[Myrhdin]

Dans la Forêt d'Yggdra, aux abords de Vindsaul Faste, les combattants midgardiens s'affairaient. La nuit était déjà bien avancée, mais la gloire de Midgard ne souffrait l'excuse de la fatigue : l'armée midgardienne allait se mettre en marche, et elle allait laver l'honneur de leurs Dieux qu'avaient osé souiller les perfides Hiberniens.

L'objectif de la campagne qui se préparait, dans le plus grand secret, était clair dans l'esprit de chacun : récupérer au coeur du Royaume d'Hibernia, dans ses plus imposantes forteresses, les précieuses reliques vénérés par chaque guerrier de Midgard, le Marteau de Thor et la Corne du Valhala.

Les Combattants vérifiaient l'état de leur paquetage, le tranchant de leurs armes, les rivets de leurs armures, les Mystes et les Devins lançaient quelques invocations dans la langue gutturale du Nord pour améliorer leurs compétences et leur résistance au cours du combat qui s'annonçait. Tous devaient sans doute avoir en tête la justesse de leur cause et la joie qu'ils ressentiraient à vaincre et mourir pour l'honneur de leurs Dieux.

Les portes de la forteresse s'ouvrirent, et le silence se fit sur le plateau qu'elle surplombait. Pendant quelques instants, on n'entendit aucun bruissement, aucun choc, aucun mot, puis une rumeur se propagea : ils arrivaient.

Sous la herse se tenaient une grande partie des plus grands combattants de Midgard, qui redescendaient du Conseil de Guerre qui s'était tenu dans les salles supérieures d'une aile de Vindsaul Faste auquel nul n'avait normalement accès.

Les Guérisseurs allaient à leur tête : on y reconnaissait Alvaath et Haegg, le duo infernal, qui sous leur apparence bonhomme masquaient un courage sans faille face aux imposantes armées hiberniennes, Claranse, qui malgré une santé fragile figurait enfin parmi les grands, mais tous les regards convergeaient vers la Flammen Einherjar Yldune, la plus puissante Guérisseuse que Midgard ait jamais connu, mais dont les atours pour une fois simples et sobres montraient la détermination.

Puis venaient les Chamans, qui firent une entrée remarquée grâce à la discussion animée qu'entretenaient Mogamoth et Romuge, les deux Kobolds, qui se chamaillaient quant à savoir qui avait le plus gros portefeuille, qui avait le plus grand nombre de morts à son actif, qui aurait le droit de perturber Yldune toute la soirée, une discussion traditionnelle entre deux Kobolds somme toute, mais qui jurait avec la solennité qui flottait dans l'air à cet instant.

Les Mystes s'avancèrent ensuite, en une masse confuse de bâtons superbement ornés, tous rutilants et prêts à lancer des sorts aux effets dévastateurs : parmi eux se trouvaient Gahnard, que l'on reconnaissait aisément à sa haute et large silhouette dans cet amas de Kobold et de Viking, Virae, dont l'esprit champion s'amusait à faire des signes à la foule malgré les réprimandes de son maître, Zhuny, qui trépignait sur place à force de se retenir de sauter en tout sens pour ne pas rompre la magie de ce moment.

Les Combattants fermaient la marche : s'avançaient pêle mêle les Sauvages, ou plutôt devrait-on dire la Sauvage Starless, dernière représentante hautement récompensée de cette classes aux arcanes méconnus, les Berzerkers, avec comme chef de file Malona, qui à défaut d'avoir le prestige de certains, avait des qualités indéniables en pleine action, et les Skalds, Khelekrandir et Kalyto, dont leur camaraderie avait fait des amis de toute l'assistance. Les Guerriers et Valkyries avançaient en de belles lignes, la lune se reflétant dans le poli de leurs boucliers.

Comme à leur habitude, ils se rendirent à l'extrême est du plateau, et une longue attente commença. Les Larrons étaient depuis de longues heures infiltrés sur les terres d'Hibernia, au plus près des forts ennemis pour garder la meute midgardienne informée des déplacements adverses. Ils étaient chargés de relayer leurs informations par les tours de guet et les murailles qui reliaient Midgard à Hibernia, sur la mystérieuse île d'Agramon.

