NOIR - Chapitre 7

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Bon, ben voilà la suite, kwa

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Chapitre I
Chapitre II
Chapitre III
Chapitre IV
Chapitre V
Chapitre VI

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Chapitre VII
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Dous retira son arme. Ce n’était qu’une petite blessure, une fine coupure dans le tissu, un peu de sang qui perlait sur la poitrine. Mais le c½ur était atteint. Mahlin regarda, comme dans un rêve, le maître tomber sur le sol. Pour un être qui s’était toujours déplacé avec autant de grâce, il s’effondrait bruyamment. La cape noire avait des allures de linceul.
" C’est une mort un peu décevante pour l’un de nous, tu ne trouves pas mon ami ? " fit Dous en s’agenouillant près du corps. Le front plissé, il posa sa main sur la gorge de Barel. " Mort " murmura-t-il enfin. Il hocha la tête d’un air satisfait. " Si j’avais imaginé te trouver ici… qui contrôle le Destin ? Quelqu’un qui ne devait pas t’aimer. "
Il soupira et se releva. Avisant qu’il tenait toujours la dague dans sa main, il la jeta de côté avant de se retourner vers les apprentis.
" Maintenant, il s’agit de s’occuper de vous. " Il eut l’air pensif. " Que vais-je bien pouvoir faire de tels disciples ? Si seulement je pouvais savoir ce qu’il vous a révélé… je n’aurai peut-être pas à prendre des mesures drastiques. "
Mahlin n’était certainement pas en état de subir un interrogatoire ; il fixait le corps de Barel, le regard vide. Il ne pouvait pas être mort. Pas après la démonstration de puissance qu’il avait faite. Ce ne devait être qu’une comédie destinée à tromper ce maudit Chasseur. Comment avait-il survécu, là où les autres avaient péri ? Respirez, maître, respirez. La poitrine ne bougeait pas. Et Shani qui refusait d’ouvrir les yeux, de lui sourire. Ou était Aarel ?
Aarel était derrière lui, il venait de se relever et regardait la scène avec un air de totale incompréhension. Il se frottait la tête en murmurant quelque chose d’inaudible. Dous fronça les sourcils.
" Vous ne m’avez pas l’air bien vaillants, tous autant que vous êtes. Savez-vous au moins qui était cet homme ? " Il attendit une réponse, la tête inclinée, les yeux mi-clos. Lorsqu’elle ne vint pas, il rit. " Je le reconnais bien là. Toujours prudent, trop prudent. " Il poussa le corps du pied. " Peut-être pas assez, après tout. "
Il s’arrêta de parler, fronça de nouveau les sourcils, puis se mit à faire les cent pas dans la pièce, mains derrière le dos. Mahlin le regardait faire d’un air éteint. Aarel lui tira la manche, ne prêtant pas plus d’attention au Chasseur.
" Maître Khorr… il est… il est mort ? "
Non, pas lui. Il n’allait pas mourir aussi facilement. Mahlin garda le silence. Mais…
" Oui… " fit-il finalement, du bout des lèvres. Aarel le regarda, puis acquiesca silencieusement.
" Peut-être nous devez-vous quelques explication, ahh… Dous. Je pense que c’est la moindre des choses après ce qui vient de se passer. " Il parlait d’une voix monocorde, et n’accorda plus un regard au corps de Barel, sur le sol. " Maître Khorr disait qu’un endroit en valait un autre dès lors qu’il s’agit de mourir. Quitte à ce que vous nous tuiez, j’aimerais d’abord comprendre. "
Dous se pencha en avant, un air d’extrême fascination sur le visage.
" J’ai toujours été subjugué par la manière dont les gens réagissent lorsqu’ils savent qu’ils vont mourir. Certains crient, certains supplient ; d’autres se battent contre tout espoir ; certains sont apathiques, comme ton ami. J’en connais qui deviennent soudain arrogants. Ce sont les plus amusants. " Il regarda Aarel avec attention. " Oui, vraiment. "
