Provient du message de Alamankarazieff
On a récemment fêté l'anniversaire des élections, et l'agacement que j'avais ressenti à l'époque m'étreint à nouveau.
Ca va aller, tu es sûr ? Tu veux un p'tit thé avec un cake ?
Qu'est censée être la démocratie, qu'est-ce qu'on me vend sous cette étiquette et quels étaient les buts de ceux qui l'ont mise en place ?
La base fondamentale de la démocratie, c'est le dialogue. La démocratie n'est pas la domination de la minorité par la majorité, mais la recherche du consensus.
C'est faux. La base de notre démocratie est le vote. Le pouvoir du peuple peut s'exprimer soit directement ( démocratie directe ), soit indirectement, par l'intermédiaire de ses représentants.
La recherche du consensus n'est pas non plus le but de la démocratie telle que conçue dans la constitution française de juin 1958. Si celle-ci autorise les députés, qu'ils fassent partie de la majorité ou non, à amender les lois, à en proposer, à pouvoir saisir le conseil constitutionnel, etc ...... ( je ne vais pas faire un catalogue ), la constitution prévoit aussi quelques moyens pour le gouvernement de faire passer ses réformes importantes " en force " ( notamment le célèbre article 49-3, mais il existe 3 ou 4 autres méthodes plus discrètes, et même une dernière encore plus perfide, consistant à ne pas publier les décrets d'application de lois votées par la majorité précédente ........ Bref. ).
Donc, la résultante de tout cela, est que ce n'est pas le consensus que recherche notre démocratie, voire la démocratie en général, mais une solution souhaitée théoriquement par une majorité de votants.
Le but est que toutes les voix soient entendues, tous les avis pris en compte, afin d'arriver à une solution qui satisfasse tout le monde.
Que toutes les voix soient entendus, je suis d'accord. Que tous les avis soient pris en compte, je le suis moins. Enfin, arriver à une solution qui satisfasse tout le monde, ça n'existe pas. Et plus particulièrement en démocratie .......... Il y a même presque antinomie entre les mots démocratie et consensus si l'on y réfléchit bien ..... A mon sens la démocratie n'a jamais été la recherche du consensus. Du moins, ce n'est pas par ce critère qu'on en déduit si un régime est démocratique ou non.
Le problème de la mise en pratique de la concertation a conduit au système de la représentation. Toute personne ayant goûté aux joies des AGs, des réunions de tout poil, sait à quel point il est difficile de gérer un débat comportant plus d'un seul participant.
Ce n'est pas qu'un problème de mise en pratique de la concertation.
Tu as raison, dans le sens où 65 millions de citoyens recensés peuvent difficilement débattre de façon pertinente de problèmes complexes, souvent très techniques, et abscons.
Cependant, il n'y a pas que cela. Nous avons recherché un système où la politique est un métier. Le député, le sénateur, les autres élus, sont payés. Pour de nombreuses raisons, cette mesure de la rémunération de la fonction politique, qui n'allait pas de soi jusqu'à de récentes périodes, donne de nombreux avantages. Le sujet est long, trop long, je tronque donc le développement. [tronqué
]
Donc on donne sa voix à quelqu'un. Sémantiquement, ce n'est pas rien. Celui à qui je donne ma voix va parler pour moi.
Quand on a posé la question aux français la question "qui voulez vous comme président de la république ?" 5 millions de personnes ont répondu Jacques Chirac, soit environ 14 % des votants. On a entendu ces 5 millions de voix là, et aujourd'hui, Jacques Chirac peut parler de la voix de 5 millions d'hommes et de femmes qui l'ont choisi pour porter leurs voix.
Mais qu'est-il arrivé aux voix des 35 autres millions de votants, des 86 % restants ? Eh bien pas grand chose. On a beaucoup critiqué les abstentionnistes, mais entre être allé à la pêche ce fameux dimanche, ou avoir voté Lionel Jospin, au final, le résultat est le même. Ces voix là sont perdues, ne seront jamais entendues.
On est donc clairement dans le cas d'une oligarchie : une minorité, même si elle est importante, gouverne la majorité.
Quand en plus, on nomme un premier ministre (dont la fonction est en fait bien plus importante que celle de président) issu de Démocratie Libérale, parti ayant obtenu moins d'1 million de voix, on est en droit de s'interroger sur le produit qu'on nous vend.
" Ce n'est pas parce que les cons sont majoritaires qu'ils ont raison ", comme disait je sais plus qui.
