[Broc] [Hib]La Clef, Sagà de Cianech

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Chapitre I

Le vieux barde examinait avec attention la Clef. Elle n’avait rien d’ordinaire. Couleur d’obsidienne, aux veines de quartz, elle étincelait dans la semi-obscurité de la pièce. De la taille d’un gros poing, elle s’ornait de motifs. On aurait dit des triskels entrelacés les uns aux autres, et la sculpture –si cette Clef avait été sculptée- était parfaite. Cianech passa le bout de ces doigts sur les ornements. Une froideur se dégageait de la Clef, ni agréable, ni désagréable.
En son bout, les triskels cessaient leurs entrelacs, et laissait place –Cianech regardait de plus près, à la lueur de la torche- à une tête de cerf, les yeux clos. Comme s’il était endormi.

Le barde reposa la clef avec précaution sur la table, et se renversa dans son siège, laissant vagabonder ses pensées, se remémorant les circonstances dans lesquelles il avait trouvé la Clef.

Pénombre. Bruit des pierres qui raclent. Des cris poussés dans l’obscurité. Eclats étouffés. Puis, un mugissement. Un Fomor mort-vivant vient de surgir au coin d’un sombre couloir. Immédiatement, une petite nuée d’individus se rue sur lui, le lardant de mille coups. La chair morte s’ouvre sous les lames, et les os se re-brisent sous les coups de masses. Les sorts fusent, puis dans un lourd bruit mat, le mort-vivant retombe.

Tur Suil. Nom de terreur, nom qui sent le souffre. Balor rôde, son âme torturée. Se souvient-il d’avoir été vaincu par Lugh Lamfhota ? On ne saurait que chercher la réponse dans son œil maudit, qui détruit ce qu’il voit. Les relents de mort, de pourriture imprègnent les grandes dalles de marbre. Des colonnes imposantes suintent une humidité nauséabonde, sinon du poison.

Le groupe de Maraudeurs avance, se frayant un passage, combattant dans la sueur, dans les mots incantés, les patrouilles des Fomors. Des escaliers en colimaçon. L’ichor imprègne les marches, les rendant glissantes. On se serre les uns contre les autres. La tension est palpable, autant que l’âcreté de l’air. Par moments, on entend plus que les battements de cœur. Ysild, du clan Yr Ellyon, nous fait signe. Avec prudence, nous avançons. Voilà.

Nous sommes arrivés.

Les yeux injectés de sang, Comghan, du clan Neart Fiain, scrute les coins d’ombre. La peur envahit mon cœur. Sans doute, les histoires et légendes tellement contées qui prennent leurs dimensions réelles en ce lieu maudit. L’énervement aussi, la peau tendue du tambour crisse sous la pression des doigts, quand ces mêmes doigts ne s’agitent pas nerveusement sur LarmeSang.

« - Il est là, je le sens, derrière ces grilles. » souffle Edrahil, du clan Ui’Aedha, en désignant une herse rongée par la rouille de la pointe de son arc. Myriald, du clan Grimwood, acquiesce lentement sous la capuche de sa pèlerine. Ses deux yeux étincellent à l’approche du combat.

Oliour le druide se concentre. Appeler les énergies de la Nature. Encore une fois, il reste inébranlable comme un chêne altier. Feidreiva arbore, un fugitif instant, un sourire carnassier. Umbrae et Athlone sont côte à côte, leurs boucliers se touchent dans un bruit métallique, tandis qu’autour d’elles, pulsent les énergies terrestres. Des cristaux protecteurs se forment devant nos yeux. Fevnaan hésite à jouer de la flûte, de peur d’ameuter l’ennemi. Wynken dégaine avec précaution sa lourde claymore, et Yshusnir fait de même. Levaillant marmonne quelques mots, traçant de ses mains gantées de fer, des arabesques. Une nouvelle force semble l’animer l’instant suivant.
Le groupe avance lentement, les pas glissants sur le dallage poli et luisant. La herse se lève. Un courant froid se faufile, et je ne peux retenir un frisson. Souffle de mort.

Des formes blanchâtres se déplacent furtivement, presque imperceptibles. Soudainement, des cris de douleur déchirent nos oreilles. Les formes blanchâtres s’abattent sur nous.

« - LIBEREZ NOUS ! » hurlent-elles.

De leurs griffes invisibles, elles nous frappent…Je ne peux retenir ma stupeur. Ces formes qui se battent, se jettent délibérément sur les lames, ont la forme de sylvains translucides. Leurs visages lisses ne sont plus qu’écorce meurtrie, et leur bouche grande ouverte augure de leurs tourments.

Les légendes étaient vraies. Ainsi errent ceux dont l’âme sert à réveiller les Fomors tombés à la bataille de Mag Tured. L’Annwn était profané, et ceux qui désiraient tant le repos, piégés, condamnés à errer à travers les froids couloirs.

