La Machination

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« Stalingrad est à terre! » cria Phibie. Voilà deux semaines que la base du Général subissait des assauts répétés de l'immense flotte envoyée par Zion et 01. Les remparts finirent par céder et la localisation d'une faille découverte par le Zephyrus a permis de créer une brèche sous les pieds des commandos. Pris par surprise, les 225 000 sentinelles du Général furent impuissante face au 450 000 sentinelles envoyées par 01. Malgré tous ces efforts, la cible prioritaire échappa à tous le monde; le Général réussit à filer entre leurs doigts ayant trouvé refuge dans la simulation. « Au moins il est hors d'état de nuire! » s'écria Djoul. Le Loup de Mer II s'était détaché de son groupe pour rejoindre le Zephyrus et l'Akatsuki dans cette ultime bataille. Ils avaient tous subit des dommages plus au moins graves selon les vaisseaux mais l'Akatsuki est certainement celui qui en aura fait les plus gros frais; un missile a percuté le cockpit tuant Aniki et blessant de plein fouet son capitaine, Har0d. Ce dernier a été rapatrié d'urgence à Zion, comme beaucoup de valeureux soldats. Aujourd'hui, son état est stable mais il est toujours plongé dans le coma.

Les mois passèrent et Zion s'activait à réparer ses hovercrafts. Parmi eux, le Loup de Mer II et exceptionnellement l'Akatsuki étaient à quai. Le Zephyrus lui n'avait pas été autorisé à entrer à cause des membres de son équipage « qui ne sont pas en règle ». Les exilés étaient mal vu dans la cité. Même s'ils n'appartenaient pas aux sous-fifres du Mérovingien, cela provoquait toujours des migraines chez le commandant Lock et à commencer par les histoires de l'Oracle et de la prophétie. Bref les histoires de ces exilés ne l'intéressaient guère.
Le capitaine Ednix demanda à sa fidèle lieutenante de rapatrier l'hovercraft vers la base désaffectée où ils avaient trouvé refuge quelques semaines plutôt. En attendant lui restait sur place pour reprendre le commandement de l'Akatsuki. Mais ils ne pouvaient se déplacer sans une escouade d'hommes présents pour le surveiller. Ce qui faisait bien sourire le capitaine StrangeReporter lorsque les deux hommes se croisaient sur les passerelles suspendues de Zion.
Et pourtant ce jour-là, contre toute attente, c'est un sourire crispé qu'échangea le capitaine du Loup de Mer II avec celui du Zephyrus :

- Ednix, si tu veux bien nous suivre, dit Strange, une réunion de première instance est en cours

Le visage de son ami zionite l'intrigua.

- Soldats, continua-t-il, veuillez retourner à votre détachement.
- Navré Capitaine StrangeReporter
, riposta l'un des gardes, mais nous avons l'ordre du commandant Lock d'escort...
- Obéissez soldats!
ordonna sèchement le Capitaine Kronos93 convoqué également à ce meeting, j'imagine que vous ne souhaiteriez pas désobéir aux ordres directs d'un capitaine de premier rang avec les conséquences que cela entraîne?

Le chef d'escouade fit signe à ses hommes de se retirer et repartir probablement faire un rapport à Lock de cette décision.

- Mon pauvre Ed, ils ne te laisseront jamais en paix ces gars-là, dit-il sur un ton rieur.
- Ouais tu peux le dire... mais au fait, c'est quoi cette convocation?
- Aucune idée
, répondit Kronos, mais cela s'avère très important. Tous les hauts gradés de Zion ont été mobilisé, puis d'un sourire moqueur, heh le Conseil doit avoir de l'estime pour toi.
- Mouais... attendons de voir la surprise que nous réserve ces vieilles peaux.


Les trois capitaines se mêlèrent à la foule et partirent rejoindre la Chambre du Conseil.
L'amphi se remplissait vivement de ces capitaines et lieutenants dans un brouhaha assourdissant. Tous étaient étonnés de leur présence et les interrogations d'une telle commission faisait craindre les plus septiques.

- Silence! avertit la vieille dame du Conseil.
- Installez-vous soldats, nous allons débuter la réunion, s'écria un autre.

