Le Journal des Larmes, une trilogie apocalyptique.

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JOUR 36



Le raptor se jette sur moi, sans hésiter je lui enfonce mon épée dans la gorge. L’animal tombe, inerte. A côté de moi j’entends le froissement de la cape de Kelch. Le bruit est presque inaudible, trahissant à peine la présence du voleur. J’ai moi-même du mal à le discerner dans l’ombre. Les contours de sa silhouette sont flous, impalpables. Voilà donc le résultat de l’enseignement de Gazel. Je souris. Dangereuses ces cavernes ? Faut quand même pas exagérer…





Deux silhouettes avancent, silencieusement, explorant le labyrinthe souterrain. Soudain, un hurlement. Le troll tombe au sol, un raptor saute sur son torse. Tandis que la bête se prépare à enfoncer sa gueule dans les entrailles de sa proie, un deuxième animal se jette sur le prédateur. Les deux reptiles se livrent une lutte sauvage. Une détonation. L’un des deux combattants se fige, puis tombe raide mort.

-Merci Asky.

Le raptor sautille vers son maître et attrape au vol le morceau de viande que celui-ci lui lance en récompense.

Le chasseur s’approche de son ami et l’aide à se relever.

-Je te dois une fière chandelle Drellath. J’ai bien cru que j’allai finir en crotte de raptor.

L’orc ne répondit pas, il fixait quelque chose sur le torse de Kelch. Du sang...
JOUR 37


Je rouvre les yeux. Tout tourne autour de moi. Je me relève péniblement, cherchant Kelch du regard. Le troll est allongé quelques mètres plus loin, son sang coule de profondes entailles sur son torse et ses membres supérieurs. Je ne me souviens pas que le raptor lui ait laissé des blessures aussi graves. Le voleur gémis faiblement, je me précipite vers lui et tente maladroitement de stopper l’hémorragie avec les bandages qu’il conserve dans son sac. Après plusieurs essais malencontreux je parviens enfin à confectionner un garrot qui arrête l’écoulement. Je m’écroule à côté de mon ami, prenant enfin le temps de me poser les questions qui s’imposent. Pourquoi étais-je inconscient ? Dans un premier réflexe je regarde mes mains mais les seules traces de sang apparentes sont celles que je viens de nettoyer sur le corps de Kelch. C’est pourtant la même sensation qu’après avoir vu mon sang. Comment est-ce possible ? Je jette un coup d’œil vers Kelch, toujours évanoui. Serais-ce son sang qui …?

Je frémis, si c’est le cas cela veut dire que mon mal est en train d’empirer, je dois absolument voir Gazel pour en avoir le cœur net. D’abord sortir d’ici. Prenant Kelch par les épaules je le hisse sur mon dos pour le transporter au dehors. Comment le troll a-t-il pu se retrouver aussi mal ? Avons-nous été attaqué durant mon sommeil ? Je maudis une nouvelle fois mon mal, sans lui j’aurai pu venir en aide au voleur… Je secoue la tête. Ce n’est pas ma faute si Kelch se retrouve dans cet état. Je presse le pas. A la croisée, un prêtre ou un chaman saura soigner mon ami. Espérons seulement que je ne trouve pas de nouveaux monstres sur ma route.



Guérisseurs :

Les êtres doués du pouvoir de guérison ont toujours bénéficiés d’un grand respect des leurs. Chaque race et civilisation leur connaît un nom que ce soit prêtre chez les humains, druides pour les elfes, chamans pour taurens et orcs ou encore sorciers docteurs dans les anciennes tribus trolls. Pourtant beaucoup de ces « bienfaiteurs » ce sont laissés fasciner par le pouvoir destructeur de la maladie. Dans les temps anciens certains ont même propagés les épidémies qu’ils combattaient autrefois, réduisant des villes entières à néant. Si la croyance populaire veut que ces propagateurs de l’ombre se soient détruits dans leurs propres cataclysmes, la ré-émergence récente de maladies que l’on pensait vaincues laisse penser que certains d’entre eux sont toujours parmi nous et continuent leurs activités avec plus de discrétion.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.
JOUR 38



« Je suis parvenu à la Croisée, épuisé, juste à temps pour remettre le sort de Kelch entre les mains de Gazel. Ce n’est plus de mon ressort désormais. Il ne me reste plus qu’à attendre que le troll se réveille pour dire ce qui s’est passé. »



-Je ne sais pas ce qui s’est passé. Je me suis évanoui. Ce doit être mon mal qui empire, au point que même le sang des autres me perturbe.

-Je ne pense pas Drellath.

Je regarde le démoniste avec étonnement. Comment peut-il nier l’évidence ? Lentement le mort-vivant prend la dague accrochée à sa ceinture et découpe une large entaille sur la paume de sa main qu’il agite devant mes yeux. Le sang tombe à grosse goutte sur le sol mais Gazel ne semble pas en souffrir. Je continue à scruter la blessure, attendant l’inévitable, mais rien ne vient.

-Tu vois, dis le réprouvé en essuyant sa main contre sa robe, aucune réaction. Tu es sûr de ne pas avoir été blessé ?

-Oui, j’ai tout fait pour me maintenir à distance.

-Hum… Raconte moi tout depuis le début. Et n’omets aucun détail.

Je reprends mon histoire. Gazel m’écoute avec attention, m’interrompant parfois pour me faire revenir en arrière. Ce n’est que tard dans la nuit que je termine mon récit. Sans me dire si cela lui a apporté des éléments supplémentaires, le mort-vivant me demande de partir me reposer. Son visage reste impassible mais je perçois l’inquiétude dans le ton qu’il emploie pour m’assurer qu’il s’occupera bien de Kelch.

Je n’insiste pas. Je jette un dernier regard sur le visage de mon ami, allongé sur le lit, puis quitte la pièce. Je n’aurai jamais cru que je puisse à nouveau ressentir la douleur de perdre un être cher. N’existe-t-il que peine et haine en ce monde ?





Le démoniste revient au chevet du malade.

-Pas besoin de faire semblant Kelch. Ca ne marche pas avec moi, je sais que tu es réveillé.

Le troll ouvre un œil puis l’autre. Il étend les lèvres en un sourire douloureux.

-Ca se voit tant que ça ?

-Ta respiration rapide de tout à l’heure indiquait que tu écoutais notre conversation. Depuis combien de temps es tu conscient ?

-Je ne sais pas. Je me suis réveillé alors que vous parliez avec Drellath.

-Justement. Que c’est-il passé ?

-Vous le savez très bien.

Le réprouvé reste silencieux puis reprend :

-Vous avez été attaqué.

Ce n’est pas une question, juste une affirmation.

-Oui c’est ça… On a été attaqué.
JOUR 39



« Kelch a enfin repris conscience. Comme il parlait difficilement je n’ai pas compris ses propos, mais il semble qu’il ait été attaqué par les créatures des Cavernes. Gazel m’a dit de ne pas le fatiguer, il est encore convalescent. »



-Kelch ?

Je rentre dans la chambre du malade et parcoure la pièce du regard.

Le lit, défait, est vide et le voleur a disparu. Où est-il passé ? Son état ne l’autorise pas à quitter l’auberge ainsi. Aussitôt les pires suppositions me viennent en tête, mais une vision a tôt fait de les dissiper.

Dans la cour de l’auberge, un groupe d’aventuriers assis en cercle s’est formé, écoutant attentivement un troll au milieu d’eux.

