[Kirin Tor] Décadence

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Chez Bruuk, à Ironforge

Perversion, traumatismes, fêlures de l'enfance...mais que cherchait-il à la fin? Que voulait-il que je lui dise?
Il ne pouvait pas savoir...je ne lui en avais jamais parlé. Il me remémorait les scènes de mon enfance comme si c'était les siennes...non ce n'était pas à moi tout ce que tu me racontais Fumazu, non je ne voulais l'entendre...qui étais-tu chasseur? Que voulais-tu démon?
Je ne voulais pas le retrouver...Azshara...la cascade...je devais partir.


Près de la cascade de Furie-du-Sud, en Azshara

De la fumée...tout était flou mais leurs regards me perçaient...Ayame, Fumazu et Miline...
"Lâche, Traître, Fuyard! Affronte au lieu de fuir!"
Je "le" sentais! "Il" était là! Fumazu l'avait ramené!

"Lâche! Traître! Affronte! Affronte!"
De la brume, des visages inquisiteurs...Miline le gardait bien sagement dans son ventre. "Il" me fixait, "lui" que j'avais abandonné dans son ventre pour rejoindre un puits sans fond. "Il" était affreusement attirant, seul vestige de mes sensations oubliés, ce moi-même que j'avais détesté.

Embrasse-moi de tout ton être Loerys.
J'avais besoin de lui...mon essence maudite. J'étais Loerys Ombrelune, Loerys l'Errant, Ombrelune le Maudit. Je ne pouvais vivre sans nom... tout ces efforts pour "le" détruire...tout ces efforts pour me détruire...
"Traître!"
De l'alcool...pour le courage...ou pour la folie. Bordel! Vous voulez que je cesse de fuir, très bien!
J'embrassais Miline de toutes mes forces, je devais "l"arracher de son ventre, "il" était à moi, "il" était moi et personne d'autre!
"Il" était moche. "Il" voulait ma perte. "Il" me méprisait. Mais on ne peut renier soi-même...je devais combler mon manque par cet essence maudite ou sombrer dans le néant...

Une bouffée d'énergie s'infiltrait avec violence dans chaque membre de mon corps...tout ces vieux souvenirs ternes avaient une couleur maintenant...ce monde qui me semblait vide exhalait sa véritable odeur...celle de la merde.
Mon organisme ne supporta pas ces joyeuses retrouvailles; je m'écroulais au sol.


Un îlot, près de Ménéthil.

Là est le point de départ de notre chute...
Ce lieu...

Ouvrir ton coeur et aspirer tout ce qu'il y avait dedans. Je l'ai toujours haï car je savais qu'il ferait notre perte. Mensonge et cruauté.
Il n'y avait pas d'anges, que des vampires.

Des pilleurs, des voleurs. Tout prendre sans rien donner. Puis abandonner quand il n'y a plus rien à voler. Ils t'abandonnent tous, n'est ce pas Loerys?
Kylhi partait...Kerandhil aussi...Asline allait le faire...l'Apatride avait disparu...

Egoïste. Voilà la clé. Prendre et ne rien donner. Et surtout ne croire en personne.
Ce monde était pourri. Personne n'était digne de respect, ni soi-même, ni les autres. Je me détestais. J'execrais les autres.

Les dieux ne sont que du vent. Leur existence repose sur le désespoir d'autrui. Plus de foi, plus de Dieu. Ils t'abandonneront tôt ou tard.
Je ne supportais plus cette traînée argentée qui trônait au dessus de ma tête. Elle n'était qu'une sombre catin, créée par des fous en manque d'amour.

J'ai besoin de sang, de colère, de fureur...embrasse les enfers, sombre dans la haine...c'est l'unique voie possible.
L'amour n'apportait que des déceptions...la haine engendrait la haine. Elle seule est éternelle.

Ne reste pas ici, il n'y a personne qui te trouvera. Tu vivras seul et tu crèveras seul. Comme ton père.
Espoir...non, il n'y avait pas de rédemption possible. Des mensonges séduisants, des illusions dans lesquels j'aimais me complaire. La réalité était bien là.

Tu es seul...avec moi-même.
Je quittais cet îlot. Il n'y avait rien pour moi ici.


Près du lac, à Reflet-de-Lune

Des fils emmêlés...cet endroit était compliqué. Une fuite, une mort, une main me guidant vers les eaux...des mots qui m'avaient englouti. Je n'arrivais pas bien à saisir la couleur de cette place...

Ces souvenirs ne sont pas à nous...nous devons lui rendre. Ils te rendront faibles.
C'était aussi compliqué pour moi, que ce l'était pour toi Ayame...mais tout cela n'avait aucune issue. Car j'étais sans issue. T'entraîner dans ma chute...

Une égoïste, une spectatrice qui se complaît à observer les souffrances des autres sans intervenir. Utilise-là ou abandonne-là.
Je me détestais...
Je ne sais plus ni rien, ni quoi...
Je ne sais plus que croire, moi qui prône tant la foi.


