Albion - Nouvelle âme chez la Blanche Hermine

 
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Mon prénom est Amarhante, je suis née dans une bourgade près de Camelot nommée Humberton. Mon père était officier dans la garde royale. Ma mère, douce créature était avalonnaise. J’étais leur seule enfant.
Au grand désarroi de mon père, j’étais une fille, il aurait voulu comme tout homme qui se respecte avoir un fils. La nature en décida autrement.
Ma mère qui elle souhaitait avoir une fille à son image fut bien déçue quant les années passèrent.
Petite fille intrépide, farouche avec une tignasse rousse, rien dans mon physique ne rappelait ses traits fins, sa peau délicate.
A bout de patience, ma mère me laissa au soin de la femme du tavernier qui venait souvent apporter à la demeure familiale des vivres.
C’est ainsi que j’entrais dans un autre monde ! Du haut de mes 8 années, je découvris une nouvelle vie. Adieu l’odeur de lys de mère, des bains parfumés à l’eau de rose !! Bonjour à l’odeur de la graisse, de l’alcool !!
La taverne était mon chez moi à présent. Mes parents tout de même pour avoir bonne conscience versaient chaque quinzaine un tribu pour mes besoins. Blanche, la femme du tavernier, était une femme économe, elle mit cet argent de côté à l’abri du regard de son mari.
Elle me laissa grandir comme de la mauvaise herbe. Je gambadais tant que je le souhaitais dans les collines verdoyantes. Je me lavais au ruisseau quand l’odeur devenait insupportable.
Je n’avais aucune idée de ce que pouvait-être une règle.
J’apprenais tout dans cette taverne, je passais des heures entière à regarder, à écouter les gens qui y venaient. J’apprenais tous les mots et les jurons, j’avais un faible pour ces derniers. Ralala !! Qu’est-ce que j’ai pu en débiter !! Blanche ne me disait rien, elle m’interdisait rien, aucune réprimande ! Je n’étais pas une mauvaise petite, je voulais l’imiter en tout, elle m’apprit la cuisine, à servir, à devenir utile dans cette maisonnée.
Les années passaient très vite à son côté, elle était toujours auprès de moi. Elle m’aimait à sa manière, jamais de cajolerie, je n’en demandais pas. Chaque fois que je n’arrivais pas à faire quelque chose qu’elle me demandait, je le refaisais ! Je ne m’avouais jamais vaincu, j’étais déterminée à réussir, à vaincre.
Les années passaient paisiblement, et alors que j’étais âgée d’une douzaine année, un soir d’hiver, des gardes ont défoncé la porte. Blanche et moi-même étions entrain de nettoyer de la vaisselle. Un homme de haute carrure s’avança et l’interpella en lui demanda où était son mari.
Elle lui fit signe qu’il était à l’étage. Des hommes montèrent, et on entendu le corps du tavernier roulait dans les escalier. Il arriva à terre comme un gros sac de farine.
L’homme le toisa de toute sa hauteur avec un sourire méprisant il lui demanda :
- C’est bien à toi la barque rouge ? !
Le tavernier répondit faiblement un oui.
Un des gardes lui envoya un coup de pied dans le flanc gauche. J’aurai voulu gifler ce gredin, Blanche me retint. Le sergent s’impatienta en tapant du point sur le comptoir.
- Tu veux taire aux tiens tes agissements ? Peut-être que les deux femmes sont au courant ?
- Non, elles ne savent rien sir, je vous jure !
- Bien alors, elle est bien à toi cette barque, nous avons fait une ronde cette nuit et qu’avons-nous vu ? Des hommes qui embarquaient de la marchandise sur ta barque !! Et quoi comme marchandise ? Des bouteilles !! L’église l’interdit !! Tu le sais n’est-ce pas ?
- Oui, sir !
Le même garde lui remit un coup dans les entrailles. Le tavernier cracha du sang.
L’homme fit signe aux gardes de l’emmener. Il posa sur nous son regard de rapace :
- Préparez vos affaires, demain vous serez dehors !
Il partit.

Blanche avait le visage défait, des larmes de rage coulaient sur ses joues rondes. J’étais en colère sans vraiment comprendre l’acte qu’avait pu accomplir son mari.

- Quel imbécile il a été !! Je lui avais dit que cela devenait dangereux !!
- Quoi donc ?
- Bah, petite ! Il faisait du marché au noir. Il vendait du tord boyau à d’autres tavernier dans la région à moitié prix.
- Pourquoi ?
- Pour ramener des sous, mon mari est idiot ! Il s’est mis à dos l’église en plus !! Pauvre de moi.
C’était la première fois de ma vie que je voyais une femme pleurait et surtout Banche. Je comprenais sa rage et son angoisse. Qu’allions-nous devenir ?
Elle se redressa et me prit la main, nous montâmes à l’étage. Nous entrâmes dans sa chambre, simple pièce, elle avait un lit de mauvaise facture et un grand coffre de bois de chêne. Elle me planta à l’entrée. Elle ouvra le coffre et jeta par-dessus sa tête trois besaces et des vêtements.
Elle m’invita à m’asseoir, je pris place sur le lit. Elle se baissa et extirpa de dessous le lit une petite boite de bois. Elle me la tendit, je la pris et l’ouvris. Mes yeux s’agrandirent quand je vis des pièces d’or s’emmêlaient à d’autres en argent. Je l’interrogeais du regard.
- Tu vois tes parents quand ils t’ont laissé à ma charge, ils me donnaient des sous pour toi, et je les ai gardé et à présent, ils sont tiens petite.
- Tu veux que j’en fasse quoi ?
- Tu dois aller ailleurs maintenant, j’ai plus de logis pour moi et non plus pour toi, petite.
- Mais tu veux que j’ailles où sans toi Blanche, je connais personne que toi ici. Et mes parents ne sont pas intéressés par mon sort.
- C’est malheureux, tu es une brave petite…
Je réfléchissais à la tournure des évènements, tout se chamboulait dans ma cervelle de simplette.
- On pourrait se servir de mes sous pour repartir à zéro Blanche ?
Un sourire triste aux lèvres
- Je suis plus jeune, petite pour qu’on me prenne dans une auberge, et encore moins comme catin, tu as vu mon tour de taille et mes rides ?
Je ne pus réprimer un sourire en imaginant Blanche en fille de joie peinturlurer.
- Je peux travailler moi ! Je suis forte !! Et tu m’as appris à cuisiner !!
- Tu es fille d’un officier, tu n’as rien à faire dans une cuisine et si quelqu’un connaissait ton père !
- Tu m’as bien élevée ici, et je n’ai jamais été reconnu par la populace. Et je préfère être une cuisinière qu’une gourgandine en dentelle !
- Tu pourrais rejoindre tes parents, et tu aurais de l’instruction…
Je serrais les poings en imaginant la situation. Ils m’avaient abandonnée, j’avais ma fierté !
- Hors de question Blanche !
- D’accord petite. Bon, réfléchissons un peu…
- Je ne veux pas les voir, les connaître Blanche !
- J’ai compris petite, on restera ensemble promis.
- Merci. Et pour ton mari ?
- Lui, on ira demain pour entendre la sentence mais à mon avis, il va payer cher cet affront qu’il a eu envers l’église.
Elle prépara nos affaires tandis que je comptais l’argent. J’avais pris à compter avec Blanche, j’avais été vite dans cet apprentissage. Elle n’en revenait pas. C’est ainsi que j’encaissais l’argent à la taverne, et tous les soirs on faisait les comptes toutes les deux.
Je comptais 400 pièces d’or et 50 pièces d’argent.
- Tu entends on est riche Blanche !!
- Non, petite, si on s’installe dans Camelot, l’argent partira vite
- Il faudra que je trouve très vite du travail alors et toi tu nous trouveras un lieu pour dormir.
- Oui, c’est bien décidé.
Elle fit le tour de la pièce en y prenant ses effets personnels. Je fis de même en me rendant dans la petite mansarde où était mon lit et un petit coffre. J’avais des braies propres dont je me vêtis et mis dans ma besace un caillou, un mouchoir de dentelle que j’avais trouvé au bord de la rivière, un peigne d’ivoire que ma mère avait eu l’idée saugrenue de me laisser. Tout était prêt à notre départ. Blanche avait cousu dans ses jupons des parties pour y loger les pièces de notre fortune.
Blanche et moi descendîmes le pas lourd, elle me prît la main pour se donner la force de quitter notre chez nous. J’avais le c½ur léger pour ma part de quitter ce lieu et l’envie d’en découvrir un autre était plus fort que tout.