Je me précipite. Tel un conteur de rue, Kelch raconte nos aventures. Renonçant à l’interrompre, je m’assis aux côtés des autres spectateurs pour écouter son récit. Sa voix a tôt fait de m’envoûter, évoquant les combats sanglants, l’angoisse de chaque seconde et les fous rires ravageurs. Je souris, il semble s’être rapidement remis de ses blessures.



Conteurs :

A l’époque où l’écriture n’existait pas encore, l’Histoire de nos peuples était entièrement transmise oralement par les conteurs qui piochant dans leur immense mémoire, en sélectionnaient les meilleurs passages pour séduire les foules. Aujourd’hui ces conteurs ont disparus, au profit des bibliothèques et de leurs secrets. Il serait pourtant utile de retrouver ces témoins de l’ancien temps, car que pourraient-ils alors nous révéler ?
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.
La nuit tombe sur les Tarides, la Croisée des Chemins redevient silencieuse. Seules subsistent les silhouettes des gardes surveillant l’horizon. Le village a perdu son effervescence, la nuit endort ses ardeurs.

-Hé vous, déclinez votre identité !

Le garde brandit sa hache en direction de deux ombres qui s’approchent de l’entrée nord.

-N’avancez pas !

Pas de réponse. L’une des silhouettes effectue un geste et le garde s’écroule aussitôt, inconscient.

Pénétrant dans l’enceinte de la cité, les deux intrus prennent alors la direction de l’auberge.



Gazel était assis à sa table de travail, recopiant les passages du Livre qui lui semblaient importants. Il avait enfin réussi à l’ouvrir, pourtant l’ouvrage conservait son mystère. Seuls les initiés étaient ils en mesure de comprendre le véritable sens de ces lignes ? Le démoniste n’y voyait qu’un mélange d’informations tirées de l’Histoire d’Azeroth, provenant sûrement d’archives ou de journaux d’époque. Mais au fur et à mesure de sa lecture le réprouvé remarqua une discordance. Certains évènements étaient évoqués dont il n’avait jamais eu connaissance. Se pourrait-il qu’ils aient été dissimulés ? En cherchant bien, il trouva diverses allusions à ces « inconnus » de l’Histoire, ainsi que plusieurs prédictions avertissant du danger de voir le passé se répéter. Qu’est-ce qui doit se répéter ?

Le mort-vivant frémit malgré la chaleur de la chambre, il avait un mauvais pressentiment.

Toc toc.

Gazel se leva et ouvrit la porte. Deux inconnus lui faisaient face. Il n’eut pas le temps de crier, que l’ombre tombait déjà sur lui.
JOUR 40


- Aleeeerte !

Je me réveille en sursaut. Dehors cris et fracas d’armes retentissent. Je sors de l’auberge en trombe. Le soleil n’est pas encore levé mais tous les habitants du village sortent des maisons et se regroupent autour de l’entrée nord. Des gardes tentent de les disperser mais l’excitation générale est trop grande pour se soumettre à l’autorité. De multiples expressions sont visibles sur les visages, l’inquiétude, la fureur, le désarroi. Je me fraye un chemin au milieu de la foule et découvre la cause de cette agitation : le cadavre d’un garde orc gît au sol, sans blessure apparente. Je tente de m’approcher mais les autres gardes me refoulent sans ménagements.

-Nous nous en occupons. Les civils n’ont pas à être impliqués dans cette affaire. Retournez chez vous.

Je recule. A près tout ils ont raison. Je ne suis pas un justicier, ce meurtre ne me concerne pas.

-Drellath !

Kelch surgit à l’entrée de l’auberge, le souffle court il dit :

-Drellath, Gazel a disparu !

J’écarquille les yeux. Non. Pas encore.



Le raptor renifle le sol. D’un mouvement de la tête il indique la direction à prendre. Le sable des tarides commence a effacer les traces, mais le flair de l’animal permet aux deux compagnons de les suivre sans difficulté. Des heures de marche les mènent à un tunnel creusé à même la roche. Ils s’entre-regardent avant de s’enfoncer dans les profondeurs du gouffre. L’obscurité y est presque totale, ils avancent à tâtons, butant les uns contre les autres. Soudain la lumière jaillit à l’extrémité du tunnel. Les trois compagnons débouchent sur une grande salle, les yeux écarquillés d’horreur devant la scène qui se déroule devant eux.



Trois corps. Trois corps suspendus au plafond de la caverne par des chaînes encastrées à même leur chair. Les deux premiers me sont inconnus ; il m’aurait d’ailleurs été difficile de les reconnaître, ils ont été tellement torturés, mutilés, qu’il est presque impossible de savoir à quelle race ils appartenaient. Mais le troisième…

-C’est Gazel chuchote Kelch.

Le troll a malheureusement raison. C’est bien le réprouvé qui se balance au bout de ces chaînes. Je me précipite mais le voleur me retient.

-Imbécile ! Tu veux qu’il nous arrive la même chose ?

Ils me désignent des silhouettes dansantes autour des trois victimes. Eclairé par les torches accrochées aux murs, je reconnais ce faciès si particulier. Des trolls. Occupés à leur danse macabre ils ne nous ont pas remarqués. Je tremble de rage. Comment ont-ils osés… Kelch me fait signe de rester calme. Les ennemis sont trop nombreux pour que nous puissions envisager le combat. Soudain le roulement de tambour qui emplissait la salle s’arrête brusquement. Les trolls stoppent leur danse et s’écarte pour laisser passer l’un des leurs qui monte sur une sorte d’estrade. Leur chef très probablement.

-Drellath tu ne remarques rien ?

J’écarquille les yeux, je la connais ! Le troll qui est en fait une femelle est la même que nous avons croisé un mois plus tôt à la citadelle de Thrall à Orgrimmar. C’était elle qui disait diriger cet ordre extrémiste, l’ordre des Annonciateurs. Serais-ce ses membres que je vois rassemblés devant moi ? La colère me reprend. Il ne s’en serait donc pris à Gazel que parce qu’il est un mort-vivant ? Cette fois ma fureur est trop forte pour que je ne réagisse pas.

-Je suis désolé Drellath.

Je regarde Kelch étonné.

Le voleur saisit sa dague et la pointe vers moi.

-Je m’en occuperai seul.

Sans que je puisse réagir il m’entaille la main et m’amène la blessure devant les yeux.

-Je ne veux pas que tu prennes de risques, pardonne moi.

Je n’aie pas le temps de répondre. Ma vue s’embrouille, je me sens partir…
JOUR 41



L’odeur de sang me réveille, fétide et pernicieuse. J’ouvre les yeux. Autour de moi tout n’est plus que cadavres. L’ensemble des trolls gît à mes pieds, égorgés par la lame tranchante de Kelch. Impressionnant, je n’imaginait pas le voleur aussi fort, du moins pas assez pour battre trente adversaires en même temps.

-Tu es réveillé Drellath.

Je me tourne vers l’origine de la voix. Mon ami est là, assis devant le monceau de chair ensanglanté qui avait autrefois répondu au nom de Gazel. J’ouvre la bouche pour interroger le voleur mais il secoue la tête négativement.

-C’est fini.

Les mots résonnent comme une condamnation. Un instant je sens la rage monter en moi, l’envie de détruire. Je regrette presque que Kelch ai déjà tué les responsables.

