Dans ce monde où chaque État est gouverné par un avatar de Sauron, et toutes les entreprises multinationales par autant de Sarumanes, il est toujours bon et utile se replonger dans cette œuvre magnifique qu'est le Seigneur des Anneaux. La leçon de vie qui est contenue dans cette œuvre reste plus que jamais d'actualité, surtout l'aspect «écologique» de la lutte de Gandalf et de la fraternité contre les forces industrielles destructrices et polluantes incarnées par les esclaves de l'Unique, symbole de tous les totalitarismes, qu'ils soient politiques (communisme ou capitalisme industriels) ou religieux (les exemples ne manquent hélas pas).
Je viens de terminer la trilogie dans sa nouvelle traduction par Daniel Lauzon, et j'ai envie de dire que nous disposons enfin d'une traduction correcte de l'œuvre de Tolkien en français, celle de Francis Ledoux, datant des années 60 étant largement infidèle à l'esprit et aux volontés mêmes de l'auteur Anglais.
Et quand on compare les livres avec les films, on est frappé par le très grand nombre de différences et de libertés prises avec l'histoire qui y est contée. Je ne nie pas que Peter Jackson ait réalisé des films d'une grande beauté visuelle, aidé en cela par Alan Lee, qui a également fourni à la nouvelle traduction des livres ses illustrations, et je comprend bien qu'il est impossible, même dans une version longue, de reproduire fidèlement le texte complet de Tolkien, mais certains manques et certains ajouts sont pourtant fort dommageables à mes yeux.
Je déplore en particulier l'absence totale de Tom Bombadil dans le film, personnage mystérieux et sage qui occupe une large partie du tome un, et aussi la lutte héroïque des Hobbits, seuls, contre l'invasion du Comté (le mot a toujours été masculin en français, sa féminisation par Ledoux reste une erreur incompréhensible) par les bandits à la solde de Sarumane, dont la mort a, il faut bien le dire, été expédiée beaucoup trop vite dans le film. Le chapitre sur la naissance de l'amour entre Faramir et Éowyn, dans les maisons de guérison de Minas Tirith, est un des plus émouvant du livre, également totalement absent du film, ce qui est regrettable.
Quant à l'histoire d'amour entre Arwen et Aragorn, elle fait l'objet de longs développements dans les films, alors qu'elle n'existe pas dans le livre, mais sur ce point, son ajout n'a rien de choquant, même si certaines scènes restent malgré tout un peu mièvres et manquent de grandeur et de majesté, deux qualités pourtant indissociables du personnage d'Aragorn, et du peuple des Elfes en général, dont le sang coule encore dans les veines des Rois du Gondor.
Enfin l'ajout par Peter Jackson de l'armée des Elfes dans le combat de la Gorge de Helm va à l'encontre de l'idée directrice du livre, qui relate la lutte solitaire du peuple des Hommes contre Sauron et Sarumane, et l'effacement et le départ des Elfes de la terre du Milieu, dont le rôle fut de guider l'Humanité, avec l'aide des Magiciens, sur la voie de la sagesse, et qui n'avaient aucune raison de prendre part à cette guerre, qui n'était plus la leur.
Je ne saurais donc trop conseiller la lecture des livres de Tolkien dans cette nouvelle traduction de Daniel Lauzon, dont le rythme, lent et majestueux comme les eaux du fleuve Anduin, est très différent de celui des films, même en version longue. Sa traduction des poèmes de Tolkien est également largement supérieure à la précédente, mais je conseillerais tout de même de les lire dans leur version originale, car ils sont courts et magnifiques, et méritent cet effort.
Dernière modification par Dyaus ; 21/02/2018 à 08h02.
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