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Publié par Frau Eternal
Soit dit en passant certains n'ont pas attendus des pseudos intellos ou des vedettes pour employer ces pluriels. Remarque, je fais peut être partie de la premiere categorie 
Il y a les intellectuels qui utilisent les termes qu'ils veulent, et ceux qui savent ouvrir un dico pour utiliser les termes définis par l'Académie Française. Perso je me sens pas de faire des recherches sur l'étymologie d'un mot quand je veux le mettre au pluriel (si ça se trouve le mot que je veux accorder provient de l'allemand et donc il me faudra lui appliquer sa déclinaison au pluriel ! Sauf que je ne connais pas l'allemand donc heureusement que des gens intelligents ont dit qu'il suffisait de mettre un s à la fin sinon on s'en sortait pas).
Publié par Grevisse
Le bon usage de Grevisse et Goosse (13e éd., 1993) indique, § 521 (« marques du pluriel/pluriel des noms empruntés aux langues étrangères ») :
« Les noms empruntés à d'autres langues forment régulièrement leur pluriel avec un S non prononcé, à l'exception des mots se terminant par un S, un X ou un Z (dans le rapport du Conseil supérieur de la langue française publié en décembre 1990 : cf. § 89, e).
Cette formule reconnaît un fait : depuis que le français existe, il a assimilé un grand nombre de mots de toute provenance, et il eût été invraisemblable que les locuteurs pussent intégrer au français la morphologie de ces diverses langues. Personne ne songe à écrire autrement que des géraniums, des dahlias, des villas, des casinos, des apartés, des clowns, etc. Il convient pourtant de rappeler que les pluriels empruntés sont un luxe inutile et souvent une marque de pédanterie, surtout si la réalité désignée a perdu le rapport avec son origine.
Ce n'est que dans la mesure où les mots étrangers ne sont pas du tout intégrés au vocabulaire français, où ils constituent des sortes de citations (voir par ex. § 522, a), que l'on peut accepter leur invariabilité ou, à la rigueur, leur pluriel exotique. Dans la suite de cet exposé, si nous rappelons ces pluriels exotiques, ce n'est donc pas pour les recommander, mais pour que la description soit complète. »
Et quelques exemples :
Adaptations grammaticales
D'autre part, en passant d'une langue à l'autre, un mot étranger n'est plus morphologiquement analysable. Par exemple, le singulier taliban est en fait un pluriel en arabe, celui de طَالِب ṭālib. Ce qui peut prouver que la lexicalisation fonctionne est que le mot adopté respecte les règles grammaticales de la langue empruntant : ainsi, taliban, qui est censé être un pluriel en arabe, s'écrit talibans au pluriel français. De même, touareg est le pluriel de targui. Pourtant, dire un targui / des touareg passe, au mieux, pour une bonne connaissance de la langue arabe, au détriment de la grammaire française, au pire pour du pédantisme ; un touareg / des touaregs est bien plus courant, d'autant plus quand on sait que d'autres mots, plus anciens, ont subi un traitement analogue : chérubin est un pluriel en hébreu (en fait, le pluriel de ce mot se termine par -im) mais il n'existe pas de singulier *chérub en français (au contraire de l'allemand ou de l'anglais). Or, si certains clament qu'il faut dire un targui / des touareg, aucun ne veut imposer un chérub / des chérubin. L'adaptation grammaticale fait qu'un mot emprunté devient souvent immotivé, inanalysable. De fait, il sera parfois adapté dans la langue receveuse à partir d'une forme fléchie ou grammaticalement marquée pour donner naissance à un nouveau terme non marqué.
D'une manière similaire, le castillan d'Amérique du Sud, en situation adstratique avec l'anglais, n'hésite pas à adapter ses emprunts : ainsi, de a car (« une voiture »), il fait un carro, qui permet le pluriel carros (alors que un car / cars ne respecterait pas la pluralisation habituelle). De même, to rent (« louer ») devient naturellement rentar. De sorte, les termes empruntés peuvent être facilement fléchis. On remarque d'ailleurs la prédominance de certains types plus réguliers de flexions dans l'adaptation de termes étrangers. Par exemple, la quasi totalité des verbes importés en français le sont en suivant le premier groupe (verbes en -er à l'infinitif), le plus facile à conjuguer : kidnapper ou rapper en sont des exemples (et c'est d'ailleurs le même principe pour le rentar castillan).
Comme on l'a vu précédemment avec l'adaptation phonologique, les emprunts qui ne sont pas encore parfaitement lexicalisés vont entraîner des dédoublements : tel mot étranger va pouvoir être fléchis dans le respect de sa langue de départ (s'il l'était) ou bien dans celle d'arrivée. L'on constate par exemple des listes de pluriels irréguliers dans de nombreuses langues d'Europe (il suffit de lire celle, impressionnante, proposée par l'article de la Wikipédia anglophone consacrée au pluriel anglais). Encore une fois, si respecter la pluralisation de départ est la marque d'une certaine culture linguistique, c'est aussi une atteinte à la cohérence de sa langue. Les débats sont très houleux, pour le français, entre les tenants des pluriels étrangers ou francisés. La petite liste suivante montrera que la volonté de garder la pluralisation étrangère est souvent une mauvaise idée :
* pluralisation italienne : scénario / scénarii, spaghetto / spaghetti ou graffito / graffiti, etc., au lieu de la pluralisation française : scénario / scénarios, spaghetti / spaghettis ou graffiti / graffitis, etc. ;
Notons qu'en italien, du reste, le pluriel de scenario n'est pas scenarii mais scenari ou scenarî.
* pluralisation latine : maximum / maxima, papyrus / papyri, forum / fora, etc., au lieu de maximum / maximums, papyrus / papyrus, forum / forums, etc. ;
* pluralisation grecque : topos / topoï, kouros / kouroï, korê / koraï, etc., au lieu de topos / topos, kouros / kouros, korê / korês, etc.
La liste pourrait être allongée à l'envi car ces pluriels « irréguliers » ne sont pas les seuls, loin de là. Il est pourtant aisé de plaider en faveur d'une francisation complète. En effet, si l'on voulait être cohérent, il faudrait aussi considérer les pluralisations suivantes :
* de l'italien : une pizza / des pizzé, une chipolata / des chipolaté, une diva / des divé, un raviolo / des ravioli ;
* du latin : un opus / des opéra, un géranium / des gérania, un abdomen / des abdomina, un visum / des visa, un agendum / des agenda, voire un lavabo / des lavabimus et un distinguo / des distinguimus (ces deux derniers mots étant des verbes à la première personne du singulier, un pluriel régulier ferait attendre des premières personnes du pluriel) ;
* du grec : un problème / des problémata, un côlon / des côla, un titan / des titanes, un narthex / des narthekes.
On le voit : garder la pluralisation étrangère ne se fait que dans les cas où les règles le permettant sont simples. Dès qu'elle demande une meilleure connaissance grammaticale de la langue concernée, elle est abandonnée. De plus, les termes absorbés par le français depuis longtemps sont tellement lexicalisés qu'ils n'apparaissent plus comme étrangers. Si l'on voulait être cohérent, il faudrait aussi les fléchir comme ils l'étaient dans la langue de départ. Pire, que dire des termes empruntés à des langues exotiques comme le nahuatl ? Faut-il exiger que le pluriel de coyote soit cocoyoh ? De même pour les langues isolantes : un thé / des thé serait plus cohérent.
Bref, la lexicalisation grammaticale permet d'éviter ces écueils et ces incohérences.
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