-Reste calme Drellath.

J’ai envie de frapper le visage de mon ami, lui qui reste si calme en pareille situation ! Mais je me retiens… La façon dont nos ennemis ont été traités montre que le voleur n’est pas resté insensible devant le sort de notre ancien maître.

-Raaaaah.

Un gémissement s’échappe de la montagne de cadavre. Y aurait-il un survivant ? Je sors mon fusil, prêt à agir. Un soubresaut agite les corps. Je vise aussitôt la bosse qui se forme mais Kelch me fait signe de baisser mon arme. Quelques secondes après, la tête d’Asky surgit des décombres. Il se précipite vers moi et blottit sa tête contre ma jambe, tremblant de tous ses membres. Le combat l’a donc effrayé à ce point ?

-Raaaaah.

A nouveau j’entends un gémissement s’échapper des cadavres, ce n’est pas le raptor cette fois. Plus rapide que moi Kelch se précipite vers l’origine de la voix. Il déblaie les corps et finit par libérer un troll encore en vie.

- Il ne tiendra pas longtemps murmure mon compagnon.

- On s’en fiche, si tu ne veux pas l’achever je le ferai.

- La ferme !

Le visage du voleur exprime la fureur. Je recule, surpris.

-Il a tué Gazel !

-Oui et je veux savoir pourquoi.

Le troll continue de gémir faiblement. Kelch rapproche son visage du sien et demande doucement :

-Si tu veux vivre un peu plus longtemps tu vas répondre à mes questions, compris ?

Puis sans prévenir, il tord violemment le bras du blessé.

-Aaaaaaarg ! Oui, oui.

La voix du troll est faible, presque inaudible. Je me prends a espérer que Kelch ne le tue pas tout de suite. Je veux savoir.

-Pourquoi avez-vous tué Gazel ?

-Le… Le réprouvé ?

Le visage du troll prend une expression dégoûtée.

-Ce n’est pas parce que c’était un mort-vivant si c’est que vous croyez. Bien que nous désapprouvions l’alliance avec ces créatures nous ne prendrions pas autant de risques pour n’en tuer qu’un.

-Alors pourquoi ?

Kelch tord un peu plus le bras du troll.

-Aaah ! C’est… Parce qu’il ne devait pas connaître la vérité.

-Quelle vérité ?

Malgré sa situation le troll a un sourire méprisant.

-La vérité. Mais vous ne saurez jamais de quoi il s’agit.

-Alors tu nous es inutile.

Cette fois le voleur cassa carrément le bras de son prisonnier.

-Arrêtez ! Le Livre, il avait le Livre.

Il désigne un objet à quelques mètres.

-Tout ceux qui lisent le Livre doivent mourir. Personne ne doit connaître le passé… L’Histoire du monde ne doit pas être redécouverte.

Dans un dernier soubresaut il crie :

-Gloire aux dieux !

Puis il meurt.

Je ne comprends pas. Tout ce que vient de dire le troll n’a aucun sens. Redécouvrir l’Histoire ? Nous la connaissons déjà. Si ce qu’il disait était vrai cela voudrait dire que les plus hautes autorités de la Horde comme de l’Alliance auraient dissimulés des informations à leurs peuples. Ce qui est naturellement impossible.

Sans rien dire Kelch ramasse le livre désigné par le troll. Il s’agit d’un vieil ouvrage à la couverture écornée où brille en lettre de sang : Les Oubliés de L’Histoire, Aneth, Le Livre des Malédictions. Je renifle avec dédain. Ce troll nous a manifestement raconté n’importe quoi, comment un tel objet pourrait être responsable de la mort de Gazel ?



Prophétie :

Les tribus trolls possèdent de nombreuses prophéties, annonciatrices d’évènements incroyables. La création de telles fables leur donne ainsi l’impression de mieux maîtriser leur destin. Pourtant elles ne sont pas toutes sans intérêt, une a d’ailleurs retenu mon attention car elle présente d’étranges ressemblances avec des évènements récents.



L’illusion ouvrira la Porte

Qui relie nos deux univers.

Les deux frères combattront,

Mais de cette guerre nul gagnant,

Les peuples se révolteront,

Et se sera la fin du monde.



Le roi des deux continents fera son apparition,

Les héros renaîtront,

Ils apprendront le pardon,

Et de leur alliance sera décidé la fin ou le commencement.



Le plus surprenant dans ce texte est que la tribu qui l’a écrite vivait recluse dans les hinterlands des royaumes de l’Est. N’ayant jamais quitté son territoire elle ignorait donc l’existence d’un deuxième continent.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.
-C’est bizarre.

L’inconnu tourna plusieurs pages du journal. Le vieil aubergiste le laissa à sa lecture, et regarda par la fenêtre. A l’horizon, une bande de lumière indiquait le lever du jour. Ils étaient restés toute la nuit éveillés, son étrange visiteur et lui. Pourtant ni l’un ni l’autre ne montrait des signes de fatigue.

-C’est bizarre répéta l’inconnu encapuchonné.

-Quoi donc ?

-Il manque des pages, elles ont été arrachées sur une période d’environ deux ans.

Le tauren sourit avec calme :

-Sans doute ces deux années étaient-elles inintéressantes.

Son interlocuteur ne répondit pas, il semblait replongé dans sa lecture. Soudain, il releva la tête et interpella l’aubergiste d’un ton brusque :

-Maintenant que j’y pense je n’ai vu aucune allusion à un tauren druide dans ces pages. Comment pourriez vous connaître quoi que ce soit de cette période si vous n’avez pas lu ce livre.

Le druide éclata d’un rire amusé.

-Il est vrai que je ne suivais pas les mêmes voies à l’époque.

Il releva manche, dévoilant de nouveau l’arbre à trois branches qui ornait son poignet. Remontant un peu plus haut sur le bras il révéla un second tatouage, plus ancien, tracé à même la chair. Un loup hurlant à la lune.

-J’étais chaman.

L’inconnu eu un mouvement de recul.

-Mais alors…

-Oui j’ai changé de voie après que des évènements tragiques m’aient montré que je m’égarais. Mon nom est Alethor.


JOUR 1 (on reprend le décompte)



-Drellath !

Le troll me serre contre lui avec un grand rire. Je pleure moi aussi des larmes de joie. Deux ans déjà… Après les effusions de nos retrouvailles nous prenons une table à l’auberge et nous asseyons autour d’un repas gastronomique. Les yeux de Kelch brillent à la vue d’un tel festin, il semble ne pas avoir mangé depuis plusieurs jours.

-Ca ne m’étonne pas que tu ai pris du poids se moque t-il.

Je souris. Ses sarcasmes me manquaient.

-Deux ans déjà…

-Oui, deux ans depuis…

Silence. Aucun de nous n’est prêt à aborder le sujet. Pas assez de temps ne s’est écoulé. Même après deux années.

-Alors que fais-tu à présent Drellath demande le voleur avec curiosité, tu t’es casé ?

-J’ai étudié durant un an le métier d’ingénieur, maintenant je tiens un atelier dans la vallée de l’Honneur.

-Tu as quitté la voie du chasseur.

Je fronce les sourcils.

-Bien sûr que non ! Durant les périodes chaudes je laisse l’atelier à mon partenaire –un gobelin de confiance- et je pars à l’aventure dans le vaste monde. Mais en ce moment je n’ai pas le temps, un chantier très important est en préparation et ils ont besoin de mes services. J’essaye d’offrir ma collaboration sur tous les plans à la Horde.

