[Brianos]

Chers amis,

Je viens d'avoir une conversation houleuse avec un camarade ici présent, qui me soutient que Jean Gabin n'est pas un grand acteur, mais "un bon acteur, sans plus".

Voici quelques-unes de ses réflexions:
- on ne doit pas penser à un autre film en voyant un acteur dans un film
- Gabin était le précurseur du cinéma à effet visuel, que veux-tu que je te dise, il faut vivre avec son temps. Aujourd'hui, il est complètement dépassé par des Al Pacino ou De Niro
- on en reparle dans 20 ans, quand les vieux critiques nostalgiques du cinéma d'antant passeront l'arme à gauche
- il jouait sur sa gueule et sur sa voix...

Enfin, voici la dernière réflexion, qui m'a fait comprendre qu'il n'avait pas compris véritablement qui était Gabin:
- je préfère largement Ventura à Gabin.

Sur ce, il m'a avoué surtout connaître le Gabin d'après-guerre. Voilà la grande erreur selon moi: beaucoup de personnes de notre génération ne connaissent de lui que ces films-là. Or, le Gabin considéré par la plupart des spécialistes comme un des plus grands acteurs du 7ème Art, c'est plutôt celui d'avant-guerre. Celui qui a joué dans les films de Carné, Renoir, Duvivier, Grémillon.

Je vous demande votre avis: pensez-vous qu'un acteur qui joue souvent le même type de rôle est pour cela un "bon acteur, sans plus"? Pour ma part, je mesure plutôt la grandeur d'un acteur aux émotions qu'il me procure.

Prévert a dit ceci à son propos:

Citation :

Il joue "comme dans la vie"
comme dans la vie secrète mystérieuse et rêvée
c'est l'évidence même
l'évidence même d'un être humain
qui joue son rôle publiquement

Voici quelques-uns les films dans lesquels il a joué avant la guerre.
- LA BANDERA, de Julien Duvivier (1935).
- LA BELLE EQUIPE, de Julien Duvivier (1936).
- LES BAS-FONDS, de Jean Renoir (1936).
- PEPE LE MOKO, de Julien Duvivier (1937).
- GUEULE D'AMOUR, de Jean Grémillon (1937).
- LA GRANDE ILLUSION, de Jean Renoir (1937).
- QUAI DES BRUMES, de Marcel Carné (1938).
- LA BETE HUMAINE, de Jean Renoir (1938).
- REMORQUES, de Jean Grémillon (1939).
- LE JOUR SE LEVE, de Marcel Carné (1939).

Par extension, peut-on affirmer que ce ne sont pas des grands films?

Le débat risque de dévier sur: "oh, l'élitiste, il veut faire son intéressant en disant qu'il aime ce vieux cinéma!". Mais ce n'est pas mon propos: un acteur/film n'est pas forcément bon parce qu'il est vieux, et n'est pas forcément mauvais parce qu'il est récent et a fait des millions d'entrées. Moi, je parle de Gabin, et accessoirement de Renoir, Carné, Duvivier...

[Rÿcän]

Citation :

Provient du message de Brianos-ex Demiosien

- il jouait sur sa gueule et sur sa voix...

Mais quelle voix et quelle gueule !


ps : La Bête Humaine est un film énorme.

[Bleiz Tad Koal]

J'ai vu quasiment tous les films que tu as cité, ce sont de grands films de l'époque. Et Gabin n'a pas usurpé sa réputation.
Enfin ça fait très longtemps que j'ai vu tout ça *voix chevrotante*, je ne vais donc pas me lancer dans un subtil et nuancé panégyrique.

Cela dit, tu pourrais un peu envisager les choses sous l'angle "on ne dit pas c'est pas bon le jambon, on dit je n'aime pas le jambon"

[Soir]

Moi, ce qui m'a toujours ennuyé avec les films de Gabin que j'ai vus (je ne suis pas un spécialiste), c’est qu'à chaque film j'avais l'impression de voir le même personnage, Jean Gabin. Oh bien sûr... Il jouait, je ne veux pas exagérer. Mais j'ai quand même l'impression que les rôles lui étaient taillés sur mesure, pour faire du Gabin. Je me demande s'il savait jouer autre chose.

[Frida]

Je n'ai jamais eu l'impression d'avoir affaire à un acteur.


Ceci n'est pas une critique, j'aime beaucoup les films avec Jean Gabin.

[Peline]

Citation :

Provient du message de Soir le Sicaire
Mais j'ai quand même l'impression que les rôles lui étaient taillés sur mesure, pour faire du Gabin.

C'est pas spécifique à Gabin c'est le mode de création des films à l'époque qui se construisaient toujours autour d'une star.

L'importance du scénario des dialogues primaient sur tout le reste, même sur les décors.

Et l'on cantonnait souvent les acteurs à des mêmes figures de style et de rôle.

C'était impensable de faire jouer une comédie à une tragédienne et inversement.

Les styles cinématographiques étaient très cloisonnés.

Pour son époque et comparé à ses pères il fut un grand acteur surtout dans certains films.

Mais là encore c'est fonction de l'appréciation de chacun et de nos goût personnels.

Ces trois films m'ont marqués mais je dirai pas à cause de Gabin.

Mais plutôt grâce à tous les acteurs , le réalisateur, l'histoire, le scénario :

La Grande Illusion et La Bête Humaine, de Jean Renoir.

