|
Bon, ok, j'ai mis du temps à le faire, et je n'en suis toujours pas satisfait (surtout du début).
Dites-moi franchement ce que vous en pensez. Même ceux qui ne postent pas d'habitude, je veux votre opinion. C'est le dernier chapitre, et il doit avoir beaucoup d'intensité dramatique. Je le recommencerai jusqu'à ce que j'en serai satisfait Attention, c'est un TRES LONG chapitre (10 pages Word taille 10, comparées aux 6-7 habituelles). Introduction Chapitre I Chapitre II Chapitre III Chapitre IV Chapitre V Chapitre VI Chapitre VII Chapitre VIII Chapitre IX Chapitre X Chapitre XI Chapitre XII Chapitre XIII Chapitre XIV Chapitre XV Chapitre XVI Chapitre XVII Chapitre XVII Chapitre XVIII Chapitre XIX Chapitre XX Chapitre XXI Chapitre XXII Chapitre XXIII Chapitre XXIV Chapitre XXV Chapitre XXVI Chapitre XXVII Chapitre XXVIII Chapitre XXIX Chapitre XXX Chapitre XXXI Chapitre XXXII Chapitre XXXIII Chapitre XXXIV -------------------------------------------------------------------- Et le combat s'engagea. La lune était haute dans le ciel. Le vent faisait onduler les capes et les cheveux. Les étoiles brillaient comme des spectatrices passionnées de ce qui se passait ici-bas. Les Dieux étaient dans l'air, et ils retenaient leur souffle en attendant ce qu'il allait se passer. Les guerriers se jetèrent en avant avec un hurlement rauque. Les lances rencontrèrent les haches, et les épées heurtèrent les masses, et les fléaux s'enroulèrent autour des boucliers. Des dizaines de flèches se mirent à vrombir, partant des arcs des envahisseurs pour venir s'enfoncer dans le bois et la chair vulnérable. Shareen s'y prit à deux fois pour assurer sa prise sur son glaive. Ses mains étaient moites, désespérément moites, et la sueur coulait sur son front, sans qu'elle ait le loisir de pouvoir l'essuyer. Elle grimaça. Bok avait pourtant dit que l'angoisse disparaissait, une fois qu'on était au cœur du combat. Eh bien, elle ne tarderait pas à y être, alors qu'elle avançait résolument derrière Rekk, suivant les guerriers qui investissaient le palais. Et pourtant, elle avait toujours l'impression que son estomac se contractait au rythme de ses pas. Un goût de bile lui envahit la bouche alors qu'elle franchissait le large portail. Elle cracha sur le pavé avec dégoût. Puis elle n'eut plus le temps de réfléchir: un garde courait vers elle. Les deux lames se heurtèrent, et elle recula sous la violence du choc. Le contrecoup lui remonta le long du bras. Elle gémit intérieurement en se remettant en position. Le soldat frappa de nouveau, sans même prendre la peine de feinter, ne voyant en face de lui qu'une gamine avec une arme trop grande pour elle. Ses yeux s'écarquillèrent alors qu'elle détournait sa lame et ripostait d'une botte vicieuse au bas-ventre. Sa bouche se tordit d'incrédulité, et il s'effondra sans un mot. "Bien joué !" lança Jon Bras-Gauche, souriant de toutes ses dents pourries. "Joli coup !" Elle lui rendit son sourire avec une joie farouche, et elle leva son glaive avec plaisir. Bok avait raison, finalement. Elle ne ressentait soudainement plus aucune angoisse, juste une sorte d'exultation sombre qui la poussa en avant. Le glaive paraissait tout d'un coup léger entre ses mains, léger comme une plume, alors qu'elle se jetait sur un nouvel adversaire. Celui-ci eut à peine le temps de se défendre qu'un autre guerrier l'abattait par derrière. Frustrée, Shareen fouilla l'obscurité des yeux, à la recherche d'un ennemi à affronter. Il n'y en avait pas. Ou, plus précisément, il n'y en avait plus. Ce n'avait pas été une bataille, mais un massacre alors que les gardes de faction tentaient désespérément de se replier. Elle fixa le pavé qu'une quinzaine de corps tachaient de rouge. "On a gagné ?" murmura-t-elle, incrédule. Jon essuya la sueur qui lui coulait dans les yeux et se prépara à parler, mais ce fut Rekk qui donna la réponse. Le Banni se retourna et leva son épée. "Ce n'était que le premier combat ! Les gardes ne vont pas tarder à arriver !" hurla-t-il. "Mais est-ce qu'ils ont une chance contre nous ?" "Non !" hurlèrent les guerriers, tapant du pied avec