C'est sous le regard de la lune que je me retrouve à nouveau, encore et toujours Elle.
J'ai toujours voulue observer comme Elle le faisait de son unique oeil cristallin.
Spectatrice de tout, veilleuse de tout et de tous..tout, Elle était tout.
Immortelle..L'était-elle ? La nuit et sa Reine sont pourtant bien éphémères, un passage fugace, mais toujours un retour.
Un donné pour un rendu. Un donné et un retour...
Elle est belle, mais Elle est cruelle, voila pourquoi Elle se plaît à être passagère de nos regards.
C'est quand une chose nous échappe, qu'on se rend véritablement compte de son importance; et Elle nous le démontre ainsi, à nos dépends, nous fervents Enfant qui nous languissons d'Elle tout le jour durant.
Mais malgré tout, bien que l'astre d'argent ne soit qu'un défilé succinct, il est éternel. Car le temps ne l'atteint pas, bref peut être, mais impérissable...à jamais.

Le brasier ne me réchauffe plus, je n'ai pas vraiment allumé ce feu car la nuit se fait froide, non ..j'avais juste besoin de voir les Ombres dansaient.
Les flammes s'animent et sous mon regard émerveillé, elles commencent leur sarabande sur une mélodie qui semble endiablé mais pourtant inaudible.
Parfois leur rougeoiement vient lécher mes pieds nus, que je recule d'un mouvement brusque, fuyant par habitude la lumière pour me réfugier dans ma pénombre.

Un léger bruit derrière moi, quelqu'un est là...
J'aurai pu empoigner l'une de mes armes, posée méticuleusement à mes côtés.
J'aurai pu proférer des insultes à l'approche de l'intrus, ou même partir...
Mais je reste là, recroquevillée sur moi même, les genoux contre ma poitrine, contemplant toujours ce feu infatigable malgré le vent qui se lève, et qui vient parfois menacer de l'éteindre.
Je ne fais pas un geste, car je sais qu'il est là, et lui sait que je l'attends.

-Le bonsoir Fille de la nuit.

-Bonsoir, aïeul


Je quitte enfin les flammes du regard, pour poser mes yeux sur la silhouette qui se révèle petit à petit sous les lueurs diffuses du brasier.
Et je souris à le voir prendre place lui aussi près de la chaleur du foyer, je souris de sa lenteur et de ses gestes précis.
D'abord il époussette sa robe sombre, pour en retirer quelques plis, puis il dépose son bâton de marche -dont il n'a pas vraiment besoin d'ailleurs...- au sol, avant de le faire tourner, avec l'indolence qui lui propre, dans les escarbilles afin d'en raffermir le bout.
Il a un visage émacié, et les joues creusent, ce qui lui donne un petit air austère de prime abord, mais lorsqu'il vous dévisage, on aperçoit son regard rieur, presque insolent.
Ses yeux sont d'acier, d'un gris profond..sans fond, qui lorsqu'on les croisent nous donnent cette désagréable sensation de s'infiltrer en nos esprits, s'insinuant avec audace dans nos songes les plus précieux.
Et je reste persuadée, que lorsqu'il me regarde ainsi, il découvre mes torpeurs et mes chimères les plus intimes...
J'essais de lui donner un âge, mais en vain, j'ai beau détailler, insister, rien ne me met sur la voie.
Il n'a pas d'âge, et il n'a pas de nom non plus. A quoi bon ? Il n'en a pas besoin.
C'est un de ces êtres de légendes, ceux qui se plaisent à apparaître là où naissent les histoires, l'un de ses vieux sages qui s'attarde parfois sur les néophytes pour leur conter quelques anecdotes, l'un de ces hommes que l'on n'appelle pas car ils viennent quand bon leur semblent.
Oui il est tout ça, témoin, conteur, veilleur...
Il me sourit à son tour, et ce n'est qu'a cet instant que je me rends compte que je l'observe ainsi depuis de long moment.
Je dodeline de la tête, gênée, troublée..Que sais-je ?

-Qu'es tu venu me dire ?

-Que veux tu entendre ?


Je grimace, et lui se met à rire, car il sait. Il sait que ces vieux érudits qui répondent à une question par une autre, ont tendance à m'agacer.

-Alors écoute, petite fille..écoute l'histoire d'un fou.