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Nouveau départ (partie une)
Nous arrivâmes à Camelot tard dans la nuit. Je n’y avais jamais franchie les murs. Le pont-Levi était abaissé et des gardes surveillaient les entrées et les sorties. Nous avançâmes fièrement la tête haute. Le soldat nous héla :
- Hé, vous deux, halte-là ! Vous allez où ?
Blanche fit une révérence maladroite.
- Sir, nous allons dans Camelot la belle pour y trouver fortune.
Le garde ricana.
- Tu crois qu’avec ton embonpoint la vieille, tu vas faire fortune ?
Il me regarda de bas en haut.
- Ah ! Ah ! Je sais tu vas faire mère maquerelle !! Tu vas vendre ta fille !!
Je le regardais à mon tour avec un air de défi.
- Non, sir. Nous venons offrir nos services de cuisinière.
- Mais bien sur ! Elle serait mieux appareillée que tu pourrais en obtenir un bon prix ! Avec ses cheveux roux, et son regard farouche, elle a l’air d’une sauvageonne la petiote !
Je lui aurai bien décocher un poing dans sa figure à cet édenté !
Blanche lui remit une pièce d’or et murmura :
- Allez mon bon sir, soyez aimable, je me fais vieille et j’aimerai me reposer.
L’homme prit la pièce avec convoitise et un sourire narquois lança à son compagnon :
- Tu peux les laisser entrer Robert !
La porte s’ouvrit, mes yeux scrutaient tous les éléments qui s’offraient à moi. Des maisons avec des couleurs vives faites de pierres que je n’avais jamais vu, tout respirait la luxe des lieux. Le vent amenait dans son sillage l’odeur des nourritures rôties, les cheminées allaient bon train, tout me plaisait. Je n’avais rien vu de tel même à Humberton.
Je regardais des fanions qui pendaient à chaque coin des maisons, ils avaient tous un dessin et Blanche m’expliqua que cela représentait un métier. Je trouvais l’idée ingénieuse.
Elle me ramena à la réalité en m’emmenant vers une petite rue, elle me guida devant une taverne qui n’était pas très reluisante, mais où une odeur de pain chaud réveilla mon estomac.
- Là, c’est le Mug, cela n’est pas cher
- D’accord !
Nous pénétrâmes dans la pièce principale, Blanche alla au comptoir demander une chambre et deux couverts. J’en profitais pour jeter un coup d’½il à la salle : il y avait de tout, des filles se pavanaient dans des tenues légères, certaines très jeune étaient assises sur les genoux d’hommes. Je trouvais cet endroit intéressant. Blanche se glaça en me voyant sourire à un tel spectacle.
- Amarhante ! Viens ici ! On va nous montrer notre chambre.
Elle ne m’appelait jamais pas mon prénom, toujours petite pour me parler. Je lui en demanderai le changement dès que nous serions seule.
Le tavernier ressemblait à une grosse bourrique de bière, il en avait l’odeur d’ailleurs et son sourire ne me plaisait guère quand il leva ses yeux sur moi.
La chambre sentait le renfermer, il y avait un lit avec un édredon grisé par la poussière. Une table et un broc, et un grand coffre.
Le tavernier nous demanda de ne pas tarder à descendre pour manger. Blanche le remercia et il prît congés.
- On partira demain matin, petite. Il ne faut pas qu’on traîne ici une nuit de plus. Tu as vu comme il te regarde, il aimerait bien te voir dans son lit et te mettre avec ses « filles ».
- J’avais bien vu Blanche.
- Pressons-nous petite ! J’ai grande faim !

Nous sommes descendues et nous installâmes à une table libre. La pièce principale était bien plus grande que celle de notre taverne. Une cheminée se trouvait dans le fond, des torches étaient accrochées au mur, l’ambiance était à son comble.
Les filles roucoulaient, gloussaient, les hommes soient joués aux dès en criant leur victoire ou leur défaite, soient ils buvaient et hurlaient après les serveuses pour qu’elles viennent de nouveau les servir en resservant leur verre.
Nous commandâmes un potage, du lard et une miche de pain. Je mangeais avec grand appétit ainsi que Blanche. L’estomac bien repu, nous nous rendîmes de nouveau dans la chambre.
Je sortis mes braies les déposant dans le grand coffre et mis ma chemise de nuit, Blanche fit de même. Nous avons secoué le gros édredon, la poussière n’allait pas être un rempart à un sommeil sans rêve.
- Demain, on ira à la prison pour se renseigner du sort de mon homme, petite.
- D’accord, Blanche. Et dis-moi, tout à l’heure, tu m’as appelé Amarhante, pourquoi ?
Blanche se mit à sourire.
- Je t’ai appelé ainsi pour que les gens quand ils nous voient, ils pensent que je suis ta mère et toi ma fille. Et puis, je le suis un peu, hein ?
Je n’avais pas pensé ainsi mais l’idée me réconforta. Je fis un oui de la tête. On s’engouffra dans le lit. Elle souffla sur la chandelle et le sommeil se fit profond.
Nouveau départ (partie 2)
Le champ d’un coq me réveilla, la pièce était inondée de la lumière matinale. J’ouvris les yeux, Blanche était prête, elle me sourit et m’envoya mes braies. Je les saisis et sortis du lit lestement, je m’habillais à la hâte.

- On va prendre un gruau et on s’en va d’ici petite.

On prit nos besaces. Blanche extirpa de son jupon deux pièces d’or. On mangea rapidement et elle paya le tavernier. Il lui demanda pourquoi on ne restait pas plus, elle lui répondit qu’elle souhaitait pas que sa fille devienne une catin. Il ria fort si fort que je dus me retenir pour pas lui décocher à lui aussi un poing dans sa face de poivrot.

On erra de rue en rue pour tenter de trouver une taverne plus décente. On nous indiqua qu’une pension de famille demeurait près de la place du marché. Nous l’avons trouvée, la bâtiment était blanc, rien de prétentieux, il y avait 3 étages.

Blanche tapa à la porte vigoureusement, un jeune garçon nous ouvrit. Il nous fit entré.

Il nous regarda de haut.

- Vous voulez quoi les deux mendiantes ?

- On ne vient pas chercher la charité ! On veut savoir si on aurait besoin de nos services de cuisinière jeune homme !

Il était habillé de vêtements simples mais il était propre et bien coiffé. Il toisa de nouveau Blanche.

- Vu ta puanteur ! Je ne te mettrais pas dans une cuisine ! et…

- Suffit !! Armand !

Une femme d’une grande beauté descendit les escaliers. Elle portait une robe de velours vert, sa démarche était aérienne. Elle avait une longue tresse, des mèches blondes s’en détachaient. C’était la deuxième fois que je voyais une femme aussi belle. Ma mère avait la même grâce, celle des avaloniennes. Elle posa sur le garçon un regard bleu gris, son visage était fin mais sa mâchoire s’était crispée. Le gamin fit une révérence en signe de soumission et la laissa prendre place devant nous. Blanche fit une révérence à son tour pour la saluer.

- Je vous prie d’excuser mon jeune fils, il manque de courtoisie !

- Je ne m’en offusque point madame, vu nos tenues je conçois qu’il ait pu nous prendre pour des mendiantes. Mon prénom est Blanche…

- J’ai entendu que vous étiez cuisinière ?

- Oui, madame, voilà depuis hier, j’ai du fermer boutique. Mon mari a péri face à des voleurs. Et comme il avait beaucoup de dettes, j’ai du fermer ma taverne pour payer les créanciers. Me voilà dehors ainsi que ma fille.

La dame m’adressa un regard pénétrant.

- Je vois, et je serai intéressée par vos services.

Blanche fit une révérence de remerciement et cette fois-ci elle y mit de la grâce. Je sentais en elle, la joie que ces paroles avaient eu sur elle comme pour moi-même.

- J’ai ré-ouvert cette pension il y a peu de temps, je suis veuve moi aussi et grâce à mon oncle, je suis revenue vivre à Camelot pour finir d’éduquer mon fils. L’église a besoin de sang neuf.

Elle me regarda de nouveau avec un sourire laissant apparaître un rang de perles.

