/hrp/ Tiens, j'aurais juré avoir posté... tant pis ^^' /hrp/
Épisode 6 : Une lueur d’espoir ?
Lentement, ses idées redevinrent claires. Se poser toutes ces questions n’avancerait à rien. Tout ce qu’il pouvait conclure, c’est que les trois individus qu’il a croisé hier ont plus que probablement enlevé son père, et sont membres des Disciples de l’Happeaukâllipse, une organisation que son père et son ami devaient garder à l’œil, et qui font disparaître ceux qui en savent trop sur eux, ce qui devait probablement être le motif de la disparition de son père.
L’idée de fouiller dans les affaires de son père lui traversa l’esprit. Peut-être y trouverait-il quelque chose, des informations sur ces « disciples », n’importe quoi qui puisse lui être utile. Il se dirigea donc vers l’atelier de son père, et se souvint de ce tiroir auquel il lui avait toujours interdit l’accès.
Tendant sa main tremblante vers la poignée, il la tira d’un coup sec, en vain car le tiroir ne bougea pas d’un pouce. L’examinant de plus près, il constata la présence d’un cadenas magique présentant un code de sécurité de 7 chiffres. Il se mit donc à essayer diverses combinaisons. 1234567 : non. 7654321 : non plus.
C’était donc quelque chose de plus élaboré qu‘une combinaison passe-partout. Il tenta sa propre date de naissance, sans succès. Celle de son père, raté également. Lui vint l’idée d’essayer celle de sa mère. Son père lui avait déjà parlé d’elle, deux ou trois fois, quand le fils le lui demandait. Il se souvint que sa mère était née le 15 Juinssidor 582, et entra donc la combinaison 1506582.
À sa surprise, le tiroir émit un léger cliquetis, et Alphan put l’ouvrir pour constater que le fameux tiroir en question, celui auquel son père lui avait si formellement interdit l’accès sous peine d’extrêmes punitions, contenait… un petit livret tout ce qu‘il y a de plus ordinaire. Sa couverture était tout à fait modeste, une simple feuille de papier renforcée avec du cuir de Bouftou.
Il l’ouvrit à une page quelconque et reconnut l’écriture de son père. En début de page était indiquée la date du 08 Martolo 633, ce qui correspondait à plus ou moins un mois et cinq ans auparavant. Houatche y racontait comment Alphan avait réagi en recevant sa première arme, un marteau de boisaille que Houatche avait utilisé lui-même quand il avait son âge.
Il relut avec émotion la joie que son père avait éprouvée en voyant son fils utiliser son vieux marteau avec tant d’aisance, le trouvant maniable et léger mais solide également. Les larmes aux yeux, Alphan survola l’ensemble des pages et comprit qu’il tenait entre les mains le journal de son père. Il regarda les dernières pages, espérant glaner des informations intéressantes. Deux entrées retinrent son attention.
A la date du 13 Aperirel 638, Houatche semblait heureux d’avoir reçu des nouvelles par missive d’un certain « C. F. », son vieux camarade d’aventures, bien que les nouvelles en elle-même n’aient apparemment rien de réjouissant. « Les Disciples sont beaucoup mieux installés qu’on ne le pensait… […] J‘ai rangé sa lettre sous mon oreiller. » écrivait Houatche dans son journal. Mais qui était ce « on » ? Combien de personnes exactement étaient au courant de l’existence de cette organisation ?
La seconde entrée à attirer son attention fut celle de la veille, le 16 Aperirel. « Phyllies », qui devait être, d’après les suppositions d’Alphan, le nom du disciple de Sadida qui avait rendu visite à son père, s’était mis en chasse de Cracka Cid.
Les yeux du Xélor se fixèrent sur ce nom, et l’espoir commença à le regagner : Si un guerrier de cette envergure s’attaquait aux ravisseurs de son père, il lui était permis d’espérer qu’un jour il puisse retrouver et venger son paternel. La suite fut pourtant moins encourageante : le dénommé Cracka Cid semblait introuvable et disparaissait dès qu’une piste menait vers lui, mais ses agissements continuaient dans l’ombre.