Nous libérons ces pauvres hères de leurs tourments. En face de nous, une rangée de tombes. Certaines stèles sont brisés, mais nul n’ose regarder à travers les fissures l’innommable qui se repose. A notre droite, nous avisons une nouvelle herse. Nous la franchissons, assaillis à nouveau par les âmes des Sylvains. Bizarrement, les chocs des armes ne s’entendent plus. Juste un bruit de linceul déchiré.

Nous nous mettons à l’abri. Celui que nous venons chercher n’est pas là. Sans doute qu’il traîne dans les couloirs, avant de revenir à nouveau piéger les âmes en son repaire. L’attente paraît longue et courte à la fois. On dirait un cauchemar sans fin, mais dont on retarde l’inévitable dernier acte.

Le crissement assourdi des herses nous surprend. Abomos arrive. Rapidement, nous nous disposons pour l’affronter. Surpris, le Chasseur d’Âme se rue sur nous, une lourde épée à deux mains tournoyant et sifflant dans l’air.

Sans hésitation, nous l’engageons. Abomos semble brasser l’air avec sa terrible arme. Il n’en est rien. Ses coups sont précis et redoutables. Ils se brisent sur d’invisibles murailles, sur les boucliers. Combien de temps cela dura-t’il ? respiration haletante, cris de douleur, cris de guerre, armes qui s’entrechoquent.

Abomos vacille un instant. Touché à mort, il reste debout, ne pouvant croire à sa défaite. Lui, qui avait bravé les royaumes de la mort, pour y cueillir les âmes, lui, mourir par la main de si futiles et petits êtres. Il tombe lentement. Vers moi. La peur n’a pas le temps de se saisir de mon cœur, je me pousse violemment sur le côté, m’assommant à moitié contre le mur.

Je tâte le sol, paniqué. Mes compagnons viennent vers moi. Mon regard est voilé, mon esprit en miette. Mes mains tremblent. Je touche quelque chose de froid, de métallique. Ma main se crispe dessus, comme à la recherche d’une présence apaisante.

La suite n’est que dédales de couloirs, combats brefs et violents, dans une semi-inconscience. Un voile rouge persiste, teintant les murs glauques de traînées sanglantes. Et je tiens toujours, dans ma main crispée, la Clef. La Clef…


… Le reste n’était plus que futilités. Le barde se redressa, happa de sa grande main la Clef. Il revêtit sa pèlerine noire. La nuit tombait, mais les astres se reflétaient sur les coupoles dorées, sur les toits en croupe d’obsidienne. Comme chaque nuit sans nuage, Tir Na Nog revêtait un air fantomatique, féerique que les Anciens auraient adoré…
Chapitre II


Les Anciens…S’engonçant dans sa pèlerine, Cianech s’engagea dans des ruelles, se dirigeant vers la Porte de Mag Mell. L’auberge de la Rose Verte résonnait de cris de joie et de rires. Mais, ce n’était pas ce que l’homme vieillissant cherchait. Il tendait l’oreille vers le firmament, comme à la recherche d’un son familier. Un bruit d’ailes, un croassement, et le Bran vint se poser sur son épaule. Son plumage, à l’instar des toits de la grande ville, luisait d’une douce iridescence.

Le barde regarda pendant quelques instants la lourde porte de chêne de l’auberge, puis se dirigea vers la Porte. D’un hochement de tête, il salua les gardes, et se retrouva dans la plaine de Mag Mell. Une douce brise troublait le silence nocturne.

Dans le ciel se dessinait des volutes fuligineuses, masquant les étoiles. Serrant toujours la Clef dans sa main, Cianech se dirigea vers le nord, afin de gagner la lisière des plateaux de Moher. Le Bran croassa, puis d’un coup d’aile s’envola, tandis que le barde gravissait le flanc d’une colline. Il n’était plus très loin, et en effet une masure se présenta, contours sombres sur le ciel bleu marine.

Il marqua un temps d’arrêt, comme indécis. Le barde huma l’air, à la recherche d’une odeur particulière, celle du danger. Mais seul l’odeur douceâtre de l’herbe brûlée par le soleil lui parvint… Ce qui servait de porte à la masure, un pan de tissus déchiré claqua sous la brise. Cianech baissa la tête pour entrer et se tint, immobile :

« - Es-tu là ? » murmura-t-il à l’obscurité. Ses yeux s’habituaient doucement et il remarqua, posés à même le sol, des objets de terre cuite frustres.
« - Je suis là, barde. Que me vaut ta visite ? » prononça une voix à l’intonation nasillarde. Cianech regarda dans la direction de la voix. Doucement, il cerna une forme accroupie, presque invisible. Un léger courant d’air lui indiqua qu’elle s’était levée.
« - Te demander de l’aide, Ombre des Trois Terres » parla Cianech d’un ton déférent. La forme invisible se contenta de rire doucement.
« - Ça ne fera que la deuxième fois que je t’aide, Celte. N’est-ce pas ?
- Je suis prêt à en payer le prix si tu le désires. »