A ces mots, le silence s'installa. Quelques chuchotements étaient encore perceptibles, mais tous tendirent l'oreille pour écouter attentivement le motif de leur rassemblement. Le capitaine Niobe se leva et se dirigea sur l'estrade. Elle semblait chercher des yeux le regard des siens. Une certaine inquiétude en découlait.

- La trêve est terminée, lança-t-elle d'une voix roque et puissante. Un vaisseau cypherite a découvert l'existence de notre nouvelle cité New Zion et a relayé l'information aux Machines.

L'annonce de Niobe fit monter l'émotion dans la salle provoquant l'énervement chez les uns, la frustration chez les autres.

- QQUOI?! Comment ça NEW ZION?? PERSONNE ne m'a tenu au courant de CE PROJET! hurla le capitaine du Calappidae.
- C'est inadmissible, vociféra un autre.
- ENFLURE! gueula un dernier.

Les jurons fusèrent dans la salle à tout va mais le conseiller Hamann s'interposa en frappant brutalement la table :

- BON SANG MESSIEURS! Est-ce une manière d'agir ainsi?! s'époumona-t-il.

La voix du vieil homme faisait encore frémir les murs de la bâtisse. Le bruit se tut. Un homme se leva et continua le débat :

- Capitaine Niobe, reprit le capitaine Kronos sur un ton serein, pourquoi la plupart de nous ici présents n'ont pas eu part de cette information pour le moins primordial? Il s'agit du destin de l'humanité.
- En effet
, acquiesça le commandant Locke qui s'était abstenu de se prononcer jusque là, nous avons estimé préférable que seulement un minimum d'entre vous le sachiez. Nous avons tenu à éviter toute fuite.
- Et en quoi la construction de New Zion remet-elle en cause le signé de la paix?
questionna Ednix qui finalement ne put s'empêcher de prendre part à la discussion.
- Les Machines estiment que New Zion est une menace pour eux et que cette nouvelle cité n'avait aucune raison d'être, si ce n'est que d'engendrer une nouvelle guerre, conclut Niobe.
- Quel est alors le but de sa construction? interrogea une nouvelle fois l'exilé.

L'alarme de surveillance des portes de Zion résonna dans toute la cité, abrégeant la réunion et alertant la population de l'approche de sentinelles dans le périmètre de sécurité jusque là non franchi depuis la trêve.
La foule se précipita sur les quais dans un déluge ahurissant. La panique était à son apogée et une impression de déjà vu se mêla aux soldats braqués sur les gigantesques portes entourant la cité. Tandis que le silence s'installa, un bourdonnement de guêpes s'intensifia au fil du temps. Les secondes passant, l'explosion des EMPs minant les galeries en périphérie se fit entendre plus fréquemment et leurs déclenchements provoquèrent la chute de morceaux de béton protégeant la ville souterraine.
Le bourdonnement n'était plus qu'à quelques mètres, plusieurs capitaines prirent position dans leurs vaisseaux pour subvenir à un éventuel surnombre de sentinelles. Soudain la porte de l'aile droite vibra violemment sous l'impact d'une puissante charge portée de l'extérieur. Le bruit du métal subissant l'attaque d'une intense source de chaleur retentit dans un vacarme assourdissant. Toute l'artillerie de Zion se concentra sur son aile droite et les soldats se pressèrent à se positionner. Puis des lasers rouges commencèrent à jaillir de la porte, certains frappant par mégarde des unités postés un peu trop près. Tandis que la poussière s'accula au centre de la porte, un trou grossissant à vitesse exponentielle se creusa. Lorsque le trou fut assez grand pour qu'un homme puisse s'y engouffrer, toute activité cessa dans un silence à en faire douter les plus craintifs. Les hommes en première ligne se regardèrent. Finalement l'un deux s'approcha prudemment de la brèche. Mais alors qu'il n'était qu'à une dizaine de mètres, une tentacule métallique géante jaillit de l'ouverture et faucha le malheureux. « FEUUUU!!!! » En instant, toute la force de frappe de Zion s'abattit sur la porte en un rayon lumineux éblouissant, repoussant une cinquantaine de sentinelles essayant tant bien que mal à se faufiler. Deux longues minutes suffirent pour mettre fin à la menace. Les premiers secours arrivèrent sur les lieux, évacuant les blessés, tandis que des experts se dépêchèrent afin de constater les dégâts.

- Vivement qu'on rejoigne New Zion déclara Strange d'une voix grave, encore sous le choc.