enthousiasme. "Aucune !" acquiesça Rekk en souriant. Malgré l'obscurité, ou peut-être grâce à elle, Shareen pouvait voir distinctement ses yeux piller. "Nous avons été forgés par le Nord, comme le froid tempère la lame d'une épée ! Ces hommes n'ont jamais vu la guerre de près. Nous allons leur montrer ce que c'est ! Aujourd'hui, le palais est à vous ! L'or est à vous ! La richesse et la gloire !" La foule hurla de plus belle alors qu'il avançait lentement dans la cour. Les lumières s'allumaient de toutes parts alors que les volets s'ouvraient et que les gens se réveillaient. Soudain, le bruit de cloches se superposa au hurlement des guerriers. L'alerte était donnée. "Sonnez !" hurla Rekk, levant la tête au ciel. Le tonnerre gronda dans le lointain, étouffé par le bruit du tocsin. "Sonnez, et annoncez l'arrivée du Démon Cornu ! Theorocle, je suis là pour boire ton sang !" Shareen supprima un cri d'excitation, et se trouva à applaudir avec les autres. Ils avançaient vers le palais, impitoyables. Elle releva la tête. Du sang coulait le long de son bras, mais ce n'était pas le sien. Les yeux à moitié clos pour se protéger de la violente lumière des torches, elle frappa de toutes ses forces l'homme qui avait commis l'erreur de lui tourner le dos. Le lourd glaive trancha les anneaux de métal comme s'il s'était agi de papier, et elle grimaça en entendant le bruit affreux de la peau qui se déchirait. Ecœurée, elle recula d'un pas, s'appuyant sur son épée pour reprendre son souffle. Elle n'en eut pas le loisir, alors qu'un soldat dardait sa lance vers elle. Dans un réflexe, elle parvint à dévier l'arme. Le garde fronça les sourcils de manière menaçante sous son casque à cimier. "Maudite gamine !" cracha-t-il. Il frappa de nouveau, mais une hache soudainement brandie vint briser la hampe de son arme. Stupidement, il regarda ses mains sans comprendre. Shareen planta sa lame à deux mains dans le ventre de l'ennemi, comme Rekk le lui avait appris. Elle regarda le sang jaillir, incrédule. A l'entraînement, il n'y avait pas eu de sang. Elle n'eut pas le loisir de contempler son œuvre plus avant que, de nouveau, un ennemi se présentait de profil, tentant de planter sa lance dans le gras d'un guerrier. Sans hésiter, elle se jeta en avant, les lèvres retroussées en un rictus guerrier. L'homme ne portait pas d'armure, et ses os se brisèrent avec un bruit écœurant. Les gardes affluaient de partout, maintenant. Elle avait été stupide de croire que tout avait été fini lors de la brève escarmouche à la porte. Le palais abritait la caserne de la ville, et un flot ininterrompu de soldats sortait désormais par toutes les portes du bâtiment. La nuit était vivante de feu et de sang, et les combats étaient maintenant devenus beaucoup trop confus pour qu'elle parvienne à comprendre ce qu'il se passait. L'essentiel, à ses yeux, était que pour l'instant, ils étaient en train de gagner. Comment pouvait-il en être autrement, alors que les gardes sortaient les yeux encore bouffis de sommeil, ne comprenant pas ce qu'il se passait, l'armure à moitié enfilée ? La plupart avaient pris la peine de mettre une chemise de mailles, certains portaient un casque, mais on en voyait parfois en vêtements de nuit, marchant tels des fantômes, une lance au poing. Même ceux qui avaient pris la peine et le temps de s'équiper complètement ne mettaient pas plus de temps pour tomber. Les gardes étaient jeunes, pour la plupart, et n'avaient jamais connu la guerre. Ils avaient en face d'eux des vétérans de centaines de batailles, qui combattaient depuis des années les barbares du nord. Des guerriers qui avaient l'habitude de se servir de leur arme pour tuer, et non pour s'entraîner. Des hommes qui ne craignaient plus la mort, à force de l'avoir côtoyée, et que l'ivresse du combat possédait maintenant totalement. A côté d'elle, Rekk se battait comme un possédé. A un moment du combat, il avait perdu son bouclier, rendu inutilisable par plusieurs coups de masse, mais désormais il tenait son épée dans ses deux mains, et il créait le vide autour de lui. Shareen se tourna à temps pour voir