La forme se mua en quelque chose de laiteux. Petit à petit, un visage blanc comme la Lune, empreint de la même majesté que l’astre nocturne, se dessina. Et ainsi de suite, le reste du corps apparut, de la même couleur. L’être doucement luminescent se révélait plus grand que le barde, vêtu de riches atours s’ils n’étaient fantomatiques.
« - Me devoir un service, barde ? Non, j’ai ce qu’il faut. Je t’aiderai gracieusement, car je connais ton nom et je sais que tu respectes les miens.
- Vénérable Empyréen, ta confiance m’honore ! En vérité, Ombre des Trois Terres, je crois que toi seul peux m’aider. Vois cette Clef ! »
Cianech tendit la Clef dans sa paume gantée. L’Empyréen regarda l’objet sans y toucher. Dans ses yeux opalescents se lisait une crainte mêlée de perplexité.
« - Etrange objet. Les méandres noirs qui se dessinent, cette tête de Cerf… Si tu cherches à savoir ce que c’est, alors je ne peux t’aider. Si tu cherches à savoir ce qu’il peut t’apporter, je ne peux t’aider. Car il est de ces objets, que le mystère nimbe d’une auréole étrange, ni de bénédiction, ni de malédiction, ou alors les deux. Seul toi, tu peux comprendre ce que c’est, sa signification, son utilité. S’il en a une…
« - Mais… »
« - Non, barde. Je ne peux t’aider. Laisse toi porter par le Destin, et tu sauras assez tôt… »

Sur ces mots, Cianech quitta l’Ancien Empyréen. Il oublia la Clef et le temps passa, jour après jour, nuit après nuit. Et puis, il cherchait autre chose, il ne l’avait pas trouvé puisqu’il n’avait pas su aller jusqu’au bout. La Pierre du Cercle Ancien, la Pierre du Baer-Gaeddon. Les Maraudeurs l’avaient obtenu et cela seul lui importait. Pierre fascinante… Belle et maudite ? La question revenait dans son esprit avec le vague sentiment qu’elle n’avait pas fini d’apporter des ennuis à la Confrérie. L’humeur du barde s’assombrit encore plus qu’à l’accoutumée jusqu’à …
(Merci aux lecteurs et pour les encouragements )

Chapitre III

Une enfant elfe. Je n’en avais pas vu depuis combien de temps ? Sur son front est sertie une pierre rouge. Elle brille légèrement, à travers les mèches longues et couleur de mer. A l’inverse, ses yeux semblent éteints, deux gouffres noirs, reflet d’un corps vidé de son énergie.

Son nom se susurre comme le sifflement d’un serpent qui regagne l’ombre. Oui, il se prononce aussi comme le bruit sourd d’une lutte entre l’ombre et la lumière. Duawen.. Et son père se tient là, devant moi, forme mince, mais grande, les mains fines formant un inextricable nœud d’angoisse. Islar…

Que fais-je ici ? Je regarde tour à tour l’enfant et le père, si différents et si proches. Une trace d’obscurité dans le clan de la Lumière ? Étrange chose. L’étonnement coule en moi, ainsi que l’impuissance. Je fixe la druidesse avec un regard que je veux lourd de reproches et qui n’est qu’étincelle d’inquiétude. L’exaspération sourd en moi, en regardant ces yeux verts si calmes, si confiants. Je lui ai promis, je leur ai promis, je ne peux reculer.

Elle me dit de m’agenouiller, je le fais près du frêle corps endormi, à l’ombre des menhirs érodés. Elle se tient de l’autre côté et de sa bouche naissent d’antiques incantations dans les Langues Anciennes. Les paroles semblent prendre, un instant, consistance dans l’air chaud avant de se volatiliser. Ma main droite se tient au-dessus du front de la jeune elfe, cachant la pierre maudite à nos regards. Du moins, le mien. Au-dessus de ma main, je sens la chaleur de celle de Maorann.

Les incantations cessent. Plus de plaine verte, plus de menhirs dressés, plus de ciel couleur indigo. Le sentiment de me retrouver à nouveau dans les couloirs puants de Tur Suil. L’odeur de la peur, la même qui suintait des murs noirs du labyrinthe. Mais là, je marche à travers un paysage de cendres, de poussière argentée volatile. Au creux d’un sillon, un filet d’eau chargé d’amertume coule doucement pour disparaître petit à petit à travers les entrailles de la noire terre. Des tertres s’élèvent, pierres grises sur ciel gris, au sommet de collines d’ombre. Un soleil blafard perce des traînées de fumée et la lumière atténuée joue sur les ombres, les allongeant démesurément.

