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Jour 1 de la Décade du Gorille
« Cher Journal. Aujourd’hui j’ai rencontré quelqu’un de formidable… Nous avons combattu ensemble le vilain messager Defias sur la route, afin de l’empêcher de continuer à apporter ses informations volées à son chef. Nous devons nous revoir après-demain soir à 22h30. Je vais devoir choisir comment me vêtir pour faire bonne impression… Mon cœur frémit dès que je pense à lui ». Journal de Metellia…
Ah… j’imagine d’ici le contenu du journal de la jeune demoiselle que j’ai croisée hier… et que je dois revoir ce soir… jeune et innocente… une proie peut-être trop facile… mais… quelle charme, quelle candeur… un visage pâle rehaussé d’une magnifique paire d’yeux verts resplendissants, une chevelure noire abondante tenue en queue de cheval… une adorable petite prêtresse nommée Metellia… Une vingtaine d’années à tout casser… probablement la plus belle que j’aie rencontrée jusqu’à présent… même si… cette petite mage… Callirhoé ? oui, c’est cela… ne doit pas être bien loin… dommage que je ne l’aie point revue… enfin… vivement demain soir 22h30… place de Stormwind… cela promet !
Jour 3 de la Décade du Gorille, matin
Faizon… quel idiot… tu n’aurais… quelle idée… tu aurais dû… t’en douter… Tout avait pourtant bien commencé en début de soirée… Elle était là, toute mignonne, sur la place, les yeux lumineux, vêtue d’une robe blanche et simple, à m’attendre… Quelques phrases bien tournées, sur la manière dont ses bracelets s’accordent à ses yeux, combien elle est charmante ce soir… et je la fais me suivre dans l’auberge de la place… un petit massage des épaules, elle est troublée, un deuxième verre… mais c’est là où ça commence à partir mauvais… et j’aurais dû m’en douter… elle ne boit pas d’alcool… bon, je bois, elle se rabat sur de l’eau…
Bon…
« Dame Metellia… que diriez-vous d’aller nous balader un peu en ville…
-Pourquoi pas messire, je ne serai pas contre, en effet… » Elle me jette un petit regard plein de tendresse… Faizon… tu y es presque, mon ami !
Nous commençons donc à marcher, au hasard, dans les rues de Stormwind. J’apprends quelques petites choses d’elle… son nom de famille est Elensar, elle a 19 ans et est prêtresse, par vocation… elle a une sœur, dénommée Khira. Nos pas nous mènent sur les marches de la cathédrale… je réprime un petit rire sarcastique, tandis que Metellia se fait héler par une jeune femme… qu’il me semble avoir déjà vue… ah oui ! Caitlan… dans le Westfall…
« Metellia… comment vas-tu ? Tu viens te recueillir ? Oh… je vous connais non ?
-Oui, dame… je me nomme Faizon… nous nous sommes rencontrés une après-midi, il y a quelques jours, dans le Westfall…
-Oh, commence Metellia, et que faites-vous donc de vos journées Faizon ?
-Eh bien… en dehors de boire et de passer un peu de bon temps… » Caitlan me regarde, attentive, tandis que Metellia fronce les sourcils… « J’abats des nuisibles à droite et à gauche…
-Messire, enchaîne aussitôt la paladine, vous savez pourtant que notre ordre nécessite un minimum de sobriété… une sobriété totale, même…
-Oh… notre ordre… et à part ça… nous faisons quoi des fanatiques qui ne pensent qu’à massacrer leurs adversaires, et à ces pseudo-paladins qui se targuent de pouvoir agir comme ils le souhaitent au nom de la Lumière, ou de je ne sais quelle bêtise du même genre…
-Vous vous rendez compte de la façon dont vous parlez de l’ordre dont vous faites partie… » J’ai droit à un regard furieux… elle est assez mignonne avec ce regard, je dois l’avouer… mais bon… ce soir… la petite Metellia reste mon seul but, et un but charmant, avec son regard inquiet devant la tournure de la conversation…
« Oui, très bien… la Lumière n’est qu’un ramassis de tromperies… si je pouvais laisser tout cela derrière moi, je ne m’en plaindrais pas… enfin, si vous voulez nous excuser… » Je prends Metellia par la taille, juste de façon à la remettre en marche, évitant de prolonger le contact et d’effaroucher la damoiselle…
Nous reprenons notre route, pour une fois qu’une étendu de verdure va s’avérer utile, je vais l’emmener au parc… ça me paraît une bonne idée… les jolies jeunes filles innocentes et naïves aiment bien les parcs… Faizon, tu as la main, ne la perds pas !
