Camlann - Histoire de Nicholas

 
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Histoire de Nicholas, chapitre I : Enfant de honte

L’homme saignait abondamment de la cuisse. Une profonde entaille lui allait du genou à la fesse, sillonnant sa jambe comme le serpent enlace le caducée. Il serrait les dents pour ne pas crier, pour ne pas gémir. C’était un guerrier, un vrai, un dur. Qu’auraient donc dit les gens de son village, là-haut dans les collines, s’ils l’avaient vu céder à la souffrance. Les hommes des Highlands savaient y résister. Il tenta d’ignorer sa blessure, de se relever pour aller reprendre le combat, loin au nord. Mais ce mouvement était de trop, et il ne put se retenir ; il cria.

Immédiatement, des mains blanches et délicates vinrent se poser sur son torse, pour l’obliger à se rasseoir. Puis examinèrent ses bandages. Le guerrier leva les yeux vers la jeune femme à qui elles appartenaient. Son visage, pale et délicat, était un délice pour les yeux. Ses longs cheveux blonds tombaient sur ses épaules avec la légèreté d’un voile. La bouche, fine, et toujours souriante, semblait appartenir à un ange. Le guerrier fixa cette bouche, oubliant sa douleur, oubliant sa blessure, oubliant les combats.

Puis elle le regarda, intriguée. Ses yeux contrastaient étrangement avec ses traits. Tout en elle respirait la jeunesse, l’innocence et la gaîté, mais son regard était celui d’un être fatigué, épuisé par les remous de la vie. Un regard endurci par la souffrance. Un regard qui transperçait le guerrier plus sûrement qu’une flèche hibernienne, et l’incitait à tenir ses distances. Il détourna les yeux.

La jeune femme finit de panser la cuisse meurtrie puis s’éloigna. D’autres patients l’attendaient. Le dispensaire de Costwold était plein aujourd’hui. Une grande bataille avait eu lieu entre les forces albionnaises et ces couards de vikings. Cette guerre à trois lui amenait toujours plus de blessés, et toujours plus d’inquiétudes. Tous ses supérieurs avaient été appelés au front. Elle était la seule clerc à disposer d’assez de pouvoirs pour soigner les blessés graves. Et Dieu sait s’il y en avait. Toujours plus de blessés…. Cette guerre, cette maudite guerre ! Elle n’avait même plus de raison d’être. Aucune des trois nations en conflit n’était assez puissante pour dominer totalement une autre. Elle le disait depuis longtemps, cette guerre se finirait dans le chaos. Dans le chaos…

Perdue dans ses pensées, elle continuait son tour d’inspection des malades. Le dispensaire était plein à craquer. Des gémissements montaient de toutes parts. On avait du mal à reconnaître la salle de rassemblement que cet endroit était avant la guerre. Un lieu de fêtes… Un lieu de joie. Maintenant, on n’y trouvait plus que douleur et tristesse. Peut-être quarante pieds sur dix de douleur et de tristesse. Et trente-quatre blessés. Certains n’avaient que des blessures corporelles, mais pas tous. La clerc supportait de voir un cul-de-jatte, mais il lui était bien plus difficile d’entendre les délires d’un guerrier ou d’un mage ayant perdu l’esprit.

Elle arriva bientôt à Polmera, une ménestrelle expérimentée qui avait longtemps côtoyé le « grand Amour » de la jeune clerc, Nicholas, Nicholas Wolfwood. Il était parti « se battre » depuis plusieurs mois maintenant, et n’était jamais revenu vers Costwold. Elle l’avait pensé mort jusqu’à l’arrivée de Polmera. La ménestrelle lui avait assuré qu’il était encore en vie, mais sûrement avec une autre. Un ménestrel ne garde pas ses attaches bien longtemps au même endroit, disait-elle. Et Nicholas était parmi le pire des ménestrels.

Elle était jeune, tellement jeune quand il s’était présenté à l’auberge de son père. Ménestrel itinérant, d’une vingtaine d’années. Il lui avait chanté des ballades, l’avait ensorcelé avec ses mots, et elle avait succombé. Pendant deux mois il était resté auprès d’elle, logé, nourri par sa famille, contre quelques chansons dans la salle commune de l’auberge. Mais un jour, elle ne le trouva plus : seul un mot restait de lui, expliquant qu’ « il devait se battre pour sa patrie ». Et elle l’avait cru. Quelle idiote elle était !

Elle se sortit de ses souvenirs et étudia la blessure de Polmera :
« Et bien, Pol… Tu seras bientôt sur pieds ! »
« C’est pas trop tôt ! Depuis le temps que j’attends ça. Et depuis le temps que tu me gardes loin de mes instruments…»
« Pas de folies quand même. Tu peux quitter le dispensaire demain, mais le repos reste de mise. Tu pourras jouer de ton luth, ou chanter… Mais la danse … Je te la déconseille fortement.»
« Allons, Clarice, je ne suis pas du genre à trop m’activer sans urgence, tu devrais le savoir, depuis un mois que tu me vois plusieurs fois par jour. Et toi, comment va ta grossesse ? », demanda la ménestrelle en pointant du menton le ventre proéminent de la jeune femme.

Clarice ne répondit pas. Elle qui avait été si fière de porter un enfant du beau ménestrel, elle n’en ressentait maintenant plus que honte. Honte à l’idée de s’être laissée prendre par les belles promesses de ce chanteur, honte à l’idée de devoir élever seule un enfant, elle qui avait choisi la voie de l’Eglise. Et pourtant, elle allait devoir le faire. Le bébé arriverait dans moins d’un mois, selon ses calculs. Elle décida ce jour-ci de l’appeler Wardenne, si c’était une fille, ou Nicholas, comme son père, si c’était un garçon. Et elle espéra que son avenir serait plus grandiose que celui de ses parents.
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
Ys : Wardenne (sentinelle 5L7), LGM tailor
Glastonbury : Bazin (ménestrel 50 4L), Nicho (nécro, LGM tailor), Nicholas (wizard 3L)
Histoire de Nicholas, chapitre II : Le début d'une histoire

La rue était vide. Nicholas fit un signe rapide de la main, et une ombre fila vers la réserve du magasin de magie de Camelot. Vérifiant avec soin que le passage était libre, le jeune garçon s’engouffra à sa suite. Il avait l’âge auquel les enfants aiment le risque. Sous toutes ses formes. Et cette nuit, il était comblé. Eviter les gardes quand il s’introduisait dans les réserves ne lui procurait plus aucune excitation, et ce depuis déjà longtemps, bien que le nombre de ses années ne dépasse pas treize. Aujourd’hui, lui et son ami de toujours Sao avaient bien mieux en tête.

Il passa la porte et se plaqua au mur, le souffle court. Il fit signe de la main à Sao de se taire, et écouta. Rien… Il relâcha sa respiration et regarda autour de lui, laissant ses yeux s’habituer aux ténèbres qui régnaient dans la pièce. La nuit était sombre, mais les étoiles éclairaient tout de même légèrement l’extérieur. Ici, aucune lumière ne pénétrait, maintenant que Sao avait délicatement refermé, et bloqué, la porte. Les deux jeunes complices n’osaient allumer leur bougie, de peur d’alerter un quelconque passant, ou même un garde, qui traverserait la rue à une telle heure. Nicholas commença à distinguer les contours de la pièce. Les murs étaient couverts, du sol au plafond, d’étagères et le sol était jonché de coffres et de malles. La pénombre et le silence donnaient un air mystique à l’endroit. Les jeunes garçons avaient l’impression d’être dans un rêve, et pourtant…

Le plus dur était fait. Toute une réserve de trésors s’ouvrait maintenant devant eux… Il n’y avait qu’à se baisser pour ramasser. Nicholas regarda autour de lui, et croisa le regard pétillant de Sao. Depuis combien de temps ils se connaissaient, il n’aurait su dire, mais ils se connaissaient sur le bout des doigts. Sao était légèrement plus âgé que Nicholas, mais cela ne faisait aucune différence aux yeux des deux garçons. Ils se ressemblaient beaucoup, à ceci près que Nicholas était blond alors que son compère arborait des boucles noires qui lui tombaient sur les épaules au plus grand plaisir de la plupart des fillettes de Costwold. Le nez saillant, les pommettes hautes et le sourire angélique, qui leur accordait bien des pardons, qu’ils arboraient tous deux les faisaient se ressembler comme des frères.

Frères ou pas, ils savaient tous deux ce que l’autre pensait, et ils pensaient la même chose : Victoire ! Sao s’avança le premier vers les nombreux coffres qui jonchaient le dépôt, à la recherche d’une arme aux pouvoirs terrifiants, ou d’un talisman d’invisibilité, comme celui que portait le héros dans l’histoire qu’avait racontée Clarice la veille. Nicholas le suivit bientôt dans sa recherche. Il passa rapidement devant les étagères pleines à craquer de parchemins dont un œil entraîné aurait immédiatement remarqué la valeur, et le danger qu’on aurait à les ouvrir, mais ni Nicholas, ni Sao, ne savaient lire. Ni écrire, évidemment. En fait, à part se chamailler, traîner dans Camelot et observer les cavaliers qui traversent le pont de Costwold au grand galop, ils n’avaient pas fait grand-chose de leurs treize années.