-Un chantier ?

-Oui tu n’es pas au courant ? Une nouvelle ligne de zeppelins et en construction. On m’a demandé de concevoir les plans d’un nouveau modèle. Plus grand et plus rapide. J’ai d’ailleurs l’idée de remplacer l’hélice usuelle par un moteur comme ceux des véhicules gnomes.

Mon ami paraît étonné.

-Tu sais vraiment faire tout çà ?

-Que crois tu ? Et toi, toujours dans les pires combines ?

Le voleur affiche une mine de conspirateur. Il est vrai que son travail ne lui attire pas que des amis. Peu importe, après cette longue séparation je suis content de retrouver mon compagnon d’armes. Même si j’ignore la raison de son retour.
JOUR 2


-Avancez la grue vers moi ! C’est ça ! Continuez, on en a encore pour quelques heures.

Le gobelin se racle la gorge et continue de crier des ordres aux ouvriers. Devant lui une immense carcasse métallique commence à se former.

-Ca avance ?

-Ca avancerait mieux si on avait plus de péons répond le gobelin d’une voix irritée. Mais Thrall ne veut pas nous en fournir plus. Il a besoin de soldats paraît-il.

Je pose une main apaisante sur son épaule.

-Je suis sûr que tu vas t’en sortir Taldez. Tu trouves toujours des solutions.

Mon collègue fait mine de réfléchir.

-On pourrait peut-être engager des gobelins proposai-je.

-Non. Je connais mes compatriotes, ils demanderont un salaire trop élevé. Au fait où étais tu hier ?

-J’ai revu un vieil ami.

-C’est bien dit le gobelin en souriant pour la première fois. Il fallait que tu te changes les idées, tu t’investis beaucoup trop dans ton travail. Ca m’inquiètes parfois.

Je ris et lui envoie une bourrade amicale.

-Au fait quel est son nom ?

-Kelch.

Le gobelin pâlit. Il semble avoir vu un fantôme.
A une centaine de mètres, cachée derrières les échafaudages, une silhouette observe l’orc et le gobelin discuter. Il sourit. Il a bien fait de suivre le chasseur. Taldez… La misérable petite créature avait pâlit en entendant son nom. Kelch. Mais bientôt il ne serait plus le seul. Toujours souriant le troll s’accroupit, attendant l’instant propice. Sa patience n’est pas mise longtemps à l’épreuve, le gobelin s’écarte bientôt du centre du chantier, pressant le pas, la mine inquiète comme si il était suivi. Ce qui était le cas. Silencieusement le voleur emboîte le pas de son ancien acolyte.



Rédemption :

Il arrive parfois que des individus autrefois malveillants cherchent le pardon de leurs actes passés après avoir pris conscience de la portée de ceux-ci. Ces personnages sont extrêmement rares, le plus souvent petits escrocs ou voleurs de bas étage ayant été embarqués dans des affaires beaucoup trop grandes pour eux. Leurs yeux s’ouvrent alors à la vérité, leur donnant le courage de trahir leurs anciens compagnons, en les dénonçant ou simplement en se rangeant dans une vie honnête et stable. Malheureusement ce type d’histoire se finit toujours tragiquement, les traîtres devant être retrouvés et punis.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.
JOUR 3


Le corps de Taldez a été retrouvé le matin même, mutilé de façon horrible. J’en frémis encore d’horreur. Chaque partie de son corps avait été découpé avec soin et disposé de manière à former un mot : traître. J’ignore dans quoi était impliqué Taldez mais il est sûr qu’il ne méritait pas cela.

-Ce que je ne comprends pas, Drellath, c’est comment tu en es arrivé à travailler avec lui.

Kelch est venu me voir dès qu’il a su la nouvelle. Comme d’habitude il me pose plus de questions qu’il ne me fournit de réponses. Ravalant mes larmes, j’explique à mon ami les évènements de ces deux dernières années. Lorsque je suis revenu à Orgrimmar, bouleversé et incapable de faire quoi que ce soit, la seule personne que je fus en mesure de contacter fut ce gobelin dont j’avais gardé la carte de visite. Il avait déménagé de la faille des ombres mais je le retrouvais plus tard à Ratchet. Il se souvenait de moi. Pour une fois j’ai mis ma méfiance de côté et ai parlé sincèrement au gobelin. J’avais besoin d’argent. J’étais seul, sans maître ni famille et ne connaissait rien de la vie en ville. Je n’eu pas à insister longtemps pour le convaincre de m’aider. Il était criblé de dettes, après –semble t-il- avoir effectué un travail dangereux pour lequel il ne reçut aucune rémunération. Nous nous sommes donc associés. J’apprenais vite, et bientôt je pus m’occuper de la confection d’armes à feu et autres gadgets tandis qu’il tenait la caisse. La suite est simple, notre commerce prospérant nous fûmes remarqués par les autorités de la Horde et chargés de l’approvisionnement exclusif en armes et munitions des armées. Ce fut un succès. Chaque jour les commandes affluaient mais je commençais à me lasser de répéter toujours les mêmes travaux. Ce chantier sur la ligne zeppeline devait être le dernier auquel je participais. Nous avions prévu que je laisserai l’Atelier à Taldez et que je recevrai régulièrement une part des revenus.

Mon explication terminée, la tristesse me reprend. Tous ces projets… Réduits à néant. Kelch reste pensif. Après un moment de silence il me demande :

-Vous étiez amis ?

-Oui. Ce n’était pas un être mauvais. Il ne méritait pas une telle fin. Mais pourquoi me demandes tu cela ?

-Pour rien.
-Les évènements prennent une tournure qui m’inquiète.

Le chef de guerre Thrall faisait les cents pas dans ses appartements. Son conseiller Nazgrel venait de lui annoncer les dernières nouvelles.

-Nous aurions dû arrêter lorsqu’il était encore temps reprit-il, nous sommes impuissants à présent.

-Cela n’est pas aussi grave.

-Nazgrel. Tu ne dois pas te fier à tes premières impressions. Que pouvons nous faire ?

-Mais…

Le vieux chaman l’interrompit du regard. Son aura de puissance semblait affaiblie par l’inquiétude et ses traits tirés indiquaient la fatigue qui le tiraillait. Brusquement il cria aux gardes devant sa porte.

-Allez à l’écurie et dites leur de préparer ma monture ! Elle doit être prête pour une longue route.

Il murmura à l’attention de Nazgrel :

- Seuls nous ne pouvons rien. Le moment est à nouveau venu pour toutes les races de se réunir.
Cheveux aux vents, Thrall traverse le continent brûlé de Durotar, monté sur son féroce loup de guerre. A la découverte de ce paysage il soupire. Cela fait si longtemps qu’il n’est pas allé sur le terrain… Mais en ce jour sa présence était indispensable. Chuchotant la direction à prendre à l’oreille de sa monture il se laisse emporter par ses souvenirs.



-Non… Vieux frère. Vous nous avez tous libéré.

La respiration de Grom Hellscream s’arrête. Le jeune Thrall ne tient plus qu’un cadavre entre ses mains. Les larmes coulent le long de ses joues.

-AAAAARRG !!

Avec un hurlement de rage il se précipite sur le corps de Mannoroth. Stupeur. La poitrine du démon se soulève encore régulièrement. Il est vivant. Son ami est donc mort pour rien ?