Je crois que je marche, mes pieds soulevant des gerbes poussiéreuses. L’air n’est ni chaud, ni froid et ne porte aucun son ; des rocs noirs, marbrés de blanc se dressent, polis, comme taillés par une main surnaturelle. Ma peur se dissipe, ma vigilance s’évanouit. Je suis chez moi, c’est le sentiment qui domine mes pensées. Je sais qu’au delà des collines encadrant le vallon, l’horizon n’est qu’un fil d’argent et les terres, des contrées de cendres qui recèlent des trésors inavoués.

Je continue de marcher, et au détour du vallon se dresse une porte d’onyx, encadrée par des contreforts. Les lourds battants grincent, alors que ma main caresse la pierre légèrement rugueuse et les sculptures à moitié effacées par les improbables pluies et années. La porte s’ouvre et une main blanche et fine me saisit doucement, mais fermement, et m’entraîne. Je me laisse faire avec une certaine réticence.

Personne de l’autre côté, mais le vallon cendreux est devenu tapis de mousse, fleurs de menthe s’abreuvant dans le ruisselet. Les pierres rondes du lit s’entrechoquent doucement, et à son unisson, le vent souffle dans les grands arbres aux feuilles mordorées. Feuilles vertes et d’argent aussi, sur lesquelles le soleil éclatant joue. Dans l’air flotte une odeur de verveine, de thym, et mille autres senteurs, connues et inconnues, tour à tour douces et légèrement piquantes…

Je marche à travers ce paysage de douce féerie et je me rends compte que je tiens dans mon poing droit quelque chose aux contours tranchants. Mais mu par une impulsion, je continue mon chemin. Le vallon prend fin et une plaine vaste s’ouvre à moi. En son centre, des menhirs se dressent et quatre personnes s’y tiennent, deux agenouillées, une allongée entre les deux et la quatrième se tient debout. Je me reconnais, avec Maorann, Duawen et Islar. Doucement, je m’approche d’eux.


Les yeux de Cianech se rouvrirent à ce moment-là. Son regard embrumé, lointain, se porta sur Duawen. Le front de la jeune elfe était blanc, immaculé, et ses mèches ne cachaient plus la pierre de Balor. Celle-ci se trouvait dans la main du barde. De fines coupures se dessinaient, traits de pourpre, encadrant le creux de la paume. Livide, Cianech ne prononça aucun mot jusqu’au moment de la séparation, juste un pâle sourire fugitif lorsque Duawen, pour le remercier, déposa un baiser sur sa joue.
(Encore merci pour les encouragements. Pour plus d'infos sur la pierre du Baer-Gaeddon : ICI. Ensuite dans ce chapitre sont introduits les Kernos, inspirés de ce texte roleplay du site officiel GOA : ICI. Bonne lecture et merci encore. )

Chapitre IV

Les joyaux illuminèrent doucement la chambre, reflet intérieur du Soleil qui se levait. Dans la semi-obscurité, Cianech ouvrit ses yeux. Son regard porta sur le corps étendu à ses côtés, allongé sur le flanc, lui tournant le dos, doucement recroquevillé dans un sommet réparateur. Levant sa main, pour caresser les formes, il arrêta son geste, sentant la chaleur du corps. La main parcourut une ligne invisible, parallèle aux formes fines. La peau, il le savait, était aussi lisse qu’un souffle d’air, et dans la pénombre, luisait d’une étrange lumière nacrée. Lumière qu’absorbait les boucles rousses qui coulaient sur la nuque.

Cianech se leva doucement. Il n’avait pas envie de rester, ni même de la réveiller dans son sommeil. Pour un barde qui dormait peu, il savait que le sommeil, c’était les rêves, le temps de l’apaisement, des instants où les légendes deviennent réalité. Le barde s’habilla, revêtant son armure de combat, et ceci fait, il sortit une vieille bourse de cuir, en défit les lacets, saisit précautionneusement une fleur aux pétales d’or pâle, et la posa sur un des meubles de pierre. En sortant de la maison, il effleura une forme grande et noire, allongée sur le pas de la porte. Elle bougea ouvrant un œil inquisiteur. Le barde se pencha et plongea sa main dans la toison épaisse, murmurant des paroles apaisantes. Le loup se rendormit aussitôt.

Il sortit de Tir Nan Og. Et une fois les portes d’or d’Ardee franchies, le barde se drapa dans sa cape noire défraîchie, frissonnant dans la fraîcheur matinale. Sa main se porta sur la Clef accrochée à sa ceinture. Les épreuves, les tourbillons de neige, les coups d’épée ; rien ne l’avait usée. Toujours pareille, des triskels entrelacés, la tête de Cerf, les yeux toujours clos, dormant d’un sommeil qu’aucun fracas de ce monde n’aurait pu interrompre.

Il lui fallait partir, il le lisait dans les entrelacs. Les paroles de l’Ombre des Trois Terres lui revinrent à l’esprit. Et bien soit, le barde irait là où le destin le porterait.

