Non mais le fait d'être prof ne fait pas de toi un spécialiste de la gestion des services publics et ne te donne pas avis d'autorité sur la question, tout comme le fait de ne pas l'être ne fait pas qu'on a aucun avis sur le sujet. Que ça soit bien clair, on a tous des avis de merde ici, à des degrés vaguement variables éventuellement, sauf peut être dans notre domaine de spécialité, si tant est qu'on en ait un. Et la spécialité d'un prof, c'est d'enseigner, pas de gérer des services publics. Donc si j'ai aucun problème pour reconnaitre que mon avis c'est de la merde, je me sens pas pour autant dans l'incapacité de discuter du sujet de la gestion des services publics avec toi.
Le fait que je sois prof :
- fait que je sais comment fonctionne concrètement un établissement scolaire, ce dont la grande majorité des parents n'ont qu'une connaissance très vague, si limitant concrètement aux réunions parents / profs et aux RDV avec les différents profs de leurs enfants. Ainsi qu'à l'ENT, qui leur donne accès aux notes.
- fait que je sais comment fonctionne on conseil d'administration, et donc la répartition des heures, les projets d'établissement, la négociation des heures avec le Rectorat (DASEN), la confrontation entre les représentants des parents, des différentes catégories de personnels, etc.
- fait que je suis régulièrement amené à prendre la défense de certains collègues vis- à- vis d'autres collègues, de la direction, des parents, de la vie scolaire, etc. dans le cadre strict de l'établissement, et pas nécessairement sous mandat syndical.
- fait que je participe aux liaisons école / collège, au conseil pédagogique, et au conseil de discipline.
- fait que je me suis syndiqué (SNALC) par la force des choses (et par conviction) pour défendre ce qui doit l'être quand il le faut.
- fait que je suis membre de la Société des Agrégés pour des problématiques plus catégorielles.
- fait que je suis membre de l'APHG pour des problématiques plus disciplinaires.
Et je pourrais encore continuer un peu, mais j'ai la flemme.
Alors OK, je ne suis pas un spécialiste (sauf de ma discipline, mais même ça on se permet de le discuter ici ou là au nom de je ne sais quels principes vagues), mais ça fait de moi une personne en contact direct et quotidien avec ces problématiques, que tu ne peux - toi - effleurer que de temps à autre et par des intermédiaires de qualité variable (TV, internet, presse, témoignages personnels, ouvrages et rapports, etc.).
Que ce soit bien clair : si tu penses avoir un avis de merde, tu peux te dispenser de le partager. Quant à moi, je n'ai jamais eu d'autre prétention que de porter témoignage et d'aider si quelqu'un pouvait y trouver une aide éventuelle. Et je n'ai pas vocation à subir des propos absurdes, comme celui- ci, qui illustre très parfaitement que tu ignores absolument tout de ce dont tu parles :
"
Et la spécialité d'un prof, c'est d'enseigner, pas de gérer des services publics"
Dans l'absolu, oui, dans la réalité quotidienne, c'est bien plus nuancé que cela (et j'aimerais e sauter dans te disant "copaaaaaaiiiiiinnnnnnnn !" mais ça n'est pas possible).
Tu as le droit de discuter de ce que tu veux. Ca n'est pas ce qui te donne une connaissance technique minimale sur les questions que tu abordes. Tu as donc le droit d'écrire absolument n'importe quoi pour perdre ton temps si tu le souhaites. C'est effectivement ta liberté, et je ne voudrais pas t'en priver. Je n'en ai d'ailleurs ni la volonté, ni le pouvoir.
Ne vous trompez pas, si les gens mettent leurs enfants dans le privé, c'est pour éviter certaines populations. Et pour bénéficier de meilleurs cours. Et pourquoi les cours sont ils meilleurs ? Car les classes sont bien plus gérables ... Bref, le système scolaire public français est bon, le problème est posé par certains élèves qui sont en train de le faire couler: c'est un cercle vicieux qui provoque petit à petit la fuite des bons profs, la fuite des bons élèves, et mettre plus d'argent dans le système n'y changera absolument rien tant qu'on ne résoudra pas le problème à la base.
- La destruction de l'autorité par des textes normatifs, ce n'est pas une fatalité, mais un choix politique.
