[Récit] Dol Orh'Ant, Conte 1.01

 
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Dol Orh'Ant.

Citation :
Quelque part. Ce n'est pas ici, mais ce n'est pas nulle part. Quelque part, deux autocars garés l'un en face de l'autre servent de portes coulissantes à une ville particulière. C'est d'abord l'architecture qui frappe le voyageur qui arrive jusque là. Des sources et des puits à l'eau verte coulent dans des fontaines faites de métal que des tubes lumineux éclairent. Aucune maison n'est identique à une autre : ici une hutte modeste, là des briques judicieusement montées. Côte à côte, un manoir aux lierres irradiés et un bunker gris rouillé contemple un marché où des fioles de sangs se vendent aussi bien que des pièces d'horlogerie. Aucun des systèmes de défense, tourelles lourdes, canons, grillages, barricades, ne semble avoir fonctionné depuis des mois sinon des années. Et soudain, le voyageur tend l'oreille. Un Humain crie les mérites de son artisanat en souriant au Biomek qui se tient debout en face de lui. Un Mutant vient de conclure une affaire, et s'empresse de le signaler à son amie à la peau blanche, aux yeux bleus et au sang rouge. Quelque part, une cité abrite tous ceux pour qui la guerre n'est pas une solution.

Un traqueur rapporta de l'un de ces voyages une choses que personne n'avait jamais imaginer voir un jour. Il conta comment, alors qu’il entrait dans le bâtiment en poussant une porte de bois vernie, il découvrit des rayonnages de bibliothèque vidés de leurs contenus. Il conta comment, alors qu’il étudiait les étagères délicatement cirées et entretenues, il aperçut posé à plat un livre à la couverture finement reliée et décorée. Il conta comment, alors qu’il tendait la main vers cet étrange objet, les murs commencèrent à trembler, le sol à se craqueler, le toit à s’effondrer. Enfin, il conta comment, alors qu’il courait vers l ‘extérieur aussi vite qu’il le pouvait, il serra le précieux trésor contre lui et le sauvait de la destruction. A l’intérieur de ce livre, aucun mot, aucune note, aucun nom. Une centaine de pages blanches, non numérotées. La couverture ne dissimulait aucune cache. Pourtant, une chose, une seule, éveillait l’intérêt au-delà de la curiosité. Jetée entre deux pages, une unique photographie. On y voyait très clairement deux Humaines, un Mutant et trois Biomeks attablés autour d'un copieux repas. Leurs visages étaient fascinant. Ils avaient tous la bouche grande ouverte, mais ils ne criaient pas. Tous ensemble, ils riaient.

Quelque part. Ce n'est pas ici, mais ce n'est pas nulle part.

Alors que je me remémore ce conte que mon père tenait de son père, un bruit sec éclate à l’arrière du véhicule. Je perds le contrôle quelques secondes avant de réussir à freiner, quelque part au milieu de nulle part. Le scanner n’indique aucune présence biologique, le radar ne renvoie aucun écho. Je laisse tourner le moteur, la zone est éloignée de toute station, et en cas de problème l’INC n’arrivera pas avant plusieurs trop longues minutes. La portière s’ouvre vers le haut, me dégageant le passage. Les deux pieds au sol, je me lève douloureusement. Combien de temps ai-je conduis sans m’arrêter ? Cinq, peut-être six heures ? Mon regard parcourt rapidement les environs tandis que je m’étire, faisant craquer les os de ma colonne vertébrale jusqu’à ceux de mes doigts. Pas un bâtiment en vu, pas un animal, et encore moins un véhicule. Tant mieux. Seul, je ne crains que moi. Pourquoi me suis-je arrêté ? Ah oui… ce bruit.