Ed s'était approché du quais. Phibie et Aeriths effectuaient ensemble les derniers travaux sur le Jarngreip, un hovercraft prêté par Zion pour pallier l'absence de l'Akatsuki.

- Préparez le décollage dans cinq minutes s'écria le capitaine du Zephyrus à ses deux membres.

Aeriths tenta de rattraper Ednix qui avait déjà remit les voiles.

- On ne peut pas se permettre de repartir, s'élança-t-elle un brin agacé par cette décision de dernière minute de son supérieur, ils nous restent encore les batteries arrières à réparer!
- Vois le bon côté des choses. Au moins tu ne t'ennuieras pendant notre vol.
Le Jarngreip voguait vers une destination incertaine à travers les incalculables tunnels souterrains et ruines accidentées, vestiges d'un passé fort lointain mais inlassablement douloureux.
Hormis leur leader, l'équipage était fortement intrigué par les mystérieuses coordonnées vers lesquelles ils poursuivaient leur croisière. Anxieuse, Aeriths demanda, après avoir mûrement réfléchis, si leur chemin aboutirait à New Zion. Ednix acquiesça de la tête. Cette nouvelle réjouissait la troupe où des sourires de satisfaction se dessinèrent sur leurs visages. Mais brusquement, l'alerte de notification de l'hovercraft éclata.

## INCOMING TRANSMISSION ##

- C'est le Zeph patron! s'empressa de dire Aniki.
- File-moi le casque! Allô.. Ked? tu me reçois?

L'écran était brouillé de parasites et le son déformé. Le visage de Kedralynn était à peine perceptible.

- Tu m'avais affirmé que le système de communication était opérationnel, dit Ednix, coléreux, à Aeriths.
- Tout était en ordre avant notre départ. Je vais dans la soute voir si je peux régler le problème.

Aeriths se précipita dans la soute. Le reste de l'équipage tentait de chercher d'autres alternatives au problème.

- Permute la puissance du générateur secondaire sur la batterie d'émission. On va essayer d'accroître la puissance du signal.
- Double slash, control, execute, command
, Aniki s'exécuta et par miracle la qualité s'améliora.
- Ici Kedralynn, premier officier du Zephyrus pour transmission urgente. Jarngreip, me recevez-vous?
- Ici Ednix, on te reçoit Ked. On rencontre actuellement des difficultés, probablement à cause d'une turbulence électromagnétique dans le secteur...
- Attention c'est un piège!


## TRANSMISSION ENDED ##

- Hé merde, qu'est-ce qui se passe encore Ani?
- J'ai perdu le signal. L'antenne vient de nous lâcher.
- Bordel!


Aeriths refit son apparition, essoufflée.

On a saboté le vaisseau. Les câbles de l'antenne ont été sectionnés.
- C'est une blague?
- Non.


Soudain, les écrans du pont principal se coupèrent, accompagnés du déclenchement de toutes les alarmes et voyeurs que pouvaient posséder un hovercraft.

> search -m /id=Omnia3
Checking network for Omnia3's location....
Search complete! Results found:
Omnia3
Would you like to download Omnia3's program? (Y/N)
> Y
Data transfer started: -m /id=Omnia3
Downloading...
> _


- La poisse! c'est un virus de classe 5, il est en train de mettre hs tous nos systèmes informatiques!
- Aniki fait quelque chose! Douceur prend l'autre poste et active les firewalls intermédiaires.


L'équipage s'activait face à cette crise mais au bout de cinq minutes d'acharnement, Aniki déclara ce que tout le monde craignait le plus.

Downloading... Download complete!
>_
## SYSTEM SHUTDOWN ##


- C'est fini. Le virus a détruit la totalité du système. Nous voilà sans aucun système de défense.

La colère s'empara d'Ednix, les sourcils froncés et le visage crispé.

- Qui a pu faire une telle chose?
- Il faut vraiment être naïf pour croire que les zionites nous laisseraient nous en tirer comme ça
, déclara Aeriths.
- Ouais et heureusement que je vous avez ordonnés de surveiller le vaisseau.
- Ce que nous avons fait
, répondit Phibie, Aeriths et moi n'avons pas bougé.
- Alors c'est qui?
- C'est pourtant évident. Zion nous fournit un vaisseau dont on n'ignore la structure. On aurait du se douter que cette tendresse n'était pas clean
, conclut Aeriths

Ednix était consterné par cette révélation. Après le soutien que ses hommes et lui ont apporté, les zionites ont jugé préférable de les supprimer.