" Vous n’avez pas répondu à ma question " observa celui-ci. Il avait les mâchoires serrées.
" Et je n’y répondrai pas. Il y a des limites à tout, même à la tolérance que je vous montre. Je pense d’ailleurs qu’il est temps de mettre fin à tout cela. Je ne peux prendre le risque de vous laisser en vie. Je suis désolé, Aarel, mais tu mourras dans l’ignorance. Je n’ai pas le temps de tout t’expliquer ; d’autant plus que ce serait l’affaire d’une journée au bas mort.. " Il leva les mains, ferma les yeux. " Priez le dieu que vous voulez, et détendez-vous. Je vais tâcher de rendre votre mort la plus agréable possible. Vous aimez les fleurs ? Tout le monde aime les fleurs. "
Mahlin s’arracha à la contemplation du corps de Barel, sur les dalles de pierre. Froides les dalles, et froid le corps. Il ne voulait pas finir ainsi. Il y avait certainement quelque chose à faire ! Instinctivement, il ferma les yeux et rechercha l’Arc-En-Ciel. Les ténèbres l’envahirent, mais il n’y prit pas garde. Grand bien leur fasse. Elles lui permettaient d’atteindre les Couleurs. Là. Elles étaient là, chaudes et rassurantes, rayonnantes. Vivantes. Il plongea dedans avec soulagement. Quelle couleur ? Le Vert. Il ferait honneur au Maître.
Il rouvrit les yeux. Le Pouvoir rugissait en lui, hurlait en lui, demandait la mort du mage Violet. Mahlin sourit cruellement. Puis l’odeur de rose lui envahit les narines.
C’était un parfum douceâtre, avec des relents d’ancienne amertume. Un parfum indéfinissable, surprenant, mais pas si désagréable au fond. Des roses, oui, mais des roses fanées. Le jardin de sa mère, lorsqu’il était enfant. Elle était là, avec son sourire rassurant, sa longue robe, ses cheveux nattés, et son parfum, son parfum. Lentement, le Pouvoir reflua en lui. Que pouvait-il y avoir de menaçant ici ? Pourquoi était-il aussi méfiant ? Les yeux embués, il courut vers sa mère, et vers les roses. Vers sa maison. Il se sentait faible, mais cela n’avait aucune importance. Une nuit de repos, et il n’y paraîtrait plus. Dormir. Il se coucha sur le sol avec un léger soupir. La pierre était confortable, après tout. Dormir. Il était en sécurité. Il avait sommeil. Il bailla, puis ferma les yeux. Quelle odeur étrange..
" Pas maintenant ! Pas tout de suite ! "
C’était un hurlement de frustration. Mahlin fronça les sourcils, perplexe. Que se passait-il ? Tout disparut, les roses, la maison, sa mère. Il cligna des yeux, complètement désorienté. Où était-il ?
Il était allongé sur le sol, près d’Aarel et de Shani, et Dous les regardait avec colère. C’était lui qui avait crié. Que se passait-il ? Il plissa les paupières. Le soleil passait au travers de Dous. Quelque chose lui disait que ce n’était pas normal.
" Qui contrôle le Destin ? " gronda Dous. " Une minute, une simple minute de plus… "
Lentement, Dous s’estompait. On commençait à apercevoir le mur derrière lui, et la table, et les chaises. Seul son visage furieux finit par rester, flottant dans l’air sans corps pour le soutenir. Et ce visage sourit abruptement.
" Votre mort n’est pas si importante en regard de ce que j’ai accompli aujourd’hui. Nous nous reverrons. Ici, ou ailleurs. " Il rit.
Et la tête disparut à son tour, mais le rire continua, et continua, et monta dans les aigüs, jusqu’à ce que cela devienne un rire de femme, un rire pur et cristallin, un rire qui rappelait irrésistiblement Shani à ses meilleures heures.