De plus, d’après Phyllies, les Disciples s’en prenaient, non seulement à ceux qui en savaient trop sur eux, mais aussi à des membres des conseils civils de Bonta et de Brakmâr, là où étaient prises les importantes décisions concernant l’administration des deux cités, ce qui excluait la possibilité que ces « Disciples » soient des adorateurs de Rushu.
Alphan réfléchit un instant. Son père était membre du conseil ET en savait un rayon sur eux. Peut-être que Phyllies était resté là pour le défendre et qu’ils s’étaient battus côte à côte. Ou peut-être l’a-t-il emmené lui-même en faisant croire à son enlèvement…
Quoi qu’il en soit, la spéculation ne le mènerait à rien. Il posa le journal, fila jusqu’au lit de son père, en souleva l’oreiller, fut heureux de voir que la lettre y était toujours mais découvrit avec tristesse qu’une partie de l’encre de la lettre s’était étendue sur l’oreiller en question, rendant impossible la lecture de quelques passages.
Apparemment, la milice de Bonta n’était pas au courant et il valait mieux qu’elle ne le soit pas, puisqu’une mobilisation paniquerait la population, ce qui était probablement la raison pour laquelle ils semblaient tout faire pour garder les agissements des Disciples inconnus du grand public.
Une phrase l’intriguait fortement cependant : Pourquoi Allister jouerait-il un jeu dangereux en mettant la tête d’un dangereux criminel à prix ? D‘après ce qu‘il pouvait déduire, il semblait évident que la tête de l‘un d‘entre eux avait été mise à prix, si du moins ses déductions étaient correctes…
Il relut attentivement les passages concernés. « mort »… « pour l’interroger »… le voulaient-ils vivant ? Le roi serait donc au courant de cette affaire ? Alors, sans doute possible, si le roi n’avait pas rendu publique l’apparition des Disciples, c’est qu’il valait mieux que le plus petit nombre soit au courant. Allister avait beau être un roi flegmatique, il avait tout de même un minimum de bon sens.
Au terme d’un moment qui lui parut interminable, Alphan prit une décision. Rester ici ne ramènerait pas son père. Sa destinée l’appelait, à Astrub, la ville neutre réputée pour ses rudes habitants et sa brochette d’aventuriers en tous genres. Même s’il n’y trouvait pas C.F., peut-être serait-il à même de glaner quelques informations sur Cracka Cid.
De plus, il devait voir par lui-même à quoi ressemblait le membre des Disciples dont la tête avait été mise à prix. Si c’était l’un de ceux qu’il avait croisé la veille, peut-être pourrait-il s’informer sur lui et remonter jusqu’à son père. Il prit un grand sac à dos, y mit des provisions pour quelques jours, les potions de Mme Inyifuje et une tente en toile, s’empara de sa bourse (et subtilisa avec une discrétion inutile celle de son père), ramassa son marteau qui traînait dans un coin de la pièce et l‘accrocha à sa ceinture, enfila ses bottes, son chapeau et sa cape, et partit vers la porte Sud de Bonta, d’où démarrait la route qui le mènerait à Astrub.
Épisode 7 : Tous les chemins mènent à Astrub…
Alphan approchait de la porte Sud de Bonta, résolu à partir pour Astrub.
- Hé, où tu vas comme ça ? cria une voix familière derrière lui.
Lentement, Alphan se retourna. Comme il l’avait prévu et craint, c’était bien Edrago qui venait à sa rencontre. Son ami sentit immédiatement que quelque chose n’allait pas.
Il était à l’avance, ce qui était loin d’être dans ses habitudes. Ses yeux étaient rouges, sa mine sombre contrastait avec son visage jovial habituel, il était vêtu de la tenue qu’il emporte toujours lorsqu’ils partaient camper dans les plaines de Cania, équipé de la tête au pied, la bourse à la ceinture, un grand sac sur le dos. De toute évidence, il ne partait pas pour une petite cueillette matinale.