Les genoux au sol, le front levé vers les nuages, les bras tendus en avant, un mutant utilise le plus précieux présent que sa nature lui offre. Une brume verdâtre commence à transpirer de la terre environnante. La brume gagne en volume et en densité, alors que le mutant sent une liqueur collante couler sur ses joues, les yeux pleurant leur sang vert. Perçant le silence, un cri strident annonce l’arrivée d’une puissance connue des seuls mutants. Le véhicule gémit, cahote, se soulève légèrement. Un rideau de brume aussi verte et épaisse que le sang enveloppe la machine qui grince de douleur. Lentement, la machine cesse de souffrir, lentement, la brume se retire. Les genoux au sol, un mutant goûte son sang du bout des doigts, et commence à se relever. Dans un instant, le véhicule et le mutant seront prêt à reprendre la route.

Jamais je ne la trouverais. Des années de recherche, et rien, pas le moindre indice. Et si ce n’était qu’un conte, si le père de mon père avait inventé cette histoire de toute pièce pour que son fils rêve un peu… Non, je ne dois pas penser cela. Je la trouverais, je la trouverais, je la trouverais… Oui, cette cité doit exister, quelque part, une fraction de ce monde a dû échapper au Changement. Mais… Si jamais je la trouve ? Si le conte est vrai, la bibliothèque n’est plus, et la cité n’est que ruines, comme le reste de ce monde. Et ce livre, je ne l’ai jamais vu… Je n’ai que cette photo, là, et…

! bip ! bip ! bip ! bip !

Quatre points bleus sur le radar, la signature d’un convoie humain. La voiture mutante, rapide, fine, précise, fonce vers le sommet d’une colline proche. Immobile, elle écoute.

! bip ! bip ! bip ! bip !

Le convoie approche, les humains ont certainement repéré la signature du contaminé. De nouveau, une brume verdâtre commence à entourer la voiture, et soudain, une créature intangible apparaît, puis une autre, répondant visiblement à un ordre muet, avant de prendre corps et de se poster de part et d’autre du véhicule.

! bip ! bip ! bip ! bip !

Déjà, le mutant distingue la moto qui ouvre la voie, suivit par deux véhicules à chenilles et un camion de maintenance. Une expédition guerrière, pas un simple convoie de voyage. En un éclair, les deux créatures se jettent au pied de la colline, en direction du convoie humain. Le premier tank manœuvre en direction des créatures, là où le second se contente de positionner sa tourelle. Le camion reste en retrait, et la moto entame un contournement. Alors que les deux créatures ne sont plus qu’à quelques mètres du tank, un fabuleux rayonnement émane de la voiture mutante, perchée sur la colline. Une fraction de seconde plus tard, le tank qui s’apprêtait à faire feu est assailli par une nuée d’insectes. N’y prêtant garde, le tank tente de pivoter, mais les insectes ont déjà commencé à travailler. Se régalant du métal comme du plastique, ils dévorent en l’espace de quelques instants la coque blindée, ne laissant qu’un amas de ferraille trouée avant de se volatiliser.
Pendant ce temps, la moto a fait demi-tour pour venir en aide à ses alliés, harcelés par les deux créatures.

Rapide et précis, le mutant dévale la colline et vient frapper latéralement la moto, l’envoyant dans les airs sur quelques mètres. Un faisceau laser vient la frapper, et elle part en fumée sans jamais avoir eu l’occasion de retoucher la terre. La poussière à peine retombée, un champ électrique commence à faire grésiller l’atmosphère tout autour du camion qui n’a pas encore agit. C’est le moment ou jamais.

Appelant les forces mystiques, le mutant concentre toutes les sources de contamination alentour en un seul point, et semble exploser dans un immense éclat de lumière folle, verte, jaune, blanche : le mutant est devenu contamination pure. Le commando survivant se débarrasse finalement des deux créatures, et entame un mouvement d’assaut pour donner une leçon à ce mutant arrogant. Trop tard. Le nuage vivant avale en un rien de temps le camion ainsi que toute l’énergie électrique qu’il possédait, et, mû par une volonté destructrice, s’avance lentement vers le tank. Ce dernier accélère, mais cette fois en direction opposée, dans une tentative désespérée de fuite. Le nuage semble hésiter, et laisse le tank prendre de la distance. Le blindé ralenti, pivote. Le commando pointe la tourelle vers la source de contamination pure, et engage le combat. Les missiles sont sur le point d’être lancés. Une lumière aveuglante, puis… plus rien. Ce sera la dernière action du commando.