Maintenant que l’odeur des roses ne planait plus dans l’air, la pièce était vraiment froide et lugubre. Mahlin se passa la main sur les yeux, essayant de réaliser un tant soit peu ce qui se passait. Il se retourna, et Aarel lui rendit son regard. Pour la première fois depuis ce qui semblait une éternité, la salle était calme. Une tapisserie à moitié brûlée se détacha du mur et tomba sur le sol avec un bruit mat.
" Tu.. tu vas bien ? " demanda Mahlin.
" Aussi bien que possible " murmura Aarel. " Aussi bien que possible. "
Son regard errait dans la pièce, s’arrêtant sur les corps épars, hochant lentement la tête.
" Shani ? Maître Khorr ? "
Mahlin soupira. Il se sentait fatigué. Il était si bien sur le sol. Les roses, où étaient les roses.
" Barel est mort. Dieu du Foyer, il a été assassiné ! Tu as vu aussi bien que moi ! Pourquoi me demandes-tu comment il va ? Comment veux-tu qu’il aille bien avec un pouce d’acier dans le c½ur ? "
" Calme-toi " fit Aarel. Il dodelinait de la tête, les yeux embrumés.
" Non, je ne me calmerai pas, comment veux-tu que je me calme ? Tu réalises ce qui vient de se passer ? Les Chasseurs sont morts, le maître est mort, et nous.. nous sommes morts aussi, pour ce que cela change. Ce… cet assassin va revenir nous achever sous peu, et nous serons incapables de faire quoi que ce soit pour l’en empêcher ! D’ailleurs, pourquoi ne nous a-t-il pas tué alors qu’il en avait l’occasion ? C’aurait été tellement plus simple ! Pour lui, comme pour nous…"
" Ne te plains pas d’être en vie " grinça Aarel. " Certains nous envieraient. Et, pour ma part, je n’ai aucune envie de lui simplifier la tâche en geignant jusqu’à son retour. "
" Parce que je geins ? " ulula Mahlin. " Je geins ? Oui, je geins. Et tu trouves qu’il n’y a pas de raison de… "
" Si, mais je pense qu’il y a aussi mieux à faire. Si tu ne te soucies pas de mourir, pense à Shani ! Et, accessoirement, à moi. Je n’ai pas l’intention de me faire tuer si je peux l’éviter "
Mahlin se massa les tempes. La situation lui échappait complètement, et il détestait cela. Lui qui était toujours si rationnel. Shani. Il fallait soigner Shani.
Son regard erra dans la pièce. Elle était là, là où il l’avait laissée, étendue de tout son long. Il la retourna et étudia son visage. Elle était si pâle ! Elle gémit.
" Elle ne va pas bien du tout… "
" Elle doit s’être brisé quelque chose lorsqu’elle a été projetée contre le mur. " fit Aarel. Il se pencha à son tour, et l’examina rapidement. Il grimaça. " Ce n’est pas beau, pas beau du tout. J’ai l’impression qu’elle a un bras cassé, et probablement quelques côtes. " Shani grogna alors qu’il passait son bras sous son épaule et la soulevait doucement. " Elle ne va pas pouvoir marcher. "
Mahlin ouvrit de grands yeux.
" Marcher ? "
" Eh bien oui, marcher ! " répondit Aarel, fort occupé à adosser Shani contre un mur. Les sourcils froncés, il éprouva la résistance de la voûte en frappant du plat de la main. " Je ne voudrais pas que tout nous tombe dessus. Il y aurait de quoi, vû les dégâts causés. " Son examen parut le rassurer, et il retira son bras. La jeune fille dodelina de la tête.
" Marcher où ? Que veux-tu dire, marcher ? "
" N’importe où, mais pas ici. Je ne veux pas être là quand ce mage reviendra. Si tu tiens vraiment à respirer de nouveau ses maudites fleurs, grand bien t’en fasse. Mais j’emmène Shani avec moi. "
Mahlin regardait le sol, mâchoires serrées.
" Et où irions-nous ? tu l’as dit toi-même, elle n’est pas en état de bouger. "
