J'avais commencé à en parler dans le sujet Police, mais comme ça concerne en fait très peu l'action de la Police et que je pense que le traitement médiatique des différents modes d'actions militantes mérite amplement son propre sujet j'ouvre celui ci.
(formulation en hommage au sujet sur l'Art contemporain

)
Thèses :
1) Démontrer l'étendue de leur détermination en étant prêts à prendre des risques pour leur intégrité physique est un outil essentiel à gagner l'attention des médias et le respect des populations pour les militants de causes radicales. Cette démonstration peut prendre la forme d'actions violentes ou
non violentes
(note : par actions
non violentes on n'entend pas de simples manifestations autorisées puisqu'elles ne représenteraient aucun risque).
2) Du point de vue de l'image, en imaginant une diffusion égale, la non-violence s'avère de loin le mode d'action le plus efficace pour ces groupes, puisqu'elle permet
non seulement une démonstration de détermination plus grande (
non seulement prendre des coups mais ne pas répliquer) mais encore d'apparaitre avant tout comme victimes de la violence étatique.
2b) L'action violente pourra avoir dans une certaine mesure le même effet en raison de la disproportion de moyens en faveur de la force publique, au moins dans les couches traditionnellement hostiles à celle ci, mais son effet se bornera en général et au plus à renforcer le soutien que des déjà convaincus du bien fondé de la cause défendue (soutien allant au delà de leur condamnation de la violence), tout en renforçant l'hostilité d'autres groupes, là où la non-violence pourrait aboutir à un respect général.
2c) En découle que l'action violente, clivante, produira probablement d'autres militants radicalisés, mais est impropre à aboutir au succès démocratique de sa cause, là où l'action non-violente est plus susceptible de conduire à une évolution des opinions en convertissant des personnes à l'origine neutres.
3) Dans le courant du XXème siècle ce constat a permis des succès spectaculaires pour les mouvements non-violents, qui n'ont pas été sans inquiéter les tenants de l'ordre établi. Pour les contrer il a été décidé d'accorder une attention médiatique bien plus grande aux actions violentes (ou même de ne traiter des mobilisations à l'origine
non violentes que quand elles dégénèrent).
3b) Autre explication possible : Sans que cela relève d'une volonté consciente de dévaloriser l'action non-violente, les médias modernes accordent naturellement plus d'importance aux actions violentes par goût du spectaculaire.*
4) Des militants menant actions violentes peuvent servir de justification au pouvoir de céder sur quelques unes de leurs revendications, présentant cela comme une nécessité pour la paix sociale, sans pour autant remettre en cause le fond de sa politique. Là où laisser des actions non-violentes gagner un plus large soutien à leurs causes pourrait forcer à des remises en cause plus profondes. De plus avoir cédé à la violence fera naître un mouvement de réaction dans l'opinion préconisant une plus grande fermeté générale à l'avenir.
5) On peut donc dire que l'attention des médias accordée aux actions militantes violentes est dans tous les cas dans l'intérêt du maintien des orientations politiques en place, qu'il y ait ou
non des reculs ici ou là. Et que l'attitude du pouvoir vis à vis du militantisme
violent est purement hypocrite, cette forme étant largement préférée par les tenants de l'ordre établi à l'autre qu'il pourrait prendre.
La première chose à exiger de nos médias et décideurs politiques, si l'on voulait limiter le nombre d'incidents liés à du militantisme
violent, ne serait elle pas qu'ils cessent d'accorder une attention largement supérieure aux mouvements violents plutôt qu'à ceux qui restent
non violents ?
Et en imaginant que l'attitude des médias change pensez vous qu'une plus large quantité de mouvements se convertiraient à la
non violence, ou que trop de militants, sans un Ghandi ou Luther King pour les mener, manqueraient trop de discipline pour l'adopter ? (c'est le seul point où j'aie des doutes en fait).
(* je n'adhère pas vraiment à cette explication, ayant constaté que les épisodes les plus spectaculaires des actions non-violentes, ceux où une certaine violence étatique s'exerce permettant aux militants de démontrer l'étendue de leur non-violence, sont les plus largement absents des médias
non militants)