Il s'appelait Rénan, c'était un vieil archer, qui dans sa jeunesse était respecté par son habilité et ses talents. Mais le temps fit son oeuvre, et Rénan ne pouvait à présent tenir son arc sans que son bras tremble, que ses doigts glissent, et que ses yeux ne distinguent plus la cible.
Alors il choisit de finir sa vie paisiblement, et fit construire une cabane aux milieux des bois, qu'il avait tant arpenté durant des années de chasses.
On lui a bien dit de prendre garde en s'installant dans cette foret sauvage, on lui dit aussi qu'il risquait de ne plus voir le jour en s'endormant sur son lit s'il laissé la porte ouverte, ou une fenêtre mal fermée.
Mais rien n'y fait, il était décidé à s'établir dans cet environnement qu'il aimé tant.
Il vécu ainsi plusieurs lunaisons, toujours sur ses gardes, car jamais, même avec l'accoutumance, sa méfiance ne sait affaiblit.
Lui, plus que personne, connaissait les dangers de la nature, il l'avait traqué, maudit, adulé.
Et un soir, alors qu'il se décidait a avaler son habituel repas frugal, il se rendit compte que l'écuelle aurait bien du mal a chauffé, car sa réserve de bois était vide.
Et bien que l'heure fut tardive, il prit sa hache sous le bras, et sortit coupé quelques branchages non loin.
Alors qui s'afférait à sa tache, un grognement plaintif le fit sursauter. Il ne bougeât plus, et pestait intérieur de s'être cru un instant seul habitant de cette foret.
Il ne vit que des yeux lumineux, car la bête n'approcha pas, mais il savait reconnaître le hurlement d'un loup.
Quand l'animal sembla s'en aller, il rentra en toute hâte chez lui.
Les nuits passèrent, et tout les soirs à présent, il entendait ce même hurlement s'approcher dangereusement de son établissement de fortune.
Puis vint la décision du chasseur "affronter ce qui doit être", résigné de répondre au duel du loup, il laissa sa porte ouverte.
Et le loup arriva, mais ce ne fut pas la plus grande stupeur de Rénan, non ce qui le surprit, c'est de voir l'animal se coucher de lui même, c'est de voir l'animal revenir chaque soirs, presque apprivoisé, réclamant parfois un morceau de la pitance de Rénan, ou même une caresse.
Puis petit à petit, comme l'homme donnait, le loup voulut donner également.
Rénan était vieux, et ses jambes ne le menaient plus là où il aurait voulu voyager, alors par on ne sait qu'elle magie, le loup décida de lui offrir ses yeux, ses sensations, et ses souvenirs...
Lorsque Rénan s'engouffrait dans le sommeil, il continuait de vivre à travers les yeux de l'animal, il vivait les chasses, il voyait la meute, il voyait la foret , plus grande qu'il ne l'avait découvert de son regard d'homme.
Le loup lui montrait la nuit, le loup lui montrait la vie nocturne et sauvage, et Rénan attendait le sommeil avec impatiente. Heureux de ce sortilège, ce don, sans chercher à savoir comment était-ce possible.
Un nouveau soir ou Rénan rejoignit Morphée sans se faire prier, ce soir le loup l'emmena dans une grande escapade...différente de celle qu'il avait vue ..vécut jusque là, car cette fois l'animal s'approcha du village où Rénan habitait avant, les ruelles étaient lugubres et sombres, le village dormait...pas tout à fait.
Une lueur, celle d'une chandelle qui se consumait encore, sans que personne ne s'en soucis. Le loup s'avança vers l'unique point de lumière du village, la fenêtre de la maisonnée était ouverte, et l'animal s'y invita avec assurance.
Il vit à travers les yeux du loup, le corps d'une femme qui se dessinait sous les draps de lin épais. Il pouvait presque sentir la fragrance du parfum qui embaumait la pièce.
Il pouvait presque prévoir le bond de l'animal sur le lit, il pouvait presque entendre le cri effroyable et apeuré de la jeune femme qui s'étouffa soudainement quand les crocs du loup lui tranchèrent la gorge. Il l'avait reconnut, même si son visage était défiguré par la terreur, il avait reconnue Anaëlle, cette femme qu'il avait repoussé "pas d'attaches" lui avait-il dit à l'époque, il ne voulait pas l'entraîner dans sa vie dangereuse et trépidante de chasseur, il avait refusé la famille.

Il se réveilla en sursaut le lendemain, son souffle était court, comme essoufflé d'une cavalcade effrénée, ses mains étaient moites et tachées de rouges...




L'aïeul se tait subitement, et me regarde, comme pour affirmer que son histoire était finie.

-Et bien ?

-Et bien quoi ?

-Pas de morale ? Pas de conclusion ? Pas de sermons philosophique ou de raisonnement insipide ?

-Te faut-il une raison à toute chose, Ayame ? Je te contais seulement une histoire.

-Il y a beaucoup de choses faites par déraison

-Exact. Le vent se lève...

-Et tu t'en vas avec lui, je sais, Aïeul, je sais...Le loup est revenu voir Rénan après cette nuit tragique ?

-Quel loup ?

-Et bien celui qui accordait ses yeux, ses sensations, et ses souvenirs à Rénan

-Il n'y a jamais eu de loup, petite fille...


Je le regarde partir bouche bée, je ne comprenais pas...ou plutôt je ne voulais comprendre...
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