" Nous la porterons. Je ne laisserai pas cet étron en robe violette poser ses mains sur elle. Ou sur moi, tant qu’à faire. "
Mahlin renifla amèrement.
" Ce n’est pas que j’apprécie l’idée de mourir, mais je ne vois pas vraiment ce que l’on peut faire… maître Khorr… maître Khorr est mort, et je n’ai jamais réfléchi à ce qui nous arriverait dans une telle éventualité. Et encore moins aux moyens de fuir un assassin au regard d’ange. Il l’a dit lui-même. Nous sommes des morts en sursis. "
Aarel grimaça un sourire.
" Je ne sais pas pour toi, mais j’ai appris à ne pas croire sur parole les gens qui veulent ma mort. De toute manière, nous n’avons pas vraiment le choix. En supposant même qu’il ne revienne pas, il faut que quelqu’un s’occupe de Shani. Quelqu’un de compétent. "
Mahlin hocha la tête comme à regret.
" Où veux-tu aller ? "
Le géant hésita.
" Là encore, nous n’avons pas le choix. Nous devons atteindre Longue-Rivière. Là-bas, ils sauront lui offrir des soins. Ou du repos. Je suis sûr que Erhman et dame Maud voudront bien nous cacher un moment si nous leur expliquons la situation " Mahlin lui jeta un regard acéré, et il sourit. Un pauvre sourire, mais un sourire tout de même. " Oh, non, je ne compte pas tout leur raconter. A supposer qu’ils nous croient, l’histoire serait connue de tout l’Empire en quelques jours. Assez pour qu’ils nous cachent, en tout cas. Ils ont bon c½ur. "
" Longue-Rivière… " Mahlin se tapota la lèvre de la main, réfléchissant. Lentement, il sortait de sa léthargie. " Je ne suis pas sûr que ce soit la meilleure chose à faire. Après tout, ce sera le premier endroit où Dous regardera lorsqu’il se rendra compte que nous avons disparu. "
" Tu as une meilleure idée ? " grommela Aarel. " Je reviens, je vais aller chercher des provisions à la cuisine. Il faut nous dépêcher. Rassemble tes affaires. Il ne faut pas que nous nous chargions trop, rappelle-toi que nous porterons Shani. "
Les derniers mots se perdirent au détour d’un corridor alors que le géant se hâtait de disparaître. Mahlin soupira en regardant les corps épars. Tout allait si bien il y avait une heure. Ou une demi-heure, tout était arrivé si vite… Son regard s’arrêta sur quelque chose de brillant, au milieu des décombres. Curieux, il se baissa et ramassa l’objet. C’était le sceau de Barel Khorr. Sans réfléchir, il l’empocha.
Le bâton posait un autre problème. Il reposait sur le sol, désormais inerte. Il ne brillait plus. A vrai dire, il brillait même moins qu’un bâton ordinaire. Les deux pierres précieuses, aux extrémités, auraient dû réfléchir un tant soit peu la lumière du soleil. Mais, non, elles restaient ternes. Ce furent ces joyaux qui décidèrent Mahlin. Il avait finalement décidé de vivre ; il leur faudrait certainement de l’argent dès lors qu’ils ne dépendaient plus du maître, et ces pierres devaient valoir une fortune. Après une seconde d’hésitation, il agrippa le bâton, son sens pratique prenant le pas sur sa répugnance.
Quoi d’autre ? Son regard erra dans la pièce. Peut-être devrait-il fouiller les corps ? Qui sait ce qu’il pouvait trouver, peut-être des renseignements intéressants ? Ou de l’argent. Il se prit à penser que désormais, les ressources leur étaient comptées. Lentement, avec dégoût, il s’approcha du mage rouge et entreprit de lui faire les poches. Rien de bien intéressant. Il passa à un autre.
" J’ai trouvé du pain, du jambon et quelques fruits ! " fit Aarel en revenant, les bras chargés. " Il faudrait que l’on trouve une besace pour tout transporter, nos bourses ne suffiront pas. "