trois hommes lui courir dessus, crachant des insultes. Deux portaient des lances et le dernier une hache. Rekk ne cilla même pas. Il se contenta de les attendre, solidement campé sur ses jambes, et ce fut lui qui versa le premier sang. Bondissant en avant, il bouscula le premier lancier pour qu'il se retrouve à tituber dans le chemin de ses adversaires. Son épée siffla, et l'homme à la hache hurla en lâchant son arme. Les deux autres tombèrent rapidement. Ils n'avaient pas eu la moindre chance. Le sang coulait, coulait, et les hommes mouraient, mouraient, et Shareen hurla à la lune en reprenant son glaive dans ses mains. "Nous avons gagné !" glapit-elle. Rekk se tourna vers elle. Il la considéra un instant avec des yeux terribles. Avec un effort visible sur lui-même, il baissa son arme jusqu'à ce que la pointe effleure le sol. Lentement, son expression se détendit. "Non. Ils sont désorganisés, ils sont pris par surprise, mais ils ne sont pas en déroute" Il sourit froidement. "Tu veux que je te montre ce que c'est qu'une vraie déroute ?" Sans attendre de réponse, Rekk plongea sa main sous son manteau pour en retirer une flasque de cuir. Les yeux de Shareen s'écarquillèrent. Elle avait déjà vu cet objet, mais où ? Lorsqu'il la déboucha et entreprit de faire couler le liquide le long de son épée, elle se rappela soudain. Soudain, sa gorge semblait sèche. Elle se lécha les lèvres avec nervosité. "C'est… c'est de là que vous vient votre surnom ?" Il hocha la tête. "Dans l'arène, on apprend à se battre, bien sûr. Mais on apprend surtout à assurer un spectacle de qualité. Ils ne seront pas déçus" Il y eut le bruit sourd du briquet à silex. Et l'épée s'enflamma. Le feu brûlait doucement dans l'âtre, réchauffant le corps de Theorocle. Depuis quelques jours, il ne supportait plus de dormir avec des couvertures. Il se réveillait systématiquement enroulé dedans, et elles lui donnaient l'impression de mains qui serraient, serraient, et cherchaient à l'étrangler. Par trois fois déjà, des serviteurs avaient dû venir changer ses draps, alors que des traces de terreur et d'urine souillaient le lin et la soie. L'empereur tremblait d'humiliation, mais il les laissait faire. Il s'était emporté, une fois, et Gundron était venu voir quelle était la cause de tout ce vacarme. Le regard empreint de mépris que le borgne avait jeté sur lui en le voyant dans cet état l'avait rendu furieux contre lui-même. Il avait envoyé tout le monde dehors, et était resté seul dans sa grande chambre, avec ses draps trempés, à retenir les larmes qui lui montaient aux yeux. Theorocle dormait donc depuis directement sur le matelas, sans aucune protection contre le froid de la nuit que la chaleur du feu, dans la cheminée. Ses cauchemars s'étaient apaisés. Jusqu'à ce soir. L'empereur sentit un léger frissonnement dans le tas de couvertures, sur le sol. Il gémit, mais ses yeux ne parvenaient pas à se détourner. Il savait qu'il dormait, mais il n'arrivait pas à se réveiller. Et le visage du Banni s'extirpa doucement de l'amas de laine et de soie, les yeux froids, la bouche tordue en un rictus sinistre. Il avait du sang sur les mains. "Pourquoi as-tu tué ma fille ?" murmurait-t-il d'une voix douce. "C'était un accident !" hurla le prince. "Un accident ! Ca aurait pu être n'importe qui d'autre ! Je ne savais pas que tu étais son père !" "Pourquoi m'as-tu assassiné ?" susurra une seconde voix, juste contre son oreille. C'était Marcus, à présent, qui le regardait, une expression peinée sur le visage. "Ne t'ai-je pas aimé ? Ne t'ai-je pas donné tout ce qu'un père pouvait donner ?" "Tu ne m'aimais pas !" gronda Theorocle, les lèvres retroussées en un rictus furieux. "Tu ne m'as jamais aimé !" "Tu as raison, je ne t'ai jamais aimé. Mais est-ce une raison pour tuer quelqu'un ?" Les lèvres de l'Empereur se recourbèrent en un sourire moqueur. "Si c'était le cas, alors tu ferais bien de te mettre au travail. La cour entière mérite de tomber sous ton épée" "Pourquoi as-tu tué ma fille" répéta le visage de Rekk, levant ses mains ensanglantées et s'avançant sur le lit. "Pourquoi m'as-tu