Les jours passèrent inexorablement et aucune nouvelle de Panda ne parvint aux oreilles de Meriel. Plus le temps s’écoulait et plus l’inquiétude de Meriel grandissait. Sa tête lui disait qu’elle était stupide d’être inquiète de la sorte, ce n’était pas la première fois que son maître s’absentait pour une mission. Son coeur, quant à lui, ne pouvait s’empêcher de se faire du soucis. Elle tenta bien de faire part de ses craintes à d’autres membres du clan, mais ils ne lui prêtèrent pas attention.
"Bah il doit encore traîner avec une donzelle dans une des tavernes de Camelot. Allez tiens goûte moi ça tu m’en diras des nouvelles !
- Non je n’ai pas soif merci Krak !"
...
"C’est un bon combattant, ne vous en faites pas ma fille, il ne risque rien.
- Certes Père Elamyr mais..."
...
"Ah bon, la Merveille est partie ? Sans rire ? Naaan allez c’est une blague, j’te crois pas !
- Mais Reis puisque que je vous le dis : il est parti ! P-A-R-T-I !!"
Devant le peu d'intérêt que ses inquiétudes soulevaient, la jeune mercenaire renonça rapidement à partager son anxiété. Personne ne prêtait plus attention depuis longtemps aux incessantes allées et venues du fils aîné du Laird, ni à ses absences plus ou moins prolongées. Plus rien n'étonnait de sa part.
Les nuits succédèrent aux jours et ainsi la fin du mois survint sans la moindre nouvelle. Par une nuit sans lune, Meriel dormait paisiblement d’un sommeil réparateur. Elle s’était épuisée en s’imposant un entraînement intensif pour être à la hauteur quand son maître reviendrait se disait-elle, mais surtout pour oublier qu’il n’était pas là. Un cri retentit dans la nuit, brisant le silence, était-ce un animal de ceux qui arpentaient sans relâche les plaines ou de ceux qui sillonnaient inlassablement le ciel azuré ? Même le meilleur des chasseurs du clan n’aurait pu le dire. La jeune fille se retourna dans sa couche et laissa échapper un petit gémissement.
...
Une brume épaisse entourait Meriel. Elle n’y voyait rien, aucun son ne perçait ce brouillard dense. Un silence oppressant planait. Le sol, sous ses pieds nus, était froid et lisse. Instinctivement la jeune fille voulut empoigner ses armes afin d’être parée à toute éventualité, mais ses mains se refermèrent sur du vide, elle était désarmée.
Elle se mit à marcher à tâtons, avançant prudemment. Tout d’un coup, devant elle, une faible lumière perça les ténèbres, une chaleur bienveillante semblait émaner de cette direction. Sans hésiter, Meriel pressa le pas pour se diriger vers ce qui lui semblait un endroit plus accueillant que la brume dans laquelle elle errait actuellement.
Brusquement une main fendit l’épais mur de brouillard devant elle, semblant sortir de la lumière. Elle était tendue vers Meriel, invitation muette à rejoindre son propriétaire sous de meilleurs cieux. La jeune fille y glissa la sienne après une courte hésitation. La paume de la main irradiait une chaleur agréable, Meriel se sentit instantanément en sécurité. Un léger frisson lui parcourut le dos, lui laissant une sensation de bien-être dans tout le corps. La main resserra son étreinte sur la sienne et attira doucement mais fermement Meriel dans la lumière.
Le brouillard se dissipa et la jeune mercenaire se retrouva dans une clairière baignée de soleil au centre de laquelle coulait un petit ruisseau dont le murmure seul troublait le silence paisible qui régnait. La lumière se voila tout d'un coup, une silhouette s'était interposée entre Meriel et le soleil éblouissant.
"Pan... Duncan !" s’exclama Meriel
Oubliant toute retenue, la jeune fille se jeta au cou du jeune homme. Ce dernier l’attrapa au vol et l’enlaça tendrement. Meriel était aux anges, ici ses espoirs secrets se réalisaient, ici elle pouvait vivre son amour avec Panda, même si celui-ci prenait les traits de l’adolescent qu’il avait été. Ce même adolescent qu’elle avait rencontré lors d’un mystérieux voyage dans le temps, énigme qu’elle n’avait toujours pas percée à jour.
Ils restèrent un moment ainsi, l’un contre l’autre sans parler, le battement de leurs deux coeurs venant seul troubler cet instant de quiétude. Puis doucement, Duncan la reposa à terre sans pour autant relâcher son étreinte. Meriel releva la tête pour se perdre dans ses yeux et eut un brusque mouvement de recul. Elle n’était plus dans les bras du jeune braconnier mais dans ceux, plus puissants, de son maître. Elle savait bien que Duncan n’était que l’apparence plus jeune de Panda, mais c’était beaucoup plus troublant de se retrouver dans les bras d’un homme que dans ceux de l’adolescent qu’il avait été.
Panda resserra son étreinte pour empêcher la jeune fille de s’enfuir. Le mercenaire lui prit le menton et la força à relever la tête doucement mais inflexiblement afin de plonger son regard dans le sien. Dans ses yeux brûlait l’étrange lueur que Meriel avait surprise lors du banquet, mais cette fois ci, son intensité était telle que Meriel eut l’impression qu’elle allait se consumer sous ce regard. Le rouge lui monta au visage alors qu’une bouffée de chaleur se répandait dans tout son corps. Brusquement les lèvres du mercenaire descendirent sur les siennes, les forçant à se soumettre à sa volonté. Sa surprise passée, la jeune fille se rendit sans même combattre aux lèvres audacieuses et répondit à ce baiser passionné avec toute la fougue de sa jeunesse.
Le temps sembla à nouveau suspendre son cours alors que le couple échangeait ce baiser. A regret Panda libéra les lèvres de Meriel ; la jeune fille restait les yeux clos, la tête légèrement inclinée vers l’arrière, les lèvres gonflées entrouvertes, encore étourdie par l’intensité des émotions qui avaient déferlé en elle. Un petit sourire de satisfaction effleura les lèvres du mercenaire. D’une main il caressa tendrement la joue de la jeune fille, frôlant ses lèvres de son pouce. Meriel rouvrit les yeux et gratifia Panda d’un sourire rempli d’amour et de passion. Ce dernier lui prit une main, portant la paume à ses lèvres pour y déposer un baiser. Puis sans prévenir, il relâcha Meriel et fit un pas en arrière.
"Adieu ma douce..."
La signification de ces mots frappa Meriel alors qu’elle tentait de conserver son équilibre, les jambes tremblantes, privée subitement de son soutien. Elle voulut le retenir mais il avait déjà disparu et la brume était revenue tout autour d’elle.
"Panda !" cria-t-elle.
...
Meriel se redressa vivement sur sa couche, le nom du mercenaire sur les lèvres, la main tendue dans le vide comme pour en attraper une autre inexistante. Elle était en sueur et il lui fallut quelques minutes pour retrouver ses esprits et se rappeler où et quand elle était. Tout cela n’avait donc été qu’un rêve ou plutôt un cauchemar. Elle passa sa main sur son front brûlant pour en essuyer la sueur. Son malaise était revenu encore plus fort, semblant la narguer dans la pénombre. Maintenant l’incertitude n’avait plus lieu d’être, Meriel était persuadée au plus profond d’elle-même qu’un malheur était arrivé à Panda.
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