Quelque part dans les terres désolées, un mutant caresse une vieille photographie, avant de la ranger précieusement et de reprendre la route.
Message roleplay
donne la moi, la clé, espèce [édité]
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C'est bien écrit Néanmoins Le style utilisé me semble très loin de permettre l'immersion dans un univers post-apoc


[édité par ( Tchey ) : tu éviteras ce genre de vocabulaire à l'avenir]
Dol Orh’Ant, 1.02

Citation :
Il était trop tard. Déjà, la salve corrosive atteignait la cible, rongeait la carrosserie comme chien ronge un os et atteignait le conducteur. S’il l’on pouvait classer les morts atroces, celle de voir son corps se décomposer doucement, sa chair fondre lentement dans une odeur de brûlure, était certainement bien placée. Le coup était parti par accident : des heures de fatigues cumulées, une mauvaise interprétation de l’écho radar, un mouvement désastreux de l’avant-bras, et voilà, un mutant tuait un autre mutant. Ce n’était pas la première fois que Trois Quatorze tuait, mais ce n’était que la seconde fois qu’il enlevait la vie à un autre mutant, et la dernière, espérait-il en s’effondrant sur son siège. Une main sur le volant et l’autre à sa poitrine, serrant un médaillon poli par le temps, il se laissa aller à ses pensées. Des années auparavant, alors qu’il n’était qu’adolescent, il s’était disputé avec son mentor au sujet de sa formation chamanique. Si le vieux souhaitait le voir suivre la voie de l’harmonie, Trois Quatorze préférait apprendre à maîtriser la contamination et à canaliser cette puissance pour appeler les créatures du Changement.

C’était arrivé au court d’une leçon d’appel. Le jeune mutant devait faire venir une source de régénération, et ainsi marquer son entrée dans le cercle des chamans. Enervé et insouciant, Trois commençait le rituel. Rapidement, la brume répondit à son appel, et prenait forme. Seul au milieu des terres désolées, le vieux chaman contemplait la puissance de son disciple : il était le plus doué de ses élèves, et serait probablement un grand guérisseur lorsque le moment sera venu. Il fallut un moment au vieux pour s’apercevoir que Trois n’avait pas appelé une source de vie. Un grognement sourd se fit entendre, et à la surprise du maître et de l’apprenti, une créature mobile, rapide et mortelle, baignée dans une aura verdâtre, se dirigeait au pas de course vers le chaman. En quelques secondes, il ne restait plus qu’une bouilli sanguinolente et la chose avait disparu. En état de choc, Trois restait sur place, debout à côté des restes de son mentor. Il ne le regardait pas, il ne regardait rien. Le soleil se couchait, et son ombre immense pointait vers l’horizon. Et puis les pensées les plus folles arrivaient à son esprit. Personne ne savait où il était ni avec qui il était. Il pourrait mentir, il pourrait dire qu’un fauve l'avait attaqué, oui, il pourrait dire aussi qu’il cherchait le vieux pour son initiation et qu’il ne l’avait pas trouvé, voilà, ou bien que le vieux avait eu une crise de folie et qu’il avait dû se défendre, ou, ou…

Trois tomba à genoux, et posa une main sur le médaillon qui gisait dans une marre de sang. Il renversa sa tête en arrière, et commença à pleurer. Il ne pouvait mentir, il le savait. L’exile ? Non, c’était bien pire que tout le reste. Il devait faire face à ses responsabilités, et annoncer à son clan qu’il venait de tuer le plus ancien des chamans.