Chacun avait repris le cours de son activité, mais elle fut presque aussitôt perturbée par le cri des vigies au plus haut de la forteresse : un Skald approchait.

Le Viking, hors d'haleine, s'avança dans un dernier effort et mit un genou en terre devant Yldune : il apportait deux rapports, l'un de Fugo, en charge de la surveillance de Dun Ailinne, et l'autre de Khrrone, chargé de l'observation de Dun Scathaig. Les patrouilles hiberniennes étaient de moins en moins nombreuses, au point que leur nombre pourrait presque être égal à celui des combattants de Midgard.

Yldune écouta attentivement le Skald, et quand il eut fini, un large sourire apparut sur ses lèvres. Levant le point haut dans le ciel, elle hurla à pleins poumons la mort d'Hibernia, accompagnée par la voix de la centaine d'autres combattants, ravis d'avoir enfin le signal du départ.

La colonne se mit en branle, et prit la direction de Bleedmer Faste, sous la conduite du Skald messager qui leur indiquait le plus court chemin. Le plateau de Vindsaul Faste se vidait petit à petit de ses belliqueux occupants, mais au milieu d'eux, une ombre se détachaient par son immobilité.

Agenouillé devant la porte de la forteresse, un grand Troll ne semblait vouloir bouger d'un pouce. Rares étaient les personnes qui le connaissait, ce Skald balafré. Chacun se demandait s'il avait déjà affronté l'ennemi à ses côtés, et il en intriguait plus d'un par cette immobilité inquiétante dans un tel moment d'effervescence pour Midgard.

Bien après que le dernier combattant se fut éloigné, le Troll se redressa, difficilement, les jambes ankylosées par l'inactivité prolongée. Il resta ainsi debout pendant de longues minutes, le regard perdu dans le vague, à respirer profondément. Puis il se mit à marmonner à voix très basse, ce qui devait être une louange à Bragi, son dieu de tutelle, lui demandant de donner force à sa voix et pouvoir à ses mots. Le Skald prit une dernière inspiration, ouvrit la bouche, et sa voix tonitruante se répercuta dans toute la forêt d'Yggdra.

«Laissez-moi vous raconter
L'histoire d'un héros adulé,
Qui sur ces terres enneigées,
A fait face à bien des dangers.

Sauvage à nul autre pareil,
Qui au combat fit toujours merveille,
Il guida Midgard l'Eternele,
Souvent sous la Lune, sa belle.

Noctambule craint et adulé,
Son courage sera loué
Pendant encore bien des années
Sans pour autant qu'il l'ait cherché.

Ce Troll Farouche n'a jamais fui,
Peu importait les ennemis.
Jusque dans de lointains pays,
Sa vie farouchement il défendit.

Maintes reliques il a conquis,
Même quand l'espoir nous avait fui.
Rien ne lui était interdit,
Dès lors qu'il avait ses amis.

Le souvenir de ses victoires
Revient souvent dans la nuit noire,
A vos côtés, mais sans le voir,
Vous disant de garder espoir.

Alors que vous serez tous las,
Face à la Mort qui vous menace,
Ne perdez surtout pas sa trace,
Et avec lui, droits, faîtes face.»

Le Troll retomba dans son mutisme, se retourna, et franchit gravement les portes menant vers les terres de Midgard. Lui n'avait plus le coeur de se battre, depuis que ce Troll dont il avait chanté la gloire était porté disparu. Quelque chose en lui s'était brisé.

Le chant du Skald se répercuta dans toute la vallée, et frappa la colonne en marche alors qu'elle s'apprêtait à rentrer dans les Montagnes de Jamtland. Tous s'arrêtèrent et tendirent l'oreille, pour distinguer plus clairement cette voix portée par le vent. Les réactions furent fort différentes au sein de la troupe : peu avaient connu le héros dont il était question, mais les plus anciens avaient été ces compagnons d'armes, et avaient pour certains participé à ses faits d'armes. Face à l'incrédulité des plus jeunes, les vieux n'eurent qu'une réponse : nul ne savait s'il était mort, nul ne savait s'il était vivant, mais ce que nombre de guerriers pouvaient dire, c'est qu'ils avaient déjà vu apparaître devant eux l'énorme silhouette d'un troll qui les protégeaient ou les précédaient dans les failles des défenses ennemies, quand la situation leur paraissait à tous désespérée. Aucun vieux ne voulut dire son nom, répondant à chacun : si tu le vois, demande-lui.