Thrall frissonne. Les blessures du démon sont trop importantes, elles finiront par l’emporter. Malgré tout le simple bruit de son souffle terrifie le chef de guerre. L’ennemi de tout son peuple gît devant lui. Cependant il ne peut se résoudre à l’achever.

-Thrall…

La voix puissante du seigneur des abysses ébranle toute la caverne. L’orc recule, brandissant sa hache devant lui.

-N’aie pas peur, approche. Je suis trop faible pour te faire quoi que ce soit. Mais je peux te proposer un marché. Je peux te rendre très puissant tu sais ?

-Je n’ai pas besoin.

La voix du démon n’est plus qu’un murmure.

-Bois mon sang et je survivrai à travers toi. Tu hériteras de mes pouvoirs.

Le jeune orc ne répond pas. Il sait ce qui arrive à ceux qui pactisent avec les démons. Sans un mot, il fait demi-tour, ignorant les appels désespérés de la créature.



« J’aurai dû l’achever à ce moment là, qui sait si il n’est pas responsable de tout ce qui nous arrive. »

Le chef de guerre secoue la tête. C’est impossible. Il préfère oublier ce souvenir. Mais un autre évènement, plus récent s’impose à son esprit :



-Nous nous souviendrons de cette alliance, jeune orc. Sans votre aide la légion ardente nous aurait tous détruit.

-J’ai agi dans mon intérêt.

Thrall serre la main du druide elfe.

-Qu’allez vous faire maintenant ?

-Mes frères veulent retrouver une patrie. Je la leur fournirai.

-C’est une bonne idée. Il faut un foyer pour les prochains enfants à naître.

-Qu’allez vous faire de celui que nous vous avons confié ?

-Il est en sécurité. Faites en autant pour l’autre.

-Bien sûr.

-Le moment est donc venu de nous quitter. J’aimerai pouvoir vous dire adieu, orc. Mais tout indique que nous serons amenés à nous revoir bientôt. Dans quelques années peut-être. N’oubliez pas ce que je vous ai dit. Personne ne doit savoir. Tous doivent penser que les pires moments de leurs vies sont derrière eux. Après tout nous ne sommes sûrs de rien.

-Je ferai de mon mieux.



Thrall soupire. « Vous ne vous étiez pas trompé, druide. Le moment est venu de nous revoir. »
JOUR 4


« L’atelier paraît bien vite à présent. L’image du gobelin me revient sans cesse. Combien de compagnons devrai-je perdre avant de disparaître moi-même ? »



Je range lentement mes affaires, mon regard s’attarde sur les étagères. Tant de souvenirs… Il me coûte de quitter cet endroit mais je ne peux plus supporter le fantôme omniprésent de Taldez. L’âme de mon ancien associé semble imprégner l’endroit, comme une tache impossible à effacer.

-Vous partez ?

Je n’ai pas besoin de me retourner pour reconnaître la voix grave et familière.

-Oui. Je m’en vais quelques jours dans les royaumes de l’Est. Pour faire le point.

Nazgrel s’approche de moi et pose une main sur mon épaule.

-Nous allons perdre un excellent ingénieur. Et un ami fidèle, c’est regrettable.

-Pour ma part nous avons déjà perdu un grand ingénieur et ami fidèle.

Nazgrel soupire.

-Nous perdons chaque jour des compagnons Drellath. Mais faut-il abandonner pour autant ? Si vous nous quittez vous le tuerez une deuxième fois.

Nazgrel a toujours su trouver les mots qui réveillent la culpabilité. Des paroles qui touchent toujours leurs cibles, l’esprit comme le cœur.

-Je sais que je n’ai pas à interférer dans votre décision reprend t-il, mais quand vous reviendrez de votre congé j’aimerai que vous réfléchissiez à ma proposition. Ingénieur exclusif d’Orgrimmar c’est une offre qui ne se refuse pas sans raison.

Le vieil orc quitte l’atelier avant que je ne puisse répondre. Je continue de ranger mes bagages. Quelques gadgets, mon bon vieux fusil, des munitions… Je prends également un grand sac de nourriture pour Asky, ainsi que du papier pour écrire. Cela longtemps que j’ai commencé mon journal. Lorsque j’en relis les premières pages c’est comme si les souvenirs ressurgissaient du néant. Un moment d’hésitation, puis je déchire méthodiquement les pages de ces deux dernières années. Qu’elles disparaissent. Toutes les joies, toutes les larmes, tous les moments que j’ai passé ici. Ce moment de rage passé, je ramasse les feuillés arrachés et les jette dans le foyer de la forge. Deux années qui brûlent… Je dois me reprendre, ne pas me laisser aller à la mélancolie. J’inspecte à nouveau les rayons pour vérifier le moindre oubli. Mon regard est alors attiré par un livre sur la dernière étagère. Un vieux livre que j’avais oublié là deux ans auparavant. Les Oubliés de L’Histoire, Aneth, Le Livre des Malédictions. Il est donc toujours là ce meurtrier. J’hésite à jeter également ce prétendu responsable de la mort de Gazel dans le feu. Pourquoi ne l’ai-je d’ailleurs jamais fait avant ? Je tiens ma revanche. Ce livre… Aussi rapidement que je ne l’ai prononcée j’annule la condamnation. Je préfère le prendre avec moi, on ne sait jamais il pourrait servir. Peut-être.
JOUR 5



« Le paysage de Strangleronce devrait m’aider à reprendre mes esprits. Ce la faisait si longtemps qu’Asky n’avait pas pu courir parmi les herbes sauvages de la jungle. »



Le chasseur éteint la lampe éclairant le campement. Seules demeurent les milles étoiles qui peuplent le ciel de Strangleronce. Des bruits de pas. Une ombre se faufile près de la tente où s’est enfermé l’orc. Sans bruit, une main tente de saisir le sac du chasseur.



Grrrr. Le grognement de Asky me tire du sommeil. Je tombe nez à nez avec une silhouette à quelques mètres de moi. Elle tient entre ses mains mon sac à dos où se trouvent mes vivres et mon or. Vite je me précipite sur mon fusil pour arrêter le voleur. Je fais signe à Asky d’attaquer mais le raptor s’est subitement calmé. Il regarde l’intrus avec envie, comme s’il attendait une récompense. Je n’ai pas le temps de me poser de question, je vise et…

-Arrête Drellath c’est moi !

Interloqué j’abaisse mon arme. La voix ne m’est pas inconnue, loin de là.

-Qu’est-ce que tu fais là Kelch ?

Quelques minutes plus tard, nous nous retrouvons le troll et moi, devant un repas improvisé. Deux coquillages font office de coupes.

Mon ami affiche un visage inquiet. J’ignore ce qui l’a poussé à me retrouver jusqu’ici mais ça doit être grave.

-Pourquoi viens tu ici Kelch ?

Le voleur avale une rasade d’eau fraîche. Il semble éreinté.

-Je voulais te demander quelque chose. Je suis venu te voir à ton atelier ce matin mais tu étais déjà parti.

-Tu as traversé tout l’océan juste pour me demander quelque chose ?!

-C’est très important.

J’ai rarement vu mon ami aussi sérieux. Quelle question veut-il donc me poser ? Je ne vois pas quelle solution je pourrais lui apporter.

-Je t’écoute.