" En tout cas, nous ne manquerons pas d’argent " répondit Mahlin sans prendre la peine de lever la tête, occupé à fouiller le corps de Fez. " Aucun parchemin, aucune arme, mais des bourses bien remplies. " Le silence lui répondit. Il se retourna pour voir Aarel le regarder sans ciller. " Quoi, qu’y a-t-il ? "
" Tu ne devrais pas détrousser les cadavres. "
" Hein ? Pourquoi ? "
" Ca ne se fait pas, c’est tout " grommela Aarel. " C’est un manque de respect flagrant. "
Mahlin haussa les épaules.
" Sincèrement, mon respect n’était déjà pas grand pour ceux-là. Ils n’ont plus besoin de leur argent, de toute manière. Il faut être réaliste. La nourriture que tu as trouvée ne durera guère plus de deux ou trois jours. "
Aarel secoua la tête. Il ne paraissait pas convaincu. Mais Mahlin se pencha sur un autre corps.
" Tu avais raison, tout à l’heure. Je veux vivre ; tu veux vivre. Et, pour cela, il nous faut de l’argent. C’est trivial, mais c’est ainsi. "
" Je suppose que nous n’avons pas le choix " acquiesca finalement Aarel. Il resta cependant mal à l’aise tout le temps que Mahlin fouilla les corps, ne se détendant que lorsque son ami se redressa.
" Ils avaient beaucoup d’argent, et de l’or. Assez pour que nous puissions vivre correctement pendant longtemps, et faire soigner Shani, quoi qu’elle ait. Si je savais ou le maître rangeait son or, je n’aurais pas à faire cela. Mais nous n’avons pas le temps de fouiller le manoir. "
Aarel hocha sobrement la tête.
" Puisqu’il fallait le faire… bon, je vais chercher des sacs ".
Il disparut de nouveau. Mahlin le suivit du regard jusqu’à ce qu’il disparaisse dans l’escalier, puis il se mordit la lèvre et regarda Barel, allongé sur le sol.
Si jamais il avait quelque chose d’important sur lui ?
Il lui devait le respect dû à un mort, et à un Maître.
Mais si jamais il avait quelque chose d’important sur lui ?
Il ne s’abaisserait pas à ce point.
Il s’accroupit et, lentement, entreprit de fouiller les poches de la tunique sombre. Il frémit lorsque ses doigts effleurèrent par mégarde la légère entaille dans les vêtements, au niveau du c½ur. Le sang, bizarrement, n’avait pas coulé. Et la peau, sous ses doigts, était froide. Il ne s’attarda pas à ces constatations. Le Maître ne portait rien d’essentiel sur lui, et il était hors de question de lui prendre ses bijoux, anneaux ou autres amulettes. Il lui restait un fond de décence. Tout de même. Des bruits de pas : Aarel revenait.
" J’ai trouvé ça… " il montrait d’épais sacs en toile de jute, solides, mais peu pratiques. " Je n’ai pas osé chercher plus avant. Je suppose qu’il faudra s’en contenter. "
Mahlin hocha la tête.
" Tu penses que nous avons oublié quelque chose ? "
" Je ne sais pas, mais je crois que nous aurons tout le temps de le regretter plus tard. Filons. "
" Quoi, tout de suite ? Je voudrais au moins donner une sépulture décente au maître… "
Aarel s’arrêta net alors qu’il se préparait à soulever Shani.
" Je n’y avais même pas pensé ! Tu as raison, nous ne pouvons pas le laisser ainsi. " Il s’écarta de la jeune fille et, à la place, souleva doucement le cadavre. " Aide-moi, nous allons le descendre dans le jardin. Je n’aime pas l’idée de perdre du temps – et les Couleurs savent que nous allons en perdre – mais nous ne pouvons pas partir sans l’enterrer. "
Mahlin opina et s’empara des jambes. Lentement, précautionneusement, ils descendirent. Combien long et raide est un escalier lorsque l’on porte quelqu’un. Mahlin perdit le compte des tours et détours qu’ils faisaient. Mais enfin ils se retrouvèrent dehors. Délicatement, ils posèrent Barel contre un arbre.