- Bien, je vais vous prendre à l'essai Blanche, je vais vous expliquer ce que j’attends de vous lors d’une autre entrevue. Tout d’abord, je voudrai que vous et votre fille vous laviez et vous habillez bien mieux. Je vais dire à ma bonne d’aller quérir ce qu’il vous faut en attendant suivez-moi.

Le jeune Armand nous laissa, mais un rictus sur ses lèvres me dit qu’il était en désaccord avec le choix de sa mère.

La pension était chaleureuse, les tentures aux murs représentaient des scènes de combats où dragons, chevaliers, chevaux se mêlaient. Des chandeliers étaient posés à chaque étage, tout respirait la propreté et le confort. Tout donnait à penser que la dame n’était pas sans fortune. Nous arrivâmes au troisième étage, nous allions au fond d’un couloir et là une petite porte.

- Blanche, vous et votre fille logerez ici. Je vais vous faire monter de l’eau et du savon par un domestique, il y a un bac. Je vous prie de vous frotter, ma maison doit sentir le propre !

- Bien madame.

Elle allait prendre congés, elle se retourna et rajouta :

- Je suis dame Léonie Mac Harcourt.

La pièce n’était pas très grande. Il y avait un grand lit nu, un coffre demeurait au milieu de la pièce près d’un bac en bois vernis. Il y avait une fenêtre qui donnait de la lumière. Quand la porte se fut fermée, Blanche se mit à tournoyer autour de moi, je ne l’avais jamais vu réagir ainsi. Je pris un air faussement contrarié. Elle stoppa net sa parade en m’interrogeant du regard.

- Tu n’es pas contente petite ?

J’éclatais de rire, elle en fit autant. Quelqu’un frappa à la porte. Un homme aussi frêle qu’une branche apportait deux seaux d’eau chaude. Il portait une tunique grise et des chausses assorties. Il libéra l’eau des seaux en la vidant dans le bac. Il se présenta sous le nom de Pierre. Il nous salua en sortant de sa poche un savon. On se mit à rire de nouveau.

C’est bien la première fois que Blanche et moi-même allions prendre un bain !! Et de l’eau chaude avec du savon ! La bonne nous apporta une robe grise et des jupons propres à l’attention de Blanche. Pour moi, elle avait apporté un pourpoint, un pantalon et des chausses. Je la remerciais. Je me sentais bien dans ces vêtements neufs, et cette nouvelle vie.

Blanche descendit une fois prête me laissant, j’en profitais pour dormir un peu en l’attendant.
Adolescence 2
Nous traversâmes l’allée principale, je regardais les bancs de bois rangés en ligne pour les fidèles. Il y avait des bouquets de fleurs un peu partout dans des gros vases prétentieux. L’église était riche, je n’avais pas de doute. L’homme me laissa devant une porte haute.

- C’est là !


- Merci à vous !

Il me laissa. J’entrepris de frapper à la porte mais un domestique en livrée vient m’ouvrir celle-ci. Je fus surprise. Il sourie.

- Entrez demoiselle !

La pièce était décorée richement, il y avait au centre un riche tapis, des bibelots disposaient sur des petites tablettes de marbre. Il y avait une bibliothèque remplie de libres reliés de cuir.

Le domestique m’avança un siège. Je m’assis.

- Père Signasse va arriver.

Quelques minutes passèrent, et une silhouette entra. L’homme était âgé mais sa démarche assurée disait qu’il avait de la vigueur à revendre. Il était habillé de maille. Une épée rangée dans son fourreau l’accompagnait sur sa hanche gauche.

Il me fit signe de me lever, et de le suivre. Derrière un rideau qui souleva, une porte, il l’ouvrit et m’invita à sa suite. La pièce devait être son bureau. Un trônait au milieu avec un grand siège tapissé de velours rouge, il s’y installa. Un siège de bois m’attendait, je m’y mis sans qu’il m’y invite. Il fronça les sourcils.

- Vous n’avez en effet aucune éducation mon enfant.

Je lui fis un joli sourire.

- Et de plus vous êtes impétueuse.

Il était calme.

- Ma nièce veut que je m’occupe de vous. Je pense que vous allez tout d’abord apprendre la politesse ainsi que le savoir-vivre.

Mon sourire s’effaça, mon regard se durcit.

- Je vois que mes paroles ont leur effet. Je pense que vous ne connaissez rien sur notre institution ?

- Non, sir Signasse.

Il sourit.

- Appelez-moi, père Signasse.

Il appuya son dos contre le siège.

- Lèves toi !

Il m’étudia.

- Tu es très grande pour ton âge, ma nièce ne s’était pas trompée. Ta tignasse devra être retenue par un lacet de cuir. Je vais tester ta souplesse à présent. Viens avec moi !

Il se leva et je le suivis.

Il poussa une autre porte, on se retrouva dans une cour. Il y avait des armes rangées sur des présentoirs de bois et des épouvantails en paille contre les murs. Il m’envoya un bâton de bois, je le rattrapais de justesse. Il éclata de rire. Il commençait à m’énerver celui-là ! Il en prit un lui aussi plus grand que le mien. Il ne m’avertit pas quand il bondit vers moi, son bâton me laissa une vive douleur sur mon flanc droit. Je ne dis rien, mais la douleur cognait dans ma tête. J’étais tombée sur les genoux. La tête haute, je me relevais et je lui fonçais dessus avec le mien en avant. Il para mon coup. Je lâchais un juron ! Il se mit à rire de plus belle. Il m’agaça encore plus, au lieu de lui mettre un coup de bâton, je me ruais vers lui, poings en avant. Je lus de la surprise sur son visage, il balaya l’air avec son bâton, je n’en avais cure, je bondis et je lui mis un coup dans la côte. Ma colère était grande ! Une douleur naissante stoppa ma ruée. Mon avant-bras avait heurté sa maille. J’avais tapé sans avoir pensé à la protection de la maille. Il avait accusé le coup, son bâton était tombé à terre et lui se tenait sur ses deux jambes fléchies. Je m’assis sur le sol, je levais ma manche pour regarder les dégâts, ma peau était rougeâtre, j’allais avoir une sacrée aubergine ! Il m’aida à me lever, je refusais son aide. Il pourrait aussi bien recommencer.

- Tu es méfiante, c’est bien. Méfies-toi toujours de l’ennemi.

Je me relevais avec fierté.

- Ta fureur doit être canalisée. Je t’apprendrais. Je suis très impressionné par ta force ! L’arme à deux mains est faite pour toi.

Il était satisfait et pour ma part, je ne l’étais pas !

- Tu seras une arme pour l’église ! Ma nièce a l’½il. J’en remercie Dieu !

Il prit congés de moi et me dit de revenir tous les jours.



Ainsi commença mon apprentissage de Paladin
Adolescence 3
J’appris que le tavernier avait été envoyé travailler dans les mines de Tépok. Il ne survivrait pas. Blanche avait pleuré beaucoup ce soir là. Elle avait tiré un trait sur sa vie passée. J’étais heureuse sincèrement pour elle. Je faisais des efforts surtout pour elle. J’aurai pu fuir ! J’aurai été lâche, on me donnait une chance de réussir, et Blanche m’avait donnée celle-là : devenir Paladin de l’Eglise !

Tous les matins, je partais pour l’entraînement. Le père Signasse était mon professeur d’arme. L’après-midi, j’avais des cours de théologie avec un moine. Nous étions dix élèves à écouter. Le fils de Léonie Mac Harcourt était là aussi. Il aimait passer devant moi avec son air hautain. Les autres élèves, des garçons de bonne famille me toisaient aussi. Une fille n’avait rien à faire ici. On parlait de caste. J’en compris le sens. Je m’en fichais totalement. Léonie Mac Harcourt n’était pas souvent là, elle se reposait sur Blanche pour recevoir les visiteurs. Son fils était sous la tutelle de son oncle en son absence. Il avait un an de moins que moi, et je les dépassais tous déjà, je riais intérieurement.

Un matin d’hiver, Armand participa aux entraînements. Il maniait parfaitement l’épée et donnait du fil à retordre à son vieil oncle avec des coups d’estoc. Je le regardais évoluer fascinée. Son oncle était rusé, et il réussit à le déstabiliser, l’épée tomba à terre. Armand était dépité. Je riais aux éclats envoyant sa tête. Il vint vers moi et l’épée menaçante, je prie la mienne, et cérémonieusement, je le saluais.

Le combat commença. Le père Signasse se mit à l’écart et nous laissa le champ libre.