Faizon… ne pas perdre la main, c’est tout le contraire de ce que tu viens de faire… Mais qu’est-ce qu’il t’a pris ! Tout se passait bien au parc… j’amène la discussion sur la famille de Metellia assez rapidement…
« Venez vous allonger près de moi, et me parler de votre famille en contemplant les étoiles… » Nous sommes au pied d’un bosquet d’arbres, l’endroit est tranquille, le ciel dégagé… la demoiselle est jolie au clair de lune, sa pâleur lui donnant une grâce éthérée… (Faizon… tais-toi… )
Elle n’hésite pas, confiante à souhait… (quelle fraîcheur… non… )
« Donc… j’ai une sœur, elle s’appelle Khira… c’est ma grande sœur…
-Et vous êtes proches toutes les deux…
-Quant on était petites… je… » Metellia me fait un sourire (oh… quel douceur… non… tu ne peux pas Faizon, tu n’as pas le droit… tu ne peux pas… ), tire la langue, malicieuse. « Je passais mon temps à faire des caprices et elle cédait toujours… je savais comment m’y prendre… je lui faisais de tous petits yeux… elle craquait à chaque fois…
-Et… vous comptez m’attendrir de la même façon ? »
Metellia penche la tête, me regarde, gênée et amusée à la fois (c’est dans la poche Faizon ! Non… pas elle… pourquoi pas elle ? elle est comme les autres… tu en est sûr ? oui… non ?), et me sourit, avant de reprendre… basculant sur un autre sujet…
« Enfin… Khira… elle est forte elle… elle m’a toujours protégée… moi, je ne suis qu’une prêtresse…
-Metellia, vous vous trompez… vous êtes prêtresse, vous soignez et soutenez Khira en combat, non ? » Elle me sourit, hausse les épaules ‘oui, et ?’. « Et, donc vous veillez l’une sur l’autre… elle a besoin de vous comme vous d’elle… (hésitation de Metellia… qui opine du chef, je continue… tu es dans la bonne direction Faizon… ça va la faire craquer de se dire qu’elle est utile à sa sœur… quoi ? tu le penses vraiment ? Faizon… qu’est-ce que tu es en train de faire, là… ? Faizon ?) et… en général… c’est plutôt la personne qui aide qui veille sur l’autre… donc, vous veillez bel et bien sur votre sœur…
-Oh, je n’avais jamais vu les choses sous cet angle… » Elle a l’air enchantée par mes paroles, me sourit, à nouveau un sourire franc (et tellement adorable… Faizon… non… tu ne peux pas… mais… ce n’est pas genre de jeune femme que je dois… non… si ?)
« Mais vous avez raison », reprend-elle, toujours souriante… Nous nous sommes assis, l’un en face de l’autre, la lune éclaire son visage… allez Faizon, c’est le moment… tu n’as pas trop bu… tu n’empestes pas l’alcool, ce n’est pas le genre de jeune fille à aimer cela, tu as bien joué là ! Seulement quatre litres de bière dans la journée, je m’embrasserais si je le pouvais…
Non… je… je ne peux pas… elle est…
« Désolé… Metellia… désolé… »
« Messire Faizon ! Attendez, attendez… »
Désolé…
Et merde… saloperies de ponts !!!! Je suis trempé maintenant ! Ca m’apprendra à courir en réfléchissant et sans avoir bu…
Et c’est lors de soirs comme ceux-ci que l’on rencontre de nouveaux amis… surtout lorsqu’ils sont tout verts, d’ailleurs… Heureuse découverte, que celle d’un saurien géant dans les canaux de la ville… surtout que l’animal semble avoir eu un coup de foudre pour moi… à moins qu’il n’ait pas tellement apprécié que je lui atterrisse dessus après mon plongeon forcé… En tout cas, j’ai le bonheur de constater que mon haleine avinée n’est peut-être pas si insupportable que cela, comparé à celle d’un saurien dont l’alimentation de base doit se résumer à quelques rats malheureux et aventuriers de passage… un peu mon genre quoi… La bête est grosse, sa gueule profonde, dans ces cas-là, la règle de base est simple : battre en retraite !