- Il savait que tu irais probablement voir New Zion. Pour eux c'était le risque en trop, ajouta-t-elle.
- Ce n'était pas une raison pour...
- Regarde les choses en face. Zion a sacrifié la trêve pour sa nouvelle cité. Ils n'hésiterons pas à la protéger coûte que coûte. Ils se fichent d'avoir nos morts sur leur conscience.


Aeriths n'avait pas tord. Aux yeux des zionites, ils étaient avant tout des exilés. Ceux qui aiment fricoter les clubs de nuit en bonne compagnie derrière un bon vin français. Ceci n'est pourtant qu'un cliché.
Ednix, reprit le contrôle du Jarngreip et le stationna au bout d'un cul sac.

- On ne peut continuer ainsi. Douceur, effectue la permutation du générateur principale vers le module de transmission annexe. On utilisera toute sa puissance pour émettre un dernier message et avec le reste du générateur secondaire, on se connectera dans la Matrice.
- Tu comptes faire quoi?
demande Aniki piqué d'une curiosité.
- Rencontrer Ked et lui demander qui est derrière tout ça.

En bon opérateur, Aniki effectua la procédure et envoya le dernier secours. Le générateur principal brussait lentement son déchargement jusqu'à épuisement. L'hovercraft plongea dans l'obscurité. Seuls les codes verts défilants sur les écrans donnaient un semblant de lumière.


Douceur qui était posté depuis deux heures face aux écran noirs, regardait les codes cryptés de la Matrice défilaient. Alors qu'il était plongé dans ses pensés il sentit une main se posé sur son épaule. C'était Aeriths, lui apportant une tasse de cette substance qui dégraisse les moteurs et qui tue les cellules grises.

- C'est sympa. Je commençais à avoir froid.
- De rien. Tu devrais aller te coucher... et puis c'est à mon tour de prendre le relais.
- Tu tiendras le coup?
- Allez file et fais d'beaux rêves.


Douceur ne s'attardait pas. Il enlaça amicalement Aeriths et partit dans sa cellule se coucher.
Elle guettait autour d'elle le moindre bruit suspect. Une fois rassurée, elle s'enfonça dans son siège, souriante.

Quelque part dans la Matrice, dans un restaurant asiatique bordant Ikebukuro...

- Alors... comment se déroule notre plan mademoiselle Rush?
- Tout se déroule comme prévu. Leur hovercraft est en hors d'état de fonctionner et ils croient que les zionites sont derrière tout ça.
- Bien.
- Notre accord tiens toujours donc?
- Les coordonnées de la position de New Zion...
- Je vous le dis je ne les ai pas!


Mécontent, le visage de l'agent Brown se fit plus grave.

- Vous aurez l'homme qui les connais.
Le soleil se noyait lentement dans les eaux du fleuve. Un halo illumina sa figure. Il aimait sentir, sous ses lunettes opaques, cette chaleur factice se déposer sur sa peau. Une sensation qu'il est rare de connaître du monde où il vient. Le regard évasif, il observait du haut de l'immeuble les millions de passants qui vont et vient, menant leurs petites vies anonymes. Ainsi, hommes d'affaires, avocats ou encore charpentiers, chacun semble y trouver une place, un rôle à jouer pour assurer une certaine cohésion dans leur environnement. Une existence tracée, sans véritable but, si ce n'est pour faire subsister celle de leur propre simulation.
Les plaintes criées par les manifestants quelques dizaines de mètres plus bas libéra Ednix qui s'était perdu dans ses réflexions. Il leva ses yeux, emplis d'espoirs pour un avenir meilleur mais aussi de craintes d'un futur imprévisible, et s'envola vers le ciel.