C’est lui qui tenta la première attaque, je l’esquivais. Il s’avança de nouveau comme un rapace sur sa proie. Je pris appui sur mes deux pieds, Armand leva son épée, nos deux lames se frottèrent l’une contre l’autre, et le bruit du métal résonna dans la cour.

J’évitais sa lame de peu, reculant le torse dans une passe arrière. Il abaissa sa lame. Je sentais sa fatigue. Il ramena son épée devant lui pour se protéger. J’enchaînais à mon tour aussitôt une nouvelle attaque. Me projetant vers l’avant, je donnais deux coups d’épée sur les flancs opposés du garçon. Celui-ci para le premier coup, mais ne put éviter le deuxième, qu’il reçu en pleine hanche. La lame de l’épée s’enfonça dans la maille, mais ne transperça pas la peau. Il lâcha son épée, surpris, effrayé. Mon épée ne faisait qu’une avec moi, j’étais une vraie furie, je voulais le dessus à tout prix et je l’eu.

Père Signasse applaudit. Mon c½ur battait à tout rompre et le souffle court, je saluais le pauvre Armand défait. Dignement, je rangeais mon arme à sa place et prit congés sans rien dire, un sourire de victoire aux lèvres.

Armand fit le premier pas pour me parler. Je n’avais jamais eu de relation avec des personnes de mon âge. Il mit du temps à m’apprivoiser.

Un après-midi, mes barrières tombèrent. Le jeune Mac Harcourt raconta à ses compagnons sa mésaventure. Il avait le sens de l’honneur. Les garçons vinrent me féliciter. Je n’en revenais pas. Ils devinrent mes camarades. Ils étaient intéressants, ils m’apprirent plein de choses que je ne soupçonnais pas.

Armand et moi devenions des élèves de plus en plus redoutables. Signasse était dure et juste. J’avais quinze ans quand il m’offrit une superbe épée à deux mains. Je le dépassais à présent, j’avais une armure de maille, elle était lourde mais avec l’entraînement intensif, ma musculaire me permettait ce poids. Mon allure n’était pas la même que celle de mes compagnons masculins. Elle était plus gracile. Ma chevelure était toujours aussi rousse, mes cheveux étaient très longs et étaient retenus toujours par ce même lacet de cuire. Mon heaume couvrait mon visage, mais le catogan dépassait et laissait voir ma seule féminité.

Blanche devenait une dame, avec l’argent qu’elle avait amassé, elle s’achetait de belles robes et elle aimait tournoyer autour de moi, le soir. Je riais avec elle. J’étudiais le soir, je savais lire et la bible fut mon premier livre de chevet.

Les garçons qui étudiaient avec Armand et moi, se joignaient aux leçons de combat du père Signasse. Bientôt, nous devions dire notre souhait de rejoindre la caste des paladins.

J’étais devenue disciplinée, mais mon esprit ne l’était pas. J’étais rebelle à l’idée de devenir un instrument à la solde de l’Eglise. Tout ce que l’on m’enseignait était pour moi une foutaise. Je voyais que mes camarades ne posaient aucune résistance à cet enseignement.

Armand m’accompagnait souvent rendre visite à Blanche dans la cuisine. Il aimait ma présence et j’aimais la sienne. On était ami. Nos vieilles ranc½urs étaient enterrées. On riait souvent de nos prestations avec nos épées. Nos camarades étaient médusés de voir que nous y mettions tant de force. On avait appris ainsi à la maîtriser. Le père Signasse aimait nous regarder. Il devenait à mes yeux le père que je n’avais pas eu. J’avais du respect pour lui et quand il me fit cadeau de mon épée. Une larme me vint, et il se moqua de moi !
Adolescence 4
J’avais pris goût à cette vie. Blanche était épanouie. Léonie Mac Harcourt était revenue vivre à la pension. Elle recevait tous les soirs. J’étais loin de ces mondanités. Armand me racontait les soirées de faste qui avaient lieu dans le château de Camelot. Il aimaient se promenait aux bras de sa mère. Je riais quand il me décrivait les robes des dames de ce monde. Très souvent, je m’imaginais avoir une robe et tentais d’engager le combat lors d’un entraînement, nous rions tous deux.

Les années avaient passé, insouciantes. Le père Signasse devenait de plus en plus exigeant lors de nos rencontres. Certains de nos camarades avaient abandonné l’entraînement : certains allaient devenir moine, prêtre. Nous étions que 4 à présent. Le jour J arriva bien vite. La mère d’Armand décida de faire une réception à la pension. Dès le matin, Blanche s’était mise aux fourneaux, tout le monde s’affairait. Je me mis en quête ce jour là d’aller commander ma première armure de plaque. Mon instructeur m’avait donnée l’adresse d’un artisan. La bonne de Léonie de Mac Harcourt vient me chercher me voyant partir. Elle voulait que je la suive pour avoir un entretien avec sa maîtresse. Je la suivis en repensant à notre première entrevue.

Le bureau n’avait pas changé. Elle m’invita à entrer et à m’asseoir. Même avec le temps, elle était toujours la même, le visage fin, et les cheveux aussi blonds retenus dans un filet d’argent. Elle me dévisagea.

- Tu as bien changé Amarhante, tu es devenue jolie.

J’étais toujours sur ma défensive devant cette créature. Elle me trouvait jolie à présent, je m’en fichais complètement. J’avais envie d’aller commander mon armure de plaque, bon sang !!

Elle se planta devant moi. Je la dépassais de deux têtes. Un sourire ironique s’afficha sur mes lèvres. Elle le remarqua en fronçant ces jolies sourcils blonds.

- Tu es très grande et d’après mon oncle, tu es très forte à l’épée. Je suis contente de t’avoir envoyé à lui.

- Je vous remercie Dame Léonie Mac Harcourt.

Je me forçais, j’avais promis à Blanche de la remercier. Mes paroles sonnèrent mal, mon ton était hautain.

- Tu es toujours aussi arrogante. J’aurai cru que de côtoyer des gens d’Eglise briserait ta désobligeance, mais il n’en ait rien.

Elle soupira.

- Bref, je t’ai fait venir pour t’informer que très prochainement, tu seras à mon service.

Je l’interrogeais du regard.

- Tu vas bientôt prononcer tes v½ux comme Armand, tu vas servir l’Eglise, mais tu seras sous mes ordres.

- Pourquoi ne pas prendre votre fils ?

Elle s’irrita.

- Ce choix ne te regarde pas ! Tu sauras ton vrai rôle le moment venu.

Elle s’avança près d’un fauteuil et y prit une robe, je ne l’avais pas remarqué. Elle me la tendit. Je la pris.

- Ce soir, tu seras des nôtres Amarhante. Armand a tenu à t’inviter.

J’aurai voulu protester à cette invitation, mais cela aurait vexé mon ami. Je serrais mes poings résignée.

- Tu vas passer la robe et ma bonne viendra te voir pour faire les retouches. Je te prête ces épingles et ce sautoir de perle. Cela rehaussera ta beauté fade.

Je pris les accessoires à regret.

Elle me congédia. La bonne m’attendait. On grimpa à ma chambre et j’entrepris de mettre ma première robe. Elle était trop grande au niveau de la poitrine, je n’étais pas pleinement formée. Mes jambes étaient musclées et longues. La bonne me complimenta sur mon physique. Je la remerciais. La robe était d’un velours vert foncé. Paraît-il que cela allait très bien avec la rousseur de mes cheveux. Elle me dit qu’elle serait prête en fin d’après-midi. Comme j’étais libre, j’allais de ce pas commander ma plaque. Je descendis prévenir Blanche que ce soir, j’étais de la fête. Elle n’en revenait pas et elle était fière que j’y participe sans tenir compte de mon mécontentement. Elle me murmure :

- Il est temps ma petite d’approcher le monde qui aurait du être tien.

Je secouais la tête. Elle me sourit et se remit à ses préparations culinaires.
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Soirée 1
Je me rendis tout d’abord chez un couturier, il prit mes mesures. Il allait accomplir la première partie de la composition de l’armure. Puis, je me rendis à la loge d’un maître de forge. Il était mandaté par l’Eglise pour créer les saintes armures des paladins. D’ici quelques jours, mon armure serait prête, j’étais tout excitée !

Je rentrais, la journée était bien avancée. La bonne avait fini, la robe trônait sur mon lit. Je soupirais à l’idée de rentrer dans le monde des prétentieux. Le soleil déclinait peu à peu. Un bain m’attendait, l’eau avait une odeur particulière, je m’y plongeais laissant ma chevelure libre. La bonne rentra sans prévenir. Je sursautais.