Innis Prydein. Pourquoi suis-je ici ? Où est mon Bran ? Je sais que tout tient à la Clef. Absurde. Faire ça pour une clef… Je l’ai bien fait pour un parchemin.

« - Salut à toi, Barde. Que Nuada Main d’Argent t’assure paroles et chants en abondance ! » hurle un colosse. Je sursaute. Je viens à peine de quitter les Monts de Collory, que je croise une personne dans les contrées habituellement désertes. C’est un Firbolg, avise-je. Les membres comme des troncs d’arbre, des mains enserrées dans d’épaisses bandelettes de cuir, un plastron de cuir abîmé et rapiécé avec des peaux de bêtes est son seul vêtements avec des braies et des bottes de cuir. C’est un Kernos. Je le sais. En lui sourd la puissance brute de la Nature. Son ton n’est ni hostile, ni amical, mais un relent de bestialité s’en dégage. Aussi, approche-je prudemment de lui. D’une démarche souple, il quitte l’arbre près duquel il se tenait, les paumes vers les cieux, appréhendant mes pensées.

« - Barde, je ne suis pas venu me battre ! Vois ! Je ne porte nulle arme. En vérité, je suis venu te parler de ce que tu portes à la ceinture. » J’effleure la Clef.
« - Oui, cet objet. Prends garde ! Il ouvre des portes que tous ignorent. Qui sait ce qui se cache dans l’embrasure de celle-ci ? Des richesses inespérées ? Tes appréhensions les plus secrètes, prêtes à se matérialiser et à détruire les battants pour te déchirer en lambeaux, ou tes plus belles espérances ? »

Je me saisis de la Clef et la tend à l’imposant Firbolg, sans dire un mot. Il regarde la Clef avec le regard de celui qui découvre un serpent, aux crocs emplis de venin, lové au creux de ma main. Puis, il éclate d’un rire sonore, et se crispe dans un sourire figé.
« - Je ne prendrais pas cette Clef, c’est la vôtre. » Le Kernos incline la tête et s’en va par où il était venu.

J’ai franchi Muir Erin, puis m’engageant dans Muir Hafren, je pris pied en Innis Prydein, en Llyonesse. Pourquoi ne pas avoir eu recours à la magie de la téléportation ? Éviter un pays dangereux. Les hommes d’armes du Royaume de Prydein n’étaient jamais loin. Et puis, il aurait fallu traverser les monts, et la forêt sauvage de Celyddon et les Portes du Caer de cette Forêt…
Chapitre V


Les langues de terre surgissaient de l’eau bourbeuse et fétide, bordée de plantes jaunâtres. Le brouillard semblait étouffant, l’air solide, et le cercle du soleil ne se voyait pas, sinon jamais. Ça et là, des ruines et des îlots de civilisation parsemaient le Llyonesse. Sombre terre, pensa Cianech, un refuge sûr pour n’importe qui ayant ou subissant la loi de l’Ancienne Île des Forts et désormais appelée Albion. La Retraite d’Adribard, village glauque à l’ombre de la forteresse. Le fort se dressait droit, les créneaux éternellement nimbés de brume. Des pierres grises suintent l’humidité, la puanteur du marais. Le barde évita la bourgade, s’acheminant vers le nord, à travers des sentiers à moitié oubliés.

Dans la Forêt de Campacorentin, Cianech se sentit plus sûr de lui-même. Profonde, épaisse, broussailleuse, même les brumes des marais du Llyonesse avaient du mal à y pénétrer. S’engageant dans les vallons, il contourna l’édifice de pierres bleutées qu’était Lethantis, jusqu’à parvenir aux plaines dégagées de Salisbury. Lentement, il se remémora.

Où étaient-ils ? Il se retourna vers les frondaisons de la Forêt. Par-là ? La nuit descendait doucement, envahissant l’Orient d’un drap bleuté. Ils sont partis. Dans les vagues embruns de sa mémoire, ils se dissimulaient au regard de leurs persécuteurs, parmi les grands arbres.
Cianech fit demi-tour et s’enfonça à nouveau dans l’obscurité. Scrutant les ombres et le moindre mouvement, il distingua un feu vers lequel il s’avança prudemment.

« - Paix sur toi, Aneurin ! Est-ce bien toi ? Oui, c’est toi, je le sens, je le vois et je l’entends. » murmura une voix parmi les troncs noirs des Arbres. Cianech se retourna et petit à petit, il distingua un visage juvénile, pâle, tavelé de tâches de rousseur. Le filidh lui saisit le bras et le tira doucement vers le feu. Au tour du brasier, se tenait deux autres filidhs, visiblement plus âgés. L’un semblait dans la force de l’âge, l’autre au crépuscule de sa vie, les joues et le menton tapissé d’une barbe blanche. Voyant Cianech, ils sourirent et lui firent une place près du feu.

