[récit]Le poison des Protopharmaciens

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Suite de mes aventures néocroniennes.
Bien entendu, si un modérateur estime que ça na pas sa place ici, leur effacement est tout à fait possible

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Pour commencer, tu essaies d'ouvrir les yeux pour comprendre où tu es. Mais tu ne peux pas.
Tu ne peux pas, d'abord parce que ton oeil gauche est presque entièrement recouvert par une épaisse membrane rosâtre qui te laisse à peine distinguer ce qui t'entoure. Et aussi parce que, comme te l'indiquent tes doigts qui s'aventurent à tâtons sur ton visage malade, ton orbite droite n'est qu'une cavité putride, tellement rongée par la maladie que même tes ongles en s'y aventurant ne parviennent pas à t'arracher plus qu'une vague sensation de présence étrangère, là au-dessus de ta joue.

Alors tu veux crier. Mais tes mâchoires soudées par les déformations osseuses ne laissent rien échapper de plus qu'un borborygme sourd de douleur et de frustration. Tu te lèves péniblement de ta couche crasseuse, fais bien attention à porter tout le poids de ton corps sur ta seule jambe solide, de peur de tomber et de te briser irrémédiablement un autre os de ta carcasse pourrie.

Puis monte la douleur. Irradiant de tout ton corps. Diffuse et intense. Sournoise et primitive. La marque de la "Spirula", le poison des ProtoPharmaciens. Une douleur à t'arracher la peau en hurlant pour que ça cesse. Dans ta main, un couteau : une lame d'acier polie minutieusement par un de tes semblables, destinée à arracher les organes, meurtrir, décapiter, punir tous ceux qui croiseront ton chemin, qu'ils soient innocents ou coupables, afin que tu ne sois plus seul à souffrir dans ta prison de chair.

Alors tu te mets en marche dans les ténèbres gluantes qui t'entourent, guidé par la faim et la rage à travers les entrailles secrètes de la ville, et sans cesse tu grinces des dents dans l'attente de ce qui [...]

Crépitement de mes synapses quand les effets de la drogue et du bombardement neuronal s'estompent.
Je rouvre les yeux. Mes Deux yeux. A côté de moi, le laborantin avale son déjeuner en coupant les afflux d'énergie de sa machine. J'agite la mâchoire en tout sens, désorientée.
" Remplissez votre rapport sur les pages 4 et 5 du protocole de test, me dit-il sans lever les yeux de ses cadrans, signez, et remettez-le au planton en sortant.
- Au planton ? marmonnais-je, stupéfaite.
- Si vous avez des problèmes d'équilibre ou d'élocution, ne vous inquiétez pas. Ca passera vite. Tenez, avec ca, ca ira tout de suite mieux.
Le laborantin me tend un gobelet frappé du logo de ProtoPharm. Comme sa chemise. Comme ma blouse. Comme cette machine. J'avale une gorgée d'eau en silence avant de la désigner du menton :
- Comment elle marche ?
Il lève les yeux vers moi, ricane:
- Impressionnant, hein ? Ca génère des ondes alpha en masse critique à partir d'un schéma pré-établi. Une fois les tests finis, on va inonder le marché de Néocron avec ce nouveau bébé : rêves à la carte !
- Ca a l'air tellement vrai.
- C'est vrai ! C'est la beauté du truc. Captage synaptique et génération de souvenirs d'un sujet vivant.
- J'avais l'impression d'être lui ! C'était...
- Mince, ca vous a drôlement secouée. Vous avez eu droit auquel ? C'est vrai qu'il y en a des sacrément flippants dans le catalogue.

Il consulte son protocole de test à partir d'un écran près de lui:
- Ben, non... Marche en bord de mer. Pas de quoi stresser.
- En bord de mer ? Bordel, j'étais dans la tête d'un mutant !! J'étais un mutant !
- Hein ?

Je montre la machine de l'index, essaie de ne pas crier:
- j'étais dans la peau d'un mutos des égouts. Seigneur, cette douleur !
Je tremble et frissonne. Derrière sa console, le laborantin ouvre une page d'analyse technique :
- Je comprends pas comment ca a pu arriver.
Je prends le protocole de test, froisse les synthé-pages d'une main en le dévisageant froidement:
- Feriez mieux de trouver, sinon elle ira pas loin votre belle application. vous avez stocké des trucs qui devraient pas y être.
Je me dirige vers la sortie, ramasse mes fringues au passage. Je me changerai ailleurs ; sortir d'ici au plus vite.
- Hey, attendez, vous devez d'abord remplir un autre document, en cas d'incident, c'est pour notre service des...
Je le saisis d'une main par le col de sa chemise, désigne sa machine de l'autre :
- Essaie-la d'abord, connard ! Une seule fois, juste pour voir. Et on en reparle !
Dans mes yeux, l'envie de l'étriper pour ce qu'il a fait à mon corps, à mes doigts, à ma vie. L'envie de saisir ma lame polie pour lui compter les mètres d'intestin. Ma vue se brouille. Je le lâche. La sensation de brûlure me quitte. Je sors de la salle de test sans me retourner.

Et dans ma tête, le crissement de mes mâchoires déformées par les mutations.
"Spirula, le poison des ProtoPharmaciens", me murmure ma mémoire brouillée.


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