Une auberge, le soir, dans une forêt enneigée...

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L'obscurité empêchait de distinguer cet homme dans l'auberge peu éclairée du Grand Cerf en ce milieu de nuit,
assis sur une chaise qui ne semblait devoir son équilibre qu'à la dextérité de celui qu'elle portait.
Les pieds croisés sur la table il se balançait, sirotant mollement cette liqueur de genièvre si typique des régions froides, tout en jonglant machinalement avec une petite lame d'argent, il semblait à la fois anxieux et impatient.
La chaleur du lieu, née de chants paillards, de fiévreux alcooliques et d'une magistrale cheminée, contrastait avec le froid glacial du dehors en ces hauteurs de Mahagra.
Personne, hormis ce gnome de tavernier lorsqu'il l'avait servi,n'avait réellement remarqué ce mystérieux bougre, la taverne comme à l'accoutumé débordait de gens avides d'euphorie en ces temps troublés mais les beuveries ne laissaient pas de place pour l'observation attentive des recoins du lieux.
C'est alors qu'un homme barbu de grande stature ouvrit la porte, laissant s'échapper un courant d'air glacé prompt à éteindre la faible bougie qui trônait sur la table à côté du verre de liqueur.
Tout en se précipitant au bar, il beuglait d'effroi et d'excitement d'incompréhensibles paroles jusqu'à ce qu'il s'asseye sur une chaise pour reprendre ses esprits, en face d'une chope de bière il déclara de sa vive voix grâce :
"- Ces foutus morts-vivant ! Ahhh vla ti pas qu'y s'mettent à nous rendrle serlvice !"
L'assemblée étonnée l'interrogeait de toutes parts :
"- Comment, que s'est il passé pour que tu puisses proclamer ça, en plus regarde toi, tu trembles !
On ne sait dire si c'est d'effroi ou de joie !"
"- un fierl'service j'vous dit : alors qu'euj rentrlait chez moua rlanger l'bois qu'javais coupé, j'entendu l'crlis d'une donzelle, bensûr vous m'connaisez core' ben vous aut', j'prends m'hache et jem'rue vers l'endroit d'ou c'est qu'les cris v'nait.
Vous d'vinerez jamais c'qu'c'était !
L'sorcière, l'sorciere j'vous dit !! C'te demone etait en proie 'vec ses créatures qui sont de l'mêm' bois !
Ahhhh c'les apprendra s'installer chez les brlaves gens puis d'y fair' leurs diableries à ces foutus déchus !"

A ce mot l'homme discret laissa tomber son verre de genièvre sur le sol et lança son couteau. En mêmes temps, le verre s'écrasait par terre et la dague venait percuter la tunique du bûcheron pour le clouer au bar.
L'homme d'un seul bond arriva à hauteur de l'assemblée pour laisser la lumière pénétrer son visage et révéler son identité : sa peau azure, ses traits magnifiquement cruels et les cornes qui pointaient de son crâne ne pouvait faire de lui rien d'autre qu'un déchu !
L'assemblée en proie à la peur prenait déjà pour acquise la mort du bûcheron, qui malgré sa solide carrure ne pouvait faire le poidss face à ce suppôt de la déesse Moraven, ils craignaient alors tous pour leurs propres vies, depuis toujours la crainte et la haine de cette race avait été entretenue en cet hameau reculé et peu passant.
Le déchu renversa facilement ces 200 livres de muscle pour empoigner l'homme et lui dire frénétiquement :
"-Où ! Où, immonde porc as-tu vu la scène ! Réponds ! réponds ou je ne saurai retenir ma rage !"
Le bûcheron, sonné et apeuré répondit alors d'une voix sèche, le souffle coupé :
"- .... A 3 lieux Sirle,en suivant la rloute ed' l' est... prles de l'hutte de l'sor.... gloup..."
Il n'avait pas fini sa phrase que le déchu l'avait relaché violemment et sortait avec précipitation de la taverne,
courant jusqu'à l'épuisement dans la direction qu'on lui avait indiqué...
... hélas il arrivait trop tard, le corps de son amie gisait sur le sol, sa faible constitution de druide lui avait interdit de soutenir l'assaut répète des dizaines de morts vivants venus chercher chez elle la satisfaction de voir périr bonne âme...
Malgré son visage tuméfié et ses os brisés, une aura fascinante de beauté émanait toujours d'elle, le déchu pleurait sa mort, ne pouvant contenir les cris de vengeance qui risquaient de faire revenir les meurtriers.
Mais rien ne se passait, comme si la mort avait d'autres projets pour cet amant anéanti, comme si celle-ci préférait le voir souffrir longtemps plutôt que de faire cesser violemment son désarroi.