« - Aneurin… Celui que la haine avait rendu aveugle… » dit dans un semi-sourire le plus vieux des trois.
« - … Et dont la Nature avait armé le bras… » continua celui dans la force de l’âge.
« - … Et qui s’est envolé pour retrouver la vue… » termina le plus jeune.
Cianech ne dit rien, se contentant de regarder les trois filidhs. Il savait qu’ils le jaugeaient, et qu’ils lisaient en lui comme dans un livre.
« - Ah ! Aneurin, il y avait longtemps qu’on ne t’avait pas vu. Des années, des saisons et des lunes ! Tu nous rends visite pour Lughnasadh bien tôt ? » s’enquit d’un ton narquois le doyen des trois. Le barde ouvrit la bouche, mais le plus jeune le devança.
« - Non, il vient pour autre chose. Et il ne s’appelle plus Aneurin, ni même Gwench’lan. Il a perdu son Corbeau, poursuit des chimères et s’appelle Vrandubh… »
« - Cianech Corbeau des Batailles serait plus juste… » parla le cadet.
« - Ici, on l’appellerait Vrandubh. »
« - C’est vrai. Bien qu’il n’ait plus son Corbeau. »
Le barde ne put manquer de hoqueter de surprise. Savaient-ils tout de lui ?
« - Oh, on ne sait que ce que la Nature a bien voulu nous murmurer et ce qu’elle garde en mémoire dans sa chair, les meurtrissures comme les plus belles fleurs… Mais toi, Vrandubh, tu as oublié… »
« - … Oublié que nous pouvons savoir beaucoup de choses. Que nous savons beaucoup de choses. Plus que tu n’en sauras… »
« - … As-tu oublié le passé, nos conversations, nos pouvoirs ? Tu nous cherches des noms que nous n’avons pas. »
Ils se montrèrent les uns et les autres.
« - Lui est moi, moi est lui, lui est lui et lui est moi et ainsi de suite… Nous formons un tout, sans fragmentation, à l’image de ce que nous servons, la Nature… »
Lentement, Cianech se remémora. Ce qu’ils étaient. Des servants de la Nature qui pour mieux la servir, s’étaient débarrassé de leurs noms même pour devenir une partie de la Nature, en empathie totale avec ses souffrances, ses bonheurs, ses floraisons comme l’endormissement à la saison froide. Là où les druides étaient le lien entre le peuple et la Nature, la souffrance, les persécutions les avaient poussés à renier leur identité, à ne plus faire ce lien entre eux et les anciens clans d’Albion.
« - … Ce qui ne veut pas dire que nous ne parlons à personne… » intervint malicieusement le plus âgé des trois.
« - Tu as failli devenir un des nôtres. Te souviens-tu, quand tu errais, aveugle et que tu es venu ici ? Le venin et la rage fusaient de ta bouche, comme un torrent d’eau noire… »
« - Nous t’avons tendu alors un bâton de coudrier pour te guider. Tu t’es calmé, tu nous as remercié et tu es parti. »
« - Oh, tu es un peu des nôtres. Nous jouissons de vies multiples, un peu comme toi. Aneurin, Gwench’lan, Vrandubh, Cianech… Demain, porteras-tu un autre nom ? » s’enquit dans un sourire le cadet.
« - J’ignore de quoi est fait le futur, et je m’en moque un peu… » commença Cianech.
« - … Tu as tort de t’en moquer, car tu es venu nous voir pour ça… pour nous questionner, pour savoir… » parla d’une voix grave le plus vieux des trois filidhs.
Le barde caressa sa barbe pensivement, puis attendit avec intérêt ce qu’ils allaient dire.
« - En vérité, je te le dis, tu nourris de secrètes espérances. Ce qu’elles sont, ce n’est pas à nous de juger, ce que tu fais, de même. Cet objet te fascine, et c’est bien normal, elle est une partie de toi. »
Cianech se remémora les paroles du Kernos. Je ne prendrais pas cette Clef, c’est la vôtre. Mais que signifiait-elle ?
« - Sa signification ? Seule celle que tu lui donnes compte. Nul ne peut te dire ce qu’elle est. Chercher à comprendre sa nature revient simplement à en faire usage. A ouvrir une porte. »
« - Et où trouverai-je cette Porte ? »
Les trois filidhs restèrent muets, un instant, concentrant leurs regards sur le feu crépitant et les éclats de braises qui s’en évadait. Puis, ils fixèrent leurs regards perçants, mettant à nu les pensées du barde, et le plus jeune murmura :
« - Demain, tu partiras pour les monts enneigés au nord du pays des Gaëls, Snowdonia. La Porte ne se trouve pas loin d’Yr Widdfa. A flanc des sommets d’une des montagnes, tu trouveras ce que tu cherches. »
Chapitre VI

Les monts auréolés d’une couronne blanche me brûlent les yeux. Et ce malgré un épais morceau d’étoffe, que j’y ai apposé. La lumière blanche, crue et réverbérée du Soleil par la neige pénètre à travers les maillons grossiers. Je passe ma langue sur mes lèvres crevassées dans une vaine tentative de les humidifier et d’atténuer la brûlure du froid. Encore une fois la neige. Je crache et maudis ce lieu désert. Presque désert.

