Bonsoir le Cercle, bon je m'adresse ici quasi-exclusivement aux personnes qui ont vu le film, pour solliciter leur point de vue sur mon point de vue.
Un pote assez fan du film m'a demandé de rédiger un article pour son blog sur ce film. J'ai enfin pris le courage d'écrire quelque chose, je vous copie/colle ça parce que ça regroupe de façon assez construite l'essentiel.
J'espère que c'est pas trop indigeste, et que certains arriveront jusqu'au bout.
Je le mets pas ça spoiler parce que ça serait trop difficile à lire.
Merci à ceux qui prendront la peine de me répondre ^^
En apparence The Host n’est qu’un film de gros monstre comme on en a tant vu. Avec un synopsis à la Godzilla : Un méchant monstre apparaît dans l’eau, et commence à tuer tout le monde, d’où une nécessaire intervention armée pour l’arrêter.
Le fameux Bong Joon-ho arrivera cependant à faire de cette aventure sans grande originalité un moment vraiment agréable grâce au total décalage burlesque exercé par les diverses protagonistes (principalement la famille du héros). Si les détails du film vous intéressent aller voir Wikipedia parce que c’est un peu long à résumer (ou regarder le). Sachez cependant qu’hormis le contenu premier de l’œuvre (un gros monstre qui tue des gens), une deuxième lecture conduit à voir le film avec un regard plus géopolitique : comme une critique de l’occupation militaire des américains en Corée du Sud (qui supervisent de manière assez imparfaite, pour ne pas dire catastrophique les opérations visant à l’élimination du monstre).
Selon moi, et c’est tout ce qui fait l’intérêt de ce film, il y aurait un troisième regard à adopter sur cette réalisation cinématographique. J’ai vainement cherché un quelconque appui à mon interprétation sur la toile, dans les bonus-tracks du dvd, mais rien. Tant pis je me lance dans ma folie: en réalité ce monstre serait un symbole de la femme. Quel rapport ? J’y viens.
Dans la famille centrale du film, on note dès les premières scènes l’absence majeure et bizarrement non-questionnée de la Femme dans le couple: à la fois pour le grand-père, mais aussi pour son fils «Park Gang-du» (le héros du film) qui sont tous les deux seuls pour s’occuper et élever « Hyun-seo »(fille du héros).
Etrangement le monstre au lieu de dévorer simplement Hyun-seo, comme elle l’a fait pour une vingtaine d’autre personne auparavant, va seulement l’enlever des mains de son père pour l’amener à l’écart de sa famille.
Par la suite la fille sera séquestrée pendant presque toute la durée du film dans une sorte de grotte sombre et humide. Difficile de ne pas penser aux 9 mois de la grossesse et à un utérus. Le monstre s’est totalement réapproprié sa fille.
L’attitude de cet être féminin est très ambiguë quant à son enfant. On a l’impression qu’elle la protège dans un premier temps, mais en réalité c’est plus l’expression de sa domination et de son désir de possession sans limites qui s’expriment à travers son comportement.
Dans une des scènes les plus réussie du film, on voit la gamine qui se retrouve face à face avec sa mère dans la grotte (serait-ce un clin d’œil à l’adage latin «tota mulier in utero » ? ; = la femme toute entière comprise dans son utérus, qui renvoie à la fonction qu’est censée assurer la Femme dans une société androcentrée).
Toute la complexité de la relation est mise à exergue par la tension et l’immobilisme oppressant de cette scène, le monstre ne l’attaque pas immédiatement, attendant de voir quelle sera la réaction de sa fille, et ce n’est que lorsque la gamine va tenter de s’enfuir que va se déchainer la colère maternelle.
En effet, la mère ne supporte pas cet abandon, et puisqu’elle ne peut plus garder son enfant, en définitive elle va se décider à la tuer.
Notons que le titre du film renvoie à cette relation si particulière. « The Host » signifie l’hôte, c’est-à-dire celui qui reçoit, mais aussi celui qui est reçu : La Mère/l’enfant.
D’autres éléments plus symboliques renvoient à cette confusion Monstre/Femme. Premièrement par la simple forme physique de la bête, c’est d’ailleurs par cet élément que mon cerveau malade a débuté son « analyse »: ce monstre a une gueule très proche de la forme du sexe d’une femme (plusieurs rangées de lèvres, un trou béant, la viscosité…). A ceci prêt qu’il y a peut-être un peu plus de crocs, mais sinon ça me semble sauter aux yeux et assez difficile à contester.