Le Xélor fixa son compagnon intensément, prêt à lui dire au revoir. Sur le visage d’Edrago se lisait une profonde inquiétude face au mutisme de son ami, et face à toutes ces étranges circonstances qui suggéraient l’inimaginable : il ne pouvait quand même pas quitter Bonta ? Pourquoi partirait-il au loin ? Où ? Il n’allait quand même pas voyager seul par les sinistres temps qui courent ?
Tandis que les mots d’adieu se dessinaient sur les lèvres d‘Alphan, les souvenirs des moments passés avec son ami commencèrent à l’assaillir. Il vacilla et tomba sur les genoux, les mains au sol, face contre terre, à 4 pattes, comme l’animal qui les avait attaqués la veille. Il sentit monter en lui un torrent d’émotions auquel s’ajoutaient celles de la veille qu’il n’avait pas pu déverser.
Alors que les larmes lui montaient aux yeux, et qu’avant même qu’il ne puisse s’en rendre compte, elles coulaient déjà le long de ses joues, il balbutia quelques mots de sa voix brouillée, dont Edrago ne put saisir que « …Père…disparu… »
Edrago se figea, l’air interdit. Houatche, l’ancien lieutenant d’élite de la milice Bontarienne, celui qu’on surnommait l’ « Œil du temps » avait disparu ? A voir l’état dans lequel son meilleur ami était plongé, il n’avait pas simplement pris quelques vacances sur l’île de Moon. Mais qui, où, quand, comment, pourquoi ?
Tant de questions… Et pour seule réponse, les pleurs incessants de son meilleur ami, qu’aucun de ses efforts ne parvenait à arrêter. Il eut beau s’accroupir à sa hauteur, lui saisir les épaules, le secouer un peu, lui taper dans le dos, rien ne semblait l’atteindre. Il semblait être dans un autre monde. Loin, si loin de lui.
Ils restèrent dans cette position une dizaine de minutes. Les quelques passants leur jetaient un regard de mépris avant de continuer leur chemin comme s’ils n’avaient jamais croisé la route des deux jeunes gens. Certains ne daignaient même pas leur adresser le moindre regard.
Lorsque Alphan fut finalement relevé, il invita son ami à le suivre en dehors de Bonta, quelque part où il se savait à l’abri des oreilles indiscrètes. Ils marchèrent donc, le Xélor en tête, jusqu’à ce qu’ils furent assez éloignés de la ville où Alphan invita son ami à s’asseoir, s’assit à son tour et prit une profonde inspiration.
D’un seul coup, il lui conta l’entièreté des événements de la veille, retraçant l‘histoire dans tous ses détails. L’étrange disciple de Sadida et le nom des « Disciples de l’Happeaukâllipse » qu’il avait surpris dans la matinée, puis la troublante rencontre qu’il avait faite en partant de chez son ami, l’absence totale de réponse en arrivant à la maison, le morceau de parchemin sous la dague en os, le journal de son père, et finalement la lettre de « C.F. » et toutes les déductions qu’il avait pu tirer de tout cela.
Edrago écouta attentivement son récit, hochant la tête, ouvrant la bouche, se la couvrant, ouvrant grand ses yeux, passant de façon spontanée d’un état d’âme à l’autre. Lorsque Alphan eut terminé son récit, il demeura silencieux à son tour. Le jeune disciple du dieu du temps était sur le point de s’excuser quand son ami de toujours lui coupa la parole.
- C’est décidé. déclara-t-il d’un ton solennel.
- Quoi donc ? demanda son ami, l’air surpris.
- Je viens avec toi.
Alphan parut sur le point de protester, mais à nouveau le jeune Féca l’interrompit.
- Et c’est pas la peine de refuser. Je viens quoi que tu dises, quoi que tu fasses. Tu ne feras PAS ce voyage SEUL.
- Mais… et tes parents ?
- Ce que tu as vu hier ne t’as pas suffi ? Tu veux d’autres exemples de toute l’attention qu’ils me portent ?