Le troll rapproche son visage du mien.

-C’est au sujet de Gazel…

Je ravale ma salive.

-… tu te souviens ? Le livre que nous avions trouvé auprès de lui, l’as-tu encore ?

J’écarquille les yeux. C’est pour ce vieux bouquin que Kelch fait ous ces mystères ?

-Oui bien sûr. Il se trouve dans mon sac…

Je me souviens alors dans quelle posture j’ai surpris le troll. Pris de fureur je me relève brusquement.

- Tu voulais me le voler ! J’ignore ce qu’il a de si important mais si tu as osé trahir notre amitié il doit valoir le coup !

- Mais…

Mon ami tente de se justifier. Il paraît ébahi par cet accès de colère soudain.

Je fouille dans mon sac et saisis le livre que je lui lance à la figure.

-Tiens, prends le et vas t-en !

-Drellath…

Sans prêter attention aux bégaiements du voleur, je le pousse au dehors de la tente. Qu’il se débrouille pour trouver où dormir.



Amitié :

Plus un sentiment est noble, plus il en devient fragile. L’amitié est de ceux là. Toutes les tentations sont bonnes, orgueil, cupidité, jalousie, pour que l’amitié devienne haine. Lorsqu’un lien particulièrement fort unit deux individus, il ne se brise jamais. Mais il peut se transformer, devenant une chaîne lourde à porter pour ses détenteurs.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.
JOUR 6


« Je m’en veux de m’être mis en colère contre Kelch hier. Le troll devait avoir des bonnes raisons pour agir comme il l’a fait. »



Je sors de la tente, cherchant Kelch des yeux. Le troll est assis quelques mètres plus loin. Sans remarquer ma présence il feuillette Le Livre des Malédictions. Je m’approche.

-Kelch je…

Le voleur lève la tête vers moi et sourit. Il semble avoir tout oublié des évènements de la veille.

-Drellath ! Regarde ça c’est incroyable.

Il me tend le livre en désignant un passage en italique. Je saisis l’objet. Maintenant que j’y pense je ne l’avais jamais ouvert auparavant.



Obscurité :

Lorsque le Fléau se répandit sur les terres de Lordaeron, les dirigeants ne se rendirent compte de la menace que lorsqu’elle prit une ampleur effroyable. Cette ignorance, ce refus de la vérité, au point de ne pas voir les dangers qui les menacent fut la véritable cause du désastre. Combien de vis auraient pu être sauvées si nous avions réagis à temps ? Des nations entières tombèrent autrefois sous les flammes du silence et de l’arrogance ; aujourd’hui c’est à nous de prendre notre destin en main pour affronter nos peurs les plus anciennes.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.


Je rends le livre au troll.

-Ce n’est qu’un livre d’Histoire et d’idées philosophiques. Je ne vois rien d’incroyable là dedans.

Kelch me lance un regard étonné.

-Comment ? Tu ne comprends donc pas ce que veut dire l’auteur ?

Il me montre à nouveau le passage.

-Ce n’est pas du passé dont il parle, mais de l’avenir !

-De l’avenir ?

-C’est un avertissement. Drellath, est-ce que tu te rends compte du pouvoir de ce livre ?

Les paroles du voleur m’inquiètent. Je ne vois rien de particulier dans ces pages mais mon ami semble convaincu d’y déceler quelque chose important. On dirait presque qu’il est envoûté par l’ouvrage.

Soudain le troll se retourne vers moi.

-Au fait ce n’est pas demain la réunion annuelle des vengeurs de Hellscream ?

Les vengeurs… Cela fait combien de temps que je n’ai pas revu l’un de ses membres ? Un an peut-être. J’étais toujours trop pris par mon travail à Orgrimmar pour m’en préoccuper. Cependant, maintenant que Taldez est mort cela me ferait plaisir de revoir mes anciens compagnons.

-Oui tu as raison.

-Je crois que ça se déroulera au cratère d’un goro reprend le voleur, je ne sais pas pourquoi ils ont choisi un coin aussi perdu mais bon… c’est Alethor qui décide.

-Un goro ? Cela prendra bien toute la nuit pour y parvenir.

-Si on part maintenant.

J’acquiesce. Aussitôt je siffle Asky et après avoir pris quelques affaires emboîte le pas de Kelch vers le camp Grom gol. Mon séjour dans les royaumes de l’Est sera plus court que prévu.
Destinataire : inconnu



J’ai repris contact avec le sujet comme convenu. Je l’emmène avec moi à l’assemblée des vengeurs de Hellscream.



PS : Notre accord ne stipule pas que je fasse du mal à mon ami. Si un tel ordre était donné je ne le respecterai pas et romprai tout contact. Sans moi vous n’avez aucune chance.



Kelch.
Loin au sud de Kalimdor, après les forêts verdoyantes de Feralas, au-delà des contrées arides de Tanaris, s’ouvre un gouffre mystérieux, appelé le cratère d’un goro. Ce lieu est peu connu des habitants de la Horde et rares sont les aventuriers qui osent y pénétrer et affronter les horreurs anciennes qui y restent tapies Des témoignages récents révèlent cependant qu’un micro climat chaud et humide a permis l’établissement d’une faune et d’une flore spécifique. Parmi les histoires les plus hasardeuses, certains contes évoquent des monstres géants sortis tout droit du passé, et régnants en maître sur ces terres oubliées.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.



Un camp de fortune. Un tauren se dresse, seul au milieu de la jungle étouffante. Il court. Sa respiration est de plus en plus saccadée. Parfois il jette un coup d’œil derrière lui et prend le temps d’élever un totem pour ralentir d’éventuels assaillants. Il court, traversant les marécages, dépassant les monticules de terre qui s’élèvent à l’horizon. Bientôt il entrevoit la lumière d’un feu. Il se précipite vers lui et atterrit soudain au milieu d’un groupe d’aventuriers. Une trolle s’avance vers lui et demande :

-Tout va bien Alethor ?

-Oui, parfaitement. Rien de tel qu’une course matinale pour se remettre d’aplomb.

La trolle a une moue dédaigneuse.

-C’est stupide. Tu sais ce que tu risques à t’éloigner ainsi du camp ? L’endroit n’est pas sans danger, je me demande d’ailleurs pourquoi tu as tenu à venir ici. Seuls les fous prendraient une telle décision.

-Je suis peut-être fou mais dans ce cas personne ne nous suivra ici.

D’un geste de la main il fait signe aux vengeurs attroupés autour d’eux de se disperser.

-Je t’ai déjà dit de ne pas m’interroger sur ce point Anakina reprend t-il. J’ai mes raisons de m’inquiéter et je ne tiens pas à ce que nos membres soient pris de panique.

-Dans ce cas commençons tout de suite l’assemblée et nous pourrons partir d’ici au plus vite.

-Impossible.

-Pourquoi ?

-Nous ne sommes pas encore au complet.
JOUR 7


-C’est donc ça le cratère d’un goro ?

Kelch et moi surplombons le large gouffre qui s’ouvre à l’extrême sud du désert de Tanaris. Au fond le couloir de sable prend une teinte verte due à la végétation luxuriante qui y prospère.

-C’est pas mal.

Mon ami acquiesce de la tête.

-Allons-y.

Je me précipite vers l’entrée du cratère, pressé de découvrir cette région inconnue. Kelch me rattrape par un pan de ma veste.