Il se releva alors, ferma les yeux de sa compagne et la blottît contre son torse... il reprit le chemin, insensible à l'épais brouillard et au poid du corps raide de sa mie, les yeux humides perdus dans le vague lointain des lanternes de l'auberge.
Comme il entrait dans l'édifice, l'alcool euphorisante qu'avaient absorbé les gens ne pouvait contenir l'émotion de la scène d'un homme meurtri par cette mort soudaine.
La honte les étouffait, personne ne sachant réellement que faire, comment se racheter... mais il n'y avait plus rien à faire, plus d'échappatoire face à la mort, la cruauté était en fait du côté de ceux qui la dénonçaient...
Alors que le déchu montait l'escalier vers sa couche, sans adresser un regard à l'assemblée, le bûcheron s'élança en sa direction et s'agenouillant lui déclara :
"- Prlends pitié de moi l'inconnu, l'homme appeurlé a besoin de caution pour ne pas passer pour pleutrle, je ne pensais pas vain mot de c'que j'ai dit sur c'te prlotectrlice de la forêt qu'etait ta femme... forlcement qu'ces histoirles de drluides plaisaient pas beaucoup au pays des bucherlons mais pas de là à ..."
Le déchu par un mouvement de tête illustrant le caractère vain de ces explications continua sa marche, renvoyant alors cet homme vers sa lâche culpabilité.

Au dehors on entendait les hurlements des loups, le croassement des corbeaux et des corneilles. Les furets, les rats, les souriceaux étaient perceptibles sur la charpente de la taverne, les araignées et les papillons grouillaient avec une autre multitude de petites bêtes. Le regard du gnome fut attiré par la fenêtre, la forêt alentour semblait avoir changé, comme emplie de haine, comme si son côté sombre, longtemps contenu, pouvait aujourd'hui reprendre le dessus par la chute d'un enchantement.
En vérité, les gens comprenaient bien que les esprits de la forêt, apaisés autrefois par la venue de la déchue étaient aujourd'hui furieux de ce qui venait d'arriver.
De tristes jours se profilaient en cet endroit, hier encore futile et bruyant, il etait devenu à jamais solennel.

Une nuit passa, l'assemblée veillait dans l'auberge le retour du déchu, comme illusoire moyen de racheter la longue ingratitude envers celle qui fut leur discrète et insoupçonnée protectrice .
Le moment arriva ou il descendit enfin l'escalier, vêtu d'une solide armure de plaques qui lui donnait un aspect beaucoup plus noble que la veille, il partit sans dire un mot.

Tout le monde restait silencieux, tiraillé entre peur et honte.

Alors que le déchu s'était déjà avancé d'une bonne mesure sur le chemin brumeux, le tarvenier sortit et s'écria comme pour se donner bonne conscience :
A Tazoon, a Tazoon j'ai entendu parler d'hommes qui pourraient soulager ta peine, comme toi ils ont vécu la disparition de proches à cause de cette engeance dépourvue de vie, on appelle leur mouvement Sacrificium !

Sacrificium... se nom résonnait dans la tête du déchu, il en avait déjà entendu parler à plusieurs reprises dans ses aventures passées, de toute façon, il venait de perdre tout ce que sa vie solitaire de guerrier lui avait permis de garder, un vague foyer, un amour isolé. La-bas ou ailleurs... il devait partir pour ne pas devenir fou...



(Voila, j'espère que vous aurez apprécié le début de l'histoire de mon futur personnage, vous en apprendrez un peu plus sur ce dechu énigmatique à travers d'autres récits de son passé.
Merci de m'avoir lu )
Thumbs up
Je vote pour !!!

Bravo !!!! ( même si c'est un encouragement un peu tardif

j'ai découvert Horizons depuis 2 semaines slt )

Pourvu qu'il y ait d'autres histoires passionnantes comme celle

ci pour donner une âme à nos tas de pixels sur l'écran
Citation :
Pourvu qu'il y ait d'autres histoires passionnantes comme celle
Tu peux jeter un oeil au thread d'archive des histoires en rapport avec Horizons, il y en a des dizaines.

De plus il y a sur le site Jol-HZ les fictions qui sont des histoires de personnages évoluant dans Horizons.

Et enfin sur ce forum tu peux sélectionner en bas : "afficher les messages depuis le début" pour avoir la liste de tous les messages écrits depuis la création de ce forum ( soit des milliers).



Merci pour vos sympathiques remarques
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