En chemin, j’ai vu des hommes et des femmes qui ont leur habitat niché dans des cavernes. Grands et à moitié sauvage, je sais que ce sont des arawnites. Ainsi s’appellent ceux qui prétendent descendre du peuple d’Annfwn, et d’Arawn. Je me remémore le
Mabinogi, ces chants et légendes, la rencontre entre Pwyll, Roi de Dyfed, et Arawn, le Roi d’Annfwn ; l’amitié qu’ils se jurèrent au terme d’un échange de leurs apparences et de leurs royaumes.

Je me secoue. Ces temps-là, s’ils eussent existés, sont révolus. Ils m’ont chassé à coups de pierres, de malédictions proférées avec méchanceté. Sauf un, je l’ai vu. Un homme petit mais trapu, aux yeux chassieux enfoncés dans un visage en lame. Il m’attend pas loin, je le sais.

Ces intuitions sont exacerbées quand mon Bran est là. Des fois, fugitivement, je vois à travers lui. Mais il n’est plus là. Je ne sais où il est passé, et pour une fois, j’éprouve inquiétude et malaise. Il ne peut mourir, je le sais, il est de ces Corbeaux qui ne peuvent mourir, venant de l’Ancien Monde.

Mais, j’ai un autre guide. Il tourne ses yeux larmoyants vers moi et m’indique une direction de son bras enrubanné de bandes épaisses de laine. Je tourne le regard vers la direction indiquée. Sur le manteau blanc semble être posé un édifice improbable. Deux pierres taillées et imposantes, grises, formant un arc irrégulier se dressent.

C’est la Porte, je le sais. Sur le visage de l’arawnite se lit une peur indicible, il n’ose pas aller au devant de la porte. Tant pis, j’y vais moi-même, la curiosité me dévore les entrailles comme une maladie purulente et pour la guérir, il me faut la satisfaire. Ne pas la franchir reviendrait à mourir doucement.

Prudemment, je m’approche de la Porte, je serre la Clef dans ma main, pour évacuer l’appréhension. Elle ressemble à celle qui mène aux Abysses, dans les profondeurs de la terre, là où la corruption règne, mais elle n’a pas ce mince rideau irisée qui la caractérise. A travers, on voit le ciel bleu et le soleil.

Mon regard se reporte sur la Clef. Les triskels noirs, sa froideur peu naturelle, et le Cerf sculpté. Il n’est plus endormi, ses yeux, par magie, se sont ouverts, laissant paraître d’étranges pierres composant un regard glacial, scrutateur, celui qui interroge et pousse à s’interroger, pour finalement dissuader de passer la Porte.

Cela ne fait que conforter ma détermination. Je tends la main, la clef dans ma paume et la franchis…
Chapitre VII

De l’autre côté,…

Temps qui s’écoule plus lentement, allant en crescendo dans sa lenteur. Immobilité.

… il y a…

Un paysage étrange, et pourtant familier. Il change lentement, suivant le rythme du temps. Impossible de décrire, l’esprit n’arrive pas à le percevoir dans ses détails, ni même dans sa globalité.

… un Autre…

Puis, le paysage se stabilise. Façon de parler. il ressemble à la fois à tout et à rien. La terre est à la fois ciel et tréfonds abyssaux, l’air est à la fois solide et liquide. Tous les repères acquis dans le Vrai Monde sont bouleversés…

… Monde, et…

… Ce n’est pas Au-Delà du Voile. Le Monde Magique ne ressemble pas à ça, en tout cas, pas dans les récits des Elfes et des Lurikeens… Cette question passe fugacement, rejoignant une ombre dans mon esprit…Car mon attention est désormais captée par…

… un Autre Être.

Il se présente sous une forme indistincte. A l’image de la sculpture de la Clef, je me suis attendu à un Cerf. Qui sait, peut-être Kernunnos lui-même, grand, majestueux. Un instant, le doute m’étreint. Plus ou moins inconsciemment, j’ai voulu trouver l’Annwn, le Royaume des Morts, mais jusqu’au bout, je me suis refusé à penser à cela. De peur d’être déçu sans doute.