De toute façon, ils ne se voyaient pas en érudits ou en mages. Eux, ils en étaient persuadés, étaient de la trempe des grands guerriers, des héros de légende, capables d’écraser un dragon de leur seule épée. Ceux dont la présence pouvait amener une armée ennemie à se rendre sans même combattre. Ceux dont les exploits poussaient les ménestrels, ces bons à rien de ménestrels, comme aurait dit Clarice, la mère de Nicholas, à écrire des sonnets, et à chanter leurs louanges de Snowdonia à Lyonesse. Ceux dont la bravoure était une arme à elle seule. Ils s’entrainaient d’ailleurs souvent, dans leurs jeux enfantins, à vaincre des ennemis, et à recevoir les récompenses qui allaient avec. Plusieurs fois, ils avaient vaincu le célèbre Golestandt, à deux. Plusieurs fois, ils avaient mis en déroute une armée. Mais à chaque fois, cela se finissait en duel entre les deux jeunes garçons.

Sao gagnait la plupart du temps. Il était plus robuste et plus fort que Nicholas. Nicholas était petit, et fin. Il ne résistait que rarement aux chocs titanesques qui ébranlaient les deux jeunes bras tenant fièrement chacun un morceau de bois, ressemblant vaguement à une épée. Parfois, sa vitesse prenait le grand brun en défaut, mais toujours le petit blond recevait quelques bleus dans les cotes et sur les jambes.

Cette fois, ils voulaient aller plus loin. Ils allaient trouver des armes aux propriétés magiques, et s’aventurer dans les plaines entre Costwold et Prydwen combattre les loups et les squelettes qui peuplaient la région la nuit. Cette fois, cela dépassait le stade du jeu. Soudain, Sao étouffa un cri de joie. Il venait de mettre la main sur une rapière, longue mais légère, qui luisait légèrement entre les mains du jeune garçon. Nicholas fixa l’arme. Il l’avait désirée si longtemps, et pourtant, maintenant, il ne pouvait y croire. Ils avaient une arme magique à leur disposition. Ils allaient devenir des héros. Son ami faisait tourner la lame dans ses mains, admirant les gravures qui ornaient la lame.

Mais c’était un autre acier, une autre épée que Nicholas fixait. Celle dont la pointe était appuyée contre sa gorge, celle de l’homme qui le bâillonnait fermement de la main gauche. Il gémit, et Sao se tourna brusquement vers lui, quand un autre homme, sorti de l’ombre comme par enchantement, le bâillonna, de la même façon que Nicholas.
« Alors les mioches, on se prend pour des pies ? », demanda l’homme qui tenait le petit blond. « Ici, elles sortent toutes du même nid, et vous n’en êtes pas. Alors vous allez gentiment nous suivre et on va régler ça entre nocturnes… »
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
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Glastonbury : Bazin (ménestrel 50 4L), Nicho (nécro, LGM tailor), Nicholas (wizard 3L)
Histoire de Nicholas, chapitre III : Sanction

L’humidité se conjuguait au froid pour faire grelotter Nicholas. Cela pouvait faire dix minutes comme dix heures que Sao et lui s’étaient réveillés au fond de cette cellule, qui d’ailleurs était plus un placard qu’une geôle… Ils se rassuraient l’un l’autre sur leur sort futur, se persuadaient que Clarice avait déjà dû les faire rechercher, et qu’on les ramènerait chez eux dans quelques instants… Mais au fond de lui, Nicholas savait qu’ils avaient de gros problèmes. Et il était terrifié à l’idée du châtiment.

Il avait déjà été corrigé par sa mère, parfois même par un garde du château, lorsque ses jeux dépassaient la simple bêtise d’enfant. Comme cette fois où il avait poussé un jeune noble dans la rivière depuis le pont. Mais il savait quel était la peine encourue pour vol. Il aurait la main tranchée, il le savait, il en était terriblement sûr ! Il se recroquevilla dans le noir, caressant sa main comme pour vérifier sa présence, ou lui faire ses adieux. Sao savait-il ce qui les attendait ? Nicholas n’aurait pu dire. Son ami était silencieux depuis quelques minutes déjà, perdu dans ses pensées. Ou peut-être priait-il…

Soudain, sans aucun bruit, la porte s’ouvrit, et la lueur d’une chandelle éblouit les deux garçons. Sur le seuil se dressait l’homme qui les avait capturés dans la réserve du magasin de magie. Il les avait ligotés, puis ballottés par dessus les toits dans tout Camelot comme de vulgaires sacs, pour finir par les déposer dans cette cellule. Il se tenait dans l’encadrement de la porte, un sourire en coin sur les lèvres. Mauvais augure, selon Nicholas. D’autant que l’homme portait à la ceinture une dague qui pouvait tout à fait trancher un poignet d’enfant de treize ans.

Le geôlier, ou qui qu’il fût, leur fit signe de se lever, et de le suivre. Ses gestes étaient brusques, et son silence poussait la nervosité des jeunes garçons à un point difficilement supportable. La bougie éclairait son visage de face en lui donnant un air presque fantomatique. Sao et Nicholas se levèrent d’un bond et suivirent tête baissée. Ils suivirent un couloir, dépassèrent quelques portes, tournèrent à gauche et arrivèrent dans une grande salle, aux murs de pierre, et dans laquelle étaient assis quatre autres personnes.

Ils avaient tous le regard dur, mais l’un deux pétrifiait les deux enfants de terreur. La grande cagoule noire qu’il portait ne laissait voir de son visage que ses yeux. Nicholas savait ce que cet habit signifiait. Et, malgré tout son courage, il ne put s’empêcher de fondre en larme quand on l’emmena dans la pièce voisine, laissant Sao seul aux mains de ce bourreau. On le jeta sur le sol de pierre, et on l’enferma. Il se releva pour tambouriner à la porte, demandant pitié entre deux sanglots, mais en vain, la porte ne répondait pas à ses suppliques, et ceux qui se tenaient derrière encore moins.

Il n’eut même pas le temps de se demander pourquoi on l’avait sorti de sa cellule pour l’enfermer dans une autre que Sao hurla un « Non ! » à fendre l’âme, avant que ce cri ne se transforme en gargouillis étouffé par une main, un chiffon, ou n’importe quoi pouvant servir de bâillon. L’esprit de Nicholas se torturait en imaginant les sévices que pouvait subir son ami dans la pièce voisine. L’image d’un moignon au bout de son bras droit revenait sans cesse à ses yeux.

Le bruit mat d’une lame s’enfonçant dans le bois lui fit perdre le peu d’assurance qu’il avait réussi à rassembler, et il fondit de nouveau en larmes. Il aurait voulu ne pas pleurer, montrer à ces gens qu’il était un grand guerrier, un de ceux dont on fait les légendes. Mais la peur et le sommeil s’unissait pour vaincre le courage du jeune breton. Il n’avait pas besoin de ses yeux pour voir la main de Sao s’abattre mollement sur le sol de pierre. Et il avait suffisamment vu de blessures au dispensaire pour imaginer le flot de sang qui devait s’étendre aux pieds de son ami.

Il se recroquevilla dans l’ombre lorsque la porte s’ouvrit, dans l’espoir futile qu’on ne l’y verrait pas. L’homme, toujours le même, le prit sans précaution par le bras, le mit debout et le poussa vers la porte. Les jambes de Nicholas, tétanisée par la terreur, ne bougèrent pas, et il s’affala face contre pierre. L’homme l’attrapa par le col de la tunique et le traîna, comme une chatte le ferait de son petit, vers la table. Le jeune garçon leva la tête, mais la rebaissa immédiatement en voyant une hache plantée dans la table en bois massif. Il ferma les yeux, ne voulant pas voir le sang de Sao qui devait entourer cette hache.

On lui posa la main sur la table, à plat, et on lui ordonna de ne pas la bouger. Mais même s’il l’avait voulu, il n’aurait pas pu rester immobile. Ses jambes s’affaissaient sous son poids, et ses bras tremblaient intensément. On lui attrapa l’avant-bras, de façon à arrêter ce tremblement, ou du moins à faire en sorte que, malgré lui, la main ne bouge pas. Soudain, alors que Nicholas marmonnait encore une prière, la tête baissée, une voix retentit.

« Jeune Nicholas, tu as été pris cette nuit en flagrant délit de cambriolage, alors que l’autorisation ne t’en avait pas été donnée par notre Guilde. Connais-tu le châtiment réservé à ceux qui sont assez arrogants pour agir sans notre consentement ? »

Sans lever la tête, le garçon acquiesça, sans toutefois arriver à emettre quelque son que ce soit.
« L’acceptes-tu ? »

Il leva des yeux larmoyants, étonnés mais implorants, vers celui qui parlait. La cagoule noir donnait à l’homme une allure froide et impersonnelle qui aurait fait frémir Nicholas même s’il n’avait rien dit. L’homme le fixa, le regard dur. Puis il prit la hache, et la leva au dessus du poignet du garçon. Nicholas ne pouvait détacher son regard des yeux du bourreau. Ils ne reflétaient pas la cruauté qu’il aurait pensé y trouver, mais plutôt l’amusement, un amusement sadique à torturer le breton. Il leva la hache un peu plus haut, mais il ne l’abattit pas.

« Toutefois, nous t’accordons le bénéfice du doute. Tu es jeune, très jeune, aussi ne connaissais-tu peut-être pas l’existence de cette confrérie. Ainsi te proposons-nous un choix. Travaille pour la Guilde, ou soit manchot. »

Nicholas ne connaissait pas le terme « manchot » mais il comprit immédiatement l’alternative qui lui était donnée. Il accepta en pleurant, de soulagement cette fois-ci. Et celui qui tenait son bras le lâcha.

« Alors, bienvenue parmi nous, Nicholas de Costwold. Tu te présenteras demain soir à la tombée de la nuit devant le magasin que tu as tenté de dévaliser plus tôt. Maintenant, rentres chez toi, et lave ce pantalon sur ton chemin, ta mère pourrait être incommodée par l’odeur qu’il dégagera lorsqu’il sera sec. »

« Et… et Sao », parvint à articuler Nicholas.