assassiné ?" renchérit de nouveau Marcus. Theorocle leva les mains pour se protéger, mais il n'en avait plus. Il ne restait que les moignons, et le sang se mit à en couler à gros bouillons. Il macula les draps, et le matelas se souleva. Il avait maintenant le visage de son père, mais les yeux qui brillaient d'une lueur meurtrière étaient ceux du Banni. Des cloches se mirent à sonner autour de lui, le glas, la lourde cloche qui annonçait le péril et la mort. Les lèvres du spectre s'incurvèrent en un sourire glacial alors qu'il répétait ses accusations, la voix chuintante. "Pourquoi m'as-tu assassiné ?" "Pourquoi as-tu tué ma fille ?" Les doigts ensanglantés s'enroulèrent autour de sa gorge, et serrèrent. Le bruit des cloches était assourdissant. Theorocle se réveilla en hurlant, trempé de sueur, les poings crispés sur le matelas. Il n'avait plus de couvertures, pourtant il avait toujours l'impression d'étouffer. Il porta ses mains à sa gorge, les yeux exorbités, cherchant machinalement les traces de strangulation. Il n'y avait rien. Les visages avaient disparu. Les draps, sur le sol, restaient immobiles, inoffensifs. "Un cauchemar" marmonna l'empereur, les yeux hantés. "Juste un cauchemar" Puis il fronça les sourcils. Quelque chose n'allait pas. Il était réveillé, pourtant, il entendait toujours les cloches. Encore abruti de sommeil, il se leva et s'avança vers la fenêtre, les mains pressées contre les oreilles pour filtrer le bruit qui devenait de plus en plus assourdissant. Ses yeux s'écarquillèrent alors qu'il comprenait enfin. Le tocsin ! On sonnait le tocsin ! "Qu'est-ce que ça veut dire, encore ?" grogna-t-il, se frottant les yeux avec application. Il se pencha vaguement par la fenêtre, cherchant à voir ce qu'il se passait en bas. Des prisonniers s'étaient-ils évadés ? Theorocle serra les poings, soudain furieux. Les geôles et le donjon étaient une vraie passoire, il semblait. D'abord G'kaa, puis Rekk, et maintenant, qui ? Il frissonna. Ce n'était tout de même pas Mandonius qui faisait des siennes ? Non, l'ancien gouverneur était bien incapable de faire quoi que ce soit dans son état. Et il avait fait doubler la garde au dernier étage du donjon, pour faire bonne mesure. Mais alors, quoi ? Songeur, il se pencha un peu plus en avant. Quelques cris résonnaient en contrebas, mais le bruit des cloches étouffait tout, et il ne parvenait pas à entendre ce qui se disait. Il fronça les sourcils. "Theorocle ! Viens par ici ! Il faut que tu sortes de là !" La porte s'ouvrit brutalement, repoussée d'un coup de pied, et Gundron était dans la pièce. Il avait une expression terrible sur le visage. Il portait une chemise de mailles enfilée à la hâte, sans les gantelets ni les chausses. Il tenait son épée à la main, n'ayant pas eu le temps de fixer son ceinturon et son fourreau. L'empereur recula d'un pas, effrayé. "Qu'est-ce que… qu'est-ce que tu fais ici ?" Il déglutit, et ses mains se crispèrent machinalement sur le rebord de la fenêtre. "Tu es venu me tuer, c'est ça ?" Gundron secoua la tête avec irritation. Il ne prenait pas même la peine de regarder son empereur en face, alors que ses yeux étudiaient la pièce avec soin. En quelques pas, il fut lui aussi à la fenêtre et se pencha pour regarder dehors. Il siffla entre ses dents. "Ne sois pas ridicule, gamin. Je suis là pour te sauver. Viens avec moi" "Quoi, qu'est-ce qu'il se passe ?" Gundron serra les dents. "Rekk est là, à la tête d'une armée. On se bat dans le palais" Soudain, au sol, les draps semblaient se recourber en un sourire sardonique. Shareen repoussa pour la troisième fois le sergent qui tentait de la coincer dans un coin. Il était énorme, un véritable tonneau, mais ça ne l'en rendait pas moins dangereux. Il avait pris la peine de s'habiller, ou peut-être était-il de service quelque part. Quoi qu'il en fût, une armure de plaques recouvrait son corps obèse, et un heaume intégral dissimulait son visage. Dans ses mains gantées d'acier se trouvait une large épée à deux mains qui, si elle n'avait pas la taille de celle de Comeral, n'en restait pas moins gigantesque. L'homme avait