Sortant de l’eau, je tombe, la soirée va en s’arrangeant, c’est royal, sur dame Daemonia, qui m’informe que Khoërdren, le chef de la Confrérie, veut me voir ce soir même à la bibliothèque du château royal de Stormwind. Comme si je n’avais que cela à faire… en même temps, c’est bien moi qui suis allé signé la Charte de la Confrérie de l’Equité, hier au soir, à… …… la capitale elfe… Darnassus… trajet intéressant… voyage en bateau plaisant… mais… enfin, ce qui est fait est fait, en chemin Faizon !
« Au fait, dame Daemonia, je serais vous, j’essaierai d’éviter les canaux de la cité… les crocodiles y sont fort gourmands à mon sens… »
Nous voilà dans la bibliothèque, Khoëdren nous a réunis, Daemonia, Nayel et moi-même pour… un instant… Une silhouette ? Je me lève, bondis derrière un mur de livres, pour entr’apercevoir une silhouette blanche et féminine s’enfuir rapidement… elle m’aurait… suivi (c’est tellement attend… non… tu lui as déjà assez fait de… enfin… ) ?
J’écoute d’une oreille inattentive, mais avec la fameuse technique de l’acquiescement régulier, ce que nous raconte Khoërdren. Apparemment, Daemonia est promue trésorière, Nayel cartographe, et moi-même… barde !? Je réprime un éclat de rire qui serait assez malvenue, à peine vingt-quatre heures après avoir validé ma présence dans la guilde… enfin… je pourrai leur écrire ce qu’ils veulent, tant qu’ils me laissent boire tout mon saoul et qu’ils payent bien…
Allez, direction l’auberge : une bonne pinte (bon, d’accord, un bon tonneau) et cela ira mieux ! Je passe devant la taverne du vieux quartier, déjà de quoi entamer de plaisante manière une soirée qui aurait dû continuer de plus plaisante façon à mon sens… et j’arrive donc dans un état nettement meilleur sur la place de Stormwind !
Oh… la soirée prenait pourtant une tournure intéressante… mais… Metellia… qui monte les marches quatre à quatre à mon arrivée… avec un homme… encore un paladin qui exhibe fièrement son appartenance… dommage que je n’aie assez bu pour pouvoir lui vomir dessus…
L’homme avance jusqu’à moi, souriant, il me tend la main, que je regarde d’un œil torve et hésitant… il se ravise, et prend la parole, amical… (enfin… aussi amical que l’on puisse être… face à un homme tel que moi… un ivrogne… qui a fait… souffrir… une amie… elle l’a bien cherché… non ? non… Faizon… non… ) :
« Messire… Faizon, si tel est bien votre nom, je me présente : Thibault, paladin de la lumière au service de l’ordre de Raziel (allez, mon gars, dépêche-toi, un lit et un tonneau de bière, dans le désordre, m’attendent). Je suis un proche de Metellia… » Il semble hésiter, puis reprend… « C’est une jeune femme adorable, un peu tête brûlée… » Il s’arrête sur ces mots, me regardant droit dans les yeux… fils de pute…
Je m’oriente vers les marches ; pour croiser Metellia, les yeux rougis, quelques larmes sèches sur les joues (cela rend son beau visage tellement triste… )…
« Dame… je suis désolé… » Les mots m’échappent presque… qu’ai-je fait ? Elle… ne méritait pas cela….
« Messire, je dois au contraire vous remercier… de m’avoir enseigné ma première leçon de vie… » Son ton est dur, sa voix cassante, mais un léger trémolo dans la voix permet de comprendre combien je l’ai fait souffrir… Comment voulez-vous croiser son regard… même si je ne voyais pas double en cet instant, je ne pourrais la regarder en face…
« Je suis bien trop naïve…
- Ne dites pas cela, dame… je suis… le seul fautif…
-Si on est doué d’un peu de sagesse, on n’écoute pas comme je l’ai fait les flatteries d’un inconnu…
-Dame… je ne peux que vous exprimer tout mon regret… je ne souhaitais pas vous faire souffrir comme je l’ai fait ce soir… Pourrais-je vous revoir… pour vous… Demain ? » Qu’est-ce que tu racontes Faizon ! Sors de sa vie… laisse-la vivre heureuse… ne va pas la briser… tu ne pourras de toute façon…
Elle fronce les sourcils, pendant que je monte les marches, m’avançant vers un lit qui me paraît parfait pour m’effondrer… Derrière moi, trois mots… qui me font frémir…
« Demain, peut-être… »
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