« Il t’attend dans la pièce attenante… Lui aussi a fait le bon choix. A demain, Nicholas. »

Nicholas se dirigeait vers la porte, ouverte par le bourreau, lorsque :

« J’oubliais, Nicholas. Il est inutile de préciser que si tu parles de cette nuit à quiconque, ce n’est pas que la main que tu perdras… »
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Histoire de Nicholas, chapitre IV : Courte carrière

Ils grelottaient tant de froid que d’émotion lorsqu’ils arrivèrent à Costwold. Passer le mur d’enceinte pour sortir de Camelot n’était plus un problème depuis bien longtemps, tant ils l’avaient fait par le passé. Toutes les lumières étaient éteintes, sauf celles de la taverne qui semblait grouiller d’animation. Une nuit comme les autres, les deux garçons se seraient faufilés parmi les soûlards, les voyageurs, guerriers ou commerçant qui se racontaient avec quelques exagérations leurs plus récentes aventures. Mais cette nuit, ils n’avaient pas le cœur à rêver de combats contre les brigands, ou de bataille contre les elfes.

Cette nuit, Nicholas, il en avait honte, aurait voulu se blottir dans les bras de sa mère et pleurer tout son soul, expulser le trop plein d’émotions qu’il avait accumulé ces dernières heures. Stress, joie, peur, soulagement, avec une intensité bien trop forte pour un cœur de cet âge. Il avait beau se dire qu’un grand héros n’aurait jamais eu ces pensées. Qu’aurait fait Arthur à sa place ? Sûrement pas se lamenter sur son sort en souhaitant pleurer sur le sein de sa mère…

Il avait dit à sa mère qu’il dormait chez Sao, à quelques lieues de Costwold, dans la ferme du père Ryn. Il ne pouvait pas rentrer chez lui sans avoir à s’expliquer, et il ne pourrait jamais tenter de mentir une histoire cohérente dans cet état. S’il voulait imaginer un combat épique dans lequel Sao et lui se seraient échappés après avoir mis en déroute la moitié des assaillants, les larmes qu’il n’aurait pas manqué de verser auraient détruit sa cohérence. Il ne pouvait pas non plus raconter une histoire même moitié moins humiliante que la vérité. Son honneur ne s’en relèverait pas. Il était dans l’impasse.

Il réalisa que Sao devait avoir le même problème que lui. Ni l’un ni l’autre ne pouvaient rentrer. Ni encore moins héberger l’autre. Sao, décidé à ne pas perdre la face devant son ami, expliqua avec les plus grands mots qu’il put trouver que, à fin de s’habituer à leur nouvelle vie, ils devaient apprendre à supporter les conditions nocturnes, et donc rester dehors cette nuit. Une nuit à la belle étoile ne les effrayaient pas, mais ils avaient tant besoin de réconfort !

Ils allèrent dans les collines quelques mètres derrière la taverne, près de l’eau, et contemplèrent le cours lent, si lent du Camelot, le fleuve qui avait pris (ou était-ce l’inverse ?) le nom de la cité dont il formait les douves. Du bruit sortait des fenêtres de la taverne, mais les enfants n’y prêtaient pas attention. Leur fatigue était telle qu’ils s’endormirent sans un mot de plus. La nuit passa, vite, trop vite au goût des enfants réveillés par les rayons du soleil. Elle aurait du porter conseil, mais les enfants ne savaient toujours pas comment se sortir d’une telle situation.

Mais au moins, ils étaient à peu près calmés. Ils réfléchirent, aussi posément que le permettait leur jeune âge, aux options qui s’offraient à eux. Il était exclu de demander conseil à Clarice… Elle aurait su quoi faire, mais les menaces de la veille étaient encore fraîches dans l’esprit des garçons. La fuite ? L’idée était trop tentante aux yeux de Nicholas. Fuir convenait aux personnes sans honneur, aux lâches et aux faibles. Ils n’allaient pas fuir. De toute façon, où seraient-ils allés ? Se cacher était à écarter, tout comme faire comme si de rien n’était. Non, la seule solution était d’aller à ce rendez-vous, et de faire ce qui était demandé.

La journée passa, lente et monotone. Nicholas, comme pour se rattraper, aidait sa mère au dispensaire, allant chercher de l’eau au fleuve ou préparant les repas des blessés. D’habitude, le dispensaire était pour lui l’endroit rêvé pour entendre des histoires. Les guerriers qui passaient par là, contre leur gré, avaient toujours quelques anecdotes pour le garçon. Mais aujourd’hui, il n’avait pas la tête aux histoires. Le retour du pays des héros à la réalité avait été brutal… Clarice lui avait plusieurs fois demandé ce qui le tourmentait, lui touchant régulièrement le front pour vérifier que quelque Mal ne s’était pas infiltré en lui, mais Nicholas ne pouvait rien dire.

Quand le soir vint, il annonça à sa mère qu’il allait jouer avec Sao, et sortit. Sao l’attendait déjà devant le pont qui enjambait le Camelot. Il semblait plus sûr de lui que Nicholas. Ses cheveux bruns, volant au vent, son regard dur et déterminé, lui donnaient un air adulte qui le surprit.
« J’ai bien réfléchi, aujourd’hui » commença Sao. « C’est une nouvelle vie qui s’ouvre à nous. Il y a plusieurs chemins pour obtenir la gloire, la Guilde en est un. Ils peuvent nous apprendre tout ce qu’il nous faut, ils nous offriront le pouvoir de faire de nos vies ce que l’on en veut. »

Nicholas restait perplexe. Faire ce qu’ils voulaient ? Mais ils étaient liés par un serment à une guilde de… de voleurs et d’assassins ! Que dirait sa mère quand elle l’apprendrait ? Et quelle vie, noble et digne, pouvait s’ouvrir devant de tels hommes ? Aucune ! Quand à briser un serment, ç’aurait été en dessous de tout…

Il ne répondit pas, et les deux garçons marchèrent en silence jusqu’au magasin de magie. Ils attendirent là, sans un mot. Une demi-heure, peut-être une heure, passa. Puis l’homme de la veille, toujours et encore lui, arriva, au beau milieu de la voie, à la vue de tous. En passant à la hauteur des garçons, il fit un petit signe discret de la main droite, sans tourner la tête ni ralentir l’allure, les invitant à le suivre. Ce qu’ils firent. Il tourna dans des ruelles, s’engouffra dans une porte, et Nicholas hésita. Et si c’était un piège ? Et si la Guilde avait changé d’avis ? Et si…

Sao le poussa dans l’ouverture. La pièce était sombre, et apparemment vide. Un entrepôt, ou une habitation désertée ? Que faisaient-ils là ? Les doutes du petit blond rejaillirent. L’homme s’avança vers lui, et il commença à paniquer. Ses mains tremblaient, ses yeux terrifiés fixaient le grand barbu qui le dominait d’un bon pied.
« Hé, je vais pas te manger bonhomme… Mais si tu pouvais te pousser, tu es devant l’ouverture. »

Nicholas fit un bond de coté, heureux d’échapper à l’ombre du voleur. Ce dernier poussa une pierre, et un pan de mur entier coulissa, révélant des marches qui descendaient dans la pénombre, puis dans les ténèbres complètes. L’homme prit une torche, l’alluma sur celle qui éclairait l’entrée de l’escalier, et commença à descendre. Les garçons suivirent, et après une descente qui leur sembla interminable, aboutirent dans un corridor, qui les mena droit à la salle où ils avaient prêté serment la veille.

Quelques mètres plus hauts, le sicaire que la Garde Royale de la Cité de Camelot avait assigné à la surveillance de l’entrée Nord du repère de la Guilde se demandait toujours comment un garçon aussi gentil que Nicholas avait pu rejoindre ce ramassis de crapules et d’escrocs. Il décida de ne rien dire à la Garde, mais d’avertir Clarice des fréquentations de son fils.
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Histoire de Nicholas, chapitre V : Punition

La nuit n’était pas finie, loin de là, mais les deux voleurs novices n’en pouvaient déjà plus. Un grand barbu avait été chargé de leur apprendre les rudiments du « métier ». Gal-quelque-chose… Très excités par ce nouveau jeu, ils avaient été pleins d’entrain les premières heures, mais la motivation était vite tombée lorsqu’ils avaient du traverser vingt fois de suite une salle occupée par deux chiens dressés pour attaquer quiconque faisait du bruit près d’eux. En tout cas, c’est ce que disait Galmachin… Nicholas trouvait Sao très peu discret, largement trop peu à son goût, et pourtant les chiens continuaient de dormir paisiblement. Aussi le jeune garçon pensait-il que l’histoire du dressage, c’était un peu du pipeau, et faisait beaucoup moins d’efforts.

Il attendait avec impatience d’apprendre les techniques de combat qui faisaient la renommée de la Guilde, aux dires du barbu. En tout cas, c’est ce qu’il ne cessait de répéter. Qu’avait l’habitude de dire Clarice au sujet de la carotte et du bâton ? Nicholas sentant la fatigue prendre le dessus, montra son impatience et demanda quand ces exercices inutiles prendraient fin. En réponse, il reçut une claque retentissante, qui l’étourdit un instant et le fit tomber. La première claque qu’il recevait, la première vraie figure d’autorité qui se tenait devant lui. Il chercha une riposte, en imagina des centaines, parmi lesquelles rendre sa baffe au grand poilu, mais finalement, il jugea que la meilleure solution était encore de sangloter sur son sort et sur sa joue.

