs, nos provisions de bouche...
- C'est que...
- Quoi encore ?
- ... J'ai quèque chose plus à vous demander ...
- Nous n'avons pas le temps ! Prépare mes pantalons !
- C'est au sujet de votre fille...
- Tu la veux ? Prends-la ! Je te la donne ! elle fera partie du lot ! Prends tout ! D'ailleurs, son mariage est nul ! Ses maris sont des entôleurs ! Les cuistres l'ont répudiée vive ... Sitôt fortune faite ! Elle ne t'a rien dit ? La grougne ! La voilà sur le sable ! Spoliée ! Nude ! Mûre dans son ventre d'un chapelet de triplés à ce qu'il paraît !
- Des triplés ?
- Trois petits cancres ! Une portée ! Tu découvriras tes chiots en revenant ! Partons au plus vite !... En route, Laquenouille ! Dieu au travail ! Face au grand projet ! tant il est jour et date que nous allions sur le terrain mesurer si le chaos des hommes est aussi grand et funeste que tu le penses !
- Coquin diou ! notre maître ! Qu'est-ce qui m'arrive ? J'ai les couillons qui grossissent ! s'écria Laquenouille en pointant son entrejambe.
Il avait l'air effrayé et stupide.
Son pantalon se déchira. Ses boutons de braguette se détachèrent. Sol La Si La, sur le sol, par petites notes, il musiquèrent. L'un se perdit sous la baignoire, l'autre roula sur la dalle, Laquenouille regardait ses organes.
- De partout, je suis trop riche, constata amèrement le valet à tout faire.
Il avait les balles comme des outres.
Et ce fut tout pour ce jour-là mais c'était bien assez...
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