- Vous allez sortir de là, votre peau va se friper !

Obéissante, je sortis du bac. Je m’essuyais. Elle entreprit de me démêler les cheveux. Je me retenais de ne pas crier, elle me faisait mal. Elle les secoua vigoureusement pour les sécher. Elle se régalait. Je me dis qu’elle devait avoir un plaisir sadique à me les tirer en tout sens. Elle s’activait avec les épingles, retenant des boucles rebelles entre ses doigts, elle était satisfaite de son travail quand je me levais.

- Un vrai port de reine !

Je ne me sentais pas à l’aise, j’avais un poids qui pesait sur mon crâne, je voulus tâter ma coiffure. Elle me donne un petit coup !

- La robe à présent !

Je m’habillais, elle serra les lacets, j’avais du mal à respirer. Le décolleté était un peu trop échancré, un galon de dentelle rehaussé le bustier. J’appréciais sa couleur, le vert me rappelait celui de mes yeux. Elle attrapa le collier de perles et le mit à mon cou. Elle me rassura quand je la vis m’inspecter, elle avait un sourire ravi.

- Vous êtes superbe ainsi, une vraie dame. Rien à voir avec la sauvageonne.

Elle ressortit. Elle devait venir me chercher.

J’essayais de marcher en imitant la démarche de la maîtresse des lieux. Mes pieds se prirent dans les pans de ma robe, je m’accrochais pour ne pas tomber et les déchirer. Un entraînement à l’épée me paraissait plus facile. Je retentais. Cette fois-ci, je pinçais délicatement le tissu de ma robe, ma démarche était plus souple et plus sûre. Je m’entraînais à faire une révérence lorsque la bonne entra. Elle m’invita à la suivre, et elle me conseilla d’être moins raide.

Il y avait du brouhaha, des serviteurs en livrée servaient à boire aux convives. Un troubadour jouait dans le salon d’à côté, j’entendais sa voix voluptueuse. Il chantait une ballade romantique. Je pensais à un pigeon entrain de roucouler pour attirer les femelles. Je ris intérieurement. Je me glissais dans la pièce, et je vis que le pigeon avait su attirer toutes les jeunes jouvencelles. Je reconnus mes camarades. J’allais les rejoindre. Armand était là et j’eu un autre regard sur sa personne, il avait fier allure dans sa tenue rouge. Il avait de la prestance !

Les garçons étaient entrain de discuter de leurs v½ux. La cérémonie devait avoir lieu dans une dizaine de jours. Les visages se tournèrent vers moi. Je fis une révérence à ces messieurs. Armand m’avait reconnue, et j’en fus heureuse intérieurement. Il s’approcha de moi, et me prit la main délicatement.

- Ne la reconnaissez-vous pas mes amis ?

Les garçons firent tous un non général.

- Je vous présente demoiselle Amarhante.

Ils ne m’avaient point reconnu. Il me fallait trouver un miroir pour y voir mon reflet.

- Enchantée de vous rencontrer Messires !

Mon ton était badin. Ils se mirent à rire, et je fis de même.
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Soirée 2
Nous discutâmes de tout et de rien. Armand me dévorait du regard, et cela me mit très mal à l’aise. Un domestique vint nous chercher pour le dîner.

Madame Mac Harcourt suivit d’autres adultes se mêlèrent à nous. La table était richement dressée. Blanche s’était surpassée. L’hôtesse me sourit satisfaite certainement de ma transformation. Mes deux voisins étaient des amis de l’oncle d’Armand. Ils me prêchaient les saintes paroles, et je faisais semblant d’écouter. Je lançais des regards tout autour de moi. J’observais tout ce monde. Armand me regardait parfois, je lui souriais.

Deux hommes discutaient avec Léonie, je ne parvenais pas à entendre tellement les deux grenouilles de bénitier jacassaient. Un des deux portaient un blason, je reconnus celui-ci, c’était celui du Roy. Cela m’intriguait. Je fis honneur au repas de Blanche. Poularde, pommes de terre, faisan en pâté. On ne se refusait rien. Je goûtais même au vin. Dès que mon verre était vide, un serviteur me le remplissait. J’aimais ce breuvage. Je me détendais un peu.

Dame Léonie se leva de table et prit la parole.

- Cette petite réunion est en honneur de mon fils Armand Mac Harcourt. Je suis fière de lui. Il va devenir Paladin. Je porte un toast à sa réussite et à notre sainte Eglise !

Tous les invités portèrent leur verre à leurs lèvres, je fis de même.

Le jeune prit la parole à son tour.

- Je vous remercie mère. Je mets mon épée au service de l’Eglise. Je voudrais que nous buvions aussi à la réussite de mes amis !

Les garçons se levèrent. Les adultes les regardaient fiers de leur progéniture. Armand me fit signe de me lever à mon tour. J’avais les joues en feu par le vin.

- Amarhante ?

Je me levais doucement. Je sentais les yeux des invités pointés sur moi. L’homme au blason me regarda fixement quand il avait entendu mon prénom. Les invités trinquèrent de nouveau à notre réussite. Je me rassis aussi vite.

Je vis l’homme parlait à son hôte en lançant des regards vers moi. Je ne comprenais rien. Mes deux voisins me félicitèrent. Je les remerciais. Je pris de l’eau pour me redonner une contenance, j’avais chaud, et les bouffées de chaleur ne voulaient pas s’interrompre. J’avais trop bu, et j’étais irritée des regards persistants !

S’il a quelque chose à me dire qu’il vienne me le dire non de non ! Ma tête me tournait à présent. On nous servit des déserts : toutes sortes de tartes ! Je comprenais pourquoi mes deux voisins avaient de l’embonpoint. C’était la tournée des grands ducs pour ces deux crapauds de bénitier.

Les hommes se levèrent et allèrent dans le petit salon. La gente féminine applaudit à l’entrée du ménestrel, et il commença son chant de rossignol. Je quittais ma place discrètement, je voulais partir dans ma chambre dormir. La nuit était tombée. Léonie me suivit du regard et se leva à son tour. Elle me guida jusqu’à la sortie et me dit :

- Tu as attiré l’attention sur toi Amarhante.

Je ne comprenais pas, mon esprit était dans un total brouillard.

- Vas dormir, demain nous parlerons.
Ma tête me faisait mal. Je me suis réveillée très tôt. La robe gisait au sol, je ne sais même pas comment j’avais fait pour parvenir à ma chambre. Blanche était là à mon réveil, elle me souriait.

- Tu te fiches de moi ?

- Non, je vois juste que tu as vécu dans une auberge mais que tu as pas la descente facile !

Malgré mon mal de tête, un sourire naquit.

Je m’habillais à la hâte. Je devais aller chercher mon armure. Blanche me questionnait du regard, mais lorsque j’allais lui raconter, quelqu’un frappa à notre porte.

C’était la bonne de Léonie Mac Harcourt.

- Madame vous fait demander demoiselle.

J’allais prendre la robe et les accessoires, elle s’exécuta à ma place. Elle les prit et elle me dit :

- Je vais nettoyer la robe, je vous la rapporterai !

Je fis un salut de la tête à Blanche et je descendis en me demandant ce qui allait m’arriver encore.

La porte était ouverte, je m’introduisis dans la pièce. Un bouquet de fleurs sauvages embaumait le lieu. Léonie m’attendait. Elle portait une robe de velours rouge. Un chignon haut orné de fleurs finissait sa parure. Elle était fraîche pour quelqu’un qui avait passé la soirée à recevoir, j’étais bien fripée et fanée moi !

- Amarhante, assis-toi, veux-tu !

Je me mis sur un tabouret de bois précieux finement ciselé.

- Hier soir, j’ai eu une conversation à ton sujet avec messire AVOYE.

Je me remémorais la tête de l’homme. Je l’avais pas mal dévisagé en effet.

- Je lui ai raconté que tu souhaitais rejoindre les forces de l’église. Figures-toi qu’il m’a dit quelque chose d’étrange.

- Ah ?

Elle se mit devant moi.

- Il a dit que tu ressemblais trait pour trait à un homme qui est à la garde royale.

Je tentais de garder mon calme devant son regard pénétrant.

- Je lui ai dit que c’était impossible ! Mais figures-toi qu’il va amener ce garde ici !

La panique s’empara de moi. J’avais envie d’hurler !