- la lâcheté humaine des personnels hiérarchiques et le sacrifice du bien commun à la carrière personnelle, c'est une question de choix aussi, lié notamment au recrutement des personnels, qui est en crise depuis un moment.
- les classes sont plus gérables tout simplement parce que l'autorité existe de fait (peur de l'exclusion), que le recrutement est à la base (dossier) et que l'homogénéité est plus assurée. Cependant, le privé est le prochain grand cocu de service des années à venir : je me permets de rappeler qu'il est sous contrat avec l'Etat, et que s'il a plus de libertés que le public (encore une fois, principalement sur le fonctionnement des élèves) il n'en demeure pas moins soumis aux mêmes cadres règlementaires généraux.
- les profs sont soumis aux règles relatives aux mutations, ils ne sont pas mobiles et libres de l'être. C'est une grande escroquerie des services de l'EN que de tenter de le faire croire. Moi par exemple, je suis non seulement sous- employé (et pas forcément sous- payé pour ce que je fais) et captif de mon établissement. Mais il faut croire que je suis con parce que je n'ai pas encore claqué la porte. Et bien en fait, j'ai estimé que j'avais là où j'étais une liberté qu'il me serait vraiment difficile de retrouver ailleurs, et, comme les cours se passent bien et que mon confort de travail est assuré tout en ayant un bon rapport heure / salaire, je me sens finalement plutôt gagnant.
- actuellement, le grand truc c'est stopper l'hémorragie vers le privé... sans jamais remettre vraiment en question l'ensemble des causes et des processus qui ont généré cette hémorragie... du coup, une fois encore, on marche sur la tête... et ça ne va donc pas s'arrêter. En revanche, il va y avoir un élargissement du privé et donc un affaissement dans les années qui viennent. Toute la société fonctionne sur la fracturation en segments de marché. Il n'y a aucune raison logique que l'EN échappe à la règle commune : au contraire, elle y est pionnière... Du coup, on aura un privé à plusieurs vitesses, comme on a un public à géométrie variable. Ce qu'il faut donc, c'est justement tout l'inverse de ce que l'on fait depuis des années. Si du moins on veut une école républicaine un minimum égalitaire... Mais même ça, c'est totalement hors sujet et contraire au sens actuel de l'Histoire, notamment chez nos amis de la majorité présidentielle. Le plus drôle est de voir des destructeurs se faire passer pour des constructeurs, des modernisateurs et des réformateurs, et se faire applaudir par une masse d'aveugles, de sourds et de muets.
Pas de démissions massive pour repasser le concours derrière (ou un truc du genre), rien, aucun problème.
Aucun risque lol.
C'est un peu son motto ainsi que "nous vivons au-dessus de nos moyens".
Donc sans surprise ...
Cela dit, nous vivons vraiment au- dessus de nos moyens.
- essayer de limiter un peu l'inégalité des chances
- faire que globalement les gens grandissent un peu moins cons en ayant des contacts avec les différents milieux qui composent notre société
Malheureusement, concrètement, ça se réduit à un abaissement du niveau de tout le monde. J'ai une classe de Sixième où la moitié des élève a les félicitations, et où l'autre moitié rêverait de les avoir, et tente de le faire. C'est rare : ça doit arriver une fois tous les dix ans un truc pareil. Des élèves gentils, qui savent être calmes, qui sont arrivés comme ça au collège, qui s'entraident, qui apprennent déjà à mutualiser le travail pour réviser en groupes, qui ne posent pas de réel problème scolaire, dont les parents suivent avec réactivité. Le Paradis quoi.
Mais c'est le joyau rare (et après l'année dernière, qu'est- ce que ça fait du bien bordel ! Un vrai rayon de Soleil). En réalité, les élèves en retard retardent tout le monde, et l'école accueille de plus en plus de cas difficile, qu'on ne veut pas se donner la peine de caser ailleurs pour des raisons de "coût élève".
C'est surtout que les discussions politiques hors sol dans lesquelles on fait abstraction de la contrepartie financière n'ont que peu ou pas d'intérêt.
La dimension financière, ça n'est qu'un aspect des choses. Un aspect important. Mais un aspect seulement.