Et oui, les abstentionnistes. Les revoilà, nos marionnettes du dimanche, les pêcheurs invétérés, les jeunes cadres dynamiques trop fatigués pour se passer de leurs week-end rando-équitation à la Bourboule, la ménagère trop occupée à ne pas louper un épisode de ses feuilletons favoris, les gens qui croient que " voter, de toute façon, ça sert à rien ", etc, etc, .... Si, voter ça "sert" à quelque chose. Déjà, à avoir l'air moins c** quand on critique la gouvernement en place, puisqu'au moins, en ayant voté, on peut se targuer d'avoir exprimé son opinion. Les autres sont des nains qui n'ont qu'à se taire.
Tu dis que les voix qui sont allées au PS sont perdues. C'est vrai et faux. Vrai car dans le cadre d'un présidentielle, il n'y a qu'un vainqueur. Faux, car ce vainqueur prend malgré tout en compte les résultats de ses petits camarades. Enfin, dans le cadre des élections législatives, ces voix ne sont pas perdues. Bref, comme il a déjà été dit, les présidentielles ne représentent pas le jeu démocratique dans son ensemble, et heureusement.
Je ne plaindrai pas les abstentionnistes, je ne plaindrai pas les perdants de ces élections. Je dis juste : " Tant pis pour vous ". Je ne suis pas allé pêché, et je n'ai pas voté Jospin. A un moment, j'ai cru que j'étais un héros dans ma municipalité, tellement il y avait peu de monde au premier tour de la présidentielle. Une sorte de Mad Max de l'urne banlieusarde. Enfin bon ....
Tu parles d'oligarchie. Pourquoi pas. Mais j'ajouterai, l'esprit taquin, oligarchie " démocratique ". Oligarchie oui, mais élue, selon les lois et règlements de la République ... Tu parles de minorité qui gouverne la majorité. Tu as juridiquement tort. Voire même tort tout court. Je m'explique. En France, les représentant du peuple ainsi que le chef de l'Etat sont élus par le vote du peuple. Le scrutin est universel et direct. Conclusion : les gens qui s'intéressent un tant soit peu à la vie politique, ou mieux et plus simplement, qui aiment leur pays et profitent pleinement des droits et devoirs que lui octroie la loi, vont voter, vont s'exprimer. On s'intéresse donc à ceux qui s'expriment. Ca semble jusque là normal.
Sur ces votants, on dégage une majorité de votes, qui désignera le vainqueur de l'élection. On considère que ceux qui se sont abstenus, et bien ........... se sont abstenus justement. Ils ne se sont pas exprimés, tant pis ( bien fait ? ) pour eux. La majorité de ceux qui s'expriment à donc le pouvoir. Quoi de plus normal ? A moins que le hamac acheté au casto du coin soit plus important ?
Encore un mot. Je vais mixer deux post : Charlotte nous a parlé de certains magistrats romains jugés selon les résultats de leur politique, et toi je crois, alamankarazieff, tu as fait allusion à une responsabilité des élus pendant leur mandat.
En gros, vos propositions se rejoignent, et je répondrai à vos deux arguments :
- Charlotte, tu dis vrai, mais quand tu ressors des cours d'institutions politiques romaines, ressort les de façon commentée et non tronquée. En effet, certains magistrats, notamment les magistrats chargés d'administrer les conquêtes éloignées de Rome, étaient "jugés" par le Sénat à la fin de leur mandat. Cependant, il faut savoir que les hautes magistratures romaines n'étaient accessibles qu'aux gens très riches, et qui étaient souvent d'anciens sénateurs. En effet, les fonctions politiques dans la République romaine n'étaient pas rétribuées. Et les élections coûtaient chères, notamment pour pouvoir se payer une clientèle et corrompre le reste.
Enfin, les magistrats "jugés" étaient souvent de la même "gens", disons de la même famille pour faire simple, que les sénateurs, donc au final, on assistait à des simulacres de jugements, et je crois même que jamais un magistrat n'a subi de sanctions sénatoriales ........... Bref, un système qui part d'une bonne intention, mais complètement pourri par la pratique. Et, à vrai dire, il ne pouvait en être autrement.
- Alamankarazieff : le coup des mandats impératifs, car c'est de cela dont tu parles, on l'a essayé en France. Je te laisse chercher la période .....
Ca s'est avéré être une catastrophe. Loin de rendre les politiques plus "clean", cela les a rendu encore plus suspicieux et craintifs. Pourquoi ? Car n'étant plus protégés, la moindre connerie, même involontaire, pendant leur mandat, en faisait la cible d'une action judiciaire visant à les démettre de leur fonction. Et ces actions n'étaient pas toujours commandités par des électeurs soucieux de la bonne marche de la démocratie, tu vois où je veux en venir ? .......
Bon, arrêtons le développement ici.
Et au regard des déclarations de José Maria Aznar et de Jean Pierre Raffarin concernant le pouvoir qui sort des urnes et pas de la rue, je comprends qu'en fait de démocratie, on nous refourgue des TCM, des tyrannies à choix multiple.
Manger sa saucisse-frite et gueuler dans la rue, n'a jamais rendu la démocratie plus forte. On n'exprime pas un pouvoir dans la rue, mais un avis, ce qui est fort différent. Le pouvoir les représentants l'ont, ainsi que d'autres instances ....
Au fait puisque tu as l'air d'aimer le sujet des retraites, je te conseille vivement de te renseigner sur le rôle des partenaires sociaux dans la gestion et l'orientation des caisses de retraites en France ............ Ils sont loin, TRES loin d'être innocents. Le gouvernement n'est pas le seul, dans le domaine social, spécialement en France, à avoir un pouvoir de décision et d'orientation concernant la santé et la retraite, notamment. Mais pourquoi ce qu'on appelle pudiquement les "partenaires sociaux" n'ont-ils jamais crié gare en ce qui concerne les retraites ? Pourquoi ne font-ils pas état des discussions quasi mensuelles qui ont lieu avec les gouvernements successifs depuis 15 ans concernant ce problème ? Pourquoi n'ont-ils jamais conditionné leurs syndiqués et les salariés en général ainsi que les fonctionnaires, dans l'optique d'une réforme ? Pourquoi donnent-ils l'impression que cela nous tombe sur le coin de la gueule comme ça en l'espace de 3 mois, alors que cela fait 15 ans que les propositions, ainsi que LEURS propositions, sont étudiées, débattues, rebattues, et montées en neige ? Pourquoi font-ils croire que le gouvernement réforme comme cela maintenant, comme une envie de faire caca, et que eux c'est les gentils, les défenseurs du travailleurs durement exploitées jusqu'à 55 ans à la SNCF ( oui, je provoque ) ?
Parce que bien entendu, en France, les syndicats ne sont pas politisés ........ Parce que évidemment, les syndicats n'ont pas de grosses difficultés financières, et que bien sûr, s'ils n'ont pas aidé les gouvernements à réformer, ce n'est pas pour éviter de perdre des adhérents, c'est juste qu'ils n'étaient pas d'accord ....... Qui ment, qui a raison ???? Et qui est le plus de mauvaise foi dans cette affaire ?
Mais ce n'est pas réellement nouveau. Déjà Rousseau critiquait le système d'élections anglo saxons : pour lui, les anglais votaient pour élire un tyran ; mais même élu serait quand même un tyran, et qui, contrairement à un roi, pourrait se targuer d'être mandaté par le peuple. ( Un peu le même problème qu'avec les trafiquants de drogue et les spéculateurs financiers, les deux sont de graves nuisibles, mais il n'y en a qu'un qui a la décence d'être un criminel incarcérable.)
Rousseau avait de bonnes idées, mais irréalisables. Montesquieu a indiqué la bonne voie.
La France est un pays éminemment difficile à gouverner : sur cette fameuse réforme des retraites, on a environ 50 % de pour et 50 % de contre, comme sur pratiquement tous les sujets sensibles.
C'est normal, il y a 50% d'actifs dans la fonction publique en France, et 50% dans le privé............
Quoique, je lance une boutade comme ça, mais je ne dois pas être loin de la vérité .......
Quand sur un référendum aussi essentiel que celui de Maastricht, le résultat est de 51 % de oui, avec donc 13 100 000 voix pour, ça implique qu'il y a 12 600 000 voix contre. 51 à 49, en basket c'est une victoire, en politique c'est un constat d'échec.
Non, en politique aussi c'est une victoire. On n'est pas chez Fidel ici, une élection ne se gagne pas avec 98% des suffrages exprimés.
La politique est " l'art du vivre ensemble". Tous ensembles. Il serait temps de trouver des alternatives à ce système qui commence à sentir le brun.
La politique c'est le maquillage qui cache la laideur. C'est la rhétorique fallacieuse........ Bah, Platon était un peu sentencieux parfois, voire carrément chiant.