Le regard du barbu vers Sao en disait long sur les conséquences d’un quelconque manque de respect envers la formation qu’il recevait ou celui qui la leur prodiguait. Aussi Sao ne bougea-t-il pas d’un pouce. L’homme le terrifiait bien plus que les chiens, et il arrivait maintenant à garder un silence au-delà de tout reproche. De toute façon, même s’il l’avait voulu, ses muscles refusaient tout bonnement de faire le moindre effort. C’est pourquoi il ne bougea pas non plus quand Galtruc lui demanda de relever Nicholas et de rentrer chez lui. Le barbu s’avança vers Sao et lui décocha à lui aussi une baffe d’une amplitude assez impressionnante, puis sortit de la pièce sans un mot, fermant la porte derrière lui.

Nicholas fut soulagé de n’entendre aucun bruit de clef après que la porte aie claqué. Au moins n’étaient-ils pas enfermés, comme cela semblait devenir l’habitude dans ce bâtiment. Cette pensée l’aida à dominer ses sanglots. Il se releva et marcha vers la porte. Elle s’ouvrit dans un horrible grincement lorsqu’il tourna la poignée. Il jeta un rapide coup d’œil dans le couloir qui se trouvait de l’autre coté, et, rassuré de le trouver vide, fit signe à Sao de venir. Ce dernier, qui était resté d’un stoïcisme exemplaire après la correction qu’il avait reçu, annihila tous les plans de Nicholas pour sortir de là discrètement en avançant à pas lourds vers la porte, et en s’engageant dans le couloir aussi pesamment qu’un troll.

Nicholas suivit, après un instant d’hésitation, et il eurent vite fait de retrouver les escaliers qui les avaient amené ici. Ou en tout cas des escaliers qui y ressemblaient beaucoup. La montée fut avalée quatre marches par quatre. L’idée qu’il était bizarre que personne ne remarque la fuite de deux gamins aussi peu discrets qu’eux effleura l’esprit du jeune blond, mais la fatigue associée à l’effort physique l’empêchaient d’aligner deux pensées cohérentes. Seul le sentiment de satisfaction d’être de nouveau à l’air libre l’atteignit donc lorsqu’il passèrent la porte camouflée qu’ils avaient emprunté à l’aller. Et ce fut en riant qu’ils coururent vers l’auberge dont le toit permettait d’accéder au remparts, et de là à l’extérieur (en sautant dans le Camelot qui s’écoulait en contrebas).

L’entrée dans l’eau froide, comme d’habitude, leur fit un choc. Pas forcément désagréable, car revigorant… Ils nagèrent vers la rive opposée, déportés par le courant sous le pont de Costwold. En sortant de l’eau, ils se déshabillèrent pour mettre leurs vêtements à sécher, puis s’allongèrent sur la rive. Ils s’endormirent bien vite. Ils étaient loin de se douter qu’au même moment, un sicaire avait réveillé Clarice, et lui avait exposé ce qu’il savait de l’embrigadement de son fils. Clarice avait tout d’abord paniqué, puis avait pris sa décision, dure mais nécessaire. Le sicaire, qui connaissait la clerc depuis longtemps déjà, se fit un plaisir de la réconforter. En tout bien tout honneur, bien évidemment.

Au matin, quand Nicholas, réveillé par le soleil, arriva chez lui, fut surpris de ne pas trouver sa mère en train de s’occuper des malades comme à son habitude. Sao, en arrivant chez lui, fut encore plus étonné de voir ses parents en pleine discussion avec Clarice, la mère de son ami, à une heure si matinale. Sa mère connaissait un peu la clerc, mais de là à l’inviter chez eux ? Et qui était cet homme svelte, entièrement habillé de noir ? Lorsqu’il pénétra la pièce commune de la ferme du père Ryn, ce dernier se leva prestement, colla une claque que Sao jugea assez puissante sur la joue de son fils, et envoya celui-ci dans sa chambre. L’apprenti voleur ne put donc pas entendre ce qu’il se disait, d’autant que lorsqu’il essaya d’écouter au mur, il s’endormit aussitôt.

Lorsqu’il se réveilla, sa mère était en larmes, et le visage de son père affichait une détermination terrible lorsqu’il lui tendait une sacoche de voyage, qui, Sao le découvrit en l’ouvrant, contenait son habit de rechange. Ne comprenant pas trop ce qu’il se passait, il demanda à son père :
« On part en voyage ? »
« Non petit con ! TU pars. Tu vas passer les sept prochaines années de ta vie au monastère de Sainte Elizabeth. Ca t’apprendra à désobéir à ton père et aux enseignements de Notre Seigneur ! »

Sao ne réalisa pas immédiatement la portée de la phrase sèche de son père. Mais au final, sa réaction fut la même que celle de Nicholas lorsqu’il appris la même nouvelle : il s’effondra, abattu, ne sachant ni que faire ni que dire, résigné à son sort. Et c’est en silence que les deux compagnons montèrent dans une charrette pleine de tonneaux vides qui faisait le voyage vers Sainte Elizabeth…
Histoire de Nicholas, chapitre VI : La fuite

- Grouilles-toi, bordel !
- Mais ta gueule… je fais ce que… je peux !
- On va se faire choper si tu te grouilles p…
- Putain… je vais… t’exploser… une cheville… on verra… si t’arrives… à courir…
- Hé ! C’est pas ma faute si tu sais pas courir sans te faire mal quelque part ok ? Alors arrêtes de me prendre la tête.
- C’est moi… qui te prend… la tête ??
- Ben tout de suite là ? Ouais…
- Attends que… je te… rattrape !
- Je peux attendre longtemps.
- …
- Bon files ton sac on ira plus vite…
- C’est… que maintenant… que… tu y penses… ? Comme… quoi… pas besoin… d’un cerveau… pour… courir…

Nicholas donna son sac à son porteur du soir. Pourquoi fallait-il toujours qu’il joue de malchance ? Pourquoi cette pierre s’était-elle placée en travers de son chemin ? Et pourquoi avait-il posé le pied juste à l’endroit où elle se trouvait ? Il balaya ces questions, qui lui rappelaient trop les leçons du Père Paltrot sur les liens entre religion et destin, sur l’existence du hasard et autres sujets bien compliqué pour un jeune homme dissipé. Impossible de philosopher quand on a mal à la cheville de toute façon. D’autant que les lacérations qu’il avait dans le dos commençaient à le faire souffrir.

Celles-ci étaient une conséquence plus ou moins directe de la découverte par le nouveau Père Surveillant du trafic d’Elize, l’alcool d’orties que produisaient les frères pour leur consommation personnelle (et non pour celle des novices), auquel Nicholas avait pris une part plus qu’active. A vrai dire, il en était le co-instigateur, avec Sao. Qui d’autre de toute façon ? Toute activité des novices qui sortait du cadre de la contemplation et de la prière découlait à coup sûr d’une idée de l’un des deux. Ce trafic avait plutôt bien marché. Les deux garçons avaient maintenant un capital assez conséquent, ainsi que des crédits chez pas mal d’adolescents du village voisin.

L’ancien Père Surveillant, Dieu ait son âme, fermait les yeux. A son âge, il avait bien du mal à les ouvrir de toute façon. Mais le nouveau… C’était autre chose. Les deux « trafiquants » avaient perdu l’habitude de dissimuler leurs agissements dans l’enceinte du dortoir, auquel seuls avaient accès les novices et le Père Surveillant. Ce dernier n’eut donc pas à se creuser la tête pour savoir qui faisait disparaître les bouteilles des réserves et les faisaient apparaître dans les dortoirs.

Le dortoir avait d’ailleurs été divisé en deux clans ces dernières semaines, suite à cette découverte. Les Bénédictins étaient persuadés que le Père Surveillant avait été réveillé cette nuit-là par les braillements de Benoît, qui chantait, plus fort que juste, quelque chose qui ressemblait fortement aux Filles de Cornouailles. Cela lui avait d’ailleurs valu le surnom de Seins-Benoît ce soir-là. L’autre clan qui s’était formé et auquel on se référait communément en parlant des Cisterciens pensaient plutôt que l’événement fondateur du Nouvel Ordre (à vrai dire il n’y avait pas d’Ancien Ordre, vu que du temps de l’ancien Père Surveillant, il n’y avait pas d’ordre du tout dans le dortoir des novices du Monastère de Sainte-Elizabeth) était l’utilisation de la Cisterce.

La Cisterce est devenue un mythe, une légende chez tous les Novices d’Albion. C’était, avant que Sao et Nicholas ne « l’empruntent » ce fameux soir, un appareil de recherche méditative comme le décrivait le Père Paltrot. Son fonctionnement était relativement simple, mais l’objet en lui-même était d’un compliqué qui inspirait au respect. Lors de ses nombreuses heures passées en pénitence, Nicholas avait souvent contemplé, fasciné, les volutes de fumée qui s’en échappaient lorsque le Père Supérieur cherchait le soutien de Dieu. Il en avait aussi profité pour imaginer mille et une façons de l’utiliser, et il était bien décidé à toutes les tester. Finalement il n’avait pu en essayer qu’une.

Dérober la Cisterce n’avait pas été facile, mais Sao et Nicholas avaient déjà tenté, et parfois réussi, plus dur. Comme le livre de prières de Paltrot. Ou la mule de ce marchand de Camelot lors d’une de leurs escapades au village. Forts donc d’une certaine expérience, assez impressionnante d’ailleurs pour des moines, qui plus est de quatorze et quinze ans, ils avaient profité de l’absence de Paltrot pour démonter, transporter, et remonter la Cisterce. Puis il avaient mis du charbon, et avaient ajouté des feuilles d’orties pilées. La fumée qui avait empli la pièce lorsqu’on avait allumé le tout, associée aux quelques bouteilles d’Elize qui circulaient, rendit vite les novices quelque peu euphoriques. Et leur donna parfois des idées.