Alphan ouvrit la bouche pour protester, trouver quelque chose à redire. Edrago était sur le point de quitter Bonta pour une période indéterminée, avec une destination et un sort plus que vague, dans un voyage dont il ne savait même pas s’il y avait un retour… Pour le suivre, lui, Alphan, son meilleur ami, son compagnon d’armes d’hier, d’aujourd’hui et de demain.
- Allez, fillette, pleure pas va, j’vais chercher des affaires et j’arrive de suite ! lui dit le Féca, l’arrachant à ses pensées.
- Besoin d’aide, mon ami ? questionna le Xélor.
- Tu penses vraiment qu’ils vont remarquer ma présence … ? répliqua l’ami d’une voix amère.
Sans lui laisser le temps de répondre, Edrago tourna les talons et s’en retourna vers Bonta.
- Edrago… merci… marmonna Alphan, laissant le vent emporter son murmure au loin avec les fleurs de pissenlit démoniaque qui germaient avec le retour du printemps.
Une vingtaine de minutes plus tard, temps qu’Alphan avait minutieusement mesuré parce qu’à chaque minute il assommait le monstre le plus proche, Edrago réapparut, vêtu de sa cape favorite, un anneau, une ceinture et des bottes constitués de Blop griotte, une étrange alliance rouge qui semblait importée de Pandala, une amulette à la forte odeur d’aisselle, probablement porte-bonheur, et une coiffe Feudala, l‘identique réplique de celle de sa mère, qu‘il portait de travers, de façon à masquer son visage… Ce dernier objet, celui qui lui conférait le plus d’allure, était, ironiquement, une création de son père. Force était de reconnaître qu’il avait du talent.
- J’ai amené avec moi une carte, lui annonça son ami, comme ça on pourra couper au court sans passer par les grandes routes, qui de toutes façons sont toujours beaucoup trop fréquentées à mon goût.
« Antisocial… » pensa Alphan en souriant légèrement.
- Hé ben quoi, dis quelque chose ! clama le Féca.
- Heu, oui, désolé… Pas de problème, je suppose que le plus court sera le mieux, et puis camper près des routes avec tous ces passants… C’est peut-être pas une bonne idée, donc autant s‘en tenir loin. De toutes façons, comme disait mon grand-père, tous les chemins mènent à Astrub !
- Le plus rapide serait d’aller par l’est, (
monte le volume de sa voix, ton sarcastique) en évitant le bois de Litneg, on passe (
il s’interrompit, le temps de déplier sa carte) près des plaines rocheuses ici, puis il nous faut contourner la forêt de Cania qui se trouve là, passer par la plaine des Porkass comme ceci , la prairie des Blops comme cela, et on devrait alors arriver dans la zone d’Astrub, en commençant par la forêt, puis les champs, et enfin la ville même ! Ok ? Alphan ? Alphan, tu m’écoutes ? ALPHAN !!
Ce dernier cri fit sursauter le jeune z’héros, jusqu’alors fasciné par la taille du monde qui s’ouvrait à lui.
- Désolé… c’est juste que… Woaw ! Le monde est ... grand ! Mon père ne m’avait jamais parlé de toutes ces îles, et ces différentes régions…
- Pour les îles, on verra plus tard, mon père m’a raconté quelques anecdotes de ses voyages là-bas, à l’époque où il voyageait encore… On les visitera peut-être un jour, qui sait ? (
il marqua une pause, fixa son ami et lui tendit la main droite avant de reprendre) Bien. On fait ce voyage ensemble, quoiqu’il arrive. Alors… Prêt ?
Les regards des deux jeunes aventuriers se croisèrent. Alphan tapa amicalement dans la main que son ami lui tendait.
- Prêt ! répondit-il d’une voix convaincue.
Ils se mirent donc en route vers leur première étape, les Plaines Rocheuses de Cania, en se racontant des blagues vaseuses sur les Boo que leurs pères leur avaient racontées, et qu’ils ne comprenaient d’ailleurs toujours pas, mais ce n’est pas comme s’ils s’en souciaient, n’est-ce pas ?
/HRP/ Fin de mise en place de l'intrigue, début de l'aventure

/HRP/