La Colonne s'était remise en marche, peu de temps après, mais plus rien n'était pareil : chacun s'était senti ragaillardi par ce chant venu de nulle part. Mais certains, une très petite partie de l'armée, n'avaient plus le regard aussi joyeux qu'avant. Seule en tête, un peu en avant, Yldune avançait d'un pas ferme et décidé. Mais sur sa joue gauche perlait une seule et unique larme, car elle avait été émue, comme tous les anciens compagnons d'armes de ce héros, un peu plus que les autres. Elle chuchota à voix basse:

«Merci. Merci pour lui, Myrhdinn.»

[Myrhdin]

C'est non sans émotion que j'ai écrit ce petit texte au coeur d'une nuit sombre, où les souvenirs m'ont assaillis, revenus d'un passé déjà trop lointain pour moi.

Ceux qui l'ont connu reconnaîtront la personne à qui il est dédié, les autres le découvriront peut-être, mais il est parti sans tambours ni trompettes, alors qu'il aurait à mon avis mérité bien mieux.

Au plaisir de te recroiser un jour mon ami.

[yldune/sahly]

Tres beau texte myr, la petite larme de la fin y était, et pas seule a vrai dire

peut être qu'un jour elles s'arrêteront de couler... j'espère.
Par contre stop faire croire que je lead des bus, c'est absolument pas mon genre

[Clarense]

tres sympa ce texte et je crois savoir de qui tu parle au final ):
d'ou j'ai une santer fragile ? ):

[Myrhdin]

J'ai longuement hésité sur le trait particulier de chacun, et surtout sur le tien, à vrai dire, j'hésitais entre deux allégories pour rendre soit ta fâcheuse tendance à cliquer où il ne faut pas, soit les LD intempestives dont tu es victime dernièrement.

J'ai donc choisi cette expression pour rendre le fait que tu n'étais pas toujours opérationnelle en combat.

[Pumpax]

Beau texte Myrh, merci.

(sale ancien va, remember)

[Khelekrandir]

Un très beau texte pour une personne fort sympathique qu'en effet je n'ai pas aperçu depuis bien longtemps sur les terres midgardiennes. Dommage que tu ne l'ai pas écrit pour le concours, ça aurait été, je pense, l'un des seuls textes vraiment représentatif de notre serveur/royaume.

Je vois dans ton énumération des combattants sortant de Vindsaul que tu gardes l'ordre d'importance dans la construction d'un groupe. Merci d'avoir mis les skalds avant les valks .

[Djuzam]

Superbe, avec des noms qui parlent encore plus aux lecteurs

Malheuresement pour eux, il n'y a pas de prêtre de Hel

Passage avec Romuge, ainsi que la chanson du Skald

[Myrhdin]

Citation :

Publié par Khelekrandir

Je vois dans ton énumération des combattants sortant de Vindsaul que tu gardes l'ordre d'importance dans la construction d'un groupe. Merci d'avoir mis les skalds avant les valks .

C'est moins RP, mais si tu veux, je peux poster les 3 pages d'analyses du rôle du Skald d'un point de vue européen que je suis en train de préparer pour le TL Skald.

Qu'est-ce tu crois, Skald jusqu'au bout des ongles ! (Je te les passerai peut-être malgré tout pour vérifier la correction de mon anglais.)

Citation :

Publié par Djuzam

Malheuresement pour eux, il n'y a pas de prêtre de Hel

Il a certes de multiples facettes mais je n'ai pas oublié de mentionner Virae et son esprit champion.

Que les classes pour lesquelles je n'ai nommé personne ne se sentent pas lésés, c'est juste que ce texte parle plus fortement à certaines personnes qu'à d'autres, et c'est à elles que je m'adressais, et ceux qui les connaissaient, donc je n'allais pas citer un random hors de ce cercle d'amis qu'est l'alliance Divine Wrath.

(Même si j'avoue que le coup d'Yzual noir d'avoir trop erré dans les couloirs souterrains m'a longuement titillé !)

[Vivi filledefiann]

superbe texte myrhdin, tu as raison mon esprit champion est très turbulent