L’une de celles-ci fut de rajouter au brasier de la Cisterce une bouteille encore fermée, et donc pleine, d’Elize, pour « essayer ». Les moines ont l’habitude de dire de l’Elize que c’est un alcool, contrairement aux liqueurs de pomme, pêche, pomme de terre et autres légumes que certains marchands amenaient parfois lors de leurs livraisons au monastère. Inutile donc de décrire la réaction du feu lorsqu’il se vit offrir une bouteille entière de cet excellent combustible . Il explosa littéralement de joie. Et la Cisterce avec. Le bruit provoqué fut d’ailleurs un magnifique contrepoint aux dernières notes de la tentative d’interprétation des Filles de Cornouailles par Seins-Benoît.

Mais, que ce soient les Bénédictins ou les Cisterciens qui aient raison n’a que peu d’importance pour notre histoire. Le fait est que quelque chose réveilla le Père Surveillant, qui entra alors que Sao tentait de cacher le reste des bouteilles, que Nicholas se demandait s’il fallait donner quelques coups de plus à l’imbécile (dont on taira le nom) qui avait eu cette brillante et bruyante idée qui avait fait tant d’étincelles et que le reste du dortoir était pris d’un fou rire collectif qui ne cessa que modérément à l’annonce des pénitences futures. Les deux passèrent la nuit dans les caves (où ils découvrirent que les rats qui peuplaient les sous-sols du Monastère n’étaient en fait pas du même type que ceux qui peuplaient les cachots de la Guilde des Ombres de Camelot).

Deux jours plus tard, ils étaient devant Paltrot, qui n’était que modérément surpris par les faits. Lionel, le Père Surveillant, était quant à lui terrorisé par la réaction, ou plutôt le manque de réaction, du Père Supérieur. Ce genre d’incidents arrivaient donc tous les jours dans cet établissement ? Il n’aimait que peu faire régner la discipline. Lui qui pensait avoir trouvé ici un havre de paix pour méditer et se rapprocher de la Lumière… Il y avait en fait une autre raison que l’habitude pour expliquer la placidité de Pal’, comme on l’appelait dans le dortoir.

Il avait déjà longuement réfléchi à la façon de traiter les deux typhons qui lui avaient été amenés il y avait trois ans. On lui avait demandé alors de leur faire découvrir la Lumière afin de les éloigner des Ombres. Paltrot n’avait jamais adhéré à cette idée, mais certains penseurs voyaient la Lumière comme une énergie invisible, impalpable, mais présente dans tout être et toute chose. L’énergie qui faisait briller le soleil, qui faisait pousser les plantes, qui faisait bouger les hommes… Vue en tant que telle, la découvrir devenait un non-sens.

Il avait essayé de leur inculquer les fondements de la Religion. Il avait essayé… Nicholas et Sao étaient d’ailleurs relativement intéressés, mais plus de l’intérêt que porte un Maître d’Arme à un nouveau type d’épée que de celui que devrait porter un homme d’Eglise aux fondements de son Ordre. Paltrot voyait la Lumière comme tout homme d’Eglise avait appris à la voir. Une manifestation de Dieu et de sa puissance. Il était intimement persuadé qu’il était impossible d’avoir un quelconque contrôle dessus. Oh, bien sûr, il avait vu des Clercs exercer leurs talents. Et il était indéniable que lorsque leurs incantations se terminaient, la Lumière frappaient leurs ennemis. Mais étaient-ce les Clercs qui contrôlaient la Lumière, ou l’inverse ? Selon Paltrot, la Lumière aidait ceux qu’elle jugeait digne en récompense de leur Foi et de leur apport à la grandeur de Dieu et d’Albion.

Mais il devait admettre que la puissance des Mots Sacrés, les pénitences qu’il distribuait à profusion, la promesse d’un Autre-Monde, d’un Au-Delà meilleur, les menaces de souffrance éternelle ou même la démonstration de la puissance de la Lumière n’avaient rien fait pour changer l’attitude des deux novices. Il ne pouvait pourtant pas les renvoyer chez eux. D’abord parce que ç’aurait été un choc trop grand pour le jeune Nicholas d’apprendre la mort de Clarice, il y avait de cela quelques mois, et ensuite parce que pour Paltrot, ce serait reconnaître l’échec. Et de cela il n’était pas question.

Il avait donc réfléchi à une façon de régler le problème que lui posaient ces deux-là en partant du principe, auquel il n’adhérait pas, que la Lumière était une sorte d’énergie naturelle. Si cela avait une certaine part de vérité (il était évident que ça ne pouvait pas être vrai, car cela aurait signifié que les Mots Sacrés se trompaient), alors il n’était pas surprenant qu’il n’y ait eu aucun moyen de faire découvrir la Lumière à Nicholas et Sao. Ces novices débordaient tout simplement d’énergie. Il n’y avait plus de place pour en faire entrer une autre, plus pure : la Lumière. Il fallait donc les aider à se séparer de leur énergie, afin de, en quelque sorte, faire de la place.

C’est ainsi que les journées de Sao et Nicholas se remplirent de façon tout à fait alarmante pour les deux jeunes hommes. Et c’est pourquoi ils couraient en direction du village. C’est aussi pourquoi, indirectement, Nicholas s’était tordu la cheville en atterrissant sur une pierre traîtresse depuis le mur ouest du Monastère.

Ils devaient en bas du monte-charge avant le moment de la relève. Deux habitants du monastère n’étaient ni moines ni novices. Ces deux paladins, trop vieux pour affronter des Trolls ou autres Firbolgs, s’étaient retirés ici et menaient une vie paisible en échange de quoi ils se faisaient les intermédiaires entre le Monastère et le monde extérieur. Certains moines refusaient tout contact avec un être non totalement pur, ce qui excluait la possibilité d’avoir des marchands venir directement au monastère. Il y avait donc un mécanisme, qui pourrait être considéré comme un monte-charge, même si techniquement le trajet qu’il faisait parcourir aux provisions qu’il transportait était loin d’être vertical. Et l’arrivée de ce « monte-charges », coté village, était gardé par un de ces paladins, et impossible à contourner, ce qui en faisait un poste de garde tout à fait adéquat.

La seule façon pour les deux adolescents de passer ce point stratégique était d’y être lors de la relève, à l’heure ou un Paladin laissait sa place à l’autre. Cela se passait au lever et au coucher du soleil. Et la nuit était bientôt là.

- ‘tin mais t’as mis quoi dans ton sac pour qu’il soit aussi lourd ?
- J’sais plus… pas trop… fait gaffe…
- …
- Mais… ta faute… fallait pas … me presser autant…
- Au nom du Ciel pourquoi il a fallu que je tombe sur un boulet pareil ?

Le soleil disparaissait tout juste lorsqu’ils arrivèrent au monte-charge. Ils étaient passés à cet endroit bien des fois pour aller fouiner au village. Ils savaient donc où regarder pour voir si le garde était en place ou pas. Il ne l’était pas. Les deux novices reprirent donc leur course vers le village. Ce qu’ils ne savaient pas, c’est que ledit paladin était en fait quelques mètres plus bas, en pleine discussion avec un des bergers du village au sujet de la disparition d’une des chèvres de son troupeau.

Ce léger manque de prévoyance leur amena plus de travaux dans les jours qui suivirent, ainsi qu’une surveillance relativement étroite. En fait, Paltrot avait instauré un système dont il était à la fois fier et honteux, qui consistait à donner à Nicholas et Sao les corvées qui incombaient à tout novice qui reporterait un acte suspect de leur part. Ces deux-là se lasseront bien un jour…
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
Ys : Wardenne (sentinelle 5L7), LGM tailor
Glastonbury : Bazin (ménestrel 50 4L), Nicho (nécro, LGM tailor), Nicholas (wizard 3L)
Histoire de Nicholas, chapitre VII : Un simple coup de Bâton

Certaines personnes semblent penser que les jours se suivent et se ressemblent. Pour Nicholas et Sao, il n’y avait rien de plus faux. Enfin, les jours se suivaient en effet, mais coté ressemblance on avait déjà fait mieux. Chaque matin, c’était un nouvel univers qui s’ouvrait devant eux. Et chaque soir une nouvelle pénitence. A vrai dire, le seul point commun que l’on pouvait trouver en comparant deux de leurs journées était les heures passées à s’entraîner au maniement du Bâton.

Tous les Pères-Instructeurs, que ce soit en Connaissance de Dieu, en Techniques Curatives, en Philosophies Barbares ou en Histoire de la Lumière et d’Albion, les désignaient comme les élèves les moins assidus qu’ils aient jamais eu. Tous sauf un. Le Père-Instructeur Maël était très fier des deux bretons. Il répétait souvent n’avoir jamais vu un tel enthousiasme chez des novices. Nicholas n’était pourtant que modérément doué avec son Bâton, au contraire d’ailleurs de Sao, mais les coups qu’il se prenait chaque jour lors de ses séances d’entraînement ne l’empêchaient pas de profiter de n’importe quel temps libre (denrée rare pour ces deux là) pour tenter de nouveaux coups et de nouveaux enchaînements en compagnie de son ami.

A vrai dire, être doué ne signifiait pas grand chose dans l’apprentissage du Bâton. La maîtrise de cette arme nécessitait de toute façon une somme de travail à faire pâlir un fermier Highlander. Les différences initiales avaient donc tendance à disparaître avec le temps. Par contre, Père Maël n’avait que rarement, voir jamais, vu d’élève non doué travailler avec autant d’entrain. Car lorsqu’on ne sait pas esquiver, hé bien, on se prend des coups.