renoncé à feinter avec elle et utilisait désormais la force brute. Elle avait tenté de parer son premier assaut, mais le contrecoup lui meurtrissait encore le bras. Avec l'énergie du désespoir, elle frappa de toutes ses forces au plexus. Mais la lame ripa sur les plaques d'armure. L'homme encaissa l'impact avec un grognement. Shareen n'avait pas besoin de voir ses yeux pour deviner qu'ils brillaient d'une joie mauvaise, alors qu'il levait les bras pour asséner un coup mortel. Soudain, ses mains s'immobilisèrent. Il poussa un cri rauque, à moitié étouffé par son heaume, et tomba à genoux. Rekk retira sa lame de la jointure de la jambe, et frappa négligemment à travers la fente du casque. Il ne prit pas la peine de vérifier si l'homme était bien mort avant de se tourner vers la jeune fille. "Viens avec moi. Maintenant. Il faut nous dépêcher" Shareen jeta un œil autour d'elle, hébétée. Pour la majeure partie, les combats dans la cour étaient terminés, et les hommes investissaient maintenant le palais. Elle essuya lentement ses mains couvertes de sueur et de sang sur le devant de son bliaut. Elle avait l'impression que le combat avait duré plusieurs heures. Elle avait l'impression qu'il avait duré quelques secondes. Cela devait être entre les deux, mais elle n'avait pas la moindre idée du temps exact. L'important, c'était que la résistance semblait être totalement brisée. "Nous avons gagné ?" balbutia-t-elle, incrédule. "Bien sûr, que nous avons gagné" grommela Rekk, fronçant les sourcils. "Le palais était presque vide. Nous étions aussi nombreux, bien entraînés, et nous avions l'effet de surprise. Penses-tu que mes hommes auraient accepté de se battre si jamais il y avait eu de véritables risques ?" Shareen repensa à ce que lui avait dit Bok, et un sourire vague se fit jour sur ses lèvres. "Je pense, oui. Je pense qu'ils l'auraient fait" Rekk détourna les yeux, la mâchoire serrée. "Quoi qu'il en soit, tout cela n'a aucune importance. Avant demain, ce palais sera pillé et livré aux flammes. Mais ça ne servira à rien si je ne trouve pas l'empereur. Allons le chercher" Il se détourna pour suivre ses hommes et pénétrer dans le bâtiment principal. Il n'accorda pas un seul regard aux dizaines de corps qui jonchaient le sol. Une torche avait été lancée dans l'écurie par une main impatiente, et la paille sèche s'était enflammée tout de suite. Les chevaux fous de terreur galopaient en tous sens, alors que l'odeur de viande brûlée prouvait que certains n'avaient pas été assez rapide. Shareen frissonna et emboîta le pas à l'homme qui était à l'origine de tout cela. A l'intérieur, les scènes de destruction étaient encore plus terribles. Le grand hall, qui avait tellement impressionné Shareen lors de sa première visite, n'était plus qu'un immense champ de bataille. Les hommes de Bertholdton étaient devenus fous au vu de tant de richesses. La plupart étaient nés dans la rue, tous avaient vécu dedans, et la simple vue des magnifiques tentures, des tapis finement tissés, des statuettes précieuses et du bois exotique les rendait totalement incontrôlables. Rekk fronça les sourcils alors qu'un homme le bousculait pour s'emparer d'un vase ornementé qui trônait sur un buffet. Le guerrier croisa son regard et déglutit. Il se confondit en excuses, mais cela ne l'empêcha pas de retourner aussitôt au pillage. La jeune fille frissonna. On aurait dit des bêtes sauvages. "Des centaines d'années pour construire et amasser, et une seule nuit pour détruire" murmura-t-elle, incrédule devant les ravages déjà commis. Rekk hocha sobrement la tête. "Voilà ce qu'il arrive lorsqu'on viole et qu'on tue des enfants innocents. L'Empire a scellé sa perte en laissant le mal les gagner ainsi" Shareen se retourna à demi. "Ca ne vous est jamais arrivé, de regarder le monde en couleurs ? Il n'y a que le noir et le blanc, pour vous ?" Rekk soutint son regard sans ciller. Lentement, un sourire fatigué se fit jour sur ses lèvres. "Pour moi, il n'y a même pas de blanc." |
28/05/2003, 18h26 |
|
Grenouillebleue |
Voir le profil public |
Trouver plus de messages par Grenouillebleue |