Edgewater, sur la 36ème Hilliard Avenue, trois silhouettes se matérialisèrent et s'échappèrent d'une cabine. Ils s'engouffrèrent dans la berline qui les attendait sous une pluie battante.
Le tête appuyée contre la vitre arrière, Phibie fixait les gouttes ruisselantes avec un air grave qui ne lui était pas propre. Aeriths tira de la banquette arrière le City News du jour qu'elle se pressa de feuilleter. Un peu plus tard, le véhicule se faufila sous le pont près d'Adams Street et s'immobilisa un kilomètre plus bas, face à un vieux immeuble délabré. Non loin de là, Ednix effectua un atterrissage gracieux sous les flots qui s'accompagna d'une ondulation sur la surface humide du sol. L'effet était saisissant tellement la difficulté du mouvement était prise avec facilité. Les autres, fascinés par l'habilité et la classe de leur chef, se pressèrent de le rejoindre. Aeriths glissa une main discrète dans sa poche, sans une once de quiétude. Ses doigts tapotèrent machinalement un numéro sur son téléphone qu'elle expédia d'un geste étudié dans le tas de carton qui traînait sur le trottoir.

Ils grimpèrent les hauts escaliers de l'immeuble jusqu'au 11ème étage. Une atmosphère paisible émanait des lieux. Comme si le palier de cet endroit n'avait plus était visité depuis longtemps. Ednix abaissa la poignet de la porte qui les séparait de leur lieu de rendez-vous. La pièce à la tapisserie décollée et fendue dévoila une femme à la chevelure courte et blanche qui semblait guetter leur venue depuis la fenêtre dominant l'entrée du bâtiment. Sa présence apaisa les membres de l'équipage, anxieux depuis leur connexion dans la Matrice.

- Kedralynn, je suis rassuré de te voir saine et sauve.

Les cernes sur le visage de son lieutenant témoignait de la longueur de sa journée.
Il aurait aimé la prendre dans ses bras et lui dire à quel point elle lui avait manqué, mais compte tenu de la gravité de la situation, il préféra s'abstenir.

- Les nouvelles sont mauvaises Capitaine, dit-elle sur un ton solennel.

Elle marqua un temps d'arrêt. Son regard, d'habitude clair et transparent, semblait perdu à l'image de son reflet sur le carreau, flouté par l'eau de la pluie.

- Il y a quelques heures, Zion a été assiégé et réduite en cendres...

Derrière le dos du capitaine, on étouffa un cri de panique.

- Quelques heures... , répéta Ednix, la bouche à entre-ouverte, Zion n'a pu être évacué entièrement... les espions cypherites étaient sur le coup ?
- Et plus nombreux qu'on pouvait le croire. Ils ont utilisé un vaisseau comme bélier pour détruire une porte et créer une brèche. Il s'est dit ensuite que plusieurs hovercrafts zionites en perdition, une trentaine, ont naufragé en chemin. Les sentinelles à leur poursuite ont fini d'achever le travail. On déplore plus d'une centaine de morts.
- Et nous étions sur la liste. Je ne regrette pas qu'on soit parti en avance. Malheureusement nous sommes immobilisés dans les souterrains et pour un bout de temps si nous ne faisons rien. Il faut absolument qu'on se tire de ce pétrin. On ne peut pas rester caché plus longtemps...
- En particulier si le vaisseau émet des signaux cryptés dans toutes les directions
, sécha-t-elle.

Cette nouvelle inattendue le fit frémir ainsi que le reste de l'équipe se tenant derrière lui.

- Que dis-tu ?!
- Si je me suis empressée de te contacter Ednix, c'est parce qu'actuellement votre vaisseau est en liaison permanente avec 01.


Dans la pièce, chacun échangea des regards avec l'autre. Décontenancé Ednix hotta ses lunettes. Il aurait pu s'emporter, saisir une chaise et la balancer par la fenêtre mais rien. Son agacement se traduit par une tape sur le mur. Soudain le bruit d'une palme d'hélicoptère créa un vacarme assourdissant et fit vibrer les cloisons de l'immeuble.

- C'est quoi ce bordel ?! Ked, la zone n'était pas protégée ??
- Bien sûr que si elle...


Une coupure de courant interrompit la phrase du lieutenant. Plongé dans l'obscurité, seul la fenêtre faisait office de lampe naturelle. Quelques secondes passèrent avant que les lumières rouge et bleue de girophares donnèrent l'alerte.

- Merde les flics !!
- C'est un piège ! tous le monde dégage !!