En tout cas, le Père-Instructeur ne se lassait pas plus que les deux jeunes hommes de leur entraînement. Il était devenu une nouvelle figure paternelle pour eux. Plus qu’un simple Père, il perdait de temps à autre sa majuscule. Peut-être revivait-il sa jeunesse à travers ces deux garnements. Peut-être se sentait-il juste obligé d’être de leur coté, tant il semblait que personne ne les comprenait. Toujours était-il qu’il prenait toujours leur défense lorsque les discussions du Conseil des Instructeurs se nourrissaient de leurs frasques, et que les décisions à prendre été liée à leur dos et à un fouet, ou quoi que ce soit qui s’en approche.

Nicholas trouvait le combat au Bâton bien plus amusant que celui à l’épée. La force physique importait moins dans cet art, et donc Sao perdait un peu de son avantage. Seulement un peu, mais c’était déjà ça. Il préférait la beauté du geste à l’efficacité, et se battait donc avec beaucoup de mouvements inutiles, pirouettes et autres acrobaties. Cela expliquait peut-être aussi cette différence de niveau. En tout cas, c’est ce que disait le jeune breton.

Ce jour-là, le combat était plus équilibré que d’habitude. Nicholas avait même dominé le début, plaçant deux coups aux jambes de Sao, son point faible. Il savait que son ami n’avait jamais pu se déplacer correctement dans une robe. Il se prenait les pieds dedans lors des déplacements latéraux, et n’avait pas encore saisi l’intérêt qu’un tel habit avait lorsque les coups venaient de bas en haut en visant les… la… enfin ça quoi… Nicholas insistait donc sur les jambes, avec des petits coups d’estoc rapides et précis, mais peu esthétiques. Il décida donc de changer. Sur une tentative de contre-attaque de Sao, il tourna sur lui-même, plongea sur sa droite et se releva d’une roulade. Dos à Sao, qu’il imaginait déjà en train de se demander ce qu’il se passait, il lança son bras droit d’avant en arrière, en laissant son Bâton filer entre ses mains jusqu’à ce qu’il ne le tienne plus que par le bout. Il entendait le bruit caractéristique d’un objet se déplaçant à grande vitesse, satisfait que ce soit son Bâton qui le produise. En deux pas il se retourna, et joignit sa main gauche à la droite pour que Sao se souvienne de ce coup pendant quelques jours, voir semaines. Il ne vit pas son Bâton s’écraser sur le dos de son compagnon. Il ne vit pas non plus celui de Sao s’écraser sur sa tempe. A vrai dire, il ne vit qu’un bout de ciel, puis un de terre qui le remplaça, puis le noir.

Que du noir… La porte s’ouvrit sur Clarice. Elle tenait en laisse la Cisterce, qui aboyait comme si elle était enragée. Sa queue frétillante se terminait en tire-bouchon, mais cela n’aurait pas suffi à ouvrir les centaines de bouteilles d’Elize qui se trouvait sous son lit. A vrai dire, il n’y avait pas besoin de les ouvrir, vu que le monastère entier baignait dedans. Nicholas se sentait emporté par le courant de la rivière, au goût d’Elize, en crue. Il fut vite arrêté par les murailles de Camelot, sur lesquelles Clarice se tenait. Elle lui poussa la tête sous l’eau. Quand il put enfin la sortir, il se trouva face à face avec une bassine. Quelqu’un le tenait par les cheveux, lui demandant où il avait planqué la Came, ou quoi que ce soit que Nicholas ne connaissait pas. On lui replongea la tête sous l’eau, et le jeune novice s’engouffra tout entier dans la bassine, Il s’accrocha à une racine qui dépassait de la berge et se hissa. Le crocodile rouge le fixait intensément alors qu’il restait étendu sur la rive, tentant de reprendre son souffle.

- Hé ben mon gars t’as pas l’air dans ton assiette !, lui dit le crocodile (rouge).
- …
- Tu sais quoi, tu devrais parler à ta mère, ça te ferait du bien…

Nicholas tourna la tête, et remarqua Clarice allongée à coté de lui.

- Maman ?
- Nicholas, il n’est pas bon de s’éloigner des voies du Seigneur comme tu le fais. Crois en la Lumière, et elle te guidera. Va vers la Lumière mon fils, va !
- Oui maman.

Et, pour la première fois, Nicholas ne discuta pas les paroles de sa mère, et alla vers la Lumière qui jaillissait des portes de Camelot, de l’autre coté du pont. Il marcha, et marcha, et marcha, jusqu’à ce qu’il ait parcouru les quelques mètres le séparant de l’entrée de la capitale. Et il franchit le seuil.

Nicholas ouvrit les yeux. Ce qu’il vit à ce moment précis n’a rien d’intéressant outre-mesure. Tout le monde a déjà vu un plafond blanc, et on passera donc les détails concernant les craquelures de la peinture ou l’araignée qui semblait s’être installée au dessus de sa tête. Ce qui était plus inhabituel était la douleur relativement intense, mais pas désagréable soit dit en passant, qu’il ressentait derrière la tête. Il leva un bras pour tâter l’origine de cette douleur, et découvrit que son crâne était entouré d’un épais bandage. Et, malgré celui-ci, il ne put s’empêcher de crier lorsque sa main effleura l’endroit où le bâton de Sao l’avait percuté.

Quelques secondes plus tard, un moine entra. « Louée soit la Lumière », criait-il. Cela étonna quelque peu Nicholas. Qu’y avait-il de si miraculeux dans le réveil d’un novice tombé dans les orties ? (« être tombé dans les orties » est une expression typique de la région de Ste-Elizabeth). Il ne pouvait pas se douter que les moines attendaient son réveil depuis plus de deux mois.
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
Ys : Wardenne (sentinelle 5L7), LGM tailor
Glastonbury : Bazin (ménestrel 50 4L), Nicho (nécro, LGM tailor), Nicholas (wizard 3L)
Histoire de Nicholas, chapitre VIII : Naissance d'une vocation

Deux mois… C’est long. C’est court aussi d’ailleurs. Comme quoi le temps, tout ça, c’est des conneries. Après tout, est-on même sûrs qu’il s’écoule de la même façon pour chacun ? On dit que c’est une affaire de perception, qu’une minute est une minute pour tout le monde. Pour Nicholas, sa dernière nuit avait duré deux mois. Et pourtant cela restait une nuit pour lui. Une simple nuit…

Des paroles que sa mère n’avaient jamais prononcées lui trottaient dans la tête. « Crois en la Lumière…» Nicholas n’y avait jamais vraiment cru. Bien sûr, sa mère lui avait enseigné comment la Lumière était source de toute vie, et tout ça. Paltrot et son armée de Pères-Instructeurs aussi d’ailleurs. Mais bon, Nicholas était du genre à ne croire que ce qu’il voyait. Et il se demandait comment une soi-disante Lumière pouvait créer des êtres aussi sombres que les Trolls ou les Kobolds.

Et pourtant, cette nuit-là, ou en tout cas ce mois, comme il l’avait appris quelques heures auparavant, il avait vu la Lumière. Il était allé vers Elle, et Elle l’avait ramené vers cette réalité. La Lumière l’avait guidé, lui, le moine athée. Les fondements de la vie de Nicholas s’effondraient tel un Onzeseptembre (le Onzeseptembre est un empilement de bouts de bois qu’il faut déstabiliser en lançant quelques petits cailloux, jeu très apprécié des jeunes sarrasins). C’était pour lui comme un nouveau départ. Une remise en question. Et si Elle existait vraiment ?

Toute sa vie prenait une tournure nouvelle. Le hasard devenait Destin. La chance devenait Miracle. Les bêtises devenaient Péchés. Et Nicholas devenait Moine. La Foi s’ancrait en lui, trouvant de multiples accrocs et crevasses où s’installer. Plus il essayait de trouver une preuve de Sa non-existence, et plus ses croyances s’effritaient. Des croyances contre la Foi… Aucune chance.

Son esprit vacillait. Sa conscience encore fragile encaissait difficilement un tel assaut de révélations. Nicholas se sentait partir. Vers un monde meilleur ? Pourquoi pas. Mais la Lumière l’avait ramené dans ce monde, donc Elle le voulait ici. Il avait son rôle à jouer ici. Il avait son Destin à accomplir. Il connaissait sa tâche : répandre la Foi au delà des frontières d’Albion. Au Nord du Mur d’Hadrien. Chez les Celtes païens et les barbares Vikings, chez les horribles Trolls comme chez les Elfes perfides. Sa vie était tracée, et cela, bizarrement, l’emplissait de joie.

Il se leva, lentement, posément. Le contact de la pierre sous ses pieds aurait du le faire frissonner, il le savait. Ses mouvements étaient difficiles. Il poussa sur tous ses membres pour se lever, et y parvint. Toutes ses pensées étaient tournées vers Elle. Il devait aller prier. Il devait rattraper toutes ses années d’égarement. Il devait Lui montrer qu’il savait, qu’il avait compris. Des pensées bien pures, qui disparurent quand il sentit ses jambes lâcher sous son poids, et qu’il vit le sol monter assez dangereusement vers sa tête encore bandée. Si ses muscles s’étaient atrophiés, ses réflexes étaient rapides, et ses bras protégèrent le reste de son corps. Il n’avait guère envie de refaire une sieste de deux mois.

Le bruit mat attira le moine chargé de la surveillance de l’hospice. Il releva Nicholas, affolé, marmonnant des questions comme « Par la Lumière, pourquoi t’es-tu levé mon fils ? ». Une fois le jeune novice de retour en sûreté dans son lit de malade, le marmonnement devint audible, et il y répondit.