Cianech ne bougea pas, et observa un peu plus la forme intangible. Elle, non plus, ne bougeait pas. Le barde se déplaça de côté, puis avança lentement. Autour de lui, commençait à voleter une myriade de lucioles, étincelantes, scrutatrices. A quelques pas de la forme immobile, le vieux barde…

…Je tends la Clef vers la forme. Elle change. Doucement, elle rougeoie, la froideur laissant la place à une chaleur douce, mais de plus en plus intense. Comme si elle revivait. Le froid de l’endormissement la quitte, et maintenant la chaleur de la vie recommence doucement à l’envahir. Mais quelle vie se réveille là ?

La main tendue du barde, avec la Clef dans le creux de sa paume s’enfonça doucement dans la forme. A travers le tissu entourant le poing, la chaleur devenait brûlure. Mais Cianech ne broncha pas, se rappelant du principe qui l’avait amené jusqu’ici : « Ce qu’il convient de faire, décide-le ; ce que tu as décidé, entreprends-le ; ce que tu as entrepris, achève-le. »

… Tout mon esprit oblitère la douleur, insidieuse, insupportable qui brûle les chairs…C’est un tel effort que je ferme les yeux. J’ai vécu bien pire, la douleur qui vrille de part en part, accompagnée de sa sœur tristesse. Mais cette douleur-là semble être amplifiée. Puis, tout à coup, elle s’estompe. Je tombe à genoux, j’étreins mon bras de ma main valide, comme pour empêcher le mal de se propager à travers mon corps. Je hurle.
Chapitre VIII


« - Non, je n’ai rien trouvé » prononça d’un ton qui se voulait sûr, le barde. Il serra un peu plus la main sur la choppe de cervoise mousseuse. Tout compte fait, il n’était pas très sûr de ce qu’il disait.

Le barde baissa ses yeux vers sa boisson, pour échapper au regard scrutateur. Le liquide ambré se voyait à travers les bulles de la mousse.

« - Je suis heureux d’être revenu, mais je crois que je devrais bientôt repartir. » annonça Cianech. C’était la solution la plus sûre, pour ne pas dire la seule qui s’imposait dans son esprit. Il ne lui laissa pas le temps de l’interroger. Ses yeux étaient déjà suffisamment inquisiteurs et annonciateurs.

« - J’aimerais bien percer le mystère de cette Clef. Vous savez que c’est ma maladie, la curiosité » sourit-il. Puis, sa voix se fit plus inquiète. « J’aimerais bien retrouver mon Bran aussi… »

« - Oui, je reste quelques temps à Tir Na Nog. J’ai besoin de repos, de réfléchir et de consulter les érudits, ceux qui savent. » Il marqua une pause. « Vous m’avez manqué »

Qu’ai-je fait ? Comment suis-je revenu ici ? Que s’est-il passé ? Je ne me souviens que de cette douleur, et son souvenir m’élance, irradie comme une dague froide pénétrant ma chair. Où est mon Bran ? Où suis-je ?

Je dois me souvenir. Je me souviens que j’ai réveillé quelque chose. Mais sais-je quelle est cette chose ? Et pourquoi suis-je revenu ici ? Parce que j’ai oublié ? Et la Clef ? Je ne l’ai plus. Qu’ai-je fait ? Qu’ai-je réveillé ? Il faut que je le sache.

Je dois partir. Mais dois-je retourner là-bas ? Où dois-je rester ici, en Eireann ?Où aller ?


« - Je vous laisse » dit le barde dans un sourire. Il se leva, laissa tomber quelques pièces d’argent, et sortit dans les rues grouillantes de monde. Tir Na Nog ! Cianech observa la foule des badauds. Dans l’esprit de Cianech, elle tranchait singulièrement avec l’austérité des monts glacés de Snowdonia, la solitude des vastes plaines. Mais son sentiment allait au-delà.

Quelque chose ne va pas…

Cianech percevait un malaise au fond de lui-même. Trouble, indistinct, tout en étant présent, gênant, le barde sut que c’était une intuition, un pressentiment. Souvent, lorsque son Bran était avec lui, quelque chose de semblable lui effleurait l’esprit, comme un fugace instant de seconde vue.

Cianech se hâta vers la sortie de Tir Nan Og, courant à moitié, oppressé, comme s’il cherchait à fuir. Il se retrouva dehors, s’éloigna vers les collines de Connacht et finalement se laissa tomber contre un arbre, quelque peu apaisé. Le barde laissa un instant ses pensées vagabonder.

Même ici, je ne me sens pas bien. Subirais-je un geis ? une malédiction ? Tout mon esprit n’est plus qu’appréhension, peur et méfiance vis-à-vis du monde. Le souffle du vent qui m’environne est porteur de mauvais présages, et l’herbe qui s’incline sous son souffle le fait avec crainte. Fou que je suis ! J’ai voulu trouver l’Annwn, le Pays du Repos, et j’ai trouvé autre chose. Quelque chose d’encore plus mystérieux que la Clef… Et…

Il se releva brutalement, portant sa main sur LarmeSang, mais trop tard, une forme gigantesque était sur lui, l’enserrant de ses bras puissants…
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