-Attends un peu. C’est peut-être bien joli ici mais c’est l’un des endroits les plus dangereux de Kalimdor, il vaudrait peut-être mieux y aller plus discrètement tu ne crois pas ?

-Comment ? Je ne peux pas me rendre invisible comme toi.

Le troll me lance un regard agacé.

-On peut être discret sans être invisible Drellath. Parfois j’ai l’impression que tu n’entends pas ce que je dis. Allez suis moi. Et essaye de ne pas faire e bruit, nous ne sommes pas de taille à affronter les créatures qui rodent ici.

Le voleur s’arrête un instant, reprend sa respiration puis s’exclame :

-«Pas de taille », c’est exactement le mot !

Il éclate de rire puis se retourne en direction d’Un goro.



L’orc et le troll s’engouffrent silencieusement dans la jungle sauvage des lieux. Parfois des tremblements puissants les avertissent du passage de géants reptiliens, juste à temps pour qu’ils puissent se dissimuler dans l’ombre des arbres millénaires. Heureusement leur petite taille les rend insignifiants aux yeux de ces anciens prédateurs.



J’aperçois la lumière d’un feu de camp. Enfin, cette région dégage une atmosphère tellement étrange, étouffante que je ne suis pas mécontent d’arriver à destination. Derrière moi Kelch époussette ses vêtements, il est couvert de boue après avoir tenté d’échapper à un ptérodactyle qui le trouvait appétissant.

- Vous avez mis le temps, on n’attendait plus que vous.

Je me retourne pour regarder le propriétaire de la voix. Le tauren nous sourit. Alethor.
Le chef des vengeurs conduit les deux amis au fond du camp où s’ouvre la gueule béante d’une caverne. Quel lieu féerique que celui-ci, éclairé seulement par l’éclat des cristaux présents en multitude sur le sol et les murs, comme autant de fleurs chatoyantes. Ils descendent le long du tunnel, toujours plus bas dans les profondeurs. Arrivant dans une large salle, ils découvrent le reste des membres de la guilde. Plus d’une centaine de combattants de la Horde, toutes races confondues sont réunis ici. Kelch et Drellath vont s’asseoir dans la foule, devant un promontoire de pierre vers lequel Alethor se dirige. Juché ainsi sur cette estrade de fortune, il balaye du regard ses compagnons rassemblés autour de lui. Son œuvre. Puis il ouvre la bouche pour commencer son discours :

-Mes amis, dit-il, comme tous les ans le moment de se réunir est venu. Mais si comme à chacune de nos assemblées je vous ai rassemblés, ce n’est plus seulement pour faire un bilan de nos activités. Beaucoup de vous l’auront remarqué, des choses graves se déroulent en ce moment même. La Horde et l’Alliance sont à l’aube de nouvelles guerres telles que notre monde n’en a jamais connues. Je ne parle pas de l’armée croissante du fléau qui se masse à l’Est, ni de l’invasion silithide ou des ré émergences des nagas. Non, je fais allusions à des dangers bien plus anciens, la corruption que connaît Azeroth aujourd’hui n’est que l’un des multiples facteurs qui devrait nous alerter.

Murmures dans la salle. Incompréhension.

-Ce dont je vous parle aujourd’hui sera la nouvelle raison pour laquelle vous devrez vous battre, la rage au cœur. Vous avez tous une famille, des amis. En ce jour je vous demande de les protéger !

Le tauren lève les bras et la foule se soulève en une acclamation monumentale. Le charisme se dégageant du chaman est tellement puissant que s’en est effrayant.

Il baisse les bras. Silence. Tous sentent le regard du maître des Vengeurs se poser sur eux, les juger, mesurer leurs capacités.

-Mes amis reprend t-il. J’irai droit au but. Nous sommes en crise. La Horde ne parviendra pas à maintenir l’ordre bien longtemps, partout des révoltes et émeutes éclatent. Cela ne peut durer !

Murmures étonnés. Nul n’a entendu parler de mouvements de foules récemment, de quoi le tauren parle t-il ?

-Il n’y a pas que la Horde, il y a aussi l’Alliance. Les citoyens sont en émoi, prêts à partir en guerre au moindre prétexte. Certes je crois qu’aucun d’entre vous n’a réellement conscience de la situation… Elle a été maintenue au secret trop longtemps…

Nouveaux murmures. Les visages sont crispés, inquiets. Quelle terrible révélation le chaman va-t-il leur livrer ?

-Ne me regardez pas ainsi. Je suis comme vous. Inquiet. Je suis inquiet parce que je sais. Je sais qu’on nous a menti, qu’on nous a trompé et pas seulement nous mais toutes les générations qui nous ont précédés !

Le tauren reprend son souffle.

-Ce que je vais vous dire aujourd’hui ne sera pas sans conséquences. Vous devrez le garder pour vous, n’en parlez à personne. Ne faites confiance à personne. Les amis du passé seront les ennemis de demain. Toutes vos croyances, tout ce pourquoi vous vous êtes battu sera bouleversé en ce jour. Par ces paroles que je vais vous confier, vos vies seront changées. A jamais.

Les derniers mots tombent comme une condamnation. Les vengeurs savent que ce qu’ils s’apprêtent à entendre les liera pour l’éternité. Alethor lève à nouveau les bras pour les inviter à se lever. Au ralenti, comme dans une cérémonie rituelle, les membres se délient, les torses se soulèvent, les têtes se dressent. Tous attendent.
JOUR 8



Alethor fait un signe de tête dans notre direction.

-Vous deux vous sortez.

-Comment ?

Le tauren nous indique l’entrée de la caverne.

-Je vous parlerai seul à seul après. Rassurez vous, je ne cherche pas à vous cacher quoi que ce soit, mais certaines choses ne doivent pas être entendues telles quelles.

La promesse du chaman de ne rien nous dissimuler suffit à me faire obéir. Néanmoins je regrette d’être ainsi mis à l’écart, ne suis-je pas un véritable Vengeur ? Je jette un coup d’œil vers Kelch qui à ma grande surprise ne proteste pas. Silence. Les autres vengeurs nous regardent nous lever puis passer devant eux sans mot dire. Je leur en veux de ne pas réagir. Je suis leur compagnon, leur frère, pourquoi ne me font-ils pas confiance ? Mine de rien un profond fossé vient de se creuser entre moi et le reste de la Guilde. Kelch et moi sortons et quittons les ténèbres de la caverne pour regagner le monde réel. L’éclat soudain du Soleil semble dissiper les paroles inquiétantes d’Alethor, effacer ces tourments inconnus.

-Que penses tu de tout ça Kelch ?

Je me retourne mais le troll a disparu. J’appelle de nouveau et sa voix me parvient quelques mètres plus loin.

-C’est dur Drellath.

Le voleur, assis sur une caisse de ravitaillement, serre le livre des Malédictions entre ses mains. La tête baissée, les traits de son visage sont dissimulés par son épaisse chevelure rousse.

-Quoi ? De quoi parles tu ?

La voix du troll retentit en murmures saccadés, brisés.

-Ils ne savent pas à quoi ils s’exposent…

Mon ami relève la tête vers moi, j’écarquille les yeux de surprise. Il pleure.

-Alethor va trop loin tu comprends Drellath ? Je ne sais pas comment il a fait, mais il sait des choses qu’il ne devrait pas savoir.

Il frappe du poing contre son genou.