- Mon Frère…

C’était la première fois qu’il utilisait ce terme pour parler à un moine confirmé.

- Mon Frère, j’ai vu la Lumière.
- Que dis-tu, jeune novice ?

Le moine posait plus la question au sujet du « Mon Frère » qu’autre chose, mais Nicholas n’y prêta de toute façon pas attention.

- Elle m’a tendu les bras et ramené parmi vous. Elle m’a sauvé du néant et des Ténèbres. Elle m’a montré ma Voie. Je me dois d’aller La louer.

Le moine hésita quelques instants, le temps de recentrer son esprit sur les paroles du novice impertinent, et non sur sa dernière impertinence. Le temps aussi de se rappeler que c’était Nicholas qui lui parlait, et que ce devait donc être un mensonge, un de plus, en préparation d’un de ses mauvais coups. Sao s’était calmé, durant ces deux mois, mais celui-là. A peine conscient et déjà il mentait.

- Le mensonge est un péché en soi. Et il est encore bien pire lorsqu’il concerne la Lumière qui nous guide tous. Aie honte de toi, jeune novice.

Ce sur quoi il quitta la pièce. Il ferma en douceur la porte, se retourna, et s’apprêta à faire un pas. Il ne le fit pas. Il se retourna de nouveau, ouvrit la porte brusquement, et découvrit que s’il avait entendu le même bruit que quelques minutes auparavant, c’était pour la même raison. Même cause, même effets, disait-on. Mêmes effets, même cause, se disait-il ; Nicholas gisait sur le sol, gigotant dans une pathétique tentative pour ramper vers la porte.

« Mais qu’est-ce que tu fous, par les Saintes Orties ? », fut la première phrase qui lui vint à l’esprit. La réponse le fit douter, et il envoya chercher le Père Paltrot.

Il finissait de réinstaller Nicholas dans son lit lorsque le Père Supérieur arriva.

- Qu’y a-t-il de si important qu’on me dérange en pleine pénitence ?, demanda ce dernier, donc les mains étaient encore cloquées.
- Mon Père, le novice Nicholas dit avoir vu la Lumière dans son sommeil.
- Frère Erwann, vous connaissez Nicholas suffisamment je pense pour savoir ce que je pense de cet énième mensonge.
- C’est que, mon Père, il est prêt à ramper jusqu’à la chapelle en pénitence pour ses péchés passés. Il dit que la Lumière lui a donné la foi, et guide ses pas. Deux fois il est sorti de son lit déjà, malgré l’état de ses muscles.
- Hmmm, dit le Père Supérieur, signifiant par là sa méfiance envers le novice, mais aussi son incompréhension de ses motivations. Laissez-nous un instant, Frère Erwann, merci.

Le moine sortit, et un long silence suivit. Paltrot était en proie à l’étonnement le plus total : Nicholas priait.
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Histoire de Nicholas, chapitre IX : Pénitence

Ces mots, ils les connaissait mieux que son nom. Tous les jours ils les entendait. Tous les jours ils les avais subis. Des mots dénués de sens, à ses yeux, qui faisaient partie de cet étrange rituel de la prière. Des mots qui signifiaient « merci » aujourd’hui, et qu’il psalmodiait sans cesse. Paltrot était stupéfait. Nicholas était un grand simulateur, et utilisait ce don bien assez souvent. Mais, soit le Père Supérieur ne connaissait pas le jeune novice, soit celui-ci n’aurait jamais fait une vraie prière. C’était bien trop à l’encontre des convictions du breton.

Paltrot savait que cette prière était sincère. Alors peut-être Nicholas ne mentait-il pas. Quelle raison aurait-il eu de toute façon ? Son jeune novice le plus dissipé, ou du moins un de ses deux novices les plus dissipés, aurait vu la Lumière ? Après tout, pourquoi pas ? Père Kerdoin, son prédécesseur, avait bien commencé comme bandit avant d’être touché par la Lumière.

Il se joignit au jeune homme pour entamer la dernière partie de cette prière de pénitence, tout en observant Nicholas. Il était livide, et faible, et pourtant il émanait de lui une force incontestable. Comme un rayonnement intérieur. Comme une confirmation de ses pensées, de ses espoirs. Nicholas était un moine maintenant, même s’il n’en avait pas le titre.

Tout chez Nicholas allait repartir de zéro ; le corps et l’esprit. Et Paltrot ferait tout pour forger les deux en maître…

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Sao avait déjà entendu la rumeur du réveil depuis longtemps quand le Père-Instructeur Maël lui annonça que Nicholas était revenu parmi eux, mais… changé. Il s’attendait au pire. Avait-il perdu l’usage de ses jambes ? De ses bras ? De la parole ( ) ? Il s’attendait à tout, sauf à ce qu’il découvrit en entrant dans la Chapelle. Même sous la menace des orties, Sao ne se serait jamais abaissé à s’agenouiller devant l’autel de la Lumière. Et le Nicholas qu’il connaissait non plus. Et pourtant…

Plus il s’avançait, et moins il pouvait nier que la prière qu’il entendait venait de son ami d’enfance. Plus que les mots, c’était la profondeur que Nicholas leur donnait qui le laissait pantois. Cette voix qu’il connaissait si bien contenait aujourd’hui une Foi plus puissante même que celle de Paltrot. Mais si son étonnement était grand, il ne put résister au fou rire qui le prit lorsque Nicholas se tourna vers lui. Il avait cet air que prennent les Pères-Instructeurs avant un sermon. Un air si sérieux qui lui allait bien mal. Une attitude qui tranchait tellement avec ses habitudes qu’elle le rendait ridicule au possible.

Son fou rire redoubla quand il vit la surprise que faisait naître sa réaction sur le visage de son ami. Il s’approcha, toujours riant. « Allez, viens, j’ai pas mal de trucs à te raconter de ces deux derniers mois. », furent ses mots lorsqu’il passa son bras autour des épaules du petit Breton, voulant le ramener vers sa place « normale » : la Cour des Novices.

Mais Nicholas se dégagea immédiatement, en douceur, mais avec force et conviction. « Non, Sao, j’ai encore bien des péchés à me faire pardonner. J’ai vu la Lumière, mon ami. J’ai compris que ma vie jusqu’aujourd’hui n’était pas celle pour laquelle la Lumière m’avait permis de vivre. Elle m’a montré ma Voie, et elle commence par le repentir. Sept jours de pénitence sont le commencement d’une vie heureuse. »

Sao hésita quelques instants avant de répondre « Gni ? ». Nicholas se retourna, s’agenouilla une dernière fois face à l’autel avant de quitter la Chapelle vers la Salle des Pénitences. C’est bien la première fois qu’il y va de son plein gré, se dit Sao, se souvenant des tentatives de fuite qui étaient comme un rituel, chaque soir avant leurs pénitences. La porte se referma, sans un bruit. Il resta un moment sans bouger, silencieux. Puis il sortit de la Chapelle.

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Le père Maël ne savait plus quoi dire. Sao semblait si bouleversé par la révélation qu’avait eu son ami. Il hésitait entre essayer de le réconforter, de lui dire que ça ne durerait pas, ce qu’il pensait, et le pousser à suivre la même voie que Nicholas, ce qui était son devoir de Père-Instructeur. A vrai dire, il était certain que la nouvelle attitude de son turbulent élève, qui lui manquait un peu d’ailleurs, depuis deux mois qu’il ne l’avait pas vu éveillé, allait bien vite stopper. Les désillusions étaient nombreuses pour ceux qui suivaient le chemin de la Foi…

Il savait que ces pensées, ses pensées, étaient sacrilèges, mais il ne pouvait s’empêcher de se remémorer sa propre enfance . Lui aussi avait vu dans la Foi une chance de rendre la vie plus facile. Il se souvenait faire appel à la Lumière lors de ses nombreux déboires. Il se souvenait attendre en vain des réponses à ses prières. Il se souvenait de tout ça. Et il ne pouvait s’empêcher que croire en la Lumière était sa plus grosse erreur. Mais il y croyait toujours. La Foi est comme la Mort, quand on l’a, c’est pour toujours.

Et ce virus, comme Maël définissait intérieurement la Foi, avait vaincu même les défenses de Nicholas. Elle avait profité de sa faiblesse suite au coup de Sao pour s’immiscer en lui, comme elle le faisait avec tant de gens, gâchant leur vie, les obligeant à suivre des règles inutiles, les poussant au combat contre les « païens », s’arrangeant pour que ceux qu’elle tue meurent le sourire au lèvres, dans l’attente d’un « monde meilleur ». Il savait ce qu’il se passait après la mort. Il avait vu certains parmi les plus pieux errer sur Albion ou ailleurs, sans autre but que de La servir, Elle, la Dame. Il pensait au plus profond de lui-même que la Foi et la Mort étaient alliées depuis la nuit des temps.

Nicholas n’était pas idiot, ou du moins était-ce ce que pensait Maël, et il comprendrait vite l’erreur qu’il était en train de faire. Mais le Père-Instructeur ne pouvait pas décemment dire ça à son élève. Il avait peut-être compris la nature de la Foi, mais il l’avait toujours en lui. Et un des fondements de sa Foi était de l’inculquer à ceux qu’elle lui envoyait. Un vrai virus essaie toujours de se propager...