" Descendons Shani, aussi. Je ne voudrais pas qu’elle se réveille seule là-haut. Et puis, l’air frais ne peut lui faire que du bien. "
" Tu as raison, je vais t’aider. "
De nouveau ils montèrent dans la Salle d’Incantations, puis redescendirent en portant leur fardeau. La jeune fille était beaucoup plus légère ; bientôt elle reposait contre la muraille. Quelque pâle que soit son visage, sa poitrine montait et descendait au rythme de sa respiration. C’était rassurant ; elle vivait.
Creuser une tombe prit une bonne heure pour qu’elle ait les bonnes dimensions, et Mahlin se sentait quelque peu inutile devant les muscles puissants d’Aarel. Il s’esquiva bientôt, affirmant qu’il allait chercher d’autres objets pour le voyage. Ils avaient forcément besoin de quelque chose de plus. Des vêtements chauds. Des couvertures.
Il passait rapidement dans les couloirs, les bras chargés de fourrures, lorsqu’il s’arrêta brusquement. A gauche de lui, à moitié entrebâillée, se trouvait la porte de la bibliothèque. Mû par une impulsion, il entra.
La pièce était dans son état habituel, c’en était presque un soulagement après tous les bouleversements de la journée. Fidèles à eux-mêmes, les livres s’entassaient dans les rayonnages en tous sens, dans toutes les directions, en des formations hétéroclites. Tout était impeccablement classé, le tout était de savoir quel critère était utilisé. Mahlin était bien en peine de le dire. L’air ici avait une légère odeur de renfermé, de confort tranquille, de sagesse millénaire. Oui, c’était rassurant.
Mahlin hésita un instant, puis posa ses fourrures sur la table et alla étudier les quelques tomes épars. S’il se souvenait bien de ses dernières recherches, ces livres étaient ceux qui se rapprochaient le plus de grimoires de magie. On y parlait en tout cas d’utilisation des Couleurs, d’incantations, et d’ésotérisme. Il se tapota la lèvre du bout de l’index, comme toujours lorsqu’il était pensif. Ils ne pouvaient se permettre de se surcharger ; la traversée des bois serait assez pénible ainsi – il n’osait y penser. Mais d’un autre côté, ce qu’il avait vainement essayé de comprendre durant des heures autrefois lui serait peut-être plus accessible désormais. Après tout, il savait désormais…
Il se figea, bouche ouverte ! Lorsque Dous s’était tourné vers eux…
Lorsque Dous s’était tourné vers eux… oh c’était si flou…
Lorsque Dous s’était tourné vers eux, il avait réussi à atteindre les Couleurs. Il ne se souvenait pas réellement de tout ce qui s’était passé après, mais cet épisode lui apparaissait clairement. Sans le soutien de la lumière (quoi que ce fût) du maître, il avait pu puiser dans ses Pouvoirs.
En temps ordinaire, il aurait crié de joie. Là, il se contenta d’un sourire triste. Et trois des livres qu’il avait sélectionnés vinrent s’empiler dans sa musette. Il sortit sans se retourner, et partit rejoindre Aarel.
" J’ai comme dans l’idée que tu es parti au moment qui t’arrangeait " fit Aarel, suant et soufflant. Le soleil tapait fort sur la clairière, et il n’avait cessé de manier la pelle et la pioche. Un large trou béait désormais devant lui, assez pour y glisser un corps, assez pour que ce corps soit à l’abri des charognards. " Aide-moi au moins à le mettre en terre "
Mahlin laissa glisser ses affaires au sol et s’empara du cadavre. Il savait qu’il aurait dû ressentir des émotions, mais non. Ni colère, ni désespoir, ni peur, ni tristesse. Du fatalisme, peut-être. Lentement, il vit le visage aristocratique disparaître sous les pelletées de terre. Le soleil accrocha une bague à sa main droite, puis elle aussi fut recouverte.