-J’aurai dû m’en douter lorsqu’il m’a engagé dans la guilde. J’aurai dû agir aussitôt.

-Tu me fais peur Kelch…

Le troll ne tient pas compte de mon interruption.

-N’ais-je pas fait ce qu’il fallait ? N’ais je pas protégé ces secrets assez longtemps ? Je croyais…

Il s’interrompt en un sanglot. Puis soudain sa voix reprend de l’assurance, il sourit maladroitement.

-Je ne dois pas douter. Quel imbécile je fais ! Nous sommes à l’aube d’un monde nouveau. Mes doutes ne font que m’affaiblir, je dois m’absoudre de toutes pensées ! Ce qui a été prédit doit se réaliser.

Je ne comprends rien aux paroles de mon ami. Abandonnant sa position prostrée, il me montre un petit boîtier que je n’avais pas remarqué auparavant.

-As-tu déjà entendu parler des pylônes d’Un goro Drellath ?

Sans attendre ma réponse il continue :

-Pendant longtemps nul n’a su à quoi pouvait bien servir ces pylônes. Puis un jour quelqu'un a eu l’idée d’y introduire ces cristaux que l’on trouve un peu partout dans le cratère. Quelle merveilleuse découverte ! Grâce au pouvoir des cristaux les pylônes ont bénéficié d’un formidable apport d’énergie. Ils pouvaient alors servir à se soigner, accroître ses capacités ou…

Le voleur sourit.

-…Déclancher de gigantesques explosions.

Il tourne la tête vers la caverne.

-Sais tu combien de cristaux contient cette grotte Drellath ?

Délicatement il ouvre le petit boîtier qu’il tient entre les mains. Un unique bouton y est encastré.

-La technologie est merveilleuse Drellath. Au cours de nombreuses recherches on a enfin pu comprendre comment fonctionnaient les pylônes, quel phénomène permettait l’utilisation des cristaux.

Il désigne l’appareil.

-Avec ceci je peux provoquer une réaction en chaîne. Il suffit qu’un seul cristal soit activé pour que tous les autres suivent. Tu comprends ce que je veux dire ?

Silence. Il me faut quelques minutes pour enregistrer les paroles du troll. Mes yeux s’écarquillent d’horreur.

-Mais Kelch… Pourquoi dis tu ça ? Je ne comprends pas.

Mon ami soupire.

-J’accomplis mon destin Drellath. Après les évènements qui vont se dérouler ici tu vas me haïr, sois en sûr. Mais j’espère que tu comprendras mes motivations… Plus tard.

Il reprend sa respiration et ajoute :

-Les cristaux d’un goro sont l’une des matières les plus dures au monde. En cas d’explosion, les éclats se transforment en pointes effilées comme du rasoir. A moins d’être invulnérable il est impossible de s’en sortir.

Puis sans me laisser le temps de réagir il appuie sur le bouton.
JOUR 9


Destruction. Apocalypse. Ce sont les seuls mots qui me viennent à l’esprit devant ce déplorable spectacle. L’explosion a fait s’écrouler l’entrée de la caverne où se sont réunis les Vengeurs. J’ai beau crier, appeler, aucune voix ne me parvient. Soit le mur de roche m’empêche de les entendre, soit… Je n’ose envisager cette hypothèse. Perdre encore des compagnons serait trop dur pour moi. D’autant plus que j’y ai également perdu mon ami le plus cher. Je jette un coup d’œil vers l’endroit où se tenait Kelch quelques instants auparavant. Profitant de mon désarroi le voleur a utilisé ses talents pour échapper à ma vue et s’enfuir parmi les ombres. J’ignore ce qui a pu motiver le troll a agir ainsi mais nul doute que cela me perturbe. Qu’a pu donc vivre mon ancien ami durant ces deux années pour changer autant ? A moins qu’il ne me mente depuis le jour même de notre rencontre. Je secoue la tête. C’est trop dur. D’autant que les dernières paroles du troll avant de disparaître me reviennent sans arrêt en tête : « Cet appareil est une petite merveille Taldez m’aura bien rendu service en me le fournissant avant de mourir. » Cela signifie t-il que Kelch a quelque chose à voir avec la mort de Taldez ? Je ne peux pas le croire. Pourtant… Ses actions d’aujourd’hui lèvent bien des interrogations.

Je relève la tête et laisse un sourire carnassier et malheureux se former sur mon visage. J’ai compris ce que j’avais à faire. Je ne rentrerai pas à Orgrimmar tout de suite. Même si cela doit prendre des années je retrouverai ta trace Kelch. Et je te ferai payer.





Trahison :

Notre histoire est parsemée de guerres, d’alliance et de la plus terrible des action : la trahison. Celles d’Artas, d’Illidan sont tout à fait représentatives, l’un ayant été corrompu par le Fléau et le second par sa soif de puissance. Pourtant il existe des individus bien plus dangereux. Ceux qui sont prêt à détruire tout ce qui leur est cher par pur altruisme. Le danger est alors bien plus grand, puisqu’ils sont persuadés d’agir pour le bien de tous. De nombreuses amitiés peuvent ainsi être détruites, des familles brisées, par la trahison d’un des leurs. Cependant il se trouve toujours quelque âme torturée pour traquer ses anciens compagnons jusque dans la tombe.
Les Oubliés de L’Histoire, Aneth,
Le Livre des Malédictions.
La caverne n’est plus qu’un gigantesque charnier. Les cadavres sont entassés les uns sur les autres, certains écrasés sous les éboulis, d’autres empalés sur les pointes acérés des cristaux.

Alethor se relève péniblement. La vue du tauren est trouble, confuse. Les larmes se mêlent à la sueur et donnent une aura d’autant plus dramatique à la scène par les yeux du chaman. Ce n’est pas possible ne cesse de se répéter le chef des vengeurs. Qui aurait pu faire ça ? Un nom lui vient immédiatement à l’esprit mais il préfère l’oublier pour le moment. D’abord vérifier si il est le seul survivant. A première vue ça ne fait aucun doute. Le tauren palpe son corps pour vérifier si il n’est pas blessé. Il a eu une chance inouïe. Si l’on peut appeler ça de la chance… Son bouclier de foudre a su détruire les éclats qui tombaient sur lui.

-Ohéééé ! Il y a quelqu'un ?

Une voix ! Etouffée mais distincte, elle semble provenir de l’extérieur de la caverne, derrière les éboulis qui en obstruent l’entrée. Alethor la reconnaît immédiatement. Drellath… L’orc continue d’appeler mais le chaman ne répond pas. Qui sait si le chasseur n’est pas responsable de la catastrophe ? Il vaut mieux ne pas révéler qu’il est sain et sauf pour l’instant. Des vagues de culpabilité submergent le tauren. Il savait que quelque chose comme ça risquait d’arriver. Mais il avait pris sur lui de jouer la vie de ses compagnons. Il avait échoué. Les paroles qu’il leur avait dit aujourd’hui les avait condamnés. Quelle stupeur les avait saisis lorsqu’il avait révélé de quoi il était question… Mais ce secret ils l’avaient emporté dans la tombe… Si le but était de supprimer ceux qui étaient au courant quelle ironie qu’il soi le seul à avoir survécu ! Envahi par le remord et un amer sentiment d’échec, Alethor s’enfonça dans les profondeurs de la caverne. Peut-être trouverait-il une autre sortie. Ou peut-être pas.
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