- Je ne peux pas madame…Il faut que j’aille chercher mon armure. J’ai promis !

Elle se mit à rire.

- Enfin Amarhante, tu n’as rien à craindre, il dira qu’il ne te connaît pas.

Elle pointa son doigt vers moi comme une accusatrice.

- Je sais très bien que toi et Blanche vous n’êtes pas de la même famille.

Elle me cloua sur place.

- Je me suis renseignée : son mari est devenu prisonnier, il a fini ses jours dans les mines de Tepok. On nuit à l’église, l’église punit ! N’oublie jamais ça !

J’avais un mal à la tête, j’avais l’impression que quelqu’un me la serrait fort si fort.

Elle s’asseyait près de moi, et elle me prit la main. Je voulus la retirer mais elle avait une sacrée poigne la bougresse !

- Je suis bien contente de t’avoir avoué que je savais. Blanche n’en saura rien pour l’instant. J’avais besoin d’avoir un pouvoir sur toi et je l’ai à présent.

Elle m’avouait que j’étais à sa merci, j’avais tout vu !

- Tu vas être présentée à ton père, il ne te reconnaîtra pas. Tu sais pourquoi ?

Je fis non de la tête, je ne cherchais plus à comprendre.

- Il serait honteux que les gens qu’il côtoie sachent qu’il la laissait sa fille unique à la charge d’une femme d’auberge ! Il serait mal placé vu qu’il souhaite monter les échelons.
Choix 1
Je ne savais plus quoi penser. Elle me dit de revenir après avoir été cherchée mon armure. Je sortis dans les rues de Camelot, l’âme en peine. C’était jour de marché, des enfants couraient, les marchands criaient ! J’avais encore un martèlement dans la tête. Prendre l’air me fit du bien. J’arrivais chez l’artisan, il m’invita à essayer mon armure. C’était comme une seconde peau. Elle n’était pas légère, certes ! Elle m’allait comme un gant, j’exécutais quelques mouvements de combats pour évaluer sa tenue. Tout allait ! Je me sentais de nouveau en moi ce sentiment de fierté : d’être une combattante !

Je décidais de m’acheter des flacons de couleur. Je choisis du rouge, je m’imaginais déjà le sang de mes ennemis sur ma lame. Je frissonnais à une telle pensée. Je n’avais pas encore ôter la vie à quelqu’un que déjà je commençais à avoir le goût du sang.

Je rentrais, je passais par la cuisine pour demander à Blanche de colorer ma parure pour la cérémonie des v½ux. Elle me félicita pour mon armure. Elle m’avait donnée une partie de ses gages pour l’acquérir, et je la remercie encore au fond de mon c½ur.

Léonie m’attendait dans son bureau. Il y avait deux autres personnes avec elle. Je fis une révérence à leur attention. Mes yeux croisèrent ceux de mon père. Il était aussi grand que moi, la même tignasse rousse ! Ah oui ! Je lui ressemblais !

Léonie était de bonne humeur, elle devait se sentir maîtresse de la situation. J’aurai aimé être à sa place. Messire Avoye me serra la main d’une poignée énergique.

- Bonjour demoiselle ! Quel plaisir de vous revoir !

Je détournais le regard de mon géniteur pour regarder l’homme qui me regardait intensément.

- Moi de même, Sir !

Léonie Mac Harcourt nous invita à nous asseoir.

- Ma chère enfant, messire Avoye m’a proposée de vous prendre sous son aile après que vous ayez fait vos v½ux de paladin.

L’homme prit la parole :

- J’aimerai en effet devenir votre parrain. Voyez-vous être paladin de l’église n’est pas donné à tout le monde, et les valeurs ne s’apprennent pas dans les livres ou dans l’entraînement, mais sur le terrain !

Je me demandais encore ce qu’il pouvait encore se tramer là ! Par chance, mon mal de tête s’estompait, je pouvais donc réfléchir à présent à la situation.

- Messire Mac Clan se propose de me seconder d’ailleurs.

Je souriais bêtement là ! Mon père voulait se charger de moi à présent ? Il devait se sentir peut-être coupable ? Ou alors il aurait un ½il sur moi de peur que je révèle ma ascendance ?

Il se leva, je sentais qu’il était très mal à l’aise, et j’étais fort aise ! Après tout, c’était lui qui s’était mis en mauvaise position ! Moi, il était hors de question qu’il me mène dans sa chute !

- Je dois en effet m’investir. Je ne vous cache pas que je n’ai pas eu le choix. Messire Avoye a insisté !

Le Mac Clan avait tout de même de l’allure, je devais le reconnaître. Je retrouvais de moi en lui. Il n’osait pas me regarder comme si j’étais là pour lui rappeler une erreur.

Et là, je ne pus me retenir, j’éclatais ! Je me levais et je me jetais vers lui en lui décochant un bon poing dans sa face ! Ah, il s’y attendait pas et les autres non plus !

Il avait un filet de sang au coin de la lèvre. Ah que cela fait du bien ! Vous ne pouvez pas savoir de pouvoir déverser sa rancune ainsi. Léonie Mac Harcourt avait perdu de sa superbe, elle s’avança vers moi et elle voulut me gifler ! Messire Avoye se mit entre nous deux. J’étais prête à bondir de nouveau ! Elle fit mine de remettre de l’ordre dans sa tenue.

Mon géniteur avait sorti un mouchoir et il s’épongeait la lèvre blessée. Je me sentais complètement vide. Il me regardait de nouveau en coin et il rajouta :

- Je ne t’en tiens pas rigueur, je peux comprendre ! Tout ce que je te demande c’est de taire notre filiation. Pour les autres, tu seras ma nièce, et tu porteras le nom de Mac Clan.

Messire Avoye me regarda à son tour et il me sourit.



- Vous ne pouvez pas cacher que vous vous ressemblez tous deux. J’ai pensé que cela serait mieux pour vous faire rentrer dans notre cercle.

Un cercle ? J’étais fatiguée pour penser. Je gardais ce mot dans un coin de ma mémoire. Pour la bienséance et pour me faire passer pour une fille courtoise, je fis mes excuses à Léonie. Elle n’en revenait pas.

Je vois que vous devenez raisonnable jeune fille !

Elle m’embrassa même sur le front ! Berk ! Je détestais tous ces épanchements. Je fis un sourire agréable. Mac Clan prit congé. Il partit comme un chien abattu. Je le méprisais encore plus. Léonie et ce Avoye tissaient une toile autour de moi, et je ne savais que faire. Accepter ?
Choix 2
Blanche était aussi excitée que moi-même. Toute la maisonnée était en effervescence. Mon armure avait été colorée avec soin. Elle trônait dans notre chambre tel un trophée. Léonie Mac Harcourt s’occupait d’héberger les autres parents qui donnaient à l’église leurs enfants en signe de leur foi.
La cuisine était en activité permanente, et Blanche n’avait plus de temps libre à batifoler avec moi. Pour ma part, je continuai le matin à rejoindre le père Signasse pour mes exercices. Je maniais de mieux en mieux l’arme à deux mains. Messire Avoye avait participé un matin à un de mes enseignements, il avait été surpris de ma hardiesse.
Il prit à son tour une épée, et là commença un combat harassant. Il faisait tournoyer son épée et il tentait de me toucher sur le flanc, j’esquivais en faisant des bons de côté. La fatigue face à ses assauts commençait à se faire sentir, mais je ne lâchais pas. A un moment donné, il me fait perdre pieds en m’infligeant un coup sur la clavicule gauche. Je sentis le poids de l’arme. Dans un instinct de survie, je levais mon épée et les lames s’entrechoquèrent, je me relevais avec un reste de force.
Il avança sa jambe et il me fit une cloche pied, épuisée, je ne pus me relever ! Reprenant conscience de mon état de faiblesse, mon arme me servit de point d’appui pour me hisser et me relever fièrement la tête. Il me salua et il partit comme il était revenu. Le père Signasse éclata d’un rire gras. Je serrais les dents.
- Tu as encore beaucoup à apprendre jeune fille. Cette séance t’a permis de savoir que l’endurance est importante dans un combat !

Dépitée, je repris la route de la maison.
J’avais compris qu’il fallait réfléchir, calculer ! C’était bien d’avoir la force, mais il fallait calculer ses coups, et aussi réserver une botte secrète pour surprendre ! J’avais été bête sur ce coup là ! J’avais encore foncé tête baissée alors qu’on attendait de moi de la feinte!