Il ne s’était pas écoulé plus de quelques secondes, mais elles avaient été parmi les plus longues de son existence. De longues, très longues secondes de souvenir. Trois se redressa, la main crispée sur le médaillon moite de sueur. Il regardait autour de lui tout en s’appuyant dans le fond de son siège. La poussière sur le capot cachait les morsures que le temps avait laissé. Sur le siège à côté de lui, encore de la poussière, mêlée à des restes de nourriture et divers composants électroniques qu’il aimait récupérer lors de ces voyages. Derrière, le coffre abritait du matériel essentiel à la survie dans le désert : roues de secours, kits de réparation, munitions, boissons et biscuits. A chaque angle du coffre, des filets qui maintenaient d’innombrable objets et débris. Trois aimait bricoler, et un léger sourire s’afficha sur son visage alors qu’il pensait au nouveau moteur qu’il allait pouvoir construire à son retour en ville. Il jeta un œil par la fenêtre, et constata que la corrosion avait complètement terminé son travail. Il ne restait qu’une trace de brûlure là où se tenait une voiture de reconnaissance quelques minutes plus tôt, et cette trace allait à son tour disparaître, recouverte par la terre que le vent s’efforçait de soulever à longueur de journée. Il ne resterait plus rien de l’incident, sinon ce que la mémoire voudra bien rappeler dans les moment de grande solitude.

Trois Quatorze consultait une carte approximative, cherchant dans le paysage un point de repère qui pourrait lui permettre de s’orienter. A l’ouest, une roche que le temps avait creusé formait une arche sur laquelle les derniers rayons solaires venaient s’écraser. Au nord comme à l’est, une étendue désolée à peine perturbée par la présence de quelques végétaux. Au sud, la terre des mutants, son foyer. Trois envoya la carte rejoindre les miettes et la poussière sur le siège passager, et contempla le coucher de l’astre qui finit par disparaître complètement. Il était totalement seul, il nuit l’entourait, il ne savait pas vraiment où il était. Et Trois souriait, car il aimait plus que tout ce sentiment mêlant la crainte et le courage, la solitude et la tranquillité. Décidant qu’il devait se reposer, il entreprit de trouver un abri rocheux et d’y attendre l’aube. Cette nuit-là Trois dormait d’un sommeil profond que les rêves fuyaient, ces sommeils qui n’arrivent que rarement et qui font qu’au matin, on a l’impression de commencer une nouvelle vie.
J'aime beaucoup , ca mets bien dans l'ambiance. J'avais un peu peur que les joueurs voient les mutants un peu comme des simples orcs de fantasie, j'espère qu'ils liront ces textes .
Citation :
Publié par joueur de jeux
J'aime beaucoup , ca mets bien dans l'ambiance. J'avais un peu peur que les joueurs voient les mutants un peu comme des simples orcs de fantasie, j'espère qu'ils liront ces textes .
Je préfère un orc a un mutant
Dol Orh'Ant 1.03

Citation :
A l'arrière, la porte est condamnée, laissant place à un blindage léger. La visibilité est assurée par une fente grossière au travers de laquelle une main ne passerait pas. Aucune vitre ne vient combler cette ouverture, et la poussière y entre facilement et s'accumule sur les divers accessoires qui trônent dans le vaste coffre. Les sièges arrière ont été arraché, laissant ainsi plus de place pour entasser toutes sortes d'outils et de matériaux de récupération. Ce n'est pas spacieux, il serait difficile d'y tenir allongé, mais c'est le prix à payer pour garder une bonne manœuvrabilité et une vitesse suffisante. Un filet de cuir épais sépare cette partie du véhicule de la cabine du pilote. Quand on lève la tête, on peut voir un ensemble de circuits électroniques qui courent le long du plafond. Ces veines nourrissent l'ensemble de l'armement du véhicule, le coeur étant situé dans la cabine, sous forme de différents écrans de contrôle. De l'autre côté du pare-brise, la poussière s'accumule au niveau des jointures. L'unique essuie-glace central, hors d'état de fonctionner depuis toujours, est à moitié fondu sur le verre. La peinture du capot laisse paraître de larges plaques de rouilles, et par endroit il est possible de passer le doigt au travers Et au delà du capot... l'horizon, le destin, et plus tard, la mort.