" Tu crois qu’il faut prononcer une orée funèbre ? " fit Aarel, hésitant.
Mahlin regarda la terre fraîchement remuée.
" Je ne sais pas. Peut-être. Oui, je pense. Mais je ne sais pas quoi dire. "
Ils restèrent un moment à regarder la tombe.
" Moi non plus " murmura finalement Aarel. Il se détourna. " C’est peut être mieux comme ça. "
Mahlin resta sans bouger. Lorsqu’il parla, sa voix était sans timbre.
" Je ne sais pas pourquoi vous êtes mort. Et je ne sais pas pourquoi vous avez vécu. Puisse votre séjour sur Terre vous avoir plu, comme il a enrichi ceux qui vous ont rencontré."
Puis lui aussi se détourna. Aarel l’observait du coin de l’½il.
" C’est ainsi qu’on saluait les morts, dans mon village " se défendit Mahlin.
" Mais ca lui convenait parfaitement " conclut Aarel. " Bien, nous partons ; nous n’avons perdu que trop de temps. Dous aurait pu revenir à n’importe quel moment. " Il fit un vague signe de la main. " Occupe-toi des sacs, je porterai Shani sur mes épaules. Mais il faudra que tu ouvres la marche, tu te sens de taille ? " Mahlin acquiesca. " Alors nous sommes partis. "
Mahlin grimaça en regardant la forêt. Trois heures de marche à tout le moins, chargé comme une mule. Cela n’allait pas être une partie de plaisir. Heureusement, il se sentait à peu près en forme. Il n’avait pas été blessé durant l’affrontement ; quelle qu’ait été l’incantation utilisée par Barel Khorr, elle semblait avoir été sélective.
" Il commence à faire froid " observa-t-il soudain. Quelques feuilles flétries se détachaient des arbres proches.
" Oui, j’ai remarqué aussi. C’est normal ; avec la mort du maître, ses enchantements disparaissent aussi. Nous ferions mieux de mettre tout de suite nos fourrures ; de couvrir Shani, aussi. Il ne manquerait plus qu’elle attrape froid. " Suivant ses propres directives, il rajusta son manteau. " D’un certain côté, je préfère que ses sorts se dissipent ainsi. Je n’aimerais pas avoir à affronter les Protections qu’il a placées sur la forêt. S’il a fallu une journée entière aux Chasseurs pour nous retrouver, malgré leur Lien, je n’ose imaginer ce qui nous arriverait. D’ailleurs… quoi, qu’est-ce qu’il y a ? " Le visage de Mahlin venait de se décomposer.
" Aarel… le lien.. "
" Eh bien quoi, le lien ? "
" Je ne comprends pas exactement de quoi il s’agit, mais j’ai l’impression que c’est ce Lien qui l’a conduit à nous, n’est-ce pas ? Donc il sera capable de nous retrouver où que nous allions… c’est sans espoir… "
" Tu ne vas pas recommencer ! " gronda Aarel. " Tu l’as dit toi-même, nous ne savons pas la nature de ce Lien. Ce n’est pas la peine de paniquer déjà. Chaque chose en son temps, et la première chose, c’est trouver un guérisseur pour Shani. "
Mahlin hocha la tête avec lassitude.
" Si tu le dis.. "
" Je le dis. Allons-y "
Sans attendre de réponse ni regarder en arrière, Aarel mit Shani sur ses épaules et s’enfonça dans les bois. La jeune fille murmura vaguement, puis retomba dans le silence.
Mahlin se retourna. Il ne voulait pas partir aussi rapidement. Il regarda le manoir dans lequel il avait habité pendant près de deux ans, et le bosquet dans lequel il aimait paresser, et la tombe.
Puis il s’empara des sacs – Dieu du Foyer, que c’était lourd – et clopina à la suite de son compagnon.
YA DES CARRES PARTOUT
(et j'ai réussi a poster ce message en réussissant le tour de force de ne même pas tenter de lire le texte, et dieu c'est que c'est pas l'envie qui m'en manque)