Un attribut physique qui m’a un peu perturbé, c’est la forme relativement phallique du corps de la bête (la langue, la queue, les tentacules...).
Je pensais que ceci venait contredire « ma théorie », mais en réalité cela la renforce encore plus. Cette femme n’en est pas vraiment une, puisqu’elle ne répond pas au rôle qui lui est assigné par la société : en réalité c’est une femme qui veut être un Homme, ou son égal. Une femme qui veut dominer, et pouvoir s’exprimer par la violence pour obtenir ce à quoi elle estime avoir pleinement droit : récupérer son enfant. Ainsi c’est une totale hybridation entre un Homme et une Femme sur beaucoup de plan.
En effet, contrairement à la figure traditionnelle de la Femme dans nos sociétés androcentrées, apaisée, douce, calme et surtout soumise à l’homme (aspects que l’on retrouve très marqués dans d’autres films du réalisateur), cette nouvelle femme apparaît comme particulièrement violente, dangereuse, et revendique elle aussi l’exercice du pouvoir de domination : d’où la panique, la terreur que ce monstre suscite en apparaissant, et la réaction particulièrement hostile de la société à son égard.
Les deux grands ordres classiques de la société vont concourir à l’élimination de ce monstre. La réponse de la société vient à la fois d’en haut, de l’Etat, par la mise-en-œuvre de diverses éléments plus ou moins institutionnalisés -que sont l’armée, les médecins, les politiques, les médias- ; mais aussi par le bas, de façon plus directe par la Famille, maillon premier et socle de toute organisation humaine.
Au final, l’ordre familial mettra à mort ce monstre sociétale qui va à l’encontre de toutes les valeurs traditionnelles.
Une fois qu’elle l’aura retrouvé, la famille du héros commencera par brûler ce monstre (comme on le faisait dans le temps pour les sorcières, autre figure non-conventionnelle de la femme insoumise).
Et une fois bien affaibli, le héros dans une scène dantesque pénétrera de sa « grosse lance » (qu’il sert de toute ses forces dans sa main droite) le monstre, et l’enfoncera lentement et profondément au niveau de la bouche (donc du sexe) de son ennemi.
S’en suit un écoulement sanguin abondant, et fatal, la femme recrachera/accouchera dans un dernier souffle du cadavre de sa fille morte-née.
Dans une autre scène assez proche symboliquement, on voit la mère vomir l’ensemble des cadavres qu’elle a ingurgité, ceci pourrait renvoyer aux règles, et/ou aux sécrétions(masculines) qui seront « sacrifiées » pour que la Femme puisse donner naissance.
Autre élément assez important dans l’analyse, la genèse de ce monstre : d’où vient-il ? De l’eau, élément par excellence dans quasiment toutes les mythologies rattachées à la figure de la Femme (l’eau, la fontaine, la rivière, la vaisselle et le ménage…).
Et comment exactement est né ce monstre ? Ce sont des scientifiques qui en déversant dans l’eau de nombreux produits toxiques, vont faire muter cet animal marin.
Selon moi ceci souligne de façon assez forte que cette nouvelle figure de la Femme apparaît du fait de l’évolution de notre société, de sa modernisation, qui pousse la Femme à changer, à ne plus être cet être passif et soumis, mais à devenir l’égal de l’Homme.
Ce que je n’arrive pas bien à déterminer c’est la position de l’auteur sur tout ceci (si tant est qu’il ait vraiment voulu signifier ça). Est-ce une condamnation de cette Femme nouvelle (qui prend quand même sacrément cher dans le film), ou bien une critique de la société qui ne lui laisse pas sa place ?
Bref voilà pas mal d’éléments qui vont dans cette hypothèse selon laquelle le monstre de The Host serait une analogie de la femme.
Ca m’étonne assez de n’avoir vu ça nulle part ailleurs, tellement ça m’a semblé évident dès la première vision du film. Sans doute que je dois être un peu détraqué pour avoir vu « une chatte dans the Host » (pour citer un confrère), m’enfin je suis pas le seul à voir du sexe partout, et apparemment ça a même réussi à certains (petite dédicace à Freud).