Combien de combats encore, combien de pannes, combien de nuits nous séparent, douceur ? Qui de nous deux ira chercher l'autre ? Nous nous sommes parfois croisé, mais jamais nous n'avons échangé de caresse. Ce jour viendra, tu le sais aussi bien que moi. Le temps commence à poser ses marques, mon visage est pareil à la terre du désert, mes mains aussi sèches que l'arbre qui attend la pluie. Mais je n'attends rien. Notre mère a subit tous les supplices, toutes les tortures, et n'a jamais crié. Ils l'ont brûlé, lui ont arraché les chairs, brisé les membres, assassiné ses enfants, puis l'ont abandonné dans ses souffrances innommables, pour ensuite l'achever. Du moins le croyaient-ils. Notre mère est puissante, et ce temps, qui me tire vers toi mon amour, est son plus précieux allié. De ses plaies sont nés de nouveaux enfants, de son sang des lacs, de sa chaire des monts. Elle est tellement belle, mon âme, pardonne-moi. Je veux passer le reste de mes jours à l'explorer. Sois patiente, tu m'auras, je ne peux que perdre dans ce dernier combat.

Il ne s'était pas battu depuis plusieurs lunes, tout du moins contre autre chose que l'environnement naturel. Il était courant d'affronter la faune, et même la flore. Les êtres vivants sur cette Terre transformée tendaient vers l'agression systématique. C'était la solution la plus sûre de survivre : détruire tout adversaire potentiel. La nature n'était pas la seule à appliquer ce principe, et quelque soit la faction, nombres de clans agissaient de la sorte. Trois savait comment éviter les combats, il lui suffisait d'éviter le contact avec la "civilisation". De fait, il était seul. Pour beaucoup, cela est la pire de toutes les souffrances, mais Trois jouissait à chaque instant de ce choix. Il ne devait rendre compte de ses actes à personne, tournait le volant dans la direction qu'il désirait, quand il le désirait. S'il souhaitait interrompre son voyage, il s'arrêtait simplement. Si son estomac réclamait sa pitance, le Mutant chassait. Lorsque le sommeil venait lui souffler sur les paupières, il dormait. De nombreuses sources de contamination lui permettait de faire le plein de carburant -son véhicule acceptant alors ce breuvage bienvenu.

De temps à autres, le Sage connaissait le désir de la chaire. S'il n'allait que très rarement dans les cités de son peuple, il lui arrivait quelques fois de faire escale dans un avant-poste ou un village fortifié. Les femmes qu'il prenaient connaissaient alors l'ivresse pour le temps d'une nuit. Trois avait déjà couché avec une humaine, mais préférait la douce peau verte de ces semblables. Il savait que ces unions étaient en de nombreux endroits punies, de la simple peine de mort au terrible bannissement. Par deux fois, il avait été pris. On eu pitié de lui, on lui proposa une mort rapide. Lorsque Trois demanda à être banni, la stupeur resta marqué sur les visages de l'assemblée. On le chassa alors, persuadé que le Mutant était fou. Et Trois, de partir le sourire aux lèvres.

N'avait-il jamais aimé ? Aussi loin qu'il pouvait se souvenir, non. Il y avait sa famille, de simples commerçants qui lui avaient donné son goût pour l'ingénierie, mais il ne l'aimait pas spécialement. Ils étaient braves, l'avaient éduqué, et il en était reconnaissant, mais n'éprouvait pas d'amour. Il avait eu de la peine pour sa mère lorsqu'elle avait mis au monde un enfant mort né qui aurait été sa soeur, il ne se le cachait pas. De l'amour, non, plutôt de la compassion. Les femmes qu'il prenait, il en éprouvait du respect, les traitait convenablement, tendrement même, mais il ignorait ce sentiment que l'on appelle amour. Presque. La Terre, si belle dans sa passion à cicatriser et à pardonner à ses bourreaux, et la Mort, si attirante et mystérieuse, avaient son amour.
Dol Orh'Ant 1.04