Il prit finalement sa décision, et ne parla pas du cas Nicholas à Sao. Il lui tendit un bâton d’entraînement, prit le sien, et visa le ventre du novice. Les réflexes de Sao reprirent le dessus, et son esprit fut bientôt totalement occupé par le combat. Exactement ce qu’il lui fallait…
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
Ys : Wardenne (sentinelle 5L7), LGM tailor
Glastonbury : Bazin (ménestrel 50 4L), Nicho (nécro, LGM tailor), Nicholas (wizard 3L)
Histoire de Nicholas, chapitre X : Un signe

Sept jours avaient passés. Sept jours de prières et de pénitences. Sept jours où, si Nicholas n’avait pas créé le monde, il avait essayé de changer sa vie. Il expiait, et expiait, et expiait. Et il attendait toujours un signe que ses pénitences et prières suffisaient. Le huitième jour, un signe vint. Ce fut plus dur qu’il ne l’imaginait.

Juste après les matines, Nicholas alla poser un cierge pour sa mère, Clarice. Il pria, à haute voix, comme à son habitude, pour que la Lumière lui apporte toute l’aide dont elle avait besoin et que lui-même ne pouvait plus lui donner. Il pria pour son bien-être et même son bonheur. Il pria pour ses patients et son hospice. Il pria pour elle, le seul être qui aurait été capable de le comprendre en ce moment.

Lorsqu’il se releva, Maël était derrière lui, silencieux. Nicholas se retourna pour saluer celui qui avait tenté de lui apprendre l’art du bâton. Celui qui, indirectement, lui avait montré le chemin de la Lumière. Le salut lui fut rendu, accompagné d’un « Nicholas, je dois te parler » qui étonna suffisamment le jeune illuminé pour qu’il ne rechigne pas à suivre le Père-Instructeur. Maël n’avait jamais aimé parler.

Nicholas se laissa donc emmener vers la cour d’entraînement, le dernier lieu qu’il avait vu en tant qu’athée. Ils entrèrent dans la salle d’arme, attenante aux quartiers de Maël, et s’assirent sur un banc qui avait du prendre la forme des fesses du novice, vu le temps qu’il y avait passé avec Sao ces dernières années, à discuter loin des corvées qui les attendaient dans les autres parties de Sainte-Elizabeth.

« Nicholas… ». Comme à son habitude, Maël ne trouvait pas ses mots.
« Oui mon Père ? », l’encouragea Nicholas.
« Nicholas, je… Je t’écoutais prier tout à l’heure… Je… »
« Oui mon Père ? » (prononcez « Bon t’accouches ? »).
« C’est au sujet de ta mère. »
« Oui mon Père ? », demanda-t-il d’un ton déjà bien plus curieux.
« Elle… elle n’est plus des nôtres… »
« … »
« Elle est morte il y a de cela bientôt deux ans. »
« … »
« Je suis désolé… »
« … »

Maël savait être très mauvais en matières de condoléances, et en resta donc là. Il espérait que le silence de Nicholas ne se prolongerait pas trop. Il avait beaucoup d’espoir cela-dit, connaissant la verve habituelle de « son » novice.

« Pourquoi ne m’avez-vous rien dit ? » vint après quelques minutes, rassurant le Père-Instructeur.

Maël ne savait trop comment prendre la question, qui n’était pas formulée sur le ton du reproche, mais bien de la question. Le « vous » s’adressait-il à lui seul, ou à l’ensemble des Pères-Instructeurs ? Lui, personnellement, pensait que le novice savait. Il avait été très surpris de le voir prier pour sa mère comme pour une personne vivante. Il avait donc demandé à Paltrot si Nicholas était au courant. Et avait décidé de se faire le messager.

Après une courte hésitation, il se rendit compte que la réponse qu’il ferait en prenant le « vous » pour lui-même serait bien inutile, et entendit donc le « vous » comme un pluriel.

« Je ne sais pas… Sûrement pensaient-ils que tu n’aurais pas été à même de supporter la nouvelle. » Il était satisfait de cette réponse, qui le dégageait de l’ensemble des Pères-Instructeurs, et le plaçait en bonne position pour aider Nicholas à sortir de sa dépendance envers la Foi. « Tu ne leur a pas montré ton meilleur visage, tu sais… », chercha-t-il à les excuser.

« Pourquoi ? ». Maël, surpris par la répétition de la question, ne dit rien.

« Pourquoi est-elle morte ? » La voix de Nicholas débordait de chagrin et de fureur. Des larmes, tant de colère que de tristesse, apparaissaient au coin de ses yeux. L’étonnement du Père-Instructeur redoubla. Il aurait compris que cette colère soit destinée à ceux qui lui avaient caché la vérité. Mais il était évident qu’elle s’adressait à quelqu’un d’autre, ou à quelque chose d’autre.

« La maladie l’a… »
« Pourquoi est-elle morte ? »
« … »
« Elle avait dédié sa vie, toute sa vie, à la Lumière ! Elle avait encore tant à faire. Et elle m’avait juré me revoir, plus tard. »
« Nicholas… »
« La Lumière n’a pas pu lui faire manquer sa promesse, ce n’est pas possible ! Tu mens ! »

Mais Nicholas savait bien que c’était faux. Il avait attendu un signe, il en avait un. Ce n’était pas celui qu’il espérait. Il se leva, et se dirigea vers sa chambre de malade. Il s’allongea sur son lit, ferma les yeux, et pleura.
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
Ys : Wardenne (sentinelle 5L7), LGM tailor
Glastonbury : Bazin (ménestrel 50 4L), Nicho (nécro, LGM tailor), Nicholas (wizard 3L)
Histoire de Nicholas, chapitre XI : De Lux

L’hiver, comme l’automne avant lui, avait plié bagages. Le printemps fleurissait, dans le monastère comme ailleurs, faisant peu à peu oublier à Nicholas la terrible nouvelle qu’il avait appris un mois plus tôt. Il avait repris ses anciennes habitudes, avec un œil nouveau. Il avait la Foi maintenant, qu’il le veuille ou non, et cela changeait beaucoup, dans la vie d’un novice.

Il lui arrivait parfois de comprendre les divagations des Pères-Instructeurs. Il lui arrivait de participer en cours, parler au Père, pas à Sao. Ah oui, il lui arrivait d’aller en cours. Mais les plus grands changements ne concernaient pas son assiduité ou son intérêt pour ce qu’on lui enseignait. Nicholas sentait maintenant la Lumière autour de lui, qui le guidait et l’emmenait vers son destin. Il savait qu’Elle était là, se servant de lui comme il sentait qu’il pouvait s’en servir.

Ce jour-là, il avait pris sa décision. Il ne savait pas si cela était la bonne ou non. Il ne savait pas où cela allait le mener. Mais il était décidé. La porte de Paltrot était juste devant lui. Il la poussa. L’Abbé nouvellement promu leva les yeux du parchemin qu’il lisait (De Terra Obscurantis) et sourit en reconnaissant le jeune Nicholas. Il l’appréciait déjà avant sa « révélation », et il n’avait plus maintenant besoin de le cacher, et l’encourageait dans sa nouvelle voie dès qu’il le pouvait.

Nicholas resta sur le seuil quelques minutes, hésitant. Il avait encore oublié de frapper. Platrot lui fit un signe de la main, l’invitant à approcher. En entrant, le novice ne put s’empêcher de remarquer l’étagère de livres aux inscriptions incompréhensibles (et pourtant, Nicholas savait lire) qui ornait le mur de droite. De nouvelles acquisitions, encore. Sur un des volumes, il lui sembla reconnaître des runes Midgardiennes, comme en avait tracé un guerrier blessé au dispensaire de Clarice.

« Hé bien, Nicholas, que veux-tu ? », demanda le Père Supérieur.

Le jeune breton essuya le début de larme qu’avait fait apparaître le souvenir de sa mère.

« Mon Père, depuis mon « accident » je peux sentir la Lumière près de moi, partout, autour de moi. Elle m’enveloppe et me réchauffe comme.. »
« C’est normal jeune novice. Viens-en au fait, je te prie. »
« Je… je sens qu’Elle souhaite m’offrir sa puissance, mais je ne sais pas comment accepter ce présent, mon Père. »

Paltrot s’adossa lentement, regardant pensivement par la fenêtre le magnifique ciel de printemps. Son regard se porta bientôt sur Nicholas.

« J’attendais ce moment, tu sais. Apprendre à accepter l’aide de la Lumière fait partie de la formation d’un moine. Nous, les Pères Instructeurs, avons beaucoup débattu à ton sujet, et à celui de Sao. Faut-il, ou non, vous donner accès à cette puissance ? Je pense que tu as prouvé à tous ton dévouement à Sa cause depuis ton accident. Sao aussi s’est calmé, n’est-ce pas ? »
« Il semble, mon Père », répondit Nicholas qui ne pouvait se résoudre à mentir.
« Bien. Vous irez tous deux voir Père Kerduin dès demain. Maintenant laisse-moi, Nicholas, je dois étudier d’urgence. »

Le novice remercia et sortit. Un sourire se forma sur ses lèvres, provenant moins de la facilité avec laquelle cela s’était passé que du fait que Paltrot pensait que Sao s’était « calmé ». A vrai dire, on ne le voyait plus faire ses coups dans l’enceinte de Sainte-Elizabeth pour la bonne raison qu’il allait les faire dehors. Il avait, semble-t-il noué une liaison pas très catholique avec la fille d’un berger. Qui du coup proposait maintenant à son père de garder les moutons certaines nuits. Sao, accepter l’aide la Lumière ? Mais pourquoi la Lumière voudrait-Elle l’aider ? Lui pour qui être novice ne signifiait que quelques corvées entre deux escapades ?

Le sourire de Nicholas s’élargit, en imaginant la réaction de Sao quand il lui annoncerait leur admission au Cinquième Cercle : la fin du Noviciat. A respectivement quinze et seize ans, ils allaient devenir moines !
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Camlann : Nicholas (moine 5L5), Nicholason (healer 4L0)
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