Armand m’attendait. Il voulait me parler depuis plusieurs jours et je l’avais éconduit prétextant que j’avais des courses à faire pour la cérémonie. Ce jour-là, je ne pouvais lui dire non.

Je devais avoir une piteuse mine. Il m’invita à prendre place dans le bureau de sa mère où quelques jours avant, j’avais rencontré mon père. Je me mis sur un siège. Il resta debout. Il avait belle allure dans sa tenue rouge. Ses cheveux était bien peignés comme à l’accoutumée. Je l’imaginais dans une belle armure montant un fier destrier. Je souris dans mon fort intérieur. Il prit la parole :

- Tu es prête alors à faire tes v½ux ?

Je fis oui de la tête.

- Je ne le suis pas Amarhante !

Je fus surprise.

- Tu vois ma mère a choisi pour moi cette voix de Dieu. Je ne veux pas être un combattant de la lumière !

Des larmes se mirent à couler. Je me sentais un peu gêner de voir un homme dans cet état, et encore plus Armant Mac Harcourt !

- J’aurai voulu être un maître d’arme et enseigner ce métier. Plus les jours passent et cette envie est là ! Mais elle ne voudra pas, Amarhante, elle veut rendre à l’église ce qu’elle lui a donné !

Je ne comprenais pas là ! Je savais qu’un secret planait autour de cette femme, mais là, j’allais en savoir plus !!

Il continua :

- Elle n’a pu donner la vie. Mon père a été voir une autre femme et elle lui a donné un fils, et ce fils c’est moi. Je fus pris à ma mère et Léonie devint ma mère adoptive. L’église a fait taire la femme en lui donnant une récompense de quelques pièces d’or.

Il était amer. Je le regardais avec compassion. Mon c½ur était serré. Je comprenais son mal être. Nous n’étions pas maître de nos vies.

- Tu sais Amarhante, je t’envie. Tu as fait ton choix et tu en es certaine ! J’aimerai en faire autant !

Si tu savais mon pauvre Armand ! Je me taisais alors qu’au fond de moi-même, j’aurai voulu ouvrir mon c½ur, et tout lui dire. Mais chut ! Je serrais les dents, et je me levais. Il me regardait avec ce désespoir que je ressentais bien des fois.

- Je peux comprendre ton ressentiment. J’aimerai pouvoir t’aider dans cette quête, mais je ne peux rien faire là.

Il s’approcha de moi, nous étions pour la première fois si prêts. Sans nos armes ! Nos mains se lièrent. Mes yeux se fondirent dans son regard bleu. Je le pris dans mes bras, ce premier contact dans les bras d’un homme ne s’oublie pas. Il pencha sa tête au creux de mon épaule et il s’y réconforta. Un dernier sanglot, et il s’y arracha. A mon grand regret d’ailleurs, car je me sentais un peu bête après cette étreinte innocente. Il s’essuya les yeux comme un enfant. Je lui souris ne sachant que dire. Il reprit de sa prestance, et il me sourit à son tour.

- Cela doit être toute cette effervescence. Je ne suis peut-être pas prêt !

- Peut-être mon ami ! Tu devrais le dire à ta mère, et même, j’ai une idée qui me vient !

Il m’interrogea du regard.

- Je pense que tu devrais remettre tes v½ux en invoquant auprès de ta mère que tu ne possèdes pas encore assez d’expérience, et qu’il serait bien que tu me suives lorsque sir Avoye m’amènera avec lui sur le terrain !

Ne me demandez pas comment, j’ai eu cette idée, je ne saurais pas vous le dire, peut-être que je voulais garder auprès de moi, mon ami, le seul que je n’ai jamais eu !
L'Unique
Après notre entrevue, j’entrepris d’aller me laver. Il ne restait que deux jours avant la cérémonie. Je me devais de préparer mon départ de la maison. Blanche était nerveuse, je le sentais dans sa façon d’être. Nous avons traversé pas mal de choses ensemble, et ce lien était là. Ce soir-là, je l’attendais bien au fond du lit, je voulais partager le peu de temps avec elle avant de la quitter complètement. Elle arriva fort tard. Elle se mit en chemise de nuit et elle me rejoignit dans le lit. Je me retournais pour lui signifier que je ne dormais pas.

- Et bien petite, tu ne dors pas ?

- Non, je t’attendais !

- Tu dois bien être excitée ?

- En effet, il me tarde de les prononcer !

- J’aurai aimé venir, tu sais, mais je dois être aux fourneaux pour faire un repas digne de cet évènement, et La Mac Harcourt y tient à ce que cela soit parfait !

- Je sais Blanche, mais tu seras là pour moi.

- Tu es bien reconnaissante petite. Tu sais, je ne regrette rien. Tu es comme ma fille.

A ce mot, des larmes vinrent. Elle me serra contre elle. Je me laissais aller pour une fois, elle m’avait protégée comme une mère, et ce lien maternel me manquait et je m’en rendais compte. Elle me berça ce soir là comme une enfant qui se rendait compte du manque affectif. Je voulais être forte tout le temps, et mettre aux oubliettes ces sentiments d’attachement ! C’était impossible à ce moment, toute la haine envers mes parents se déversait dans mes larmes. Blanche avait ce droit de me voir faible, elle était celle qui m’avait donnée sa présence. Je reniflais et elle me tendit un mouchoir.

- Allons, petite, on ne va pas se laisser abattre ! Tu vas devenir un bon soldat et je suis déjà fière de toi !

Ses paroles me remplirent de joie. Cette nuit, je dormis dans ses bras.



Le lendemain matin, je me levais de bonne heure. Je m’habillais vite, et je descendis. Au passage, je rencontrais Léonie et le père Signasse. Je les saluais. Ils entrèrent dans le bureau. Et ils fermèrent la porte.

Je pris le chemin de l’église. Je voulais prendre le temps de méditer, de réfléchir aux derniers évènements, et je comptais que l’Unique m’aide dans cette réflexion.

C’était bien la première fois que je voulais m’entretenir avec lui, mais viendrait-il à mon appel ? J’avais vu bon nombre de personnes faire appel à lui lors des offices. Peut-être qu’il entendrait ma demande. L’église était vide ce qu’il me soulagea grandement. Je ne voulais pas être importunée. Le silence était, mes prières commencèrent. Je laissais mon âme s’ouvrir. Une chaleur envahit mon corps. Je me sentais bien et je me libérais de mes mauvaises pensées que j’avais pour mes parents. Je ne pensais pas que le recueillement donnait un tel état de bien-être. Dans ma tête, une lueur minuscule apparu. Je voulais m’y accrocher. Elle devint plus vivante quand mes lèvres se mirent à chanter un cantique. Je laissais ce charme agir ! La chaleur se fit plus intense quand mon chant se fit plus fort. J’étais surprise et pourtant, je ne pouvais plus m’arrêter. Le chant se fit léger, la lueur grandit et elle se transforma en une flamme belle et chatoyante. Mon esprit ne faisait plus qu’un avec elle. Ma volonté de continuer s’estompa quand je sus que j’allais choisir ma voix : l’Unique m’avait choisie et je me devais de lui appartenir corps et âme.

Le c½ur emplit de cette chaleur, j’ouvrais les yeux. Je fus déçue de voir que rien autour de moi n’avait changé !



Je me remis de mes émotions et je suis rentrée. Je voulais raconter cet état à Blanche mais elle était occupée avec ses légumes et il y avait trop de gens autour d’elle pour que je me livre ainsi. Je décidais de le garder pour moi. La servante de Dame Léonie me dit de la suivre pour aller voir sa maîtresse. Elle me ramena à la réalité.

Je rentrais dans son bureau avec un sourire chaleureux. Je n’aimais pas porter un masque, mais avec le temps, je ne voulais pas être vulnérable aux yeux des autres, et surtout devant cette femme. Elle me fit signe de m’asseoir.

- Amarhante, j’ai une nouvelle pour toi ! Armand m’a confiée qu’il n’avait pas encore su acquérir assez de confiance en lui pour devenir paladin.

Il lui avait parlé.

- Je me suis entretenue ce matin avec mon oncle et il pense qu’il serait bien qu’il t’accompagne avec Sir Avoye sur le terrain. Cette idée ne me réjouie pas ! Mais bon, mon oncle a été toujours de bons conseils donc, j’ai décidé qu’il irait. Je lui laisse 6 mois pas un de plus.