bon je retourne faire un tour sur chemistry et je reviens voir
mmmhh

je ne peux qu'être perplexe...

faudra je relise sans les carrés mais il me semble qu'il y de l'incohérence (ils retrouvent leurs souvenirs ou pas ?) la magie ne peux pas servir de pretexte a tout, attention

besoin de la suite là ...

edit : pour ceux qui ont pas les carrés vala ce que ça donne :

carres.jpg
Citation :
Publié par Helnea/Gjavann
mmmhh

je ne peux qu'être perplexe...

faudra je relise sans les carrés mais il me semble qu'il y de l'incohérence (ils retrouvent leurs souvenirs ou pas ?) la magie ne peux pas servir de pretexte a tout, attention

besoin de la suite là ...
Ouai et vite meme !

Edit :


Citation :
Publié par Helnea/Gjavann
mmmhh

edit : pour ceux qui ont pas les carrés vala ce que ça donne :

carres.jpg
essayez avec le skin bleu de JOL ptet ?

http://ekios.free.fr/crapo.jpg
Citation :
Publié par Helnea/Gjavann
mmmhh

je ne peux qu'être perplexe...

faudra je relise sans les carrés mais il me semble qu'il y de l'incohérence (ils retrouvent leurs souvenirs ou pas ?) la magie ne peux pas servir de pretexte a tout, attention

besoin de la suite là ...
marrant j'ai eu la même impression, mais pas le courage de relire avec les carrés
Citation :
Publié par Ekios
essayez avec le skin bleu de JOL ptet ?
marche pas non plus, j'ai essayé de voir en cliquant "citer" aussi, mais les carrés ont l'air vraiment incrustés DANS le texte (pas un soucis d'affichage)

(suis sous win2kpro et c'est pareil avec win2003server, avec internet explorer )
Hmm oui au sujet de ses "souvenirs", ça peut paraître étrange. Mais est-ce vraiment ses souvenirs à lui ? Peut-être que le mage lui balance une vision, tellement convaincante, qu'il croit vraiment tout ça. Qu'il croit voir SA mère, et tout l'reste ... alors que c'est faux. N'ayant aucune idée de à quoi peut ressembler son passé, le mage peut lui faire croire n'importe quoi.

Autre suggestion : Vu que la magie a effacé la mémoire de Mahlin, je ne vois pas pourquoi cette même magie ne pourrait pas lui faire revenir pendant un bref instant .. ? Et qui dit qu'il se souvient de ce qu'il a "vu" ? Il se rappel de certaines choses, vaguement, comme les roses (me semble), mais pour le reste ..
Citation :
Publié par Dok Slayers
Hmm oui au sujet de ses "souvenirs", ça peut paraître étrange. Mais est-ce vraiment ses souvenirs à lui ? Peut-être que le mage lui balance une vision, tellement convaincante, qu'il croit vraiment tout ça. Qu'il croit voir SA mère, et tout l'reste ... alors que c'est faux. N'ayant aucune idée de à quoi peut ressembler son passé, le mage peut lui faire croire n'importe quoi.

Autre suggestion : Vu que la magie a effacé la mémoire de Mahlin, je ne vois pas pourquoi cette même magie ne pourrait pas lui faire revenir pendant un bref instant .. ? Et qui dit qu'il se souvient de ce qu'il a "vu" ? Il se rappel de certaines choses, vaguement, comme les roses (me semble), mais pour le reste ..
il serait logique que le charme des souvenirs se dissipe avec la mort du maître, mais les roses c'est l'image de la mort donnée par Dous ("Vous aimez les fleurs ? Tout le monde aime les fleurs"). C'est un mage violet, couleur de l'esprit, il peut faire croire ce qu'il veut et il est visiblement puissant... En même temps Malhin se plonge dans le vert, couleur de son maître, de la nature... et donc des fleurs... on sait qu'il a de l'imagination le petit...

rah suis toute mélangée là ...

(arg on est vendredi, saleté de crapaud va nous falloir le 8 assez vite la, on va pas pouvoir attendre lundi...)
Citation :
Publié par Helnea/Gjavann
avec le décodeur ça veut dire quoi ça ?
Bah avec IE ou Mozilla tu changes l'encodage des caractères de la page.

Mozilla : View -> Caracter Encoding -> tu choisis celle qui fait pas de carré
IE : Affichage -> Codage -> idem
Citation :
Publié par Helnea/Gjavann
suis déjà paramétrée comme ça perso, ça me le fait seulement sur ce post la...

edit : ah non c'est bon, etrange y a des mysteres qui resteront tjs obscurs pour moi..

Merci Kiki et Crabier
Ca reste dans le NOIR du sujet
Je hais ce chapitre !

Pas qu'il soit mal ecrit, ou mauvais en lui même, mais qu'il est un chapitre de transition, où pour le moment il ne se passe rien, et ca m'agace de rester sur ma faim ! C'est pas comme ci je pouvais tourner la page...(Le message est passé ? la suite ?)
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