Le Jour se Lève de Marcel Carné.

[Brianos]

D'autres avis peut-être?

[Magma]

moi j'aime pas du tout ..

[Folken le NB]

Pour ma part les film d'avant 1970 sont des films où l'on parle vieillot et surtout où l'on s'endort.

Je sais je suis un petit con qui n'a pas l'esprit ouvert, on me l'a souvent dis et ça me désole que ça désole. Mais je ne vis pas dans le passé.

[Brianos]

Citation :

Provient du message de Milhouseur
Pour ma part les film d'avant 1970 sont des films où l'on parle vieillot et surtout où l'on s'endort.

Je sais je suis un petit con qui n'a pas l'esprit ouvert, on me l'a souvent dis et ça me désole que ça désole. Mais je ne vis pas dans le passé.

Disons surtout que généraliser comme tu le fais, c'est pas bien!

[Wolik]

Perso je suis pas un spécialiste mais je trouve comme dis plus haut que les roles semblaient "sur mesure" pour lui plutot que lui s'adapte au role comme les acteurs "classiques". Ceci dis j'ai toujours aimé les films de Gabin, avant ou après guerre.
J'aime beaucoup je "Gentlemen D'espon"

Mais perso je préfère Ventura... mon coté dwarf power surement Ben quoi un petit gros avec une grande gueule et qui sais se battre.. c'est un héro pour un nain dans l'ame

[Brianos]

Ce grand débat mérite mieux qu'une troisième page...hé oui!

[Blacky---]

Petite anecdote... Gabin et Fernandel étaient à une cérémonie publique (au mariage de je sais plus qui, ou pour un festival, quelque chose dans ce goût là), ca discute, ca boit, ca boustifaille, et puis à une innocente question d'un journaliste Fernandel répond:

"Je suis le plus grand acteur français".

Stupeur, les gens se mettent à regarder Gabin en coin d'un air gêné, Fernandel souri toujours de son grand sourire pleine dents, Gabin se met à tirer une tronche pas possible tout à coup, on se dit que ca va barder. Fernandel rajoute, n'ayant pas eu l'air de réaliser la réaction générale :

"quand on voit, comparé aux autres acteurs, tous les nanards que j'ai pu faire, et où j'en suis aujourd'hui, ce n'est pas possible autrement"

[Brianos]

Je connaissais cette anecdote, Blacky, mais ce n'est pas exactement ça. Ce qui s'est passé en réalité est encore plus drôle...malheureusement je ne m'en souviens pas, et n'arrive pas à la retrouver.

En revanche, j'ai trouvé une autre anecdote évoquant la rencontre entre Sergio Leone (que j'adore également) et Jean Gabin...elle n'est pas mal non plus:

Citation :

En 1974, Sergio Leone vient à Paris pour visionner un film de Jacques Deray, à qui il pense confier la réalisation d'une de ses productions. Accompagné du producteur Norbert Saada et du comédien André Pousse, Leone se rend aux studios de Boulogne. Pousse raconte la scène :

" On entre (…) et sur la droite je vois au loin un acteur habillé en président de cour d'assises. On s'approche et je reconnais Gabin. Il était en train de tourner Verdict avec Sophia Loren et, entre deux plans, il était sorti fumer une cigarette dans le couloir, assis sur le banc en face de la cantine.

- Bonjour, Jean, comment vas-tu ?
- Ça va et toi ?
- Ça va…

Comme il voit que je suis accompagné, il jette un bref coup d'œil sur Sergio Leone et Norbert.

- Bonjour, messieurs…

Et il se lève après avoir écrasé sa cigarette pour retourner sur le plateau. Là, je me marre et je désigne Sergio Leone à Jean Gabin.

- Vous vous connaissez !
- Ben non, excusez-moi.

Sergio Leone, évidemment, connaissait Jean Gabin en tant qu'acteur qui lui-même savait qui était Sergio Leone, mais ils ne s'étaient jamais rencontrés, c'était la première fois. J'ai dû faire les présentations.

- Jean Gabin, Sergio Leone.

Ils se sont serré la main et Sergio Leone avait attaqué le premier :

- J'ai lu que vous alliez arrêter de faire du cinéma. C'est dommage et je le regrette beaucoup, parce que, pour moi, vous êtes le plus grand, et j'aurais aimé faire un film avec vous.

- Compliment pour compliment, je peux vous dire une chose, s'il y a un metteur en scène qui peut le faire changer d'avis, c'est bien vous, parce qu'avec vous on a très peu de texte et beaucoup de gros plans…

Il ne manquait pas d'humour, Jean Gabin. "

[- Caïn Abalham -]

Perso j'aime bien Gabin, mais c'est vrai qu'entre Gabin et Ventura, le choix est vite fait.

Gabin, dans le peu de films dans lesquels je l'ai vu, c'est vrai que c'est souvent le meme registre (en meme temps j'ai pas eu la chance de voir toute sa filmo), alors que Ventura a jouer dans des films plus "legers" et certains tres lourd.

Et pis,quand meme, le "Hapy birthday to you ..." et paf dans tes dents, rien que pour ca il merite d'etre le plus grand acteur

[Brianos]

Vu chez Ardisson, ce soir:
- Ardisson: "Si vous n'aviez pas été Johnny, qui auriez-vous aimé être?"
- Johnny: "Jean Gabin".

Hé ouais!