Je me réjouissais intérieurement ! Elle avait craqué, elle était contrariée certes ! Quelle belle victoire ! Pour une fois, je me sentais plus forte qu’elle. Je savais un secret d’elle. Ce n’était pas très catholique d’avoir le dessus sur l’autre, mais nous sommes des êtres humains tous alors parfois, on se laisse aller à la vanité !
Blanche
Je me réveillais de bonne humeur. Toute la nuit, j’avais rêvé de guerre, je me battais aux côtés d’Armand. Il ne me restait qu’un jour avant de recevoir le sacrement. Et j’avais encore à faire. Tout d’abord, je devais m’habiller au plus vite. Messire Avoye m’avait dit de le rejoindre pour une entrevue dans la matinée et à voir la position du soleil, elle devait bien être avancée.

Une fois habillée, je descendis aussi vite qu’un lapin. Je passais dans la cuisine où l’odeur était toujours un délice pour mes narines, Blanche commençait à s’affairer pour le repas du lendemain. Elle me fit un geste de la main pour me saluer, et là je lui fis claquer une bise sur sa bonne joue. Elle en fut ravie. Nous devions nous séparer demain, et là ce fut une évidence : Elle me manquerait !

Je pris deux brioches en passant et je me mis en route vers l’église. Un serviteur m’accompagna au bureau du Père Signasse où m’attendait Messire Avoye. Il était assis avec aisance, je me demandais comment on pouvait bouger avec grâce avec une armure… J’en découvrirai le secret ! Il se leva et il me salua :

- Bonjour demoiselle ! Il va falloir apprendre à se lever à l’aube !

Je lui fis une révérence avec un sourire crispé.

- Pardonnez mon retard Messire Avoye, je n’ai aucune excuse que celle d’avoir rêver de combat !

Il éclata d’un rire franc et je fis de même.

- Ne soyez pas sur la défensive mon enfant, j’aime mettre le ton ! Je veux que vous compreniez que le temps est maître de nous. Et tout guerrier qui se respecte le sait, surtout en terrain ennemi, le sommeil est certes réparateur, mais là-bas on ne peut pas se permettre de dormir profondément. Enfin, vous êtes vive et je vais vous mener à vos derniers retranchements.

- Je vous écouterai Messire Avoye.

- Bien ! Je vous ai fait venir pour vous informer que demain après le repas que donne ma nièce vous quitterez sa demeure pour venir vous et Armand avec moi. Mon camp est proche de Château Sauvage.

J’acquiesçais de la tête. J’imprimais dans ma mémoire le nom de Château Sauvage.

- Il faudra amener votre armure et quelques braies bien entendu. N’amenez que quelques effets personnels. Vous êtes une jeune fille et je sais très bien que vous devez avoir quelques objets futiles.

- Je n’amènerai que le strict nécessaire Messire Avoye ! Je ne suis pas un paladin en dentelle !

Il ria de nouveau.

Il se remit sur son siège et il agita sa main pour prendre congé de moi.

- A demain !

Je rentrais à la maison de Dame Léonie Mac Harcourt. Il y avait du passage en permanence, des visages souriants. Demain était un grand jour pour les parents. Je rejoignis Blanche dans son antre, elle me donna une bonne cuisse de poulet rôti avec un bout de pain. Je m’installais à la grosse table en bois. Je me mis à dévorer sans penser aux bonnes manières. Je me régalais, cela aussi me manquerait. Blanche me dit qu’elle monterait après avoir fini de donner ses ordres aux domestiques.

Notre chambre était simple, mais elle était notre univers, notre cocon et demain, elle ne le serait plus pour moi. Mon armure rouge sang trônait toujours là. Un sourire naquit sur mes lèvres. Je pris un bas de Blanche et je me mis à l’astiquer avec amour. Blanche rentra à son tour, elle s’écria :

- Petite ! Serais-tu devenue folle ?

Je me retournais sans comprendre sa colère.

- Un bas, tu utilises mon bas ! Sais-tu combien j’ai dépensé !!!

Le bas tomba à terre.

- Oh, pardon Blanche. J’ai pris la première chose qui me tombait sous la main, ne m’en veux pas, c’est notre dernier jour ensemble.

Je me forçais de faire une mine peinée. Elle se détendit et là je lui dis :

- Qu’est-ce que tu deviens futile Blanche !!

- Petite me parle pas sur ce ton, j’ai la notion du coût !

- Un bas ? Cela n’est pas utile Blanche. Par contre, je vais t’en prendre un pour nettoyer mon armure car je vois que cela est lustrant.

- Rhaa, Petite, excuses-moi ! Je suis dans tous mes états. Tu pars demain et cela me pèse.

Elle se jeta dans mes bras, et elle sanglota. Mon cœur gémit et les larmes me montèrent. Nous restâmes un long moment ainsi. Je reniflais, je repris possession de mon état. Elle se détacha de moi et elle sortit un grand mouchoir de son tablier et elle s’essuya.

- Il est temps Petite de faire tes sacs ! D’ailleurs, j’ai quelques affaires pour toi !

Elle extirpa de dessous le lit une grosse besace.

- Tout d’abord de nouvelles braies, elles sont rouges. Tu aimes ?

Elle me mit les braies devant les yeux, tout l’ensemble était soyeux.

- Oui !

- Et pour finir, voici de l’argent au cas où !

Elle sortit de son corsage une bourse, la seule habitude qui lui restait d’avoir été femme d’aubergiste.

- Cela te servira, on ne sait jamais ma fille !

Dans mes yeux, elle pouvait y lire tout l’amour que j’avais pour elle. Une mère de cœur. A ma Blanche, tu allais me manquer terriblement, mais dans mon amour, je trouverai la force !

Elle me m’y tout dans la grande besace et elle la porta sur le lit.

- Sais-tu où est-ce que le Messire Avoye t’amène ?

- Oui, à Château Sauvage !

Elle eut un regard triste.

- C’est un lieu très dangereux, Petite ! Fais attention à toi, hein ?

- Oui, je te promets.

- Je vais redescendre et je vais nous apporter un bon repas et du bon vin. Autant que notre dernier repas soit un festin.

- Oui, je pense que je ne vais pas manger aussi bien là-bas !

Elle descendit et je finis de faire mes affaires.
Cérémonie
Le jour se levait, enfin. Blanche n’avait pas réussi à fermer l’œil de la nuit. Je dus lui tenir compagnie. Nous avions évoqué notre vie ensemble. Une page allait se tourner ! J’avais ma destinée à accomplir.
Je me vêtis de mes braies écarlates, mon armure toute aussi vive finit de me parer. Blanche avait les yeux humides en me voyant m’équiper. Je mis l’épée offerte par le Père Signasse dans son fourreau.
- Te voilà prête Petite !
Elle me donna une bise sur le front comme pour me bénir. Elle me tendit ma besace.
- Je serai toujours là pour toi, hein ! Ne m’oublie pas, ma fille.
- Je t’aime Blanche.
Des larmes perlèrent au creux de mes yeux.
- Maman !
Je me jetais dans ses bras. Mon armure était si lourde que la pauvre Blanche se retrouva les fesses sur le plancher avec un futur paladin étendu à terre. Nous avons éclaté de rire.
Elle m’aida à me relever et sans rien rajouter de plus, je pris le chemin de ma destinée.
Armand au bas des escaliers m’attendait. Il portait une tenue de cuir noir, il me regardait avec admiration, je lui rendis ce même regard. Léonie Mac Harcourt et ses invités se préparaient à partir pour l’église. Mes compagnons et moi-même les suivions pour finir le cortège.
La cérémonie fut sereine et à la prononciation de mes vœux, je ressentis de nouveau cette chaleur envahir mon corps ainsi ma voix s’éleva. La flamme se raviva. Toutes mes craintes s’évanouirent, la paix intérieure m’habita.
Sœur Amiel me sourit et elle m’admit dans le cercle des paladins.
Deux de mes compagnons ne sentirent pas cet appel de l’Unique. Aucun cantique ne sortit de leur bouche. Ils furent déçus.
Sœur Amiel, à la fin de la cérémonie informa aux deux jeunes gens qu’ils auraient leur place dans la garde d’Albion. Les parents félicitèrent tout le monde.
Léonie Mac Harcourt, à la sortie de l’église accueillit Messire Avoye. Ils échangèrent quelques mots. Un serviteur prit ma besace et celle d’Armand
 

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