Citation :
Comment en était-il arrivé là ? Un instant, Trois cru avoir oublié son passé. Trop de combats, trop de blessures, la mémoire efface les horreurs pour que l'esprit ne se perde pas du côté de la folie. Peut-être était-ce mieux ainsi. Vivre au présent, sans avoir à se soucier d'autre chose que de sa survie immédiate. Pourquoi survire alors ? Pourquoi ne pas se laisser mourir ? Le seul but de la vie est-il de vivre ? Absurde. Trois savait que ces questions ne connaissaient aucune réponse, mais il ne pouvait s'empêcher de se les poser quand même. Il lui arrivait de rester dans son siège des heures durant, le moteur arrêté, le regarde dans le vide, perdu dans des considérations sur l'existence des Mutants et des Humains. Trois plaçait les Biomeks à part, il connaissait leur origine, il n'y avait pas de mystère là-dedans. Amas de chair et de mécanique, ils avaient été les jouets de l'humanité lors du Grand Changement, jouets conçu pour traquer et abattre ceux qui n'étaient plus des humains, ceux dont la peau, les yeux, le sang, l'essence même avaient changé. Puis, abandonnés par leur mère l'humanité, ils avaient survécu et évolué seul, tandis que les Humains se terraient au plus profond de la planète et que les Mutants continuaient à développer une symbiose avec la contamination. Des décennies plus tard, les trois factions vivaient sous le même astre solaire, contemplaient la même Lune, les mêmes étoiles... les mêmes ruines. Avaient-ils choisi de reconstruire ensemble un monde nouveau, de s'épauler pour faire face à l'inconnu d'une Terre ravagée ? Non. Non. Non.

Les souvenirs de Trois revenaient. Il n'avait donc pas perdu la mémoire. Hélas ? On lui avait appris à vivre dans la haine de l'autre, à ne voir chez les Humains et les Biomeks qu'une menace à éradiquer. Il savait que de gangs parcouraient les landes, et qu'eux étaient une réelle menace. Dégénérés, avides de violence, jaloux, Pikes, Gangsterz et tous ces autres clans n'avaient qu'un but dans l'existence, détruire. Fallait-il que les trois grandes factions suivent le même chemin ? Trois refusait de le croire. Il avait suivi un enseignement de guérisseur, de chaman, mais au fond, quelque chose n'allait pas. Il se rappela l'incident avec son mentor, comment il l'avait tué en appelant la Contamination. Ce jour là, il avait réellement compris. Il avait le pouvoir de créer et de contrôler cette force qui était à l'origine de l'existence des Mutants. De retour au village, il décrivit la scène, il dit la vérité totale, et n'éprouva pas le moindre sentiment. Fierté, compassion, haine, tristesse, remord, rien. On l'enferma le temps de décider de son sort.

Banni.

Dans ce monde désolé, cette Terre déchirée, ces paysages saccagés, là où les gangs, la faune, et même la flore étaient hostiles, rien n'était pire que le bannissement. Lorsqu'une telle peine était prononcée, le banni préférait le plus souvent implorer la mort. Trois accepta le bannissement, et s'en alla sans voir l'effarement sur le visage des ses proches. Il avait droit d'emporter son véhicule et tout le matériel qu'il pouvait transporter, mais pas d'armement. Il ne pris presque rien, sinon des réserves de nourriture et de carburant. Il avait déjà eu l'occasion de parcourir les landes arides, et connaissait suffisamment bien les environs pour se débrouiller quelques jours. Ensuite, il lui faudrait trouver de quoi se défendre, et il avait une petite idée pour se faire. Il avait observé les Pikes, la façon dont ils récupéraient le matériel sur leurs victimes, comment ils l'adaptaient à leurs propres véhicules. Il allait survivre grâce à ceux qu'il combattait.

Oui, Trois allait survivre.
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* Jeux1d100 ? Le blog Jeux1d100.net sur les jeux indécents et Linux, et la chaîne YouTube *
 

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