Il fait chaud. Deux heures maintenant que je coure, impatiente, vers le camps des lions blancs. Je me félicite encore une fois de ne porter pour toute armure que mes épaulières et quelques pièces de tissus.
Comment peut-on apprécier se recouvrir d'armure, se couper de la fureur du combat par plusieurs couche de métal et de tissus ?
Le combat je le ressens sur ma peau, je le ressens dans ma chair. Je me fond en lui, je ne m'en protège pas. Un long frisson me parcours tandis que je me remémore mes combats. L'impatience brûle mes reins. L'avant poste il y a deux jours. Les cris et leur douleur resurgissent dans ma mémoire. Je souris.
Non.
Il faut que je me concentre. Mes bracelets de douleur me rappelle à l'ordre. J'ai une mission, une plaisir de mission, mais une mission.
La nuit est sombre ce soir, je le ressent tandis que je cours. Elle m'enveloppe, me protège, me murmure ses secrets. La brise brûlante de cette fin de saison chaude me fait frissonner à nouveau. J'aime cette terre, cette terre qu'ils nous ont volé.
Ils sont là. Je stoppe net, la nuque raide de dégoût. Je ressent leur présence avant même de les entendre. Ils sont tout proche, insouciants du danger, inconscient de ma présence. Je sens leur confiance en eux, leur sens du devoir. Je goûte leur honnêteté, leur droiture d'âme. Elles me laissent un goût de terre, de cendre dans la gorge. C'est insupportable. Ils se sentent si juste, si sur d'eux. Je n'ai plus qu'un désir, sentir leur douleur, goûter à leur cris, entendre leur détresse.
Ce n'est plus seulement l'ordre que l'on m'a donné qui me pousse, la nécessité de réussir ma mission pour la gloire de ma maison qui me porte, c'est le besoin viscéral de leur mort, la nécessité de les éradiquer pour que je puisse continuer à vivre.
Je m'approche, silencieuse. Je les entends clairement maintenant. Un long frisson, encore, mais de plaisir anticipé. Mes dagues semblent chanter d'impatience alors que moi même je ne me contrôle qu'à grand peine.
Ils sont à moi.
La sentinelle ne saura jamais pourquoi ni comment elle est morte. Mes lames glissent sur sa gorge, l'embrassent, un baiser froid et dur, le dernier qu'il connaîtra. Il s'affaisse contre moi, son goût de haut elfe me révulse. Je cours déjà vers le prochain, qui se retourne, me voit, crie.
L'alerte, enfin, est donné. Le cri de celui qui a donné l'alerte se transforme en gémissement de douleur, d'agonie. Il est remplacé par le mien.
Soyez des ombres, sans bruit, frappez sans qu'on ne vous remarque. Mes
Le combat commence, pour de vrai.
Mes lames dansent, chantent, virevoltent. Mes bracelets de douleurs mordent parfois ma chair, délicate brûlure pour me rappeler que je suis en vie pour m'empêcher de m'oublier dans le combat, dans la frénésie du sang qui m'éclabousse.
Je tranche, lacère, coupe.
Mes lames brillent, chantent, embrassent.
Tourbillons de douleur et de sang. Je ne frappe pas pour tuer. Je lacère pour faire souffrir, pour prolonger l'agonie.
Pourquoi tuer alors que je peux faire durer le plaisir ?
Le fil de mes lames tranchent muscles, entaillent artère et gorges. La vie s'échappent lentement des haut elfes qui tombent sous mes coups. Je savoure le goût de leur agonie. Ma peau frissonne sous la caresse de leur sang. Décidément non, je ne comprendrais jamais comment l'on peut prendre plaisir à se battre en armure.
Il ne reste plus personne. Ils sont tous mort ou presque. Déjà... Le silence petit à petit se fait à nouveau. L'amère goût de leur droiture disparaît peu à peu du fond de ma gorge. Il est l'heure de repartir, de rentrer faire mon rapport.
Un bruit.
Je me fige. Il en reste un. J'ai été inattentive. J'ai failli le rater. Je peux presque sentir sa peur. Il doit être jeune. Le voilà, là, au fond d'une tente. Il tremble.
'Si tu me supplies, je te laisserais la vie sauve ' lui dis-je amusée. Après tout, pourquoi me refuser un petit mensonge. Je le sens qui voudrait me croire, qui voudrait oublier son honneur et sa droiture.
'Menteuse'.
D'un simple mot il retrouve, presque, son courage. Il soulève sa lourde hache et se jette sur moi. Il n'a aucune chance. Un pas rapide sur le coté, presque comme si nous dansions et ma lame s'enfonce jusqu'à la garde. Il hoquette de douleur, je tourne ma lame en son sein. Il lâche son arme, sent la mort venir. Il essaie de m'étrangler et c'est alors que dans la faible lueur du feu, à l'extérieur, il croise mon regard. Il sursaute tandis que ma dague s'enfonce à nouveau en lui.
Un autre mot, le dernier. Un dernier mot qui me définie, plus encore que le premier.
'Aveugle'.
Il est mort. J'essuie mes dagues sur sa cape. Leur sang sèche sur ma peau. Je repars.
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