Ils sortirent d'un pas précipité de la chambre. Les mains posés sur la rambarde d'escalier, Ednix observa le rez de chaussé où la porte principale explosa sous la détonation d'une bombe. Des unités policières se déployèrent et prirent rapidement état des lieux, asphyxiant le sol de gaz lacrymogènes. Le capitaine Ednix prit les devants et indiqua à ses hommes de le suivre. Le coeur battant la chamade, ils coururent espérant rejoindre le dernier étage et filer par le toit. Mais c'était faire fausse route. Une dizaine de policiers armés des pieds à la tête dévalaient les escaliers à leur rencontre. Voyant le piège se refermer sur eux, d'un pied il enfonça la première porte qui lui était venue. Phiberglas ferma la marche en prenant soin de refermer la porte derrière elle. Ednix réceptionna d'une main habile le portable que son lieutenant venait de lui lancer et contacta son vaisseau.

- PK, il nous faut une issue d'urgence. Tu as les plans du bâtiment ?
- Deux secondes chef, et je vous trouve votre billet de sortie.
- C'est pas assez rapide, dépêche-toi.


Les commandos qui montaient les marches pour les uns et descendait pour les autres ne tardèrent pas à se rejoindre. L'incompréhension générale s'installa. Ils comprirent que la seule chose qu'ils cernaient était le vide. Deux agents se détachèrent du groupe et hochèrent négativement de la tête.

- Mais où sont-ils ?

Coincé entre les briques du mur et les fosses septiques de l'immeuble, les fugitifs se déplacèrent entre les canalisations sans le moindre bruit, chacun surveillant les gestes de l'autre. Ils savaient qu'à la moindre inattention, au premier pied mal placé, à la première particule de poussière irritant le nez, leurs vies seraient compromises. Mais ce qui devait se passer se produisit. Un commando, passant par hasard, intrigué par un bruit suspect, sollicita son attention. Il inspecta le mur en y collant une oreille contre, puis en plaçant un oeil dans un petit orifice. Il eut un moment de recul lorsque, affolé, il constata qu'un oeil le fixait. Préméditant la suite des évènements, Ednix prit ses initiatives de capitaine. Il poussa un cri pour se donner du courage et éclata le mur de tout son poids. D'un élan, il désarma le commando pris au dépourvu, le souleva par le coup pour le dissuader de crier avant de le plaquer contre le mur d'en face. Ednix regarda derrière lui son lieutenant, en acquiesçant de la tête, comme pour répondre à la question qu'elle se posait. Kedralynn lâcha prise et entraîna Phiberglas, Aniki et Douceur dans sa chute. Ils se laissèrent glisser sur plusieurs mètres avant de retomber violemment sur le dur. Les policiers fouillant la zone furent rapidement neutralisés par les fugitifs qui en profitèrent pour faire sauter une grille et s'échapper par les égouts.
Ednix refit face à face avec le commando qu'il tenait plaqué contre le mur. Mais à sa grande surprise il se retrouva nez à nez avec un type le menton carré, rasé de près avec des lunettes noires sur son nez et un dispositif d'écoute dans l'oreille droite.

- T'es qui toi ?
- Gibbs, Agent Gibbs.
- Les cheveux blancs vous donnez meilleur mine, Agent Gibbs.
- Un autographe soulagera peut être de votre déception, Monsieur William Flynn ?


Et l'agent dégaina un coup de poing puissant dans les entrailles du capitaine du Zephyrus qui le projeta sur le mur opposé. Les briques se détachant de la paroi témoignèrent de la violence de l'impact. Désorienté, le capitaine chercha un appui solide pour se remettre en course. L'agent avança d'un pas décidé. Ednix jeta un coup d'oeil derrière son épaule, évalua la distance qu'il le sépara de son agresseur, et lorsqu'il jugea ce dernier à sa porté, tel un félin bondissant sur sa proie, il lui asséna un coup de pied dans la rotule. L'agent agenouillé, il lui balança un autre pied en pleine figure, ne manquant pas de fendre l'un des verres de ces lunettes. En un éclair c'est une rafale de coup de poings qui s'abattit sur l'agent, inapte face à une telle débauche d'énergie. Ednix termina son enchaînement en pivotant sur lui-même de 180°, infligeant un coup de pied dévastateur à son adversaire, déboîtant sa mâchoire. L'agent s'écroula. Tandis qu'il s'apprêtait à évacuer d'urgence les lieux, quelque chose d'une force incroyable s'empara de ces deux bras. Il reconnaissait bien cette tête. C'était l'agent Gray. Voyant l'autre agent se relevait Ednix essayait tant bien que mal de se défaire de l'emprise de ce dernier. Il tenta de sortir un objet de sa poche mais en vain. L'agent Gibbs contrarié, remis sa mâchoire en place, et fit face à Ednix qui redoutait ce qu'il attendait. L'agent enchaîna une série de coups de poings à une vitesse et une puissance fulgurante, dépassant de loin la force du capitaine. L'agent Gray relâcha sa victime, inconsciente, les lèvres éclatées, les côtes brisées, le visage mutilé d'atomes. Il s'écroula à son tour sur le sol, inanimé.

- Emmenez-le !

Les unités policières qui assistaient au spectacle derrière l'épaule de l'agent Gray, exécutèrent les ordres de leur supérieur.

Pendant ce temps, les quatre autres fugitifs , guidés par leur opérateur, se précipitèrent vers une ligne téléphonique d'un vieux antiquaire. Kedralynn sortit en première de la simulation pour rejoindre son vaisseau avec le sentiment de culpabilité d'avoir abandonné son capitaine dans une situation critique. Phiberglas rappela l'opérateur du Jarngreip pour commencer l'évacuation.

Aeriths rouvrit les yeux. Elle s'empressa de se détacher du siège. Elle examina le pont principal. Elle se dirigea vers PK qui, concentré à pianoter sur son clavier, ne la vit pas se filer derrière son dos, sortant de sa poche un couteau à la lame tranchante. Et avant que ce dernier n'ait eu le temps d'extraire un second membre d'équipage, elle lui trancha la gorge d'une violence inouïe. Le sang gicla sur les écrans verts, suintant à même le sol. Elle récupéra le casque de PK et alluma le microphone.

Phibie, confuse, se tourna vers Douceur et Aniki. Elle haussa des épaules et raccrocha le téléphone. Son mobile sonna. Elle ouvrit le clapet et le colla à l'oreille. Elle entendit la voix d'Aeriths l'appelait. Sa gorge se noua.

- Aeriths mais... où est PK ?

Sa respiration haletante, à la limite de la suffocation, lui glaça le sang.

- PK s'en est allé... dans un monde meilleur. Un monde qui nous attend tous.

Phiberglas avait compris ce qui venait de se produire.

- Tu as tué PK !? dit-elle avec dégoût et indignation.

Le même sentiment se répandit dans le reste de l'équipage accablé par la nouvelle. Aeriths enjamba le corps sans vie de l'opérateur. Elle se baladait entre les fauteuils où étaient allongés ces collègues, la main caressant le cuir des appuis-têtes.

- Pourquoi ? s'empressa de demander Phibie, sentant que chaque seconde passée les rapprochait un peu plus d'une mort certaine.
- J'en ai plus qu'assez de servir des idéos qui n'aboutiront à rien... de servir une cité qui n'ont aucune reconnaissance pour nous... et par dessus tous, j'en ai plus qu'assez de manger chaque jour la même chose froide et amer dans ce tas de ferrailles pourri qui vogue dans un monde aussi ruiné qu'est ma vie depuis le jour où j'ai posé le pied sur ce navire.
- Et tu crois qu'en rejoignant les cypherites, tout s'arrangera pour autant ?
- Les cyphs ? oulà non... il est trop tard pour faire marche arrière maintenant que je sais la vérité. Cette vérité qui m'a pourri la vie jusqu'à la moelle des os. Et je m'arrangerai pour qu'elle ne pourrisse plus la vie à aucun autre être humain.
- Où veux-tu en venir ?
- J'ai passé un accord. En échange que je leur livre Ednix, ils m'ont promis un poste dans leur agence. Je récupérerai mon poste de flic, ma plaque et toutes mes affaires personnelles. Tu peux pas savoir à quel point il me tarde de récupérer la vie qu'on m'a volée. Mais avant j'ai encore quelques affaires à terminer...


Phibie avait les yeux écarquillés. Elle ne pouvait plus décoller le téléphone de son oreille. Elle était paralysée. Derrière quelque chose de lourd venait de s'affaler sur le sol. Elle se retourna, pétrifiée. Douceur gisait sur le sol, les yeux grands ouverts. Aniki en tremblait.

- J'aurais ta peau Aeriths !

Ses pensées s'échappèrent de sa bouche.

- Ne m'en veux pas Phibie, je ne donne qu'un petit coup de main au destin. D'ailleurs si tu as quelque chose à dire à Ani, tu ferais mieux de te dépêcher.

Le regard de Phibie croisa celui d'Aniki qui reculait, comme s'il voulait fuir la mauvaise tragédie qui se produisait dans ces lieux.

- Phi-b...

Ces derniers mots. Aniki s'écroula à côté du corps inerte de son ami. Des larmes de tristesse mais aussi de colère coulèrent sur les joues de Phibie.

- Au revoir Phiberglas.

Aeriths, posa sa main sur la prise où était branchée la tête de la jeune femme. Mais une secousse terrible l'empêcha d'exécuter son geste et la fit vaciller à même le sol. La tête heurta en premier, la laissant étourdie quelques instants. L'alerte stridente du Jarngreip signalant des mouvements hostiles dans son secteur, lui mit la puce à l'oreille.
Elle vit sur l'écran holographique le Zephyrus lancé plusieurs missiles en sa direction. Alors qu'elle débloqua le cache de sécurité du bouton pour lancer l'onde électromagnétique propulsée, elle fut prise par un mal de crâne. En touchant ses cheveux, elle sentit une substance froide perler sur sa main. Du sang. « Arg !? Kedralynn ! » Mécontente du choc qui lui a été assénée, elle fixa attentivement l'écran. Le Zephyrus fonçait à toute allure vers le Jarngreip.

Distance : 2,03 km
.
..
Distance : 880,65 m
.
..
Distance : 639,11 m
.
..
Distance : 498,74 m


Aeriths pressa le bouton rouge et un énorme souffle se libéra, balayant tout sur son passage.
L'EMP déclenché, l'onde electromagnétique se propagea et heurta le Zephyrus qui n'étant plus alimenté, s'écrasa contre le sol devant le Jarngreip.

Une lumière blanche jaillissante de nulle part surgit à Phiberglas. Elle ne sentait plus son corps. Une silhouette qui lui était familière apparut en face d'elle. Elle cligna des yeux, aveuglé par tant de luminosité. L'éblouissement de plus en plus intense, eut raison d'elle. Elle abaissa ses paupières.

- C'est fini. Je suis là maintenant.

Cette voix rassurante, qu'elle pensait avoir oublié, la conforta dans son angoisse. Seul un léger frisson, mais pas celui de la peur, lui traversa le dos.

Dans la Matrice des corps inanimés jonchaient sur le sol, à proximité du combiné téléphonique qui pendait sur le fil. Le calme pesait dans la pièce. Seul la tonalité régulière et monotone du téléphone était perceptible.

Une épaisse brume flottait dans le tunnel où le Zephyrus et le Jarngreip reposaient. La porte de la soute de l'hovercraft s'ouvrit. Aeriths descendit du vaisseau, portant sur son dos son sac de voyage et un foulard autour de son visage pour se protéger de l'air poussiéreuse, irrespirable qu'avait dégagé le Zephyrus dans son crash.
Un grondement assourdissant s'approchait de sa position. Des lumières pointèrent le bout de leur nez au coin du tunnel. L'ombre impressionnante d'un hovercraft fit son apparition et s'immobilisa au dessus de sa tête. Une trappe s'abaissa et en un instant elle s'y engouffra.
Essouflée, Aeriths jeta son sac au sol. Un homme, dissimulé dans la pénombre, le sourire au coin des lèvres, acclama comme pour féliciter la performance de la nouvelle arrivante.

- Bienvenue sur le Praefectus Altea, Sarah. Excellent travail.

L'homme lui tendit une main pour l'aider à se redresser.

- Tu as fait le bon choix. Tu verras tu ne le regretteras pas.

L'homme toujours tapis dans l'ombre, se dirigea vers le cockpit. Depuis son siège, il prit les commandes du vaisseau et alluma le tableau de bord où une diode clignotait obstinément. Il enclencha le bouton et sur l'écran video bruité, le visage d'un agent se dessina progressivement.

- Le colis a été récupéré. Je répète le colis a été récupéré. Demande permission de rentrer.

La voix austère de l'agent Gray résonna dans la cabine.

- Bon